samedi 31 mai 2008

Des qui croient que (caricature).


Toute petite balade cet après-midi, pour cause de travail scolaire inachevé. Un tour dans le 6° pour terminer le recensement des animaux de cet arrondissement (dont l'un, devant l'ex-gare des Brotteaux, a disparu).
Eh bien, j'ai rencontré d'autres animaux dans ces rues, des plus dangereux peut-être: les habitants.

Autant la Presqu'île, un samedi après-midi se remplit d'une foule bigarrée, cosmopolite, bruyante et souvent bon enfant, débarquée par rames de métro entières des banlieues de la ville, autant il n'en est rien sur le cours Franklin Roosevelt. A part quelques bonnes faisant les courses de dernière minute pour la réception du soir et les nurses, des perles dénichées dans des pays où la main-d'oeuvre n'est pas chère, on n'y voit que des autochtones.

Dans la rue, à pied, au volant des voitures, assis aux terrasses des brasseries, occupés dans les magasins: que des purs du 6°. A quoi les reconnait-on? A leurs vêtements? Non, pas l'après-midi, ils ne sont pas ostentatoires. A leur voiture? Non, pour la même raison.

On les repère à leur air: lointain, absent, hautain si vous insistez, l'air de celui qui ne peut vivre que dans le 6° et qui se demande bien comment d'autres peuvent loger ailleurs. On les repère à leur façon de marcher, d'occuper l'espace, de tenir, et c'est vrai, le "haut du trottoir", persuadés que ce n'est jamais à eux de s'écarter mais à vous, et ce quel que soit leur âge, de la gamine insupportable à sa mère terriblement affairée, de l'adolescent arborant son "look-marques" un peu défraîchi au cadre supérieur accroché à sa mallette et à son téléphone portable.

Alors, j'ai trouvé la parade. Si l'on veut passer sans avoir à descendre dans le caniveau, là où mûrissent les crottes de leurs charmants petits compagnons canins, il faut, vous aussi, prendre un certain air, à la fois mystérieux, dégagé et scrutateur et faire mine de passer très très près de ces dames, du côté où elles tiennent leurs sacs à main. Près à les frôler. Là, pour l'amour de leur carnet de chèques, de leur carte dorée ou de je ne sais quoi de précieux qu'elles transportent avec elles, elles préfèrent laisser passer cet individu un peu louche qui pourrait bien les détrousser. J'en ai vu une cet après-midi qui vérifiait le contenu de son cabas après mon passage. Je ne pensais pas jouer si bien la petite frappe. A mon âge!
Comme je suis bien dans mon 3°!

Le monde animalier.

Encore une livraison des bêtes de la biennale. Ceux qui suivent ont été photographiés il y a déjà assez longtemps. J'espère ne pas me tromper en les situant dans la ville.

(LION 16)
Celui-ci, toujours dans la Presqu'île nord, un hôtel de luxe de la rue Grolée, le quartier acheté par les américains. Bof!

(OURS 21)
Et celui-ci, à peine chargé, au même endroit. Bizarrement, je n'ai pu obtenir de photos nettes dans ce coin yankee. Un peu d'impatience faisait sans doute trembler ma main.

(OURS 22)
Voilà qui est mieux, Place des Cordeliers. En vous penchant un peu, vous pourriez apercevoir les deux jeunes québécois nouvellement arrivés à Lyon.

(OURS 23)
Notre ami le petit gris essaie d'apprendre à lire sur le fac-similé des Tables Claudiennes, au Musée de l'Imprimerie.

(OURS 24)
Et pour le dernier du jour, nous traversons la Saône, direction Saint-Georges. Plus exactement, Place Benoît Crépu. Celui-ci est très explicite: il porte sur son socle les dates du Québec (1608-2008), sa devise sur une de ses pattes ("Je me souviens.") et a dans l'oeil un je ne sais quoi qui me plaît. Mais je ne veux pas influencer le jury!



Voilà une livraison qui, par la mauvaise qualité des photos, ne m'enchante guère. Je tacherai de faire mieux la prochaine fois. Car, si je compte bien, il en reste encore 29.

vendredi 30 mai 2008

Le mur du son.

Ma soeur m'a beaucoup fait rire dimanche dernier. Au détour d'une conversation, elle m'a avoué une de ses naïvetés enfantines.

Il faut auparavant rappeler que nous avons, tout jeunes, passé de nombreux étés à la limite entre la Loire et la Haute-Loire, à Usson-en-Forez, soit en colonie de vacances, soit en location avec mes parents.

Or, pendant un certain nombres d'années, chaque fois que ma soeur, après un grand bang dans l'atmosphère, apprenait que c'était à cause d'un avion qui venait de passer le mur du son, elle restait perplexe: qu'avaient donc tous ces avions à passer justement par là, et où était donc ce mur que, malgré nos fréquentes promenades dans le village et la campagne alentour, nous n'avions jamais aperçu?

Le mur d'Usson est resté longtemps pour elle un grand mystère.

Ecrire

Ce soir, j'ai envie d'écrire. J'ai toujours envie d'écrire mais particulièrement ce soir.

Je m'installe à ce bureau et la journée tourne sur un autre axe. Je redoute que le téléphone ne sonne et ne me dérange. Je ne mets pratiquement plus de musique en accompagnement: je me suis rendu compte que je ne l'écoutais pas, ou mal, comme si je rentrais dans une bulle insonorisée dès que je commence à taper les premiers mots. Parfois, rarement, c'est la musique qui m'empêche d'écrire, quand j'entre dans l'autre bulle, celle de l'orchestre ou de la voix.

En créant ce blog, je savais qu'il répondait chez moi à un besoin, je ne savais pas en revanche que ce besoin était aussi profond et qu'il allait m'amener à écrire près de 500 billets en huit mois à peine. Je ne me doutais pas non plus qu'il allait déverrouiller d'anciennes peurs, me libérer dans mon écriture, aussi bien pour le style que pour la pudeur bête.

Ce soir, à la radio, un musicien évoquait son art et la façon de jouer de son instrument, le violoncelle je crois. Pour se faire comprendre, il a pris un exemple qui m'a remis en mémoire un souvenir d'enfance que je veux sauver du naufrage. N'est-ce pas aussi fait pour cela, un blog? Si ce souvenir tout bête avait disparu de la boutique de mon passé, relégué sans doute dans l'arrière-salle, une main de violoncelliste l'a ramené à la lumière et je veux qu'il y reste car je doute que les enfants d'aujourd'hui fassent couramment la même expérience.

Il avait disparu et pourtant c'était une sorte de jeu qui me plaisait beaucoup, chaque fois que mon père sacrifiait un poulet de chez nous au repas dominical. Bien sûr, je n'assistais pas à l'immolation du volatile (encore que cela ne m'ait jamais autant touché que le meurtre des agneaux ou des chevreaux).

Et quand il ne restait plus rien dans la cour de la ferme que quelques plumes et duvets échappés du torchon destiné à les récupérer avant qu'elles ne s'envolent, quand les instruments du supplice, ainsi que le bol où l'on avait recueilli le sang destiné à être fricassé à la poêle, avaient réintégré la cuisine, quand la bête, vidée et nettoyée, était prête à passer au four, alors j'aimais prendre dans mes mains une des pattes sectionnées, regarder ces sortes d'écailles qui la font ressembler à un dos de poisson sec, malaxer un instant cette chair molle, puis, saisissant un des nerfs qui dépassaient de la section, le tirer au maximum vers l'extérieur et regarder, ébahi, les serres du poulet se contracter et se relâcher selon mon unique volonté, comme obéit la marionnette au montreur derrière le castelet.

