lundi 18 mars 2024

Les escaliers de la gare

Les escaliers d'Odessa

C'est à vous

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dimanche 17 mars 2024

Larmes de crocodile

Si l’on consulte le grand dictionnaire de la langue latine — rédigé par Guillaume Freund et traduit en français par N. Theil — et qu’on se reporte à tous les passages des auteurs latins qu’il cite comme ayant parlé du crocodile ; si l’on parcourt attentivement l’Histoire des Animaux d’Aristote, laquelle consiste en deux volumes, l’un contenant l’Histoire des animaux proprement dite et l’autre des Notes critiques sur cette Histoire, on ne trouve rien qui fasse référence au stratagème prêté au crocodile pour attirer sa proie. L'origine en est donc plus moderne. 

Comme cette expression se trouve dans toutes les langues de l’Europe occidentale (Lagrime di coccodrillo, en italien ; lagrimas de cocodrilo, en espagnol et en portugais ; krokodil tränen, en allemand ; krokodille traanen, en hollandais ; crocodile tears, en anglais), cela donne à penser qu’elle est due à un ouvrage qui aurait été très répandu à une certaine époque dans les pays où se parlent ces langues. Or il semble bien que ce soit le Livre des merveilles du monde (1478) de Jean de Mandeville.

C’est précisément de ce récit qu’est tiré l’extrait suivant se rapportant à l’expression qui nous occupe : « En Afrique, au pays des Egyptians, proche la seconde cataracte du Nil, habitent, parmi les roseaux, d’énormes lézards de trois toises et plus de longueur, de figures difformes et de mœurs sanguinaires, dont le seul métier est, quand ils ne dorment pas étendus au soleil sur la vase chaude, de guetter les hommes et les animaux qui se hasardent sur les bords du fleuve, pour s’en saisir et les dévorer.

« Nonobstant leur aspect farouche, leur voracité insatiable, et la dureté telle de leurs écailles que point ne sauroit la percer un robuste archer de son vireton le plus aigu, ces animaux féroces sont pourvus d’une sensibilité exquise ; à ce point que souventes fois les ai moi-même ouys geignants ou se lamentants es rozeaux, poussants des sanglots qui semblent mugissement de bœufs, et versants, ainsi qu’il m’a été assuré, larmes qui jaillissent du pertuis de leurs yeux, comme de pommes d’arrosoirs.


« Maintes foys, continue le naïf conteur, au dire de mes guides, gens réputés pour leur prud’homie et leur grande honnêteté, aucuns voyageurs, trompés par l’effusion de ces larmes, et s’assurant que tant de gémissements ne pouvoient provenir que de coeurs vrayment marris de tant de crimes et assassinats, s’estant voulu approchier des pélunques èsquelles se tiennent ces grands lézards, furent eux-mêmes saysis et méchamment dévorés par ces traîtres et hypocrites qui pleurent non par douleur vraye de leurs péchiés, mais par feintise pour engaigner les trop crédules, et bien et commodément se remplir le ventre en les dévorant. »

Voici comment les effusions sentimentales des sauriens des bords du Nil donnèrent lieu chez nous à la locution que chacun sait.

Pleurer des larmes de crocodile

Il pleure dans mon cœur

Il pleure dans mon coeur

Comme il pleut sur la ville ;

Quelle est cette langueur

Qui pénètre mon coeur ?


Ô bruit doux de la pluie

Par terre et sur les toits !

Pour un coeur qui s’ennuie,

Ô le chant de la pluie !


Il pleure sans raison

Dans ce coeur qui s’écoeure.

Quoi ! nulle trahison ?…

Ce deuil est sans raison.


C’est bien la pire peine

De ne savoir pourquoi

Sans amour et sans haine

Mon coeur a tant de peine !


Paul Verlaine, Romances sans paroles (1874)

La chanson d'amour du dimanche

samedi 16 mars 2024

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