samedi 30 avril 2016

Les travailleurs de la terre

Petit hommage à ceux qui nous nourrissent (et clin d’œil, encore, à Totor!).

Lire ou ne pas lire (comme le roi)

Ça y est, je m'y suis mis. J'ai retrouvé dans mes amoncellements livresques le Théâtre complet de Shakespeare que je savais avoir quelque part. Il a bien attendu, le pauvre, puisqu'acheté en Juillet 1976, dans une collection reliée du Cercle du bibliophile, lors d'une braderie dans une boutique qui fermait. Quarante ans à deux mois près !

Le livre est lourd même si la publication compte quatre volumes et imprimé avec une police dont la taille m'aurait été  bien plus lisible à l'époque ! Introduction, notices et notes fort savantes d'un illustre inconnu aujourd'hui, professeur à la Sorbonne, et traduction de François-Victor Hugo ! On ne se mouche pas du coude !

Par quoi commencer ? Tragédie ou comédie ? Finalement, comme je viens de voir deux comédies à la télévision, ce sera Hamlet, donné il y a très longtemps au théâtre de la Renaissance à Oullins. Une belle surprise d'entrée de jeu : j'avais complètement oublié que le père de Hamlet avait été assassiné par son propre frère qui en avait récupéré et le trône de Danemark et son épouse. Heureusement pour ma famille et moi que ce genre de mariage n'était plus considéré au XX° siècle comme un inceste ! Et que meurtre il n'y eut point car, comme Hamlet, il m'aurait fallu me poser bien des questions !

J'avoue avoir parfois quelques difficultés à tenir mon attention sur le texte. D'abord, la pièce semble regorgée de longues tirades un peu pompeuses (traduction du fils à Totor ?). Ensuite, on est bien loin de mes tragédies adorées de Racine. Ici, la traduction est en prose, et j'avoue que l'alexandrin a toujours eu mes faveurs. Mais rien de tout cela ne vient de Shakespeare lui-même, pas plus que ma dernière réticence : j'ai toujours préféré découvrir une œuvre théâtrale sur scène, incarnée par des comédiens qui, pour moi, y insufflent la vie, et non mise à plat sur du papier.

Alors ? Je continue. On verra bien !

vendredi 29 avril 2016

Qu'en pensez-vous ?

jeudi 28 avril 2016

Muse

Troisième roman de Joseph O'Connor que je lis en peu de temps, lui que je ne connaissais pas il y a peu. Trois livres totalement différents les uns des autres, et je serais bien en peine de dire celui que j'ai préféré. Peut-être celui-ci, mais parce que c'est le dernier découvert.

Elle est catholique, il est protestant. Elle est pauvre, il est de la classe moyenne. Elle est inculte, il est cultivé et écrit. Et ils s'aiment, un court instant avant sa mort. Lui, c'est John Millington Synge, un grand dramaturge irlandais, elle, c'est Molly Allgood qui deviendra une comédienne de bonne renommée.

C'est elle qui, cinquante ans plus tard, à Londres, raconte leur histoire alors qu'elle n'est plus qu'une vieille femme portée sur la boisson et abandonnée de tous. Souvenirs qui ressurgissent dans le brouillard des rues, rêves de landes et de tournées théâtrales sur lesquels, à chaque page, planait pour moi l'ombre de Norma Desmond, le personnage tragique joué par Gloria Swanson dans Boulevard du crépuscule.
(Joseph O'Connor, Muse. Ed. Phébus. Trad. de Carine Chichereau.)

mercredi 27 avril 2016

Ma Madame Rosa à moi

A Lyon, le sixième arrondissement est, avec le deuxième, le quarter le plus chic de la ville. Tout près du parc de la Tête d'Or, le Boulevard des Belges et l'Avenue Foch en sont la quintessence. C'est là, tout près des deux, rue Vendôme, que j'ai habité avant de prendre un appartement avec Pierre. Nous vivions en communauté dans un immense appartement à l'entresol et, bien que la majorité des membres de cette communauté soit, au départ, d'anciens prêtres ou séminaristes, les grands bourgeois, nos voisins, ne voyaient pas d'un très bon œil notre présence dans les lieux. Seule la concierge nous aimait.

Elle était énorme et peu mobile mais, de sa loge minuscule, elle contrôlait tout passage dans la maison. J'ai peu à peu appris des bribes de son passé et le moins que l'on puisse dire, c'est que je suis allé de surprise en surprise. Elle avait, entre autres, été la fleuriste attitrée du président René Coty à l’Élysée et préceptrice des enfants d'un riche famille en Autriche. Et elle vivait maintenant dans une sorte de placard au rez-de-chaussée où elle circulait à peine entre une accumulation de télévisions hors d'usage, de réfrigérateurs défunts, et même de pneus de voiture, elle qui n'avait jamais conduit.

L'été, parce qu'il faisait trop chaud dans son réduit, elle installait un matelas dans la cour, à l'entrée de l'escalier qui descendait aux caves. Encore aujourd'hui, je n'ai pas compris comment elle avait pu faire accepter tout cela aux propriétaires de l'immeuble.

Elle parlait couramment plusieurs langues, dont surtout l'allemand et l'espagnol. Un jour, elle avait interdit l'entrée de l'immeuble à des cousins de locataires parce qu'ils ne parlaient pas le pur Castillan mais plutôt un dialecte d'une autre province. Où cette femme, habillée comme l'as de pique et à qui l'on aurait donné l’aumône dans la rue, avait-elle appris tout cela ? Mais pauvre, elle ne l'était pas : un jour, elle fit appel à moi pour acheter une composition florale destinée à la fille de l'un des propriétaires qui allait se marier. Elle sortit de sous son lit un vieux sac à main en carton pâte et me tendit l'un des nombreux billet de 500 francs qui s'y trouvaient. Je n'en avais jamais vu autant et je ne vous dis pas ma joie, au retour, lorsqu'elle tint absolument à me laisser la monnaie, soit plus de 300 francs, ce qui pour moi, à l'époque, était une somme considérable.