Ainsi la bête vivait-elle encore, grâce à moi, quelques instants. Etait-ce déjà une façon que j'avais trouvé pour éloigner la mort en prolongeant le mouvement? Et n'est-ce pas le même mouvement que celui des serres du poulet et celui des doigts tenant un stylo ou picorant les lettres du clavier? Ainsi écrire chasserait la Grande Faucheuse? Non, je crois plutôt que, tous, nous essayons de la séduire et que tous, nous avons l'illusion d'y parvenir comme l'enfant parvenait à imiter la vie en tirant sur le nerf de l'oiseau qui, déjà, rôtissait dans son jus.

Tempestas.

Jour de pluie, sans cesse, du matin au soir. A peine une courte éclaircie après le repas de midi. Juste de quoi rappeler qu'il est toujours là, derrière les nuages. Comme je suis dépendant de la présence ou non du soleil au-dessus de ma tête.

Pourtant la grisaille n'a pas réussi aujourd'hui à entamer mon optimisme. D'abord parce que je n'ai que peu eu le temps de la contempler: six heures de cours et une réunion, ça occupe, le restant étant consacré à terminer la correction des copies.

Ensuite parce que, ces temps-ci, je trouve un certain charme à ces ciels brouillés, voire carrément gâtés. La pluie abîme les pivoines dans les jardins mais leur ruine est souvent encore splendide quand le soleil revient. Il y a, près des vestiges de l'aqueduc, un jardin privé foisonnant de fleurs en jungle, devant lequel je m'arrête chaque fois que je monte à Fourvière. C'est là qu'étaient hier ces tiges généreuses ployées sous leur charge aquatique. Une légère caresse et tout s'écroulerait à jamais, comme les piles érodées de l'aqueduc tout proche, dont la base ressemble de plus en plus à un trognon de pomme dévoré à belles dents.

J'ai aussi un certain plaisir avec le crachin. Quand je cours, il me rafraîchit sans trop me mouiller et c'est comme une impression érotique, une main qui frôle sans vraiment toucher, qui attise et ne donne pas, qui fait que, bientôt, c'est soi qui réclame. Courir est un acte d'amour. Il y a du faire l'amour dans la course et la pluie en est un prémice comme la sueur une jouissance.

En ville, le crachin installe un parfum de nostalgie que j'apprécie s'il ne dure pas trop longtemps. Lyon est belle sous un peu de brume. C'est une ville de demi-teintes, pour laquelle une pluie fine ajoute à son mystère naturel.

J'aimais sortir sous l'orage dans mon enfance. Ma mère, bien entendu, nous l'interdisait. Mon rêve était de me promener nu dans la nature sous les trombes d'eau et les gifles du vent. Ce rêve, je l'ai réalisé des dizaines d'années plus tard, au bord du lac Léman, un soir de tempête. Je me suis déshabillé entièrement et, seul, j'ai marché le long du rivage, jusqu'à ce que le froid me transperce. Je crois que ce que l'on ressent alors enivre encore plus que le vin, une impression d'être englobé dans l'univers, d'être un élément du cosmos, un élément fragile, un des plus faibles, mais le seul à penser qu'il en est un.
Depuis, je n'ai jamais plus utilisé de parapluie.

Lecture pour tous.

Oui, parce ce que je considère que de bons romans pour la jeunesse peuvent être lus par tous avec contentement. Aujourd'hui, j'ai choisi une oeuvre un peu plus complexe (c'est peut-être un bien grand mot) destinée plutôt à des élèves de douze ou treize ans et plus. Il s'agit du Secret de Maître Joachim, de Sigrid Heuck (Folio Junior n°1273). De cette auteur, je ne sais rien que ce qu'en dit l'éditeur, à savoir qu'elle est née en 1932 à Cologne, qu'elle est venue à l'écriture en 1980 par le biais de l'illustration et que, pour ce roman, elle a obtenu le prix du Livre jeunesse autrichien.

Le Secret de maître Joachim est un roman plus difficile d'accès que les précédents. Mes élèves, ayant beaucoup espéré du début un peu fantastique, ne l'ont finalement pas aimé pour la plupart. Sans doute parce qu'il exige un effort supplémentaire et que l'univers qu'il aborde ne leur est pas suffisamment familier.

Un adolescent de notre époque, en feuilletant un livre sur un peintre flamand du xvi° siècle, Joachim Patinir, s'attarde dans la contemplation d'une reproduction de tableau représentant Saint Christophe. Mais ce n'est pas le Porte-Christ qui l'intéresse. Plutôt, à l'arrière plan, une scène curieuse: deux hommes, au bord d'un fleuve, sont occupés avec un cadavre. Sont-ils en train de le retirer du fleuve? Sont-ils au contraire prêts à se débarrasser ainsi du corps de leur victime?

L'adolescent, Peter, va trouver un moyen pour entrer lui-même dans le tableau et se retrouver en 1521 à Anvers, à l'époque où vivait Patinir et où Albrecht Dürer était déjà grand. S'ensuivra une quête de la vérité, sous forme d'énigme policière, qui mènera le garçon à connaître la vérité sur ce cadavre. Ne me demandez pas de vous révéler la solution. J'ai lu ce livre il y a déjà quelques années et je ne m'en souviens pas. D'ailleurs, ce n'est pas, je crois, l'essentiel de cet ouvrage. J'ai plutôt gardé en tête le foisonnement de cette Europe du nord en cette période de basculement entre la fin du Moyen-Age et le début de la Renaissance.

Moi qui aime la peinture flamande, je ne pouvais pas ne pas aimer ce livre très bien écrit et traduit, où l'éditeur a eu l'excellente idée de représenter le tableau de Patinir, Saint Christophe portant l'enfant Jésus, en couleur et en double page de garde. Ainsi en a-t-on une vue générale et peut-on nous aussi s'attarder sur l'arrière-plan, si riche et repris dans les pages suivantes. Certains détails m'évoquent l'Italie et les lointains brumeux de Léonard de Vinci, d'autres l'imagination dantesque de Jérôme Bosch.

Tout a commencé le jour où j'ai découvert un cadavre au bord du fleuve.
Deux hommes retenaient l'étroit radeau sur lequel il était attaché mais, tel que j'étais placé, je ne pouvais pas voir s'ils étaient en train de le tirer vers la terre ferme ou de le pousser dans le courant.
Le mort portait une tunique rouge et un pantalon de couleur claire qui devenait nettement plus foncé à partir des genoux. Cela donnait l'impression qu'il avait pataugé dans un marécage avant de mourir. Un bout de papier était glissé sous sa ceinture..
Le fleuve était calme. Non loin de l'endroit où se trouvait le cadavre, il se divisait en deux bras enserrant une île rocheuse au sommet de laquelle se dressait un puissant château fort. Un peu plus loin, le fleuve se jetait dans la mer. Sur la rive droite, là où la terre ferme prenait fin et où l'eau s'étendait jusqu'à l'horizon, on pouvait voir une ville.

(Trad. de Dominique Miermont.)

jeudi 29 mai 2008

J'en suis tout retourné!

Un peu de soleil dans l'eau froide.

Jeudi humide (3)

Et voici la partie qui mérite le plus son titre.

En quittant le Musée, montée à l'esplanade de la Basilique. La Vierge dorée est bien là, descendue de ses hauteurs, mais enfermée à double tour dans une structure de verre et métal. A quoi m'attendais-je? A la voir trôner au milieu de la place sans aucune protection, accès direct? Un peu déçu mais j'aurais dû y penser. Un petit coup d'oeil sur son ancien emplacement.

Et puis le nouveau, pour un certain temps sans doute. Mais je fais le pari que tout sera terminé pour le 8 décembre. Ca ne paraît pas possible autrement.

Elle est là, en attendant, immense (environ quatre mètres de haut, je pense) dans sa dorure toute neuve, son paratonnerre dans le dos, les mains accueillantes, mais la bouche un peu grimaçante. Peut-être le déplaisir d'avoir été déplacée! Non, selon l'angle sous lequel on la regarde, la tête n'a pas des traits aussi doux qu'on pourrait l'espérer.

