mercredi 30 janvier 2013

Des fleurs (9) : la jonquille

"J'ai connu Émilie aux premières jonquilles...". Pendant que la France frémissait, en 68, Hugues Aufray chantait cet air-là. Dans le jardin de ma mère, cette année-là, je me souviens des roses. De jonquilles, point!

Je ne sais pas si je les aime, en tant que fleurs. Peut-être plus parce qu'elles marquent une saison, la fin de l'hiver et le début du printemps, parce qu'elles sont une sorte de repère,  comme le lilas, la pivoine ou le chrysanthème. Leur parfum n'est pas celui qui je préfère. Il ne me dérange pas, c'est tout, comme me dérange celui de leur cousin, le narcisse.

Pourtant, j'aime aller en cueillir, des sauvages, dans les sous-bois de l'Ain, avec Jean-Claude et en rapporter de gros bouquets qui ne tiennent guère. La mythologie a honoré Narcisse, Le Caravage en a fait un de ses plus beaux tableaux. On a oublié la jonquille. Mythographes, à vos plumes!

mardi 29 janvier 2013

Et puis l'autre

Et puis l'autre, le dernier, celui que j'avais oublié: le cèdre. Il nous avait été offert au Liban, à Beyrouth, lors d'une tournée de la chorale. Il avait ensuite fallu attendre une occasion solennelle pour le planter dans la grande pelouse en pente. Elle nous fut donnée par la semaine européenne que nous organisions tous les deux ans au collège.

Arrivaient dans nos murs deux élèves de chaque pays invité ainsi qu'un professeur à qui étaient proposées de nombreuses activités pour leur faire découvrir Lyon et la France. Pour ma part, avec quelques collègues, j'organisais une semaine des régions françaises avec expositions, présentations orales et dégustations de quelques spécialités. Les élèves confectionnaient d'immenses panneaux. Ça demandait un boulot fou, mais qu'est-ce que c'était intéressant et gratifiant! C'était l'époque où il se passait toujours quelque chose au collège!

Lors de cette semaine européenne, mon amie Kicou avait confectionné des galettes de terre cuite dans lesquelles un membre de chaque délégation imprimait ses mains. Elles furent ensuite installées sur le mur de l'un des bâtiments, disposées de façon à dessiner une colombe. La main grecque se cassa quelques jours après l'opération. Comme les européens étaient rentrés chez eux, ce sont mes mains qui sont encore aujourd'hui accrochées au milieu des autres.

L'arbre mit très longtemps à pousser. Lorsque l'herbe était haute, il disparaissait totalement et je craignis plusieurs fois qu'il ne soit tranché lors de la fauche. Je suis allé le voir tout à l'heure. A ma grande surprise, il mesure maintenant au moins quatre mètres de haut et se porte comme un charme (si j'ose dire!).

Quant au voyage au Liban en question, il me laissa une impression très mitigée: admiration devant la beauté du pays et des sites, mais beaucoup plus de réserve face à ses habitants, richissimes maronites que la guerre qui venait à peine de se terminer n'avait pas empêchés de faire fructifier leur biens considérables. Mais ceci est une autre histoire...

lundi 28 janvier 2013

Des amis muets

Seul, ce soir, à fumer ma cigarette dans le parc, je me demandais ce qui me manquerait le plus lorsque je quitterais le collège. La réponse était devant mon nez: ce sont les arbres. J'en connais beaucoup, les plus importants, ceux qui ont une histoire avec moi, ceux qui sont encore là et ceux qui ont disparu depuis mon arrivée.

D'abord l'énorme tilleul de la cour dite de la Croix (bien que, personnellement, je n'y aie jamais vu quoi que ce soit qui y ressemble!), un très vieil arbre sans doute, dont le tronc était impressionnant. Il y a quelques années, il a fallu le couper car il était devenu dangereux. J'ai regretté ce solitaire dont le feuillage d'automne tranchait si bellement avec la vigne vierge accrochée aux murs du couvent qui, elle aussi, a disparu.

Le ginkgo biloba également, derrière le bâtiment des sœurs, tout aussi vénérable de par son âge, dont je prenais soin de ne pas fouler du pied les fruits à l'odeur nauséabonde. Je me demande pourtant si ce n'est pas celui-ci qui va le plus me manquer parce qu'on ne s'attendait pas à le trouver là. Qui l'a planté ? Je ne le saurai jamais.

Les sapins aussi, deux ou trois, parce qu'ils me rappellent ma campagne natale et les forêts du Pilat et qu'ils fournissent, l'été, une ombre appréciable où garer sa voiture (pas comme ce deuxième tilleul qui, pendant un de mes voyages d'un mois en Russie avec la chorale, recouvrit mon pare-brise et ma carrosserie d'une couche si épaisse de "résine" que j'eus toutes les peines du monde à m'en défaire.

Le houx, qui a bien grandi depuis mon arrivée, et auquel, chaque hiver, je prélevais quelques branches pour décorer les tables de Noël.

Le lilas qui me permit pendant de nombreux printemps d'avoir de magnifiques bouquets odorants dans mon appartement, tout ceci, bien sûr, avec l'autorisation des religieuses.

L'arbre dont j'ignore le nom, planté pour commémorer le passage chez nous d'un directeur adjoint mort trop vite d'une leucémie foudroyante. Il avait l'habitude de m'appeler "peigne-à-boeufs", ce qui dénotait chez cet être bourru une grande tendresse rentrée. La dernière fois que je le vis, il m'enlaça en me disant que j'étais son fils adoptif. Bien peu de mes collègues d'aujourd'hui, trop jeunes, l'ont connu.

