jeudi 15 mai 2008

L'amour, autrefois (Titus et Bérénice)


- Ah! cruel! est-il temps de me le déclarer?
Qu'avez-vous fait? Hélas! je me suis crue aimée.
Au plaisir de vous voir mon âme accoutumée
Ne vit plus que pour vous. Ignoriez-vous vos lois,
Quand je vous l'avouai pour la première fois?
A quel excès d'amour m'avez-vous amenée!
Que ne me disiez-vous: "Princesse infortunée,
Où vas-tu t'engager, et quel est ton espoir?
Ne donne point un coeur qu'on ne peut recevoir.
Ne l'avez-vous reçu, cruel, que pour le rendre,
Quand de vos seules mains ce coeur voudrait dépendre?

(...)

Je n'écoute plus rien, et pour jamais adieu.
Pour jamais! Ah! Seigneur, songez-vous en vous-même
Combien ce mot cruel est affreux quand on aime?
Dans un mois, dans un an, comment souffrirons-nous,
Seigneur, que tant de mers me séparent de vous?
Que le jour recommence et que le jour finisse
Sans que jamais Titus puisse voir Bérénice?

Racine, Bérénice, IV,5. (1062/1073 et 1110/1117)

Je suis passé à côté de cette tragédie pendant mon adolescence. Certains vers ne se comprennent vraiment qu'avec l'âge.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Lire.
Soupirer de beauté.
La journée commence bien.