Je pensais ne pas pouvoir approcher la statue: pas un chat, ou presque. Mais, en regardant le ciel, on comprend pourquoi. D'ailleurs, il m'est tombé sur la tête pendant le trajet retour (à pied) jusqu'au collège, où j'ai poursuivi la journée par l'avant-dernière séance de formation psy de l'année.

Pas un moment pour souffler donc, mais je peux dire aussi: des moments rien qu'à moi. Face à tout ça, il y a en ce moment à Lyon les 2° Assises Internationales du Roman, en partenariat avec le journal Le Monde et France-Inter. Depuis lundi, j'ai à peine eu le temps de jeter un oeil sur le programme. Je savais que Francis, mon ami libraire, y participait, j'ai laissé passer le jour! L'an prochain, peut-être.

Mais j'en entends déjà certains: quand travaille-t-il donc, cet homme? Demain, toute la journée, des cours, des vrais!

Jeudi humide (2)

A quatorze heures trente, j'ai rejoint à pied le Musée Gallo- Romain de Fourvière pour y écouter des extraits du Couronnement de Poppée, donnés à cet endroit, en voisins, par les départements chant et musique ancienne du Conservatoire de Lyon. Intéressant d'écouter ce type de musique dans cette cathédrale de béton à la beauté très pure (mais tout le monde ne partage pas mon avis sur cette architecture).

Ce musée, je m'y sens un peu comme chez moi. Depuis le temps que j'y promène des générations d'élèves, que j'y côtoie leurs guides, leurs archéologues et même leur directeur (qui fut, il y a de nombreuses années, "du plus grand bien" avec une de mes amies très proches). Je crois que je le connais par coeur et que, si on me bandait les yeux, je pourrais tout de même citer tout ce que l'on peut voir dans chacune des salles.

Le Trésor de Vaise avait été un peu poussé dans un coin pour laisser place aux chaises pour le public et aux pupitres pour les musiciens. Le décor se résumait bien entendu aux accessoires nécessaires à l'action: un fauteuil principalement. Bravo le conservatoire: ils ont commencé à l'heure, ce que j'apprécie beaucoup.

Une heure trois quarts de chants et musique, au milieu des artistes en civil. Une belle réussite. Beaucoup de monde et tous enthousiastes. Il faut dire que l'on oubliait très vite que l'on avait affaire à des élèves, tant l'exécution de la partition se faisait discrète par sa justesse et sa pureté. Et des voix qui, à part le contre-ténor à l'organe un peu faible, n'avaient rien à envier à celles d'artistes confirmés. Et, cerise sur le gâteau, j'ai découvert dans le programme le nom d'un de mes anciens élèves dans le rôle du Premier Soldat. Bon, d'accord, il ne chante pas encore les rôles titres mais je ne désespère pas pour lui.

Haring le matin, Monteverdi l'après-midi. Eclectisme. J'aime.

Jeudi humide (1)

Vingt heures quarante. Je m'assois devant mon clavier. Journée sociale terminée. Maintenant commencent mes moments à moi.

Une journée qui fut bien remplie et culturelle.

Ce matin, comme prévu, visite, au Musée d'Art Contemporain, de l'exposition Keith Haring. Cette rétrospective couvrant une décennie (80/90) a été montée avec la collaboration de la Fondation Keith Haring de New York et représente à ce jour la plus importante "mostra" de cet artiste. Les oeuvres présentées ont été prêtées par des musées et des particuliers du monde entier et concernent aussi bien la peinture que le dessin, la sculpture, la photographie, les oeuvres à la craie dans le métro new-yorkais ou, par exemple, une "frise" à la bombe sur des panneaux interdisant l'accès à un chantier du bâtiment.

Nous avons trois guides, un par classe. Je me retrouve seul prof avec la mienne, donc pas de décibels intempestifs à supporter. Élèves très intéressés, certains ayant même préparé la visite en se renseignant par eux-mêmes.

Pour ma part, très intéressé: son univers, sous des allures simples, voire simplistes, est très structuré et fortement ancré dans des archétypes, dans les fondements de notre société occidentale (mais pas seulement). Ses compositions, qui ont l'air improvisées ou inexistantes, sont en fait minutieusement élaborées.

Le "loup", "l'animal" omniprésent avec l'homme simplifié (qui rappelle le petit bonhomme de La Linea ) et le bébé rayonnant, n'est pas un loup pour moi: c'est le Minotaure, avaleur d'humains (comme le montre un tableau), le monstre anthropophage, qui parfois s'adoucit.

Étant accompagné de mes élèves, je n'ai pu accéder au 3° étage, là où sont exposées les oeuvres "dures", violentes (choix de la prof. d'Arts. Il est vrai que ces enfants n'ont que douze ans). Je reviendrai seul, mais dans d'autres tableaux déjà est présent le sexe lié à la mort, au serpent, au coeur transpercé. Certaines de ces toiles ont été peintes avant qu'il se sache atteint du virus du sida. Sans doute un thème qui n'a cessé de le hanter. Je reviendrai donc, pour approfondir mon observation et tenter de saisir le pourquoi de mon grand attrait.

Sa dernière oeuvre (pas forcément la plus intéressante).
Attention: pour ceux qui seraient intéressés, l'expo. se termine le 29 juin.


(En quittant le collège, ce matin, pour rejoindre le bus spécial, croisé un papa qui amenait sa petite fille à la maternelle. Coup au ventre: beau comme je les aime, avec un rien de fragilité et un sourire!!!! Si ça continue, je vais faire la sortie des écoles, mais pour les papas!)

mercredi 28 mai 2008

Déboussolée!

Hier après-midi, la Vierge dorée qui protégeait Lyon du haut de la chapelle de la Vierge qui jouxte la Basilique de Fourvière a été déboulonnée.

Non, rassurez-vous, nous ne sommes pas à Bagdad: il ne s'agit certes pas d'une fin de règne pitoyable, mais d'un acte de prudence, vue la fragilité du clocher qui la supportait, et de toutes les toitures de Fourvière d'ailleurs. J'ai eu l'occasion d'aller faire un tour (en petite compagnie) au-dessus de la voûte de la Basilique: le béton est dans un état à faire frémir!. Effectivement, des travaux s'imposaient.

Mais enlever sa Vierge dorée de Fourvière à Lyon, c'est comme si l'on privait Paris de Tour Eiffel, Bruxelles de son Manneken Pis ou que l'on disait à la sardine qui bloque l'entrée du port de Marseille d'aller jouer ailleurs. Non, c'est du sérieux, pas de l'anecdote. Et je gage que nous allons en entendre parler longtemps. Il faudra que j'aille voir dans la plaine de l'est si le panorama que l'on découvre d'abord de la ville a vraiment changé sans cette statue. Il est vrai que parfois, à certaines heures, avec un certain ciel, le soleil couchant la fait un instant miroiter, la transformant quelques secondes en Phare d'Alexandrine (non, ce n'est pas une faute de frappe: c'est le prénom de Madame le Maire socialiste du 5° arrondissement, où se trouve le sanctuaire).

En attendant, la précieuse statue a trouvé place, d'après ce que j'ai compris, sur le parvis de la Basilique. Tout un symbole d'accueil! Demain, ayant un petit trou de liberté dans l'après-midi (entre Haring et une formation psy, suivie sans doute par une soirée musicale- Monteverdi- au Musée Gallo-Romain), je vais essayer d'immortaliser l'événement sur mon appareil photos. J'en profiterai aussi pour faire un tour du côté de la mairie du 5° où se cache, je le sais, un félin ou un plantigrade (ça, je ne le sais pas).

Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil.

Je dois en ce moment tomber dans la niaiserie la plus totale. Ma journée d'aujourd'hui pourrait se résumer par cette phrase: tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil.