Le seringa, ou jasmin des poètes, qui embaumait.

Les marronniers de la cour  du même nom qui, en saison, fournissent tout ce qu'il faut pour les jeux des élèves.

Et puis les vieux cerisiers, bien alignés le long d'une allée, aux troncs tordus et rugueux, dont les sœurs ramassaient les quelques fruits restant après le passage des élèves (et des enseignants!). Près de l'un d'eux, il y a la statue d'une sainte montrant le chemin à une jeune élève. En face, autrefois, existait un banc de pierre un peu branlant où, après le déjeuner, nous allions nous asseoir pour nous détendre et profiter du calme et du paysage.

Oui, sans conteste, ce sont bien ces amis muets que je regretterai le plus

dimanche 27 janvier 2013

Méli-mélo

La Ligue des dames pour le transfert de la papauté aux Amériques

Merci, Jérôme, de m'avoir conseillé La Ligue des dames pour le transfert de la papauté aux Amériques. J'ai éprouvé un immense plaisir en lisant ces trois nouvelles, les deux premières, les plus courtes, en particulier. J'ai déjà dit que toutes avaient, en partie, pour cadre la ville de Venise et ses environs immédiats comme la Riviera del Brenta, ce petit coin de paradis où se côtoient tant de villas palladiennes.

Le plaisir vient autant des sujets choisis, que je vous laisse découvrir, que de l'élégance et de la légèreté du style. Je ne connaissais pas cet auteur italien, Aldo Alberti, et ne sais pas s'il a publié d'autres livres que ce recueil paru dans les années 80. Mais je vous assure que c'est un livre à découvrir.
(Aldo Alberti, La Ligue des dames pour le transfert de la papauté aux Amériques. Ed. Viviane Hamy. Trad. de Jocelyne Sephord et René Marx.)

samedi 26 janvier 2013

Vingt ans

" J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie. "  Tout le monde connaît l'incipit de l'ouvrage de  Paul Nizan, Aden Arabie, qui le rendit célèbre. Pour préciser ma pensée suite aux commentaires de Karagar et de La Plume sur le billet précédent, je dirais que je partage entièrement cette assertion.

Ma phrase ("Mais qui, a vingt ans, n'a pas de succès?") ne signifie en rien que j'étais heureux et épanoui à cet âge-là. Je crus l'être un moment. Qui n'est pas heureux de voir des regards se détourner pour l'observer, surtout lorsque l'on est aussi peu sûr de soi que je l'étais à l'époque ? Qui ne croirait pas, dans la naïveté qui n'a pas disparu après l'adolescence, à toutes ces paroles flatteuses et énamourées ? Étant, dans mes premiers mois à Lyon, totalement seul, perturbé par la mort de ma petite sœur, j'étais une proie d'autant plus facile pour les bonimenteurs plus intéressés par le galbe rebondi de ma chute de reins, ou d'autres réalités plus intimes mais uniquement physiques, que par le besoin de reconnaissance et de tendresse qui me taraudait.

Le bonheur que je connus à l'époque n'était qu'un semblant de bonheur, un étourdissement journalier que me procuraient des conquêtes faciles mais sans lendemain pour la plupart. Et lorsque je me rendis compte de la vacuité de ces rencontres, lorsque je compris que j'étais, pour ces hommes, totalement interchangeable, un objet passager de plaisir, une source de gloriole d'avoir mis dans son lit quelqu'un d'aussi jeune, un corps et rien d'autre, j'en conçus une immense tristesse. Je me sentis perverti et sale, alors que les gens de mon âge qui m'entouraient me semblaient, eux, encore pleins d'espérance et de rêves.

C'est à ce moment-là que j'eus l'idée, pour la seule fois de ma vie, de me suicider. La rencontre avec Pierre vint à point nommé pour m'empêcher de passer à l'acte. Yvon, lui, n'eut pas cette chance. Il me fallut des années pour remonter la pente, pour retrouver une certaine estime de moi et pour considérer la vie autrement que comme un marché de dupes.

Que m'en reste-t-il aujourd'hui ? Une profonde allergie pour le factice, pour la fête à tout prix, pour les ghettos et pour tout ce qui n'est pas vrai. Ce n'est pas toujours plus facile à vivre mais, au moins, je suis le chemin que je me suis tracé, le seul qui me convienne.

vendredi 25 janvier 2013

Oderint dum metuant!

Lorsque je suis entré à l'université, je n'en menais pas large. C'était la première fois que je quittais vraiment ma famille (même si j'en avais fait le choix et que cela m'ouvre, croyais-je, bien des horizons),  je devais loger dans une petite chambre en cité universitaire alors que j'étais habitué à de grands espaces (même si pas toujours confortables) et surtout je venais dans la grande ville "ennemie". Comment allais-je me dépêtrer de toutes ces nouveautés?

Mes compagnons de fac (mes compagnes, devrais-je dire, car, en Lettres Classiques, on comptait un garçon pour une dizaine de filles, demoiselles, j'en fis vite la constatation, venues là en attendant le mariage le plus avantageux possible et fréquentant davantage le milieu vétérinaire ou médical) étaient, pour la plupart, issus du bon milieu bourgeois lyonnais qui ne brille pas, au début, par la qualité de son accueil. Je fréquentai donc, les premiers mois, des apatrides comme moi, venus des quatre coins de Rhône-Alpes et même d'un peu plus loin. Il me fallut plusieurs années pour m'introduire enfin dans le saint des saints.