Régulièrement (par quel passe-droit , par quel ami influent ? ), elle recueillait chez elle un débile léger qui passait le reste de son temps à l'hôpital psychiatrique du Vinatier. Son vrai nom, je l'ai oublié : nous l'appelions tous Kiki. Très handicapé de la parole quand il arrivait, il progressait rapidement avec elle : elle réussissait là où les spécialistes échouaient. Sans doute en l'entourant d'un grand amour maternel qui lui manquait. Le Kiki avait un  trésor : une vieille guitare sans cordes et sortie on ne sait d'où, sur laquelle il improvisait des chants sans queue ni tête, avec, comme partition, un petit Larousse qu'il tenait à l'envers. Et lorsqu'il était énervé, il nous menaçait tous d'aller se plaindre au "polissariat". Le mot est beau, non ?

Elle fit encore plus : vers la fin de sa vie, parce qu'elle ne pouvait assurer le nettoyage de l'escalier, elle hébergea une femme presque aussi vieille qu'elle mais beaucoup plus maigre, qu'elle était allée chercher dans un des foyers de l'Armée du Salut : une sorte d'épouvantail qui n'avait que la peau sur les os. Ainsi, la concierge, Kiki et Zèzette (nous l'avions surnommée ainsi) dormaient-ils tous les trois dans la cour l'été. L'hiver, je ne comprends pas comment ils pouvaient tous entrer dans la loge.

Un soir, entendant un bruit régulier d'eau sous la fenêtre de ma chambre, je me mis à la fenêtre et assistai à un spectacle inoubliable : royale, la concierge était assise dans un fauteuil à moitié effondré. A ses pieds, une grande bassine d'eau et Zèzette, à genoux, qui y puisait des louches qu'elle versait sur les jambes dénudées de sa "maîtresse".

Mais mon plus grand souvenir, c'est sans doute le jour où je les vis toutes deux dans l'entrée, la concierge devant la porte de sa loge, Zèzette sur les premières marches de l'escalier qu'elle était en train de balayer.
- La concierge : Madame !
- Zèzette : Plaît-il ?
- La concierge : Cet escalier n'est pas propre. Appliquez-vous, nous sommes dans un  immeuble de condition !
- Zèzette : Oui, Madame. Bien, Madame.
On trouverait ce dialogue dans un ouvrage de fiction, on aurait du mal à y croire.

Lorsqu'elle fut gravement malade, elle confia à l'un de nous les clefs d'un appartement du quartier dont elle était propriétaire pour que nous y prenions tout ce qui nous plaisait. Alors que sa loge était encombrée de choses sans aucune valeur, l'appartement regorgeait de meubles de valeurs, de belle vaisselle et d'une ménagère en or dont j'ai héritée et que j'utilise encore aujourd'hui dans les grandes occasions.

Existe-t-il de nos jours des personnages aussi haut en couleurs que cette femme (ou que la cousine de Jeanne d'Arc dont j'ai déjà parlé) ? Je nous le souhaite ! Un dernier mot, en forme de regret : je n'ai jamais su ce que sont devenus le Kiki et la Zèzette.

mardi 26 avril 2016

Le mardi, c'est gâterie

William toujours... Et là, c'est une longue gâterie ! Quelle est la version que vous préférez ? La mienne ? Je vous le dirai après, j'ai eu du mal à choisir mais ce n'est pas forcément celle qu'on pense.
















lundi 25 avril 2016

C'est à vous

A vous, si cela vous dit, de mettre sous cette photo un titre, une phrase ou un petit texte qu'elle vous aurait inspiré. (Vous pouvez l'agrandir en cliquant dessus.)

Qui êtes vous, William ?

Lorsque j'ai émis l'intention de me lancer dans la lecture de Shakespeare, je ne pensais pas coller autant à l'actualité. J'ai appris que l'on célébrait ces jours-ci le 400° anniversaire de sa mort. Arte a eu la bonne idée de marquer l'événement : ce soir, la chaîne retransmet Le Songe d'une nuit d'été et hier, j'ai pu voir une émission très intéressante sur les questions que  pose la véritable identité du grand William, puisqu'il semble quasiment certain qu'il ne s'agit pas de l'homme né à Stratford-upon-Avon. Alors qui ? Le deuxième comte d'Essex ? Christopher Marlowe ? Francis Bacon ? La réponse n'est pas prête d'être donnée car on ne déboulonne pas aussi facilement un si grand mythe.

Mais ce qui m'a surtout intéressé dans cette émission d'hier soir, c'est toute la première partie concernant les pièces "italiennes" du dramaturge localisée à Venise, Padoue ou Vérone entre autres. Un érudit les a lues et examinées à la loupe et en a déduit que Shakespeare ne pouvait pas ne pas connaître directement, par des voyages, ces villes de la botte, tant les indications géographiques que l'on trouve dans ses écrits sont précises. Une occasion aussi pour moi de revoir la belle Vérone, visitée il y a très longtemps et où j'aimerais retourner.

dimanche 24 avril 2016

Main verte ?

Les deux cyprès sur le balcon de ma chambre sont morts. Ils ont commencé à jaunir peu à peu, malgré les arrosages (à la fréquence de ce recommandé par le fleuriste) et sont aujourd'hui complètement secs. J'avais pourtant mis de la bonne terre de jardin prise chez un ami de la banlieue de Lyon.