Début des amabilités ce matin, en arrivant au collège: mon collègue Christian, prof d'allemand, plein de malice et de sous-entendus (mais lui, il est toujours agréable!), puis ma collègue de physique, Fabienne, une prof. nouvellement arrivée (je n'ai pas dit jeune), totalement atypique, à l'allure de diseuse de bonne aventure, et qui maintenant ne m'appelle plus que par mon prénom et a failli me sauter au cou ce matin (impression confirmée par Christian).

Une seule heure de cours aujourd'hui: Stéphane me trompait encore avec une femme!
Aussi suis-je bien vite rentré chez moi pour mettre un point final à la déclaration d'impôts de mes parents, déclaration rendue compliquée par le décès de mon père et par le nombre incalculable de leurs caisses de retraite. Calculette, pro rata temporis, renseignements trouvés, personnes appelées dans les administrations et qui répondent, et en final, un agent (féminin) des impôts, très compétente, très riante, très comme j'aime, qui m'évite au téléphone d'attendre trois-quarts d'heure dans une salle d'attente à la moiteur de sauna comme la semaine dernière. A midi, la déclaration était dans la boîte.

Début d'après-midi: copies, copies et copies. Il faut tout corriger, vite. Déjà la fin de trimestre approche, déjà il faut faire les bilans, remplir les documents pour les conseils de classe, le brevet des collèges, les orientations.

Puis kiné. Il est resté constamment avec moi. De quoi parlons-nous? Des romains, toujours. C'est un passionné, bien qu'il se dise étrusque. Pas banal, n'est-ce pas, de se faire masser en évoquant les origines divines de César ou la fin contestée de Marc-Aurèle? En plus par un étrusque! Moi, j'aime. Comme j'évoque des soucis d'estomac (bravo les anti-inflammatoires pour le dos!), il me griffonne sur un bout de papier le nom de deux produits aux plantes à acheter uniquement dans une certaine pharmacie "chinoise". Effectivement, la personne qui me reçoit est d'origine asiatique, et immédiatement, le courant passe. J'ai cru un moment que j'allais me retrouver dans l'arrière-boutique pour une tasse de thé.

Alors que, pour rentrer, j'essaie vainement de trouver à la station un vélo'v en état de marche, arrive une femme charmante qui m'adresse la parole la première (dans ce quartier chic, c'est plutôt rare) pour me dire qu'elle me conseille le sien qui fonctionne parfaitement. Et c'est vrai.

Changement de vêtements et direction le parc de la Tête d'Or (j'aurais bien visé Miribel mais le ciel se couvrait dangereusement). Quatre tours de piste (15 kms environ) et rencontre d'un charmant monsieur avec qui le courant passe immédiatement aussi.

Ce soir, bonne fatigue. Seule restriction: j'ai bu une des ampoules aux plantes conseillées par le kiné: le goût en est infect. Mais bon, on ne va pas se plaindre. Je l'ai déjà dit: il y a des jours comme ça. Alors, d'après vous, niais ou pas?
En tout cas, niais fatigué qui vient de se souvenir que, demain matin, il va passer beaucoup de temps debout au MAC (Musée d'Art Contemporain), à visiter avec trois classes (!) l'exposition des oeuvres de Keith Haring. Papy va sans doute se battre avec les élèves (par essence fatigués) pour occuper un des quelques sièges disponibles.

mardi 27 mai 2008

Sidney Pollack.

Pollack, Sidney Pollack est mort.

Pour moi, il restera le réalisateur de On achève bien les chevaux. C'était en 1970. J'avais dix huit ans. J'avais la passion du cinéma. J'aimais Jane Fonda et Michael Sarrazin.

Le dimanche matin, j'aidais à l'épicerie de mes parents. Je trichais un peu sur la balance des fruits et légumes. L'après-midi, j'allais dépenser cette "gratte" dans les cinémas de Saint-Etienne, espérant aussi rencontrer, qui sait, l'âme soeur.
Le Voyou, Ma nuit chez Maud, Le Passager de la Pluie, Le Conformiste, Les Choses de la Vie,... Des heures de plaisir dans le noir.

C'était ma dernière année chez mes parents, ma dernière année à Saint-Etienne. J'allais perdre ma petite soeur l'année suivante. L'âme soeur, j'allais la rencontrer deux ans plus tard, à l'automne 1972. C'était Pierre.

La Fête des Voisins.

Dans mon immeuble, nous ne la fêtons pas. Nous n'en avons pas besoin.

Nous savons, les anciens occupants, très largement majoritaires, en tout cas, que nous pouvons compter les uns sur les autres. Très indépendants et très respectueux, mais aussi très attentifs. Les uns arrosent les plantes des vacanciers, les autres récoltent leur courrier, pour ma part, je change les ampoules grillées dans les parties communes. Lorsqu'on se croise, on se fait la bise (pas tous!). On évite les bruits gênants à des heures impossibles. On fait les courses d'une malade, on se repasse les adresses des bons artisans.

Ce tableau en ferait fuir plus d'un, pensant que tout le monde sait tout sur tout le monde et que l'on vit en vase clos. Eh bien, pas du tout: c'est mal connaître le lyonnais de souche (et adoptif/té). Aucune ingérence, on peut passer plusieurs mois sans se voir. Simplement on sait que l'on est là.

Alors, ce soir, chacun chez soi.

(Je viens sans doute d'écrire le billet le plus stupide depuis l'ouverture de ce blog. Mais la stupidité n'est-elle pas dans cette fête elle-même, passage obligé une fois l'an, où l'on fait l'effort de? Mais alors pourquoi ne pas faire cet effort tous les jours? Cà devient vite un plaisir, l'attention aux autres.)

Quelques mois dans la ville que j'aime.

Novembre: Lyon 5°

Décembre: Lyon 6°


Janvier: Lyon 7°

Février: Lyon 4°

Mars: Lyon 1er

Avril: Lyon 3°

Mai: Lyon 2°

Et, de tout ce temps, je n'ai pas mis les pieds dans le 9°! (Le 8° attendra d'être montré! Il l'a déjà été bien souvent.)

lundi 26 mai 2008

De quoi je parlais déjà?

J'ai dit l'autre jour que je revenais à la distraction de mon enfance. Le dernier exemple en date: en étendant une lessive tout à l'heure, j'ai découvert que j'avais eu toute une journée aux pieds une paire de chaussettes dépareillées. Personne ne me l'a fait remarquer: indifférence, manque d'observation ou tact?
Il m'est arrivé d'autres fois de partir en voiture au travail et de revenir en métro. Grosse montée d'adrénaline le lendemain matin en ne retrouvant pas le véhicule.
Ou bien d'acheter des livres et de les laisser dans le panier du vélo'v.
Ou bien de découvrir un journal au réfrigérateur (sans doute pour avoir des nouvelles fraîches).
Ou bien d'organiser une sortie avec une collègue tout aussi distraite que moi, de louer un car, de partir avec les élèves en ayant totalement oublié de prévenir la directrice de l'époque qui n'avait pas vraiment apprécié, et je la comprends.
Ou bien de me retrouver dans la cour du collège un dimanche matin.
Ou bien de passer tranquillement une heure à lire en salle des profs alors que j'ai cours.
Ou bien d'arriver chez un commerçant en me demandant ce que je viens y faire.
Ou bien d'acheter deux fois du pain le même soir.
Ou bien, pour plaisanter, de cacher le cartable d'une collègue et, quand la fin de la récréation a sonné, de partir en cours en oubliant de le lui rendre.( Là aussi, mauvaise réaction. Là aussi je comprends.)
Ou bien, ou bien, ou bien...
Voilà, j'aurais pu m'appeler Triphon. Mais non, je ne suis tout de même pas comme ça sans cesse!

Des lettres et... des lettres.