La solution pour laquelle j'optai fut celle du masque. J'en avais déjà expérimenté les avantages au lycée, où j'étais un des rares fils d'ouvriers. Le masque de l'extrême froideur et du plus total détachement. Ce masque, accompagné de résultats scolaires excellents, firent que l'on me craignit mais que l'on me respecta, à l'instar de cet empereur romain qui avait fait de cette phrase son idéal de règne. J'étais seul mais j'avais choisi cette solitude et je n'aurais jamais accepté de m'en plaindre.

Je connus rapidement une grande déception: les professeurs qui m'enseignaient le français n'avaient pas la qualité de ceux du lycée que je venais de quitter. Beaucoup n'approfondissaient guère leur enseignement et ceux, rares, qui le travaillaient, ne nous proposaient l'étude que d'auteurs à la mode et qui, moi, ne m'intéressaient pas. Heureusement, en latin et en grec, j'eus affaire à des puits de science qui, loin de se prendre au sérieux, nous faisaient partager le plaisir de la connaissance.

Lorsque je quittai la cité universitaire pour intégrer une communauté de clercs (ou d'anciens clercs),  je découvris un univers autre que celui, exclusif, des livres, un monde s'ouvrit à moi (en plus de celui que m'offrait la tendreté de mes vingt ans. Mais qui, à vingt ans, n'a pas de succès?) et le masque disparut pour quelque temps.

Et puis vint le moment de chercher du travail. J'en trouvai dans ce centre scolaire où j'enseigne encore aujourd'hui. A l'époque, l'établissement accueillait en majorité des enfants de cette grande bourgeoisie lyonnaise que j'avais appris à connaître au moment de mes Humanités. Le masque abandonné n'était pas encore très loin, je le repris immédiatement, ce qui me valut très vite une réputation de "petit con prétentieux" (c'est une de mes collègues, devenue plus tard une amie, qui me le dit, quelques années après). Mais, là encore, je fus sauvé par le sérieux que je mettais dans mon métier.

Aujourd'hui que je vais quitter l'enseignement, je regarde toutes ces étapes avec un certain sourire et, malgré tout, une certaine tendresse. Il m'avait bien fallu passer par toutes ces étapes pour devenir, enfin, adulte. Beaucoup ont su aller au-delà de l'apparence et m'ont ainsi aidé à mettre définitivement le masque encombrant au rencart. Mais que j'ai dû souvent leur paraître ridicule! Ils m'ont en tout cas, appris à sourire et à ne plus avoir peur.

jeudi 24 janvier 2013

Dans les limbes

Cet après-midi, j'avais écrit un long billet et puis, au moment de l'enregistrer, coup de sonnette à la porte! Fausse manœuvre ? Déficience de mon serveur ? Tout a disparu! Irrécupérable, perdu, dans les limbes, là où, autrefois, l'on envoyait les enfants morts-nés. Alors ce soir, basta! Je boude!

mercredi 23 janvier 2013

On en apprend tous les jours

- Comment comptez-vous mettre en pratique dans les années prochaines ce que vous avez appris aujourd'hui?

Cette phrase du compte rendu à rédiger après la journée pédagogique d'aujourd'hui m'a beaucoup fait rire. La réponse pour moi se résumait à un seul mot: rien! D'abord parce que je n'aurai pas de prochaines années dans l'enseignement, ensuite parce que l'exposé, au demeurant très sérieux et intéressant, était trop vaste et généraliste pour pouvoir approfondir quoi que ce soit, enfin parce que, bien que n'étant pas un spécialiste des neurosciences, j'ai, au fil des années, acquis une certaine sensibilité aux problèmes des élèves et un petit savoir-faire pour tenter de résoudre les quelques-uns qui sont à ma portée. Dans le cas contraire, je n'ai aucune gêne à les transférer vers des gens spécialisés du domaine médical.

J'ai en revanche appris que deux collègues du lycée allaient, elles aussi, cesser leurs activités à la fin de cette année scolaire, et, comme elles sont toutes deux des femmes que j'apprécie, je suis heureux à l'idée de monter en juin sur l'estrade aux discours en même temps qu'elles. Vous voyez, je n'ai donc pas totalement perdu ma journée.

mardi 22 janvier 2013

L'Allemagne et moi

La célébration aujourd'hui à Berlin du cinquantième anniversaire du traité de l'Élysée entre France et Allemagne a fait ressurgir en moi une foule de souvenirs concernant nos voisins d'outre-Rhin.

Je n'ai pas connu la deuxième guerre mondiale puisque je suis né plus de sept ans après la capitulation du III° Reich. Pourtant, mon enfance a été sans cesse accompagnée par ce que j'entendais en famille sur ce qu'ils avaient vécu pendant ces années de conflit. Mes parents n'étaient pas tendres avec ceux qu'ils appelaient les fridolins, les boches ou les frisés, et racontaient souvent les mois de privations et d'humiliation, en y mêlant parfois des anecdotes plus drolatiques, comme celle du saucisson de contrebande qui dépassait du corsage d'une femme où il était caché.

Pourtant, ce ne sont pas ces moments comiques qui m'ont marqué à cette époque mais plutôt l'horreur que semblaient cacher toutes ces évocations. Ainsi pendant des années, mes cauchemars furent habités par des silhouettes de méchants avec casques à pointe, bien que je n'en aie réellement jamais vu un seul, et parlant, aboyant plutôt, un langage guttural. Le premier mercredi de chaque mois, lorsque les usines procédaient à la vérification des sirènes, je tremblais à chaque fois de voir apparaître dans le ciel les avions ennemis porteurs de bombes. J'avais, pour les Allemands, sans en connaître aucun, une haine farouche parce que la simple mention de leur nom me terrorisait.