Mon bougainvillier semble lui aussi à bout de course cette année : il ne doit pas avoir très bien supporté les trois "exhumations" accidentelles provoquées par l'ouvrier en charge des travaux d'ascenseur. Je l'aurai tout de même gardé dix ans. Pour une plante qui, paraît-il, ne vit pas en pot !

Quant à mon laurier rose, déjà bien rachitique, il se couvre actuellement d'une sorte de confiture marron qui m'a déjà joué des tours les années précédentes et qui résiste à tout traitement. Heureusement, les géraniums, eux, n'ont pas l'air malades cette année

Enfin, j'ai donné à une amie du Jura le chèvrefeuille qui végétait sur le balcon de la cuisine et qui se sentira sûrement mieux en pleine terre là-bas.

J'avais pourtant la main verte, autrefois....

samedi 23 avril 2016

Silence, on tourne/ Clap de fin

Une habitude qui me plaît, c'est d'aller consulter Chronobio pour savoir les décès et les naissances du jour. La première chose que mes parents lisaient dans leur quotidien, c'était la rubrique nécrologique, ce que je considérais avec une certaine ironie. Aujourd'hui, je fais la même chose, le journal est simplement remplacé par l'informatique et les morts locaux par les célébrités mondiales.

La moisson du jour est assez généreuse, ce qui n'est pas toujours le cas.

Nés un 23 avril : Jacqueline Boyer, Franco Citti, Maurice Druon, Marcel L'Herbier, Renée Lebas, Michel Leeb, Prokofiev, Shakespeare, Simone Simon, Jean-François Stévenin, Shirley Temple, Turner.

Morts un 23 avril : Barbey D'Aurevilly, Jules Berry, Cervantes, Maurice Clavel, Eltsine, Paulette Goddard, Catherine Langeais, Otto Preminger, Shakespeare.

Beaucoup de personnalités du 7° art donc et deux interrogations de taille : Shakespeare serait mort le même jour que Cervantes (ce que je savais) ? Shakespeare serait mort à la date exacte de sa propre naissance, ce que j'ignorais et qui semble contestable selon le calendrier employé ?

(Et avant-hier, paraît-il, c'était l'anniversaire de la fondation de Rome. J'ignorais que la date avait été calculée avec autant de précision.)

vendredi 22 avril 2016

La cousine de Jeanne d'Arc

Elle s'appelait Laurence. Elle était vieille et petite. Petite même pour moi qui n'était qu'un enfant. Vieille pour la même raison. Elle s'habillait toujours de noir et seul son grand chapeau de paille dépassait du chemin creux qui reliait nos deux fermes. Parfois même, elle disparaissait totalement dans les terres.

Elle vivait avec son paysan de mari, un homme sec comme un cep de vigne et à moitié borgne, ce qui lui valait dans le village le surnom de Coco Bel-œil. A moi, il faisait peur car il ne parlait qu'à peine, émettant plutôt des grognements que je ne pouvais traduire tant sa voix était embarrassée par le tabac à chiquer qu'il mâchait constamment et dont, un jour, il m'envoya le jus sur la main alors que, monté sur un cerisier, il jetait d'en haut les cerises dans un panier que je tenais.

Il n'était jamais allé à la ville et n'avait jamais non plus voyagé dans une automobile. Vers la fin de sa vie, il dut consulter un médecin et mon père se chargea du transport. Le vieil homme, terrorisé par la "vitesse" de la voiture, se coucha à l'arrière, sous les sièges, refusant de voir le paysage défiler aussi vite. Quand il mourut, une nuit, sa femme resta allongée près de lui jusqu'au matin, où elle vint nous prévenir.

La Laurence, comme nous disions, avait trois passions : l'une pour Jeanne d'Arc, qu'elle prétendait sa cousine et qu'elle entendait parfois lui murmurer à l'oreille des choses que nous ne connûmes jamais. Une autre, infinie, pour ses bêtes, chiens, chats, poules, qui vivaient avec elle dans la salle commune, pigeons, chèvres et vaches dont elle ne tua et mangea aucun, les laissant mourir de vieillesse ou dévorés par les rats pour les premiers. De toute sa vie, elle ne goûta jamais à la viande, ne consentant à se rendre au village, chez le boucher, que pour nourrir ses chiens et ses chats.

Sa dernière passion fut à l'origine de la mienne : l'amour de la lecture. Régulièrement, elle allait au bourg, dans le petit bazar qui vendait un peu de tout et qui n'a disparu qu'il y a à peine une dizaine d'années. Elle y achetait des livres de la bibliothèque rose ou verte, uniquement consacrés aux animaux et me les donnait une fois qu'elle les avait lus. Un titre m'en est resté jusqu'à aujourd'hui : Le Chat du capitaine, disparu dans les nombreux déménagements de mes parents. Lorsqu'à son tour, elle mourut, je pris l'habitude d'économiser centime par centime, la plupart trouvés dans la rue et que je cachais dans une vieille boîte de dragées rose jusqu'à ce que j'aie suffisamment pour prendre moi aussi le chemin du bourg.

Ainsi est-ce à elle que je dois ma passion de la lecture : une vieille femme inculte et un peu folle qui entendait des voix mais avait un cœur immense. Mais peut-être l'ai-je déjà dit....

jeudi 21 avril 2016

Six ans seulement

Six ans, ça n'est pas grand chose dans une vie. 2010, ça n'est tout de même pas la préhistoire. Pourtant, hier, quelqu'un est allé déterrer une photo que j'avais postée sur ce blog en avril de cette année 2010, la photo de la fenêtre fracassée du vieux monsieur qui habitait près de chez moi et que je croisais parfois dans la rue, une photo sans autre intérêt qu'anecdotique.