AZERTYUIOP, tout le monde sait ce dont il s'agit: la première ligne de nos claviers en France. Mais que représente donc la succession de lettres suivantes:
ESARINTULOMDPCFBVHGJQ...?

Tout simplement notre alphabet mis dans l'ordre de fréquence d'emploi des lettres en français. J'ai appris cela hier soir, en regardant à la télévision (Canal+ gracieusement offert par Free pour 10 jours) le film Le Scaphandre et le Papillon, palme d'or 2007 du Festival de Cannes.

Tout le monde connaît cette histoire dramatique, je n'y reviendrai pas. N'ayant pas lu le livre, j'ai voulu me rendre compte de ce que cela donnait sur écran. La première partie m'a beaucoup plu, lorsque l'on voit la réalité principalement à travers les yeux, l'oeil du patient, lorsqu'il se rend petit à petit compte qu'il est prisonnier de son corps, que l'enfermement est quasiment total. Découvrir que l'on se parle mais que les sons ne sortent pas, que l'on est à la merci des autres, revoir par hasard son visage martyrisé et avoir du mal à se reconnaître, retrouver les amis, la famille en les abordant sous un angle tout différent...Sombrer dans le désespoir.

Puis s'accrocher, se dire qu'il y a des îlots de vie en soi, que tout n'est pas paralysé, que de vifs, il reste un oeil, l'imagination et la mémoire. De quoi achever de se tuer, de quoi accepter de vivre aussi.

Et cette deuxième partie du film m'a moins touché, comme si, pour moi, l'essentiel était dans la découverte de ses limites, de l'enfermement subi, de l'impossibilité d'en sortir. Quand vient l'abandon, même s'il se traduit de façon très positive par l'écriture d'un livre, cela ne m'intéresse plus.

Pour moi, un beau film mais qui ne tient pas ses promesses. Ou alors, difficulté de revenir à un art que j'ai abandonné depuis pas mal de temps, par ennui (un film est toujours trop court pour raconter vraiment une histoire, le roman lui est infiniment supérieur) et par économie: je commençais à trouver très chères les places où je m'installais pour m'y endormir dans les dix minutes suivantes, et ce quel que ce soit le film.

Je suis sans doute injuste mais je trouve qu'entre un bon livre et un bon film, il n'y a pas photo!

dimanche 25 mai 2008

Rome

Je viens de terminer la première saison de la série Rome. Douze épisodes de 45 minutes environ. Je dois dire que, si je ne suis pas totalement emballé, je suis tout de même très séduit.

Pas emballé parce qu'il est dans mon habitude de réserver mes emballements pour la littérature (sauf exception), et parce que, parfois, on tirait un peu trop sur la corde du sentimentalisme légèrement épicé (les amours saphiques de Servilia et de la fille d'Atia) ou sur celle de la violence sanguinolente et gratuite (le combat de Titus Pullo dans l'arène).

Mais séduit, oui. Pour plusieurs raisons.

D'abord, l'adéquation entre le physique des acteurs et celui que, in petto, je prêtais aux personnages historiques. Ainsi Marc-Antoine est-il beau comme je me l'imaginais, c'est à dire viril et sûr de lui, bête à plaisir au lit des femmes. Ainsi Caton d'Utique s'incarne-t-il bien dans ce corps osseux et sec, gonflé seulement par la superbe de ses origines. Ainsi surtout César a-t-il bien ces traits un peu lourds du bas du visage, représentation confirmée par le buste récemment découvert dans le Rhône à Arles et datant du vivant du dictateur.

Ensuite par la reconstitution historique: les décors, en particulier sont non seulement beaux, mais fidèles à la réalité. Bien qu'exercé, mon oeil n'a pu décelé aucune erreur dans la disposition des bâtiments publics, sur le Forum Républicain en particulier. Même chose pour les costumes et jusqu'aux moindres détails des objets courants et pratiques de la vie quotidienne. Rome est d'ailleurs montrée avec le faste qu'on lui connaît de ses palais et de ses temples, mais aussi avec la misère et l'insalubrité de quartiers moins relevés, comme la Subure par exemple.

Enfin, les évènements marquants de cette époque ont peu été romancés et l'on s'y retrouve sans sursauter si l'on connaît un peu l'histoire romaine.

J'ai aussi beaucoup apprécié, dans le dernier épisode, la façon dont est filmé l'assassinat de César, avec un mouvement de rotation de la caméra en plongée, qui en fait ressortir toute la violence et l'atrocité. De plus, on nous a évité le cliché de la dernière parole adressée à Brutus, parole dont, je l'avoue, j'ai un peu soupé.

Un seul bémol: la mort de Caton d'Utique, qui se suicide après avoir appris l'assassinat en Egypte de Pompée, dont il avait rallié le camp. La relation de cette mort est beaucoup plus croustillante (presque du grand-guignol) à lire dans Suétone (Vie des douze Césars). Si quelqu'un est intéressé, qu'il me le fasse savoir, je lui indiquerai le passage exact.

Bavardages.

J'ai bien fait de profiter de la journée d'hier pour arpenter Miribel et Lyon. Aujourd'hui, pluie, pluie et pluie.

Depuis chez mon frère, où nous avons déjeuné, je voyais, en face, les collines de la Croix-Rousse et de Fourvière apparaître puis disparaître tour à tour dans les ondées et la brume. Novembre en mai. De beaux coins de ciel, parfois, aux amas de nuages impressionnants.

Un hélicoptère a survolé la ville pendant plusieurs heures. Sans doute en lien avec la victoire de Lyon au football et la réception des joueurs aujourd'hui à l'Hôtel de Ville. Comme disent déjà les panneaux électroniques de la ville: le doublé du siècle. Heureusement que le ridicule ne tue pas!

Journée calme, en compagnie aussi des beaux-parents de mon frère. Bon repas, comme d'habitude. Et tout le monde était en forme: pas de tension, pas d'énervement. Reste que je ne me sens toujours pas intégré vraiment à ce genre d'évènement. Surtout pour une fête comme la fête des mères, créée par Pétain pour redorer le blason de la femme au foyer. Il est étonnant d'ailleurs qu'aucune des féministes exacerbées des années quatre-vingts, qu'aucune de nos chiennes de garde actuelles n'ait jamais dit un mot sur cette manifestation évidente du "machisme" fondamentale. Après tout, un cadeau n'est-il pas toujours bon à prendre?

Pas de cadeau pour ma mère cette année. Je crois que c'est la première fois. mais que lui offrir à quatre-vingt quatre ans? Un bon repas, des fleurs et une journée détendue. C'est déjà bien.

Ce soir, je suis de retour plus tôt. J'aime me retrouver chez moi. J. m'a téléphoné ce matin, alors que je partais chez mon frère. Nous mangerons ensemble mardi à midi. Je souhaite le voir plus dynamique, plus en forme que la dernière fois.

En rentrant, je me suis mis à ce billet. Comme d'habitude, je ne sais pas, ou presque jamais, de quoi je vais parler, et puis les mots viennent, les riens comme le reste, et je ne trie pas, je laisse aller, parce que j'aime taper sur ce clavier. parce que je ne me pose plus de questions inutiles. J'ai envie, alors je le fais. Cela a l'air simple, dit comme ça, mais pour moi, c'est assez nouveau comme attitude.

Résultat: mes billets s'allongent, s'allongent et ne présentent parfois qu'un intérêt bien limité pour autrui. Ce n'est pas très grave. Un billet n'est pas une lettre que l'on reçoit et que l'on est obligé de lire attentivement pour y répondre: on peut parcourir en diagonale, ne lire que quelques passages, quelques phrases prises au hasard, arrêter la lecture, fuir ailleurs, en laissant si peu de trace de sa venue. Et puis, je ne veux pas jouer un personnage que je ne suis pas, et ma vie est aussi faite de tous ces petits non-événements. Comme la vie de beaucoup de gens, je suppose.

Lorsque j'étais jeune et que je me rendais en fin de semaine en boîte de nuit homo (oui, ça existait déjà!), je cachais systématiquement mes lunettes dans ma poche avant d'entrer. Un homo, à l'époque (et je doute que cela ait beaucoup changé) ne devait pas porter de lunettes pour espérer plaire. Résultat: dans la semi-obscurité et les nuages de fumée de cigarettes, je ne voyais absolument rien, ni qui me regardait, ni qui je regardais. J'ai ainsi laissé s'envoler des tas d'occasion de finir la soirée dans l'étreinte langoureuse de bras tendres et attentionnés ( là, normalement, les violons apparaissent pour une douce mélodie pleine de romantisme sucré). Sans doute aussi, ai-je évité bien des complications et de désagréables situations! Et quand l'occasion se concrétisait, je finissais bien entendu par remettre ces lunettes sur mon nez à un moment ou à un autre. Aujourd'hui, je crois qu'il faudrait me les arracher du visage. D'ailleurs, il y a belle lurette que je ne fréquente plus les boîtes de nuit.

Parti de la fête des mères, j'en arrive aux boîtes homo. Bavard, oui! Le seul lien qui puisse expliquer ce glissement, c'est la volonté de n'être plus que moi. Et ce n'est pas toujours facile. Comme pour la plupart des gens, je suppose.

samedi 24 mai 2008

Bon samedi.

Encore! Eh oui.
Ce matin, je me suis adonné à deux de mes vices préférés. Nous avons couru avec Gilles autour du lac de Miribel. Les emplois du temps de l'un ou de l'autre nous avaient empêchés de le faire depuis quelque temps. Matinée grise, accompagnée d'un léger crachin, si léger que finalement il en était agréable, à la manière d'un brumisateur. Nous sommes restés silencieux, plus que de coutume. La fatigue de la semaine sans doute et aussi "l'être bien ensemble" qui s'installe et qui n'a plus besoin de mots. Gilles parti, je me suis attardé encore un peu dans le Parc. Je ne vous dirais pas quel est mon deuxième vice préféré: il y a des dames qui me lisent! Je peux simplement dire que je découvre ce parc plus en détails, et qu'il ne manque pas d'attraits.

Vrai repas préparé par mes soins (tiens, j'ai repris un bon kilo!), arrosé d'un petit verre de vin (ça aussi, c'est de retour. Pourquoi ai-je passé tout ce temps à m'en priver, à vouloir être quelqu'un que je ne suis pas?). Puis départ pour la ville, Vieux Lyon et Fourvière, d'abord en vélo'v puis tout à pied.
Beaucoup de monde malgré le temps incertain. Lyon a vraiment décollé en ce qui concerne la fréquentation touristique. Il n'est plus rare d'entendre parler "étranger" (et pas seulement stéphanois) dans les rues et des cars déversent à flots des touristes bardés d'appareils photos ou pas. On entend de la musique un peu partout, et j'ai, encore aujourd'hui, été frappé par l'air de fête que la ville arbore et que je ne lui connaissais pas auparavant.

Encore beaucoup de manifestations diverses et variées un peu dans tous les coins. Mais je ne me suis pas arrêté. Rien ne m'a détourné de mon but, le Vieux Lyon où j'ai pris les clichés des nombreux ours et lions qui s'y trouvent. Puis j'ai gravi la pente de Fourvière, et c'est là que m'attendaient deux divines surprises, un peu comme ce matin, mais dans un tout autre registre.

Je savais que deux animaux se trouvaient dans l'hôtel Villa Florentine, Montée St Barthélémy. En pénétrant dans le hall, j'ai donc demandé à la réception l'autorisation de photographier. Et j'ai eu la joie de tomber sur un homme jeune, non pas beau mais charmant par sa gentillesse et sa bonne humeur, qui non seulement m'a accordé la permission requise (normal) mais m'a accompagné jusqu'à la deuxième bête plus difficile à trouver, me laissant au passage admirer et photographier ce splendide hôtel.

Il s'agit, d'après l'historique qu'il m'a remis pour répondre à mes questions, d'une maison de la Renaissance, quand Florence et Lyon s'unissaient en même temps que s'unissaient Henri IV et Marie de Médicis dans la Primatiale Saint-Jean (1600). En 1707, alors que l'édifice est tenu par les Religieuses Trinitaires, il devient la "Maison de la Providence", institution destinée à donner une éducation aux jeunes filles pauvres. On y ajoute un peu plus tard (de 1736 à 1741) une chapelle ornée de superbes fresques, et c'est cette ancienne chapelle qui est aujourd'hui l'atrium d'accueil de l'hôtel. Je ne connais pas les tarifs de la nuitée, je ne sais pas si le reste du bâtiment est du même bon goût, mais je peux dire que c'est certainement le plus bel hôtel que je connaisse. Et en plus avec des employés sympathiques!

Deuxième surprise: le jardin du Rosaire, qui permet d'accéder par un parcours en lacets de verdure à l'esplanade de la Basilique de Fourvière. Pour cette fois, je me suis éloigné du trajet habituel, et ai pris la direction, jamais remarquée auparavant, du jardin des roses. Là, personne! Tout le monde grimpe pour admirer la vue, alors on ne fait pas de détour. Et je me suis retrouvé au milieu de centaines de vieux rosiers, sous des arceaux surchargés, devant des églantiers moussus, des iris ployant sous leur propre poids. La touffeur répandait et magnifiait toutes les senteurs, et j'avais Lyon à mes pieds. Un moment de grand bonheur.

Suivi par un épisode très touchant: en redescendant par le même chemin, j'étais précédé par un jeune homme et une jeune fille. Elle avait à la main une branche de cerisier couverte de fruits mûrs, et une autre tout aussi fournie accrochée à la poche arrière de son jean. Au moment de la doubler, je lui ai dit en plaisantant que je lui volerais bien quelques cerises. Avec un immense sourire, elle m'a offert la branche qu'elle tenait à la main. Devant mon refus, c'est son ami qui a insisté pour que j'accepte le présent. Pouvais-je davantage résister? D'autant que les cerises étaient belles. Nous avons terminé ensemble la descente, à manger les fruits pleins de la chaleur du soleil, crachant comme des gamins les noyaux sur les trottoirs.

Sainte colline, qui m'a offert en plein Lyon le parfum des roses et des iris et le jus sucré des cerises des chanoines.

Arrêt chez Francis. Le livre de Stegner commandé la semaine dernière est arrivé: il s'agit en fait d'un recueil de nouvelles: Le Goût sucré des pommes sauvages.
Je n'ai pas pu m'empêcher de compléter mes achats par Ce peu de bruits de Philippe Jaccottet. Encore de bons moments en perspective.

Comme j'aime ces journées pleines où, si le corps a mal, c'est du plaisir de l'effort fourni et consenti, et où, enfin, le présent se conjugue au présent, et rien d'autre.

En charmante Campanie.

Après l'enfermement de La Femme des sables, j'ai voulu lire quelque chose qui me ferait plaisir, quelque chose où je me sente bien. J'ai choisi Montedidio de Erri de Luca. Le sortilège habituel n'a pas tout à fait opéré. Est-ce d'être venu après ce roman japonais si oppressant? Je ne crois pas. La brièveté des chapitres m'a paru un procédé factice, cette fois-ci, et ne s'imposant pas. J'ai l'impression que De Luca a voulu écrire un roman, sans doute en grande partie autobiographique, sans donner l'impression d'en écrire un.
Et c'est cet ouvrage qui a obtenu le prix Femina étranger en 2002.

A treize ans, un jeune napolitain quitte l'école et commence à gagner sa vie. Sa famille est pauvre. Là où il travaille, il y a un vieux juif bossu qui prétend que sa bosse n'est rien d'autre que deux ailes d'ange qui, un jour, pousseront dans son dos et lui permettront de rejoindre Jérusalem. Ce jeune homme s'entraîne au lancer de "boumeran", sans jamais lâcher le morceau de bois qui vibre sous ses doigts. Sa mère va rentrer à l'hôpital, gravement malade et son père ne la quittera plus jusqu'à sa mort. Avec une voisine qui l'initie à l'amour, le garçon va faire face à ce nouvel état des choses et apprendre à résister.

Bien sûr, on sent vibrer la grande métropole de Campanie et la poésie est toujours présente au détour des pages. Bien sûr, on approche le monde ouvrier qui me tient à coeur. Pourtant, cela m'a intéressé, mais pas émerveillé comme les précédents. J'ai l'impression d'avoir déjà lu le même type d'ouvrage plusieurs fois (en particulier d'un auteur irlandais, il me semble).Il reste qu'un ouvrage de De Luca que je trouve moins bon que les autres est tout de même un ouvrage de De Luca, donc à ne pas négliger.

Là où il habite, une chambre qui était un débarras, il n'y a pas de lumière électrique. le soir, il allume une bougie. Il la pose sur une chaise, il dit qu'il faut qu'elle soit basse car la lumière veut monter. Il dit aussi que la bougie éclaire l'obscurité, elle ne la chasse pas. Au feu de la mèche, le verre de vin s'allume, l'huile brille, le pain sent le feu et se met à sentir bon. Qu'est-ce que vous mangez d'autre? lui dis-je. Un oignon, dit-il, comme il est beau près de la bougie, on a plus envie de l'embrasser que de le couper. Puis il y met de l'origan, le sel scintille quand il en fait tomber une pincée sur l'assiette devant la lumière. Pendant qu'il me parle de ces choses connues, je m'aperçois que je ne les ai pas encore vues sous une bougie. Elles semblent meilleures. Elles sont nourrissantes, elles lui suffiront pour voler jusqu'à Jérusalem. Puis il dit que la pièce devient plus grande avec une seule petite flamme, les ombres bougent sur le mur et lui tiennent compagnie et il dit que l'hiver la bougie arrive même à réchauffer.(...) Papa et maman n'aiment pas les bougies, on s'en servait pendant la guerre.
( Trad. de Danièle Valin.)

On a l'impression d'être devant une toile de Caravage.

Et puis, ceci, à méditer:
Mon garçon, celui qui parle derrière, dans le dos d'un autre, se voit répondre par le cul.

vendredi 23 mai 2008

C'est loin, la Mongolie?

En rédigeant le billet précédent, j'écoutais un CD que Gilles m'a prêté le jour où, en courant, nous avons parlé musique. Nous sommes tous deux beaucoup attirés par la musique minimaliste, répétitive, que, pour ma part, je qualifie de mystique.
Certains morceaux d'Arvo Pärt, et surtout Gorecki (Symphony of Sorrowful Songs, n°3) peuvent donner une idée de ce que je veux dire.
Beaucoup de mes amis trouvent cette musique triste. Moi, je la trouve jubilatoire, parce qu'apaisée, parvenue à une sorte d'ataraxie, se suffisant à elle-même, sans clins d'oeil à d'autres oeuvres, d'autres styles ni d'autres mesures. Lorsque je veux me détendre, je la mets sur le lecteur et elle me calme.

Le CD de Gilles a été enregistré tout près de Lyon, à Sathonay. C'est suite à un concert à Oulan-Bator que l'Ensemble Médiéval Xeremia (ensemble dont fait partie un des amis de Gilles) a voulu importer en France cette expérience mêlant la musique médiévale française et la musique mongole traditionnelle. Et ça fonctionne: les deux musiques , comme le dit la pochette, "se côtoient et se croisent". Expérience réussie, comme l'était celle mêlant musique irlandaise et baroque à laquelle j'ai assisté il y a quelque temps.

La nouveauté ici, pour moi, c'est la musique mongole. Moyen-Age, Irlande, baroque, j'ai de quoi me repérer. Mais la Mongolie, c'est loin. A part le souvenir d'une émission sur France-Inter il y a très longtemps, un après-midi où tranquillement je descendais depuis Lyon la N86 pour rejoindre Uzès et mon ami Paul, une émission présentée,il me semble, par Gérard Klein, sur la Mongolie et qui m'avait passionnée, à part cette émission et le cliché traînant partout des courses à cheval dans les steppes, des yacks poilus et des yourtes ventrues, je ne connais rien de ce pays.

Musique répétitive, c'est vraie, mais plus rythmée que ce à quoi je m'attendais, voix et instruments acides, grinçants, qui irritent un peu le tympan au début, et puis auxquels on s'habitue parce qu'on n'écoute pas cette musique comme on en écouterait d'autres. Ce ne sont pas les oreilles qui l'entendent (Non, non, je vais bien, je vous assure!). Je veux dire que ces musiques sont comme des mantras inlassablement répétés (je ne sais pas, je n'ai pas cette expérience) qui n'ont pas d'intérêt pour leur contenu en lui-même mais pour l'effet qu'ils produisent, de détachement et d'ataraxie, je me répète.

Je suis en train d'en réécouter quelques morceaux. Je suis surpris par la voix, cette fois-ci, une voix non travaillée, naturelle, instrument elle même à part entière, qui fait vibrer dans les graves toute la tuyauterie humaine interne. Est-ce encore une voix où le bruit du vent dans les conduits des grandes cités?

Oui, vraiment, j'aime. J'allais oublier de dire qu'il s'agit de l'ensemble Les Voix de la Steppe, Bayarbaatar Davaasuren.

Revenons à nos moutons.

Il est arrivé, le temps de la prochaine livraison de nos charmants compagnons quadrupèdes. En voici encore cinq aujourd'hui, photographiés tous dans la presqu'île nord.

(OURS 18)
Celui-ci tourne le dos au théâtre des Célestins. Je l'ai découvert le soir de Bérénice.

(OURS 19)
On dirait Argus, n'est-ce pas, avec tous ses yeux? De quoi surveiller tous les recoins obscurs de l'Hôtel-Dieu.

Et ma connaissance étendue de l'anglais me permet de dire que ce sont des beareyes, des yeux d'ours. J'en connais qui vont être contents!

(LION 14)
Enfin un lion, mais visiblement pas prêt à rentrer dans sa savane arborée. Je l'ai croisé place de la République, comme son compagnon, l'ours qui suit.


(OURS 20)
Brrr... Vivement le printemps!

(LION 15)
Retrouver celui-ci m'a demandé quelques efforts. Il a fallu déjà que je découvre l'entrée piétonnière du parking souterrain de la République (pas évident un jour de grande foule), puis, bien sûr, que je traverse le parking, l'animal s'étant réfugié à l'autre bout!

Un détail du lion souterrain, mais c'est à peu près la tête que je devais faire au bout de ma longue enquête pour le localiser.

jeudi 22 mai 2008

Moi, moi et moi.



Deux ou trois choses sur moi, en vrac, au cas où vous ayez pris au sérieux ma requête de fin de billet précédent (voir aussi mon profil: tout y est vrai):
- lorsqu'il y a deux chemins, l'un tout droit et l'autre qui tourne, je choisis celui qui tourne.
- ce ne sont pas les élèves excellents qui m'intéressent.
- il faut toujours que j'aille voir ce qu'il y a derrière.
- j'aime les mots et les jeux avec.
- je suis capable de faire du charme à une chèvre, comme ça, gratuitement.
- j'aime qu'on m'aime (et aussi qu'on me le dise)
- j'ai eu la chance d'être aimé par un même être pendant 33 ans, je ne me plains pas.
- j'aime la solitude mais pas trop longtemps.
- j'aime la compagnie mais pas trop longtemps.
- je suis capable d'ironie cinglante.
- je ne fume plus et je ne bois pas, sinon ce serait à l'excès.
- je suis difficilement capable de modération.
- je n'ai pas conscience de vieillir.
- l'âge n'a jamais été un mode de classement pour moi.
- quand j'étais jeune, j'aimais les hommes plus vieux. Aujourd'hui, j'aime celui qui me plaît.
- la chose la plus terrible qui puisse m'arriver: ne plus avoir envie de lire.
- si je n'avais pas été prof, j'aurais aimé être jardinier ou menuisier.
- j'ai horreur des snobs et des gens qui étalent à tout bout de champ leur culture.
- je considère que la femme est plus intelligente que l'homme.
- mais ce sont les hommes que j'aime.
- j'étais très con à vingt ans, je commence seulement à l'être un peu moins( enfin, je pense).
- je suis maniaque.
- je ne supporte pas qu'une porte soit ouverte si elle n'a pas à l'être.
- je n'aime pas les gens qui laissent traîner leur sous-vêtements sales ou leurs poils dans les salles de bains.
- je trouve l'eau infiniment meilleure quand je la bois à la bouteille et pas dans un verre.
- pendant très longtemps, je n'ai pas aimé mes jambes. Aujourd'hui encore, il faut tout.
- pendant très longtemps, j'ai aimé mes cheveux bruns bouclés. Aujourd'hui, ils sont blancs et courts.
- Je n'ai été fan que d'une chanteuse: Barbara.
- je chante très souvent la chanson du Magicien d'Oz, Over the Rainbow, dans ma voiture le matin, en partant au travail.
- sur la question de la foi, je ne sais pas où j'en suis.
- je crois en l'Homme (et là, j'inclus la femme).
- je me sens plus proche de certains hétéros que de certains homos.
- je suis homo, pas gay.
- d'ailleurs les mots hétérosexualité et homosexualité n'ont pour moi aucun sens.
- j'aime le chocolat noir.
- je n'aime pas le wisky.
- tout ce qui brille ne m'attire pas, sauf le soleil.
- je me sens moins nu lorsque je suis nu que lorsque je m'habille.
- je me fous complètement des voitures, de leurs marques, de leurs puissances.
- je chante souvent.
- je recommence à être très distrait, comme dans mon enfance.
- j'adore qu'on me fasse à manger.
- je suis, hélas, quelqu'un d'habitude.
- il me faut fournir un effort pour apprécier l'imprévu. Après, je suis heureux.
- je déteste perdre un ami, quelle qu'en soit la raison.
- je peux être très bavard, c'est pourquoi je vais m'arrêter là pour ce soir.

( Je viens de relire tout ça et je me dis: mais qu'est-ce qui te prend? Tant pis, trop tard.)

Les amis, les amours.


Beaucoup de pensées me tournent en tête ce soir, beaucoup de choses que je ne dirai pas. Il y a des silences dans ce blog, de longs silences importants que je masque sous mes bavardages accoutumés.
Ce n'est pas de la pudeur, c'est plus que cela. Je ne sais pas comment les écrire. Je ne veux pas fixer, pétrifier ce qui est vivant, même si c'est aussi lourd parfois que de la pierre.

Je viens de téléphoner à Kikou. Hier, elle a eu sa deuxième séance de chimio. J'ai voulu lui transmettre mon enthousiasme suite à la soirée avec De la Garanderie. Elle s'est enthousiasmée, je la connais bien. J'ai pensé aussi qu'elle ne pourra pas jouer Célimène et le Cardinal pour laquelle elle s'était préparée depuis de longs mois. Je lui ai même donné la réplique, ici ou à sa campagne certains soirs, découvrant ainsi cette pièce. Après la fête des mères, je descendrai passer une fin de semaine avec elle, on parlera, on rira, on jouera aux dames chinoises. Comme avant, comme toujours. On récitera peut-être des passages de Célimène ou de Bérénice, dont elle trouve que je ne lui ai pas assez parlé. Des projets, elle en a. Moi, je découvre combien profondément je l'aime.

Ce soir, les hirondelles piaillent dans la cour. Il a fait lourd, des embouteillages, des manifestations, J. triste et fatigué à midi. Il fallait que je coure. Encore trois tours aujourd'hui. Depuis samedi dernier, j'ai ainsi parcouru près de quarante kilomètres. Mon marathon à moi. J'en ai besoin. Samedi, nous retournerons à Miribel avec Gilles. Ces escapades me manquent. J'aime parler avec lui. Il est fou, il me convient.

Amédé m'a parlé des cendres de sa chienne, P. de son amant marié qui va le quitter, la vie comme elle va. Un vélo qui ne fonctionne pas, on le remet à la borne et on en prend un autre. Un ami, je ne peux pas le traiter comme un vélo. Mais qu'ont-ils donc tous à me prendre pour confesseur, en me disant que ,moi, je suis fort? Enfin, bonne nouvelle (je touche du bois), je n'ai plus mal au dos.


Maintenant, ce qu'il me faudrait, c'est une relation simple, remplie de rires et surtout de tendresse, une liberté à deux, où l'on est content de se voir, où l'on ne s'écrase pas, où il y a plus de réponses que de questions, où tout est léger. Voilà, le message est lancé. Si vous connaissez quelqu'un...

mercredi 21 mai 2008

Antoine de la Garanderie.


J'arrive à l'instant d'une conférence donnée par Antoine de la Garanderie, l'auteur de la théorie de la Gestion Mentale, à la salle Ste Hélène, dans le 2° arrondissement.

Je connais ces théories depuis déjà très longtemps, ayant lu, dans mon jeune âge d'enseignant deux de ses ouvrages: Les Profils pédagogiques, et Pédagogie des moyens d'apprendre. Il est vrai que je me suis tout de suite senti bien chez ce dyslexique qui a dû bataillé pour réussir scolairement, moi-même ayant sans doute et sans le savoir souffert de dyslexie. Ces idées me plaisaient et sa clarté de pensée m'enchantait.

Ce soir, pour la première fois, j'ai vu l'homme. Et l'enthousiasme s'est réveillé. Antoine de la Garanderie a aujourd'hui quatre-vingt huit ans. C'est un grand vieillard sec, au cheveu blanc assez fourni, auquel j'aimerais ressemblé dans quelques années. Quel esprit brillant, et quelle clarté de l'intelligence! Tout ceci dans la plus grande modestie. Un grand comédien, de plus. Plusieurs fois, il a provoqué de bons rires dans la salle, pourtant sérieuse à priori.

Et faire rire en nous exposant la Pédagogie de l'Intériorité, ce n'était pas gagné d'avance. Comment conduire l'apprentissage en l'axant sur le développement d'une vie intérieure? Après avoir évoqué Alfred Binet, dans la continuité duquel il se place, développé l'exemple d'Helen Keller et de Ann Sullivan (magnifique démonstration du jet d'eau dans la paume de la main, pendant que de l'autre main, dans l'autre paume, on trace le mot WATER! Premières communications, premières adhésions!), il a précisé son idée.

Je vous livre quelques phrases, notées ce soir:
- Chaque élève possède les chances de sa réussite scolaire.
- Helen a compris qu'elle pouvait accéder à son sens d'humanité dans et par l'autre.
- Dans toute situation éducative, il faudrait toujours avoir le souci de provoquer la communication chaleureuse pour que l'élève accède à une intériorité positive. Reconnaître l'autre comme un être humain (écho avec ce que j'ai écrit il y a peu).
- Le scolaire fait-il accéder les élèves à des actes leur permettant de vivre le sens de ce qu'on leur demande de faire?

J'étais tout guilleret en pédalant sur mon vélo'v pour rentrer chez moi. Qu'un vieillard vous redonne une leçon de jeunesse et d'enthousiasme, ça, c'est formidable.
Merci, Monsieur de la Garanderie.