Quelques années plus tard, sans doute autour de mes dix ans, je découvris par hasard, en fouillant dans les affaires de mon père mort (le géniteur), pieusement conservées, un livre d'allemand destiné aux débutants et la beauté et l'intelligence de cette langue me fascinèrent immédiatement. Était-ce aussi parce que ce livre avait appartenu à celui qui m'avait mis au monde et que je ne connaîtrais jamais ? Sans doute. En tout cas, c'est de ce jour que date ma volonté, qui n'a pas fléchi depuis, d'apprendre l'allemand. Je compte d'ailleurs bien y consacrer une partie de ma retraite.

Alors que j'étais étudiant à Lyon, je fis la connaissance de deux amis allemands, rencontrés un soir de drague. L'un habitait Stuttgart et l'autre Karlsruhe. L'un était organiste et l'autre ténor. Ils m'invitèrent chez eux et j'entrepris le voyage peu de temps après. Quand j'annonçai la nouvelle à mes parents, mon père se tut, comme à l'accoutumée, parce que sa volonté de me laisser libre l'emportait sur ses réticences, et ma mère, en tordant le nez, me demanda ce que j'allais faire "là-bas".

Lorsque, en traversant en train le pont de Kehl, je vis apparaître la pancarte Deutschland, je ne pus empêcher mon corps d'avoir un frisson nerveux: je pénétrais "chez l'ennemi"! Frisson bien vite oublié en visitant les deux villes de mes amis et en découvrant leur sens de l'hospitalité et leur gentillesse.

Mon deuxième voyage, je le fis avec Émile, mon ami curé dont la ville française était jumelée avec une ville allemande. Nous partîmes en 2CV, en plein hiver, et je fus fasciné: il avait beaucoup neigé et le soleil brillait sur les sapins recouverts d'une lourde charge. Une vraie carte postale agrémentée du plaisir de savoir que je remontais la vallée du Neckar, que j'allais pouvoir visiter Heidelberg et mettre mes pas dans ceux des romantiques allemands que j'avais lus entre temps.

Par la suite, j'y fis de nombreux voyages, en Forêt Noire, dans la Hesse et le Baden-Württemberg, à Bamberg, en Bavière, à Nuremberg, à Bayreuth... Chaque fois, mon amour pour ce pays grandissait, aussi bien que celui pour sa musique, pour sa littérature, pour cette civilisation que je découvrais peu à peu et qui n'entrait pas en conflit avec mon amour plus "naturel" pour l'Italie.

Je ne me souviens pas avec précision de la construction du mur de Berlin en 61: j'étais encore trop jeune. Mais j'en comprenais la réalité quelques années plus tard lorsque je me rendis à Vienne et que je vis que Budapest était si près de la capitale autrichienne. Si près et inaccessible à l'époque. En revanche, le jour de la chute de ce mur, en 89, j'avais déjà 37 ans, et je pleurais de joie. Je crois bien que, si l'on me demandait ce qui, dans ma vie, m'a le plus marqué, je citerais sans hésitation ce jour-là.

Je reçois depuis longtemps le calendrier des nombreuses manifestations qu'organise à Lyon Le Goethe Institut, et c'est là que je m'inscrirai bientôt pour, enfin, prendre mes premiers cours. Moi qui me croyais nul en langues vivantes parce que, dans mes études, ayant à étudier le latin et le grec, je n'avais appris que l'anglais, langue que je ne peux me résoudre à aimer vraiment, mais qui avais été rassuré par la facilité avec laquelle, adulte, j'avais digéré l'italien en cours du soir, je pense qu'avec ce projet, je me réserve de grands plaisirs. Et lorsque je serai suffisamment au point, je sais déjà ce que je ferai. Il me reste encore là-bas deux vœux à accomplir: connaître Berlin et me lancer sur les pas de Bach.

lundi 21 janvier 2013

Et un peu de musique, ça vous dirait ? (124)

Parce que c'est le jour ou jamais. Et, en français, sur des images que je n'avais jamais vues.

dimanche 20 janvier 2013

Soupirs

-"Bon, d'accord, les sœurs Tatin, c'étaient Caroline et Stéphanie, comme à Monaco. Mais leur nom, c'était quoi?"

-" Mais c'est qu'il est exigent, celui-là! Il veut tout: le beurre, l'argent du beurre et le sourire de l'infirmière!"

Bien dans mes claquettes

Retour d'une journée entre amis. Beaucoup de bruits, beaucoup de verres, beaucoup d'assiettes. Une bonne journée. En rentrant, j'ai mis mes claquettes Birkenstock achetées à Rome, celles dont la semelle épouse la forme de la voûte plantaire, posé mes vêtements sur le valet de chambre, enfilé mon pyjama et ma robe de chambre et préparé le lit en prévision du coucher. Puis j'ai allumé cet ordinateur pour avoir de nouvelles des uns et des autres, et je me sens bien. Envie de m'endormir sereinement avec mon livre pour clore cette bonne fin de semaine. Demain, une collègue me prendra au coin de la rue à 7h25 et tout se remettra en route.

Rien d'extraordinaire, rien d'intéressant mais j'ai appris à savourer ces moments rares faits de petits riens et qui laissent l'esprit dans le bien-être, avec les autres et avec soi-même.

samedi 19 janvier 2013

Clotilde

Ces jours-ci, pour les vœux, j'ai téléphoné à la mère d'Yvon, cette femme qui a vu deux de ses fils se suicider, l'un sans doute par imitation de l'autre, et qui m'avait bouleversé en pensant davantage à moi qu'à elle à la mort de mon ami d'enfance.