Ce vieux monsieur, je l'avais oublié. Depuis, son appartement a été repris par d'autres occupants et je ne lève même plus la tête pour regarder quand je passe dans sa rue. Autant en emportent les jours.

Curieux de voir ce que j'écrivais à cette époque, j'ai relu tout ce mois d'avril, surpris par ce que je découvrais : des fondamentaux, comme les voyages en Haute-Savoie, Saône-et-Loire ou Italie, des choses toujours présentes dans ma vie aujourd'hui. Et puis des allusions à des amis, même intimes,  que je ne vois plus aujourd'hui, de petites anecdotes sur mon travail d'enseignant bien loin de moi aujourd'hui, une façon d'écrire plus longuement, d'approfondir mes ressentis, ce dont, sans doute, je n'ai plus besoin maintenant, des commentaires de gens perdus de vue ou encore présents aujourd'hui (et que j'en remercie pour l'occasion).

Mais ma plus grosse surprise  lors de ce voyage dans le passé, ce fut ce billet que je ne me rappelais absolument pas avoir écrit et auquel aujourd'hui, je ne retrancherais pas un mot. Le voici :

Vol au-dessus d'un nid de cons-cons 

- Dis donc, homo et pédé, c'est bien la même chose ? demande l'Ignorance.
- Oui, je crois, puisque les homos, on les traite de pédés, ça doit bien être la même chose, répond le Syllogisme.
- Ah mais pas du tout ! Seulement quelques-uns, reprend la Précision, il y a en qui sont presque normaux, sauf qu'ils aiment les personnes du même sexe qu'eux. Mais adultes tout de même. Les autres, on pourrait dire qu'ils sont les pervers des pervers.
- Moi je ne comprends pas ! s'exclame l'Étonnement. Quel plaisir on peut trouver à ça ?
- Un laïc avec une petite fille, passe encore, rajoute la Tolérance, mais un curé avec un petit garçon !
- Je frémis à l'idée que ça pourrait être le mien, gargouille la Famille.
- Il faut que cela cesse, éructe le Politique. Nous allons promulguer une loi, dans l'urgence. C'est comme pour les zones inondables, on ne peut pas attendre !
- Avec indemnisation des victimes ? questionne la Cupidité.
- Cesser ! Alors que même le pape les soutient! s'indigne l'Intégrisme laïc.
- Qui vous permet de vous attaquer au chef spirituel de l'Église catholique ? s'indigne à son tout l'Intégrisme clérical.
- On n'est pas près d'en voir le bout ! rigole le Comique de service.
- Mais où va le monde, tout de même ? pleurniche le Nostalgique. De mon temps, ce n'était pas comme ça. Même les volcans s'en mêlent.
- Moi, je ne peux même pas rentrer chez moi! Ce n'est pas normal, proteste le Touriste. Je vais porter réclamation.
- Et vous avez vu le nom du volcan ! s'exclame la Franchouille. Si c'est pas fait exprès pour nous faire chier.
- On pourrait peut-être...! essaie la Raison.
- Ta gueule ! explose la Connerie. Tu parleras quand on te le dira!

mercredi 20 avril 2016

Radio

Un soir de la semaine, une émission sur France-Inter, à propos des relations des auditeurs avec la radio.

Pour moi, d'abord une participation à un concours sur Barbara. J'avais gagné et pensais recevoir un disque d'elle : ce fut Marilyn Monroe. Terriblement déçu à l'époque.

Puis un ami prêtre qui animait une émission religieuse en Savoie me demanda un soir de lire l’Évangile du jour. Comme ça, au pied levé, sans préparation. Je n'avais même pas pris connaissance du texte à l'avance. C'est ce jour-là que je me suis rendu compte que je n'éprouvais absolument aucune anxiété face à un micro. D'autant qu'une amie à lui téléphona le soir même pour lui demander : "A qui appartiens cette voix magnifique ?". Pas peu fier, le Calyste !

Ensuite, deux enregistrements à Lyon, l'un pour exposer les résultats d'un sondage que l'on m'avait commandé sur Victor Hugo pour le centenaire de sa mort. L'autre pour présenter aux auditeurs mes goûts musicaux. Sans le faire exprès, je n'avais choisi que des musiciens dont le nom commence par B, dont Bach bien sûr.

Mais le souvenir le plus marquant date de ma toute petite enfance. La voisine de ma grand-mère avait un vieux poste sur un meuble qui lui était réservé avec les almanachs Vermot, où je découpais consciencieusement les portraits des députés et sénateurs (rassurez-vous, cela m'a passé depuis longtemps !). Ce poste me fascinait pour deux raisons : d'abord sur le devant apparaissaient les noms des émetteurs, des villes pour moi totalement inconnues mais qui me faisaient rêver (je me souviens particulièrement de Sottens, qui a perdu son mystère depuis que j'ai appris que c'était en Suisse et non dans un pays exotique). L'autre raison était la présence d'une sorte d’œil qui s'éclairait en bleu lorsque nous allumions le poste : il avait quelque chose de vivant, de chaud et de rassurant.

Un jour, j'entendis l'histoire de ce jeune berger qui, sans cesse, crie au loup par plaisanterie et qui, lorsque le loup est effectivement là, se fait dévorer car personne ne se déplace pour le secourir. Cette histoire m'avait terrorisé et je m'étais bien promis ce jour-là de ne jamais mentir. Je ne vous dirai pas si j'ai tenu parole.

mardi 19 avril 2016

Le mardi, c'est gâterie

Enfin, pour moi, car je doute que beaucoup de gens se souviennent de ce trio, très connu dans les années 60, et de cette chanson, que les Compagnons avaient aussi à leur répertoire.


lundi 18 avril 2016

C'est à vous

A vous, si cela vous dit, de mettre sous cette photo un titre, une phrase ou un petit texte qu'elle vous aurait inspiré. (Vous pouvez l'agrandir en cliquant dessus.)

Le Voyageur byzantin

Ça commençait bien : un homme qui quitte la Grèce pour échapper aux turcs et prend en charge quarante fiancées palestiniennes en route pour découvrir leurs promis au Chili. Ça ne pouvait que me plaire ! Ça se poursuivait encore mieux : je retrouvais l'ambiance de Cent ans de solitude, de Garcia Marquez, cette folie sud-américaine qui m'enchante.

Et puis, fatigue aidant ces jours-ci, je me suis perdu en cours de voyage, mélangeant les personnages, leurs liens de parenté et je n'ai plus eu, pour me raccrocher que la beauté du style et la poésie des évocations. Un livre donc à côté duquel je suis passé.
(Miguel Littin, Le Voyageur bysantin. Ed. Métailié. Trad. de Bertille Hausberg.)

samedi 16 avril 2016

La générosité des pivoines



Elle photographiait les pivoines de la Tête d'or, j'avais emprunté le même sentier qu'elle. Elle s'excusa de me barrer le passage. Mais j'avais bien le temps, temps de photographier moi aussi. La lumière était si belle cet après-midi. Il n'en fallut pas beaucoup pour que nous engagions la conversation, sur les pivoines, sur Rome, sur Sienne, sur la photographie; sur la peinture qu'elle pratique en amateur à partir de ses photos. Une heure debout, à échanger des cigarettes, à parler de nous comme seuls des inconnus en parlent quand ils savent qu'ils ne se reverront jamais.

Une heure de pur plaisir. C'est doux, la vie, parfois.

vendredi 15 avril 2016

Les dinosaures sont de sortie

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Et je ne parle pas de moi ou de mes anciennes copines de fac !

A contre saison

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Hier, sur la terrasse du restaurant, ces roses déjà presque fanées, belles pourtant dans la lumière de l'après-midi.

Primeur

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Les premiers de l'année. Pourquoi ai-je tant d'amour pour ces glaives, surtout les blancs ?

jeudi 14 avril 2016

Orage

Quel orage hier soir ! Un vrai, avec éclairs, tonnerre et de l'eau à pleins paniers ! Comme je les aime, ces déchaînements du ciel ! Je l'ai regardé derrière ma fenêtre. Autrefois, je serais sorti pour en être douché. Je vieillis....

Retrouvailles (2)

Je me suis réveillé tôt ce matin. Pas besoin de réveil, comme chaque fois que j'ai quelque chose à faire. Et je suis parti à pied pour Saint-Jean, parce qu'il faisait beau, parce que j'avais besoin de cet intermède, de ce sas pour me remémorer certains souvenirs communs.

Nicole, bien sûr, qui m'avait déjà invité il y a plus d'un an, mais que je n'avais pu revoir, ma mère venant de mourir. Au téléphone, elle m'avait rappelé ce que je lui avais dit un jour : "Toi, tu es au bord du mariage." Comme au bord d'une falaise ? Je ne m'en souvenais pas. Elle, elle m'avait dit : "Tu vivras toujours dans la tension". Et ça, je m'en souvenais. Notre dernière rencontre : il y a 35 ans, pour son mariage.

Claudine, aussi. Perdue de vue depuis quarante ans. Elle avait abandonné ses études. Je la connaissais moins bien, même si elle m'avait invité chez ses parents, dans un appartement des Gratte-ciel à Villeurbanne, où l'ascenseur arrivait directement dans le salon. Une fille petite, un peu boulotte , qui n'avait pas la langue dans sa poche.

Frédérique, enfin, élancée et très timide qui vivait elle aussi dans sa famille. Elle avait réussi le Capes dès la première fois, malgré son manque d'assurance. En fin d'année, je lui avais prédit : "Toi, je pense que tu vas atterrir à Béthune." (C'était pour moi, à l'époque, le fin fond de la France). L'année suivante, je l'avais croisée. Elle avait été nommée à ... Béthune. Je m'en voulais presque, comme si j'en étais responsable.

Un petit marché devant la manécanterie de Saint-Jean. Beaucoup de touristes déjà dans les rues du vieux Lyon. Et quelques traboules encore ouvertes. Rue du Bœuf, un petit square. Nicole est là, nous attendant sur un banc. Elle me reconnaît, je la reconnais. Puis arrive Claudine et enfin Frédérique qui a réservé à la Tour rose. Claudine est toujours boulotte, Frédérique toujours élancée. Ses cheveux sont gris maintenant, mais toujours abondants et frisés, ce qui, bêtement, me rassure un peu.

Pendant le repas, nous parlons de nos anciens copains, de nos anciens profs, ceux qui nous ont marqués et dont, à quatre, nous retrouvons tous les noms. Nicole et Claudine parlent famille, ennuis et joies du quotidien, Frédérique et moi, restés célibataires, de photos, d'écriture, de sa grande maison peu confortable mais isolée, en Isère, et de ses nouvelles études d'archéologie : le Moyen-Âge la passionne, elle écrit un mémoire sur une abbaye des Pyrénées Orientales et a retrouvé les "coutumiers" du lieu.

Petit tour à pied dans le vieux Lyon puis à Bellecour, où Claudine nous quitte pour reprendre son train. Puis Nicole regagne sa voiture garée sur la Saône. Frédérique a une vieille flûte à faire réparer, je l'accompagne jusqu'au magasin. Puis nous nous asseyons sur les marches de l'ancien palais de justice et la conversation se bouscule : Rome, Sienne, Fernandez, musique, Japon, quoi encore... ? Je la quitte près de la bibliothèque de la Part-Dieu. Il est six heures.

En rentrant chez moi, je souriais. Ça avait été une bonne journée. Et puis, avec plus d'assurance, plus d'humanité, plus de rondeur (physique et surtout dans les jugements), le gamin provocateur que j'étais à l'époque était parfois réapparu aux détours d'une phrase incisive mais pas méchante. Moi qui le croyais mort depuis longtemps.

mercredi 13 avril 2016

Parce que j'en avais envie






Retrouvailles

Demain, je retrouve trois de mes copines de fac. Je ne les ai pas vues depuis l'époque (donc avant-hier !)  et n'ai gardé des contacts épisodiques qu'avec l'une d'entre elles.

Ça me fait très plaisir et en même temps j'appréhende un peu . D'abord le constat du changement physique, bien sûr, mais aussi et surtout la crainte de se sentir bête, de ne plus avoir rien à se dire, sinon l'échange de souvenirs communs. Peut-être ne sera-ce pas comme ça, peut-être ressortirai-je ravi du restaurant. On verra bien !

mardi 12 avril 2016

Un indice

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bouteille et un verre de vin rouge sur un fond noir Banque d'images - 19151964

Des noms ! des noms !

Une gentille carte postale aujourd'hui dans ma boîte aux lettres. Elle aurait pu être signée par Charles, François, Catherine, Léonard, Henri, Louis, Anne, et bien sûr Abd El-Kader... , mais elle le fut de deux autres prénoms ! Alors qui ? Et d'où vient-elle ?

lundi 11 avril 2016

Trouvaille (spéléologique)

Il n'y a pas que des Dupond(t), il y a aussi maintenant une Duponte. Sa perle :
- Ah! tu ne connais pas le golfe de Padirac ?
Ben non ! J'ai beau me creuser....

C'est à vous

A vous, si cela vous dit, de mettre sous cette photo un titre, une phrase ou un petit texte qu'elle vous aurait inspiré. (Vous pouvez l'agrandir en cliquant dessus.)

Momentini

- Un nouveau Camilleri, La Danse de la mouette, lu avec la même rapidité et le même plaisir que les précédents. J'ai connu, avec d'autres, des enquêtes policières plus tordues, plus intellectuelles, mais je suis bien dans son univers à lui, avec sa petite ville sicilienne, ses inspecteurs récurrents tout autant que bien typés, sa femme de ménage qui lui prépare toujours de bons petits plats locaux et sa maîtresse milanaise.

- Samedi soir, je me suis couché de bonne heure (rarissime). A peine dix minutes au lit puis appelé par un voisin pour vandalisme dans l'immeuble : une vingtaine de gamins au septième, complètement pétés, ou shootés, ou les deux, qui ont trouvé drôle de démolir l’ascenseur, refait à neuf depuis même pas un mois. Moments chauds jusqu'à une heure du matin. Après, va trouver le sommeil !

- Dimanche dans la Loire. Cimetière familial d'abord puis visite au vieux cousin germain de mon père. Nous sommes bien de la même race : chevelure abondante et immaculée, comme l'avait d'ailleurs mon père. C'est maintenant lui, le doyen de la famille.

samedi 9 avril 2016

Quoi, qu'est-ce qu'elle a ta gueule ?

La radio, il n'y a que ça de vrai ! Les journalistes ne sont que des voix, que l'on aime ou que l'on n'aime pas. Et quand on aime, on va parfois sur Internet voir à quoi ils ressemblent. C'est un mauvais plan : ils correspondent rarement à ce qu'on avait imaginé.

Tout ça pour dire que je supporte plus l'information à la télévision. Quel que soit le sujet, manifestations, attentats, inondations, il faut toujours que le journaliste soit à l'image, même et surtout s'il n'y a rien de nouveau à dire (voir chaînes d'infos en continu). Ils font le pied de grue devant un ministère, près de barrières interdisant le passage, au bord de l'océan déchaîné et récitent leur message avec la tête de circonstance, comme si nous n'étions pas capables de déceler seuls si la situation est dramatique ou heureuse.

Le pompon va incontestablement pour moi aux jeuno-journalistes du Petit Journal de Canal Plus. La plupart du temps à se foutre de la gueule de ceux qu'ils interviewent, à se croire spirituels et supérieurs parce qu'ils sont jeunes et regardables, alors qu'ils transpirent la bêtise absolue du bobo parisien.

Voilà, c'est dit. Ça me démangeait depuis un moment !

Actualité !

On ne dirait vraiment pas, mais j'y colle, j'y colle ! Mais si, mais si (c'est le cas de le dire !).


vendredi 8 avril 2016

Et un peu de musique, ça vous dirait ? (164)



(En souvenir d'Yvon. Du Wagner que j'ai aimé avant d'apprendre à aimer Wagner !)

jeudi 7 avril 2016

Pas pleurer

Mais on n'en a pas du tout envie, de pleurer, en lisant ce "roman" de Lydie Salvayre qui a obtenu le prix Goncourt en 2014 tant ce livre est plein de fougue et d'amour. J'avais vu Salvayre à la Grande Librairie et j'avais été subjugué, aussi avais-je un peu peur, en abordant son texte, de ne pas retrouver ce que j'avais pressenti ce jour-là. Eh bien non, le livre est tel que je l'avais envisagé.

Lydie Salvayre raconte la vie de sa mère, ou plutôt, souvent, fait raconter à sa mère vieillissante la période de sa vie qu'elle n'a jamais oubliée : la révolution libertaire espagnole en 1936. Dans une langue particulière, mêlant français, mots bien à elle et espagnol (non traduit mais presque toujours facilement compréhensible), la vieille dame évoque sa découverte de la vraie vie, ses rêves provoqués par la pureté idéologique de son frère, son mariage et la fin dramatique des illusions des républicains, vaincus par le mouvement franquiste.

Parallèlement, Lydie Salvayre évoque Les Grands Cimetières sous la lune, le pamphlet de Georges Bernanos, d'abord proche des franquistes, puis profondément choqué par leurs exactions à Majorque où il séjourne, et par le clergé espagnol qui, dans sa grande majorité, se rallia au "Caudillo".

Un livre splendide qui fait au mieux comprendre ce que furent ces années dans l'Espagne du petit peuple.
(Lydie Salvayre, Pas pleurer. Ed. du Seuil.)

mercredi 6 avril 2016

L'Evangile selon Pier Paolo




Le rôle de la Vierge Marie est tenue par Susanna Colussi Pasolini, la propre mère de Pasolini. 

Trois P

Mardi, il pleut, toute la journée. Marre de rester enfermé. Une expo Pasolini : Una Vita violenta,  à la bibliothèque de la Part-Dieu ! Ça me tente bien : un homme que j'ai beaucoup aimé, et c'est presque à côté.

Le commissaire de l'exposition est là : le vernissage aura lieu tout à l'heure, à 18h30. Un journaliste radio l'interviewe, je saisis au passage quelques bribes de phrases avant de me laisser gagner par l'intérêt de ce que je vois : l'histoire de Pier Paolo à travers des textes de lui, des articles de journaux écrits lors de la sortie de ses films (Bory et Chapier  pour, Mauriac, le fils, contre), des photos de famille, des affiches d'époque et, merveille, de nombreux clichés de ses comédiens fétiches : Franco Citti, Ninetto Davoli (et le fascinant visage de Enrique Irazoqui, le Christ de L’Évangile selon Saint Matthieu), et des femmes qui illuminèrent ses films : Ana Magnani, Laura Betti, Silvana Mangano, Maria Callas, ...

A travers les salles, j'égraine mes souvenirs, les films que j'ai vus, les livres que j'ai lus. Une vie violente mais christique, je suis bien d'accord.

Quand je ressors, il pleut toujours mais, en moi, il fait beau.







mardi 5 avril 2016

Le crêt

Il y avait deux hauteurs dans le hameau de mon enfance : l'un, le terril, fabriqué de mains d'hommes, sur lequel il nous était interdit de monter et que nous escaladions pourtant , un peu pour se faire peur, surtout pour braver l'interdiction. L'autre était le Crêt qui séparait mon hameau du village.

La pente en était raide, surtout pour mes jambes de gamin lorsqu'il fallait, le dimanche matin, parcourir à jeun les quatre kilomètres qui nous séparaient de l'église. Ma grand-mère maternelle m'accompagnait ce jour-là mais il fallait, dans la semaine, aller à confesse, et là, j'étais seul. Parfois, Yvon faisait le chemin avec moi et nous en profitions, une fois la pente bordée de champs ou de cultures avalée, pour nous aventurer un peu dans les bois qui occupaient le sommet.

De là-haut, je voyais le hameau, pauvres maisons de mineurs qui sont toujours là aujourd'hui, envahies de constructions nouvelles remplaçant les champs anciens. Je voyais la ferme de ma grand-mère paternelle, où je vécus ensuite, un peu isolée, un peu rude, comme les fermes de cette région, dominée par le cône du terril.

L'été, il y faisait chaud, aucun arbre avant le sommet. L'hiver, on y avait très froid. Ma mère nous glissait de vieux journaux entre le maillot de corps et la chemise, pour couper la bise et il fallait aussi enfiler des gants et un bonnet, ce dont j'ai toujours eu horreur. Parfois, les congères, au bord de la route, étaient plus hautes que nous. Alors le hameau disparaissait  et nous ne voyions plus que les murs de neige et, dépassant devant nous, la cime des sapins et des châtaigniers.

Ma mère avant moi avait aussi, enfant, emprunté cette route, deux fois par jour, pour se rendre à l'école libre où l'avait inscrite ma grand-mère et où on l'acceptait, malgré sa pauvreté, contre quelques travaux fatigants. A elle le lessivage des parquets, à genoux sur le sol rugueux, comme dans la toile de Caillebotte. Malgré sa foi profonde, elle m'avait inscrit, moi, à la laïque, qui se trouvait au bout du hameau, à l'opposé de la ferme.

Quand je me rends aujourd'hui sur la tombe familiale, je rentre toujours par cette route, même si elle me détourne un peu. Parfois, j'arrête la voiture sur le crêt et je retrouve ce paysage qui fut devant mes yeux pendant de nombreuses années. La ferme a disparu, les prés de ma grand-mère, en contrebas de la route, comblés et remplacés par un terrain de sports, ceux du haut intacts où se profilent encore les trois poiriers qui en marquent la limite et où nous disputions les fruits aux guêpes. Le terril n'a pas bougé mais il ne me fait plus peur, comme si, en vieillissant, il s'était un peu tassé, il avait pris du ventre.

Je ne reste pas longtemps. Ce paysage ne m'est plus rien, pas plus que celui vu dans mon enfance. Le seul, réel à mes yeux, vivant, plein du bruit des insectes, de la fuite des vipères dans les buissons de mûres, du braiement d'un âne qui a soif, de l'odeur du sureau noir, de la putréfaction des feuilles de peupliers, du crissement de la neige sous nos pas, celui-ci est ici, dans mon souvenir.

Le Chuchoteur

Des petites filles disparaissent. Cinq au début du roman, et l'on apprendra bientôt qu'une sixième a aussi été enlevée. Mais, contrairement à ce qui se passe d'ordinaire dans ce genre d'affaires, le mystère ne vient pas de leurs disparitions successives mais bien plutôt de leurs réapparitions successives, toutes mortes, avec le bras gauche en moins.

Un criminologue et son équipe ainsi qu'une experte en affaires d'enlèvement enquêtent sur ces réapparitions qui semblent, chaque fois, les mener sur la trace de dangereux individus à qui l'horreur ne fait pas peur.

Donato Carrisi, l'auteur de ce thriller inspiré de faits réels, ne fait pas dans la dentelle mais son art de raconter fait tout passer. Intrigue très bien maîtrisée et grande maestria pour distiller l'angoisse. C'est peu dire que je n'ai guère lâché ce livre pendant quelques nuits qui s'en sont trouvées singulièrement écourtées.
(Donato Carrisi, Le Chuchoteur. Ed. Calmann-Lévy. Trad. de Anaïs Bokobza.)

lundi 4 avril 2016

Repas des vieux

C'était hier. Nous étions neuf. Comme d'habitude, gibier (civet de lièvre) et cochonnailles. Pourtant, quelque chose n'était pas tout à fait comme d'habitude : il en manquait deux, Janette et Janine, parties rejoindre leurs ancêtres. Et même si la journée fut agréable et enjouée, il m'a semblé parfois que le vide était là.

 Les Dupond(t) étaient présents : l'un pérorant comme à l’accoutumé, l'autre buvant à satiété et riant gras. Jean-Claude se taisait, comme toujours. Frédéric pensait à sa reprise du travail aujourd'hui, à la fois content et anxieux, me semble-t-il. Mimi trônait en tête de table. Elle avait fait un effort, en allant chez le coiffeur et en se rasant la moustache. Colette faisait déjà des projets de voyages et de repas futurs. Lucienne, qui recevait, avait, comme chaque fois, perdu la tête : où est mon plat long ? Mon lave-vaisselle est plein, je ne sais plus comment le mettre en route.... Louis, son vieil amant, jouait au maître de maison, mais avec plus d'humanité qu'autrefois : ses récents problèmes de santé l'ont un peu humanisé. Il a enfin compris qu'il n'était pas immortel.

Et moi ? Moi, j'observais, sans oublier de boire un petit coup. (En ce qui concerne la police de ce billet, un peu plus grande que d'habitude, ce n'est pas que ma vue a baissé par contamination ! C'est mon ordinateur qui fait des siennes et refuse de m'obéir !)

Comment faire du nouveau avec de l'ancien?

Découvert aujourd'hui ce groupe allemand et sa chanson d'amour (?) chantée à l'ancienne. Mais dans quelle langue ?



Mais oui, en latin ! Bon, même en latin, je ne suis pas transporté !

samedi 2 avril 2016

Résultat de recherche d'images pour "dessins de poisson d'avril"

Désolé pour ceux qui ont mordu à l'hameçon ! J'ai un peu honte de vous avoir fait croire que mes voisins allaient être remplacés par une famille nombreuse. Il n'en est heureusement rien, enfin pas que je sache. A ma décharge, j'ai essayé de vous mettre sur la voie avec la fausse Barbara. Mais, sauf Karagar qui préfère les manières expéditives, vous avez eu la bonté d'essayer de me consoler. Ceci dit, si c'était vrai, je serais vraiment contrarié !

vendredi 1 avril 2016

Imitation

Juste pour tenter de retrouver le moral !

Les locataires

Je m'apprêtais à concocter un petit billet poisson d'avril mais je n'y ai vraiment pas le cœur. J'ai aujourd'hui appris une nouvelle qui m'a fichu en l'air la journée.

Mon voisin du dessus, ce matin, m'a apporté les documents de la régie concernant l'état des comptes de la copropriété en vue de la prochaine assemblée générale du mois de mai. Et, en partant, il m'a prévenu que lui et sa femme allaient s'installer définitivement dans leur maison de campagne ardéchoise et que, pour leur appartement, ils avaient trouvé des locataires : une famille avec cinq enfants !

Bien sûr, je me suis parfois plaint du côté réfrigérant de cet homme, qui peut passer à vos côtés sans même vous saluer, alors que nous sommes voisins depuis plus de vingt ans, qui, chaque nuit, se lève à deux heures du matin pour se rendre aux toilettes et, bien sûr, n'oublie pas de tirer la chasse d'eau et d'utiliser bruyamment la balayette. Bien sûr, j'ai un jour créé entre nous un léger froid en demandant à sa femme, un peu simplette, ce qu'il pouvait avoir aux pieds pour que je le suive à la trace à chacun de ses placements au-dessus de ma tête.

Mais il avait l'avantage, en tant qu'ancien huissier, de s'y connaître un peu en paperasses et de parfaitement jouer son rôle comme président du syndic, m'évitant ainsi de m'investir trop dans ce boulot qui m'ennuie profondément et qui risque, maintenant, de me retomber dessus.

Et puis, rien qu'à penser aux cinq gosses qui vont bientôt batifoler là-haut, j'en ai des frissons d'angoisse ! Ça joue, les gosses, ça court dans tous les coins en hurlant, ça va à l'école et ça se lève tôt. Finies mes grasses matinées pour récupérer des couchers trop tardifs !

J'ai téléphoné à ma vieille voisine pour lui annoncer la nouvelle. Elle, ce qui la met hors d'elle, c'est "qu'il n'y a jamais eu un seul enfant dans l'immeuble" ! Elle imagine déjà les papiers de bonbons dans la cage d'escalier, les parties de skate ou de ballon dans la cour, les carreaux fracassés, les plantes martyrisées. Bref, l'apocalypse !

J'ai failli demander au voisin s'il me faisait une blague puisque nous sommes le 1er avril mais, vus sa tête et son caractère, j'en doute fortement. J'ai préféré me taire. Et le pire, c'est que je ne peux rien faire, à part devenir sourd, et rapidement !