J'avais perdu sa trace, le numéro de l'appartement où elle a toujours vécu ne répondant plus.  Je l'ai retrouvée dans une maison de retraite, dans la banlieue de Saint-Etienne, et c'est presque un miracle. Elle a maintenant 94 ans et a tout de suite su qui j'étais. Dur pour elle d'avoir quitté le cadre où elle a passé toute sa vie, des années difficiles quand son mari alcoolique était encore en vie, puis des années plus douces, à faire tranquillement des mots croisés en attendant que le temps passe.

J'ai moi aussi immédiatement reconnu sa voix, un peu tremblante (mais elle l'a toujours été) et son rire qui fuse et qu'elle réprime un peu comme si elle s'en excusait. Elle m'a dit avoir toute sa tête, même si le reste ne suit plus, mais j'ai pu constater que les oreilles s'étaient sérieusement ensablées depuis deux ou trois ans que je ne l'aie vue.

Je lui ai promis d'aller lui rendre visite. Le ferai-je ? Il ne faudra pas trop traîner.

vendredi 18 janvier 2013

Le chien du garde

Une expression qui me revient de mon père. Encore un de ces petits éléments de la mémoire, bien enfouis au fond du labyrinthe, qui reviennent à la surface, on ne sait pas pourquoi, au coin d'une rue, alors que la situation n'a rien à voir avec.

Lorsque mon père se méfiait de quelqu'un d'un peu trop beau parleur, d'un peu trop enjôleur, qu'il avait l'impression qu'on essayait de l'enfumer, il avait coutume de dire: "Celui-ci, il est plus fin que le chien du garde!" De quel garde s'agissait-il ? Vues les origines rurales de ma famille, particulièrement du côté paternel, il est probable qu'il faisait allusion à un garde-forestier ou à un garde-chasse, pas à un en particulier mais à la fonction. Le chien, lui, avait sans doute été dressé à débusquer les poseurs de collets et autres braconniers.

Je me suis surpris à sourire tout seul, tout à l'heure, quand cette phrase m'est revenue. Parce qu'elle sent bon mes racines.

jeudi 17 janvier 2013

Momentini

- Me voici sans voiture pour une semaine! Bien choisi le moment pour la faire réparer avec le froid qu'il fait en ce moment à Lyon! Et je ne vous raconte pas, avant d'en arriver là, les échanges labyrinthiques avec l'assurance, le garage et l'expert (qui a refusé ma déclaration!)

- Hier rendez-vous pour ma retraite. Très bien reçu par un homme jeune et souriant avec qui j'ai même échangé des propos sur la littérature. Ça ne m'empêche pas de me retrouver avec quatre dossiers différents à remplir. Mais les choses se précisent! Si je veux, je finis l'année scolaire et basta: c'est confirmé.

- Commencé hier à la Cram un petit livre facilement transportable (le courrier de Madame de Grignan est trop volumineux et n'entre pas dans ma poche): La Ligue des dames pour le transfert de la papauté aux Amériques, de Aldo Alberti. Un petit bijou! Merci à celui qui me l'a conseillé ici même (je crois qu'il s'agit de Jérôme). Trois nouvelles sur Venise qui se lisent avec délectation.

- Trois nouveaux locataires (et propriétaires) dans mon immeuble, et que des jeunes. Ma vieille voisine leur a déjà expliqué le "règlement" (pas de vélos dans l'allée par exemple). Seule nuisance pour l'instant: le bruit des travaux.

- Plus ma retraite approche, moins je supporte certains de mes collègues (et pas forcément les nouveaux!). J'ai parfois l'impression d'être déjà parti.

mercredi 16 janvier 2013

Et un peu de musique, ça vous dirait? (123)

Line Renaud, Sexe et Tilt
(Deux pour le prix d'un, avec, en prime, un invité surprenant, dans le coin droit de l'écran.)


mardi 15 janvier 2013

Matin blanc


 
C'est chiant mais c'est beau.

Un homme de bien

J'ai parlé si souvent de lui, tout le monde connaît la tendresse particulière que je vouais à Jean Bertrand Pontalis au point de guetter en librairie la sortie de chacun de ses essais. J'aimais son monde intérieur, sa façon de parler des riens qui tissent nos vies, son style pur et précis. Il y a quelque temps, François Busnel lui a consacré plusieurs "Grands Entretiens" sur France Inter, que je n'ai malheureusement pas pu entendre intégralement. Je me souviens particulièrement d'un soir où il parlait de son père et où j'ai eu toutes les peines du monde à éteindre la radio pour rejoindre la clinique de ma mère.

Ce soir, en revenant du travail, j'ai à nouveau entendu sa voix. "Encore une rediffusion, après une grève d'une semaine!", me suis-je dis, excédé contre France-Inter. Et j'ai entamé un paquet de copies. Et puis, il y a quelques minutes, en passant chez PP, j'ai lu la nouvelle: Pontalis est mort aujourd'hui, le jour même de son anniversaire, à 89 ans. Je suis triste que l'on perde, comme l'on disait autrefois, un "homme de bien".

lundi 14 janvier 2013

La Nuit américaine

Ce soir, La Nuit américaine de Truffaut. Curieusement un film que je n'avais pas encore vu. Le roman de Christopher Frank traîne aussi dans ma bibliothèque depuis des décennies, sans avoir été lu. Juste avant le début  du film, coup de sonnette à la porte: Frédéric vient le voir avec moi. Très agréable surprise. En regardant les images, nous dégustons une bière pendant qu'il m'épate encore une fois par ses connaissances cinématographiques.

J'aime Truffaut, malgré Léaud qui m'insupporte (même allergie de la part de Frédéric). Quelle intelligence, ce film, et quels acteurs: Bisset, Stewart, Cortese, Aumont, Baye (un peu nunuche ici, dans son premier rôle), Dani, encore belle! Qui aujourd'hui tournerait un tel scénario, de telles images truffées de références littéraires ? Je me souviens que la mort de ce cinéaste, en 84, m'avait beaucoup touché, tout autant que celle de Barbara en 97. Ce sont les deux seules personnes, étrangères à mon cercle familial ou d'amis, dont la disparition m'ait à ce point affecté.

Seul bémol au plaisir partagé: le commentaire en voix off pour les malentendants que je ne parviens pas à supprimer (est-ce possible, d'ailleurs ?) mais ce soir, il n'était pas trop encombrant.

dimanche 13 janvier 2013

Oui, bien sûr...

Comme mes paupières commencent déjà à réclamer des allumettes pour rester ouvertes  ce soir, je ferai court et me débarrasserai d'une petite aigreur qui m'irrite, avant d'aller retrouver cette chère madame de Grignan.

Il y a deux types de personnes (entre autres, bien sûr) qui m'insupportent lorsque je les croise:
- ceux qui, à votre bonjour, ne prennent même pas la peine de répondre parce qu'ils sont lancés dans une grande conversation (une partie de mes collègues quelquefois, le matin surtout).
- ceux qui, au même bonjour, vous regardent avec un air d'immense condescendance et vous répondent "bonsoir", parce qu'il est déjà tard, avec le ton d'une institutrice d'avant-guerre tentant d'inculquer quelques notions de base au demeuré du coin.

Mon père, lorsque je le quittais, ne m'a jamais dit "au revoir" mais "adieu" (peut-être "à Dieu") et j'ai toujours trouvé ça magnifique.

samedi 12 janvier 2013

Humanité du textile

Chaque fois que je vais acheter ma dose de drogue (licite, licite! Des bouquins!) à ma librairie préférée de la place Bellecour, je jette un œil curieux en passant sur la galerie de la Fondation Bullukian, une petite salle au rez-de-chaussée d'un hôtel particulier où j'ai souvent vu des choses fort belles.

L'autre jour, je suis tombé sur l'expo du Lauréat 2011 du prix Bullukian, Jérémy Gobé, intitulée Monument aux mains (beau titre, n'est-ce pas?). Peu d’œuvres, en fait, mais très ....comment dire ? touchantes, humaines, d'une certaine façon sensuelles, surprenantes de la part d'un artiste âgé seulement de 26 ans.

Gobé récupère des objets rejetés et les transforme en y ajoutant  des éléments textiles qui les drapent en leur procurant une douceur extrême. L'humanité de ces œuvres vient à la fois de cette douceur ajoutée du textile et de leur vie première qui semble renaître en tout autre chose.

En passant, arrêtez-vous! Cela ne prend pas longtemps et l'on est toujours très bien accueilli! Et, en plus, on m'a permis de prendre des photos!

Grève

Agacé il est, le Calyste! Et par quoi (signe de vieillissement ?)? Par la grève de France-Inter. Toute la semaine, de la musique interrompue à intervalles réguliers par de brefs messages expliquant le pourquoi du comment.

Moi, le matin surtout, France-Inter, c'est mon point de repère: à tel moment des infos, je me lève ; à tel autre, j'entre dans la salle de bain ; un peu plus tard, je mets la clé dans la serrure. En voiture, plus que la montre, c'est l'avancée des émissions qui me dit si je suis en retard ou pas. A midi, quand je mange chez moi, je me frotte au Jeu des mille euros. Quand je pars chez ma mère, j'ai droit à un petit bout de Busnel. Même les journalistes qui me crispent me manquent maintenant, c'est dire!

Alors, dans ma chambre, j'ai laissé la même fréquence, au cas où ça revienne (et puis les stations ne sont pas trop faciles à régler sur mon radio-réveil). A la cuisine, c'est France Culture. En roulant, Europe 1. Mais bon, ça va durer encore longtemps ?

vendredi 11 janvier 2013

Oscarisable

J'ai été ravi d'apprendre que Madame Emmanuelle  Riva était sélectionnée pour l'Oscar de la meilleur actrice à Hollywood. C'est la plus vieille comédienne de tous les temps à être "nominée" pour cette récompense: 85 ans. Et ce matin, à la radio, la même jeunesse dans la voix, le même entrain, la même pétillance! Comment se fait-il que j'aime à ce point la voix de certaines femmes ? Un conseil: allez voir, si ce n'est déjà fait, le film de Haneke, Amour. Pas drôle du tout mais d'une humanité bouleversante.

jeudi 10 janvier 2013

Momentini

- Pas pu échapper au baiser de Judas! Lundi, rien, mardi, rien: elle n'était pas là. J'avais fini par oublier et vlan: hier, en sortant de ma salle de cours, derrière la porte pour prendre ma suite: la délicieusement hypocrite, la trop sucrée, l'hyperlaudative par devant, l'as de la démolition par derrière, bref, celle parmi tous que je ne regretterai jamais! Pas eu le temps de réagir: elle m'avait déjà empoigné et me collait ses lèvres froides sur les joues. Je me console en me disant que c'est la dernière fois!

- Si les commentaires à mes billets apparaissent bien en français en-dessous du texte, ils ont eu, pour la nouvelle année, la délicieuse idée de se traduire en anglais sur mon reader. Et je ne vous raconte pas l'anglais! Même moi qui n'ai jamais été très bon dans la langue d'Outre-Manche, je m'en rends compte. Pas encore trouvé le bon clic pour réparer ça.

- Mon quartier étant en plein boum bureaucratique, les deux boulangeries (entre autres) du coin se sont mises à proposer des "formules" pour le déjeuner. Résultat: des files d'attente impossibles et un bon quart d'heure pour acheter son pain! Même pas foutues d'organiser deux files. Et hier, pas de sacristain, bien sûr. Que de la brioche à la frangipane. Ras le bol!

- Ragots de la libraire: un lycéen lui a demandé un jour "Blinis" de Racine.
Réponse: - Vous prenez aussi "Tarama" ?
Un petit dernier pour la route ? Vous connaissez, vous, "L'illusion Optique" de Corneille ?

- Regardé l'autre soir une émission sur la chute de Fouquet, grand intendant du roi. Je ne savais pas que Colbert avait été aussi retors. Résultat, j'ai entamé un livre qui traînait chez moi depuis bien longtemps: Ma chère Mère, de Françoise Hamel, lettres (fictives puisque les originales ont été détruites) de Madame de Grignan à Madame de Sévigné.

mercredi 9 janvier 2013

Histoire vraie

Un jeune étudiant entre dans une grande librairie lyonnaise et demande à la vendeuse:
- Comment sont classés vos livres ?
- Nous les classons par auteur, Monsieur.
- Heu..., le problème, c'est que je ne connais pas la taille de celui que je veux acheter....

Chemises

Tout à l'heure, en allant à la clinique, pendant qu'un feu passait au rouge, une idée étrange m'a traversé l'esprit, sans crier gare, alors que je pensais à tout autre chose: la vie, c'est comme les chemises. Au vert, j'ai essayé de comprendre. Ça voulait dire quoi, ce message subliminal ?

J'ai vu des chemises, celles que l'on achète et que l'on porte un peu en croyant qu'elles nous vont bien, celles que l'on vous offre et qui ne vous correspondent pas du tout, celles dans lesquelles vous vous trouvez à l'étroit, celles qui, finalement, vous semblent trop larges, celles dont l'étoffe n'est pas agréable, celles dont les couleurs passent trop vite, celles que vous remettez inlassablement en espérant qu'elles dureront encore un peu, celles auxquelles vous faites un accroc, un jour, parce que vous n'avez pas été  assez attentifs, celles que vous ne mettez plus mais dont vous n'arrivez pas à vous débarrasser parce qu'elles vous rappellent trop de souvenirs, celles dont vous masquez la tache en les passant seulement sous un pull....

Je crois que j'ai finalement compris. Compris que je ne dirai plus jamais: je m'en moque comme de ma première chemise.

mardi 8 janvier 2013

Le Tireur

Encore un bon livre à l'actif de mes lectures. L'éditeur Gallmeister a créé une collection, Totem, qui me plaît décidément beaucoup. Dans les titres publiés, citons Le Signal de Ron Carlson, Indian Creek de Pete Fromm, Les derniers Grizzlys de Rick Bass, La Rivière de sang de Jim Tenuto, Sukkwan Island de David Vann et bien sûr Lonesome Dove de Larry McMurtry, la plupart romans sur les grands espaces américains que j'avais beaucoup appréciés. Il  en est de même pour le petit dernier: Le Tireur de Glendon Swarthout, ouvrage qui fut porté à l'écran par Don Siegel en 1976 sous le titre Le dernier des Géants et qui fut le dernier grand rôle de John Wayne avant sa maladie et sa disparition.

Le tireur, c'est J.B. Books, un rescapé de la grande époque de la conquête de l'Ouest qui, atteint d'un cancer de la prostate, vient, en 1901, mourir dans une petite pension de famille après avoir accompli son dernier exploit. C'est simple, c'est rapide (mais pas sommaire), c'est prenant. Voilà! Il faut juste aimer cet univers. Ma vieille voisine ne doit pas être fanatique, je ne lui ai jamais proposé de lui en prêter un.
(Glendon Swarthout, Le Tireur. Ed. Gallmeister. Trad. de Laura Derajinski.)

lundi 7 janvier 2013

Des mots démodés (8)

Ce matin, j'ai eu une belle surprise en rendant un contrôle à mes sixièmes. Lorsque j'ai fait lire à voix haute le texte sur lequel portaient les questions - il s'agit d'un conte, Le Chêne de l'ogre, extrait de Le Grain magique, contes, poèmes et proverbes berbères de Kabylie, de Taos Amrouch, (une sorte de Petit Chaperon Rouge à l'orientale)-, j'ai entendu l'élève prononcer: "Lorsqu'il avait tiré la targUette, la fillette entrait...". Intrigué, je l'ai fait répéter: même prononciation. Après avoir indiqué la bonne façon de lire "targette", j'ai demandé à la classe de quoi il s'agissait. Pas un ne savait!

Ainsi donc, voilà un nom qui, pour moi, vient de tomber dans le sac des mots oubliés, démodés, obsolètes comme il était de mode de dire il y a quelques années. Banal, peut-on penser. Combien d'autres ont sans doute suivi le même chemin sans que je m'en rende compte? Oui, mais celui-ci, pour moi, il est particulier. Parce que je l'ai toujours aimé, et surtout la chose qu'il représente. Depuis tout enfant, moi qui n'ai rien d'un manuel, je m'extasie devant ce mécanisme ingénieux, presque magique, qui transforme un mouvement circulaire en mouvement linéaire . Je sais maintenant, bien sûr, comment ça fonctionne, et que la magie n'a rien à faire ici. Il n'empêche que je garde à ce petit verrou une sorte de tendresse candide et stupide. Vous pouvez me traiter de nigaud, je m'en fiche: d'ailleurs, mes élèves ne comprendraient pas non plus ce que "nigaud" veut dire....

Satisfaction

Ce que je redoutais le plus en cette rentrée, avoir à souhaiter une bonne année à des gens dont je n'ai rien à faire, ne s'est pas produit: tous ceux que j'ai vus ce matin étaient des gens que j'aime et mes vœux ont été sincères. L'hypocrite était absente, la mégère penchée sur un ordinateur et visiblement pas prête à relever la tête. Tant mieux! J'aurais pu être très désagréable si elle avait tenté la moindre approche. Je n'ai pas de temps à perdre et plus l'envie de faire semblant, si tant est que je l'aie jamais eue.

Et puis, quand on vous fait de façon répétée des compliments sur vos nouvelles lunettes, qu'on vous dit que ça vous rajeuni, que ça vous donne un côté intellectuel (l'un a même parlé de Bergson), on ne peut qu'être ravi, non ?

dimanche 6 janvier 2013

L'étoile et la cochonne

Pour commémorer les vingt ans de la mort de Rudolf Noureev, il n'est pas interdit de rire un peu...



Sir Williams

Fin décembre 2012 disparaissait Jean Topart. Qui se souvient de lui ? Au delà de la voix, c'est la silhouette du personnage de Sir Williams dans le feuilleton Rocambole que j'attendais avec impatience certains soirs de mon enfance: je l'aimais et il me faisait peur, tout ce que désire un enfant.


On tourne la page

Cette fois-ci, vacances comme fêtes et repas sont bel et bien terminés. Pour les unes, je dis tant pis, pour les autres, je pousse un grand ouf!

Demain, l'école: avant-dernier trimestre pour moi, sans doute. Dernière ligne droite, comme on me l'a déjà dit. Il faudra que ça se passe.

Dernier repas de famille de fin d'année aussi aujourd'hui, en présence de mon neveu, de ma nièce et de son mari. Les deux derniers rentraient de New-York où ils venaient d'effectuer un voyage de noces à retardement. Huit jours dans les rues de la Grosse Pomme. Nous avons échangé des souvenirs de Manhattan où je m'étais rendu il y a quelques années. Si mon neveu direct est toujours aussi muet, j'ai découvert mon nouveau neveu par alliance, un garçon fort calme également mais plein d'humour et pince-sans-rire, ce qui n'est pas pour me déplaire. Et puis, nous avons (avions ?) en commun la passion de la course à pied. Ce qui nous fait un certains nombre de sujets de conversation.

Bonne journée en famille avec une mère calme et un frère qui ne souffrait pas trop. Je me suis forcé à être plus présent que d'habitude: c'est peut-être le dernier repas que nous prenons tous en commun.

samedi 5 janvier 2013

James Hardley Chase à la petite semaine

Petit matin blême. Humide et froid. Banlieue est, encore enlaidie par les publicités gigantesques au bord des champs d'hiver. Les magasins n'ont pas encore ouvert leurs portes. Personne. Une femme seule, dans une voiture, sur un parking. Elle consulte son portable. Ce n'est pas avec elle que j'ai rendez-vous. Je frissonne.

Histoire de passer le temps, je fais le tour de deux giratoires et reviens me garer au même endroit, un peu à l'écart de la femme. Il arrive enfin. Voiture banalisée. Il est seul, ce qui me rassure. Et toujours le même sourire. A la main un sac de plastique rouge, d'un magasin de jeans. Il me le tend: la peau est là, correctement pliée. Est-ce la même qu'hier? Je vérifierai plus tard. Pas devant lui. J'imaginais que notre échange durerait quelques secondes: la peau contre les billets et on ne se connaît plus.

Pourtant la sympathie réciproque l'emporte et nous bavarderons une demi-heure, entre son véhicule et le mien. Quand je lui donne l'argent, il recompte. Je le lui ai demandé. J'avais, à dessein, omis de glisser le dernier billet dans la liasse. Au bout de quelques temps, il se met à me tutoyer. Il m'a visiblement à la bonne. Un vendeur qui arnaque son patron, un brave type. Lorsque je le quitte, il reste sur le parking et téléphone. Un peu plus loin, je vérifie: c'est bien la bonne marchandise.

Très bientôt, j'aurai un dessus de bureau entièrement recouvert de cuir neuf: un cuir vert anglais, comme le papier du bureau.

J'ai gardé son téléphone, si, un jour, j'ai besoin d'autre chose. Hier, il m'avait déjà offert le nettoyant.

jeudi 3 janvier 2013

Ex-voto

Lors de mon dernier passage en Savoie, en novembre je crois, j'ai visité le sanctuaire de Notre Dame de Myans, près de Chambéry. Dans une salle annexe, des vitrines d'ex-voto. Et celui-ci qui m'a particulièrement ému. Parce que, derrière la croyance ou le fétichisme, comme il plaira à chacun de nommer cette pratique, il y avait un homme, un homme qui n'est pas tombé et qui est revenu chez lui. Et la faute d'orthographe me le rend encore plus cher.

Le Confident

Je viens de lire un livre super! Lire ? Je peux même dire dévorer tant les pages ont tourné vite, chaque soir, jusqu'à la dernière. Rarement je me suis laissé prendre dans une histoire avec autant de facilité et de plaisir. Et dire que c'est un premier roman, ce Confident d'Hélène Grémillon! Si elle manie toujours aussi bien l'intrigue jusqu'à la dernière page, cet écrivain ira loin!

Une sombre histoire de famille (de familles) que tente de reconstituer une jeune femme dont la mère (mais est-ce bien sa mère ?) vient de mourir. Camille, l'héroïne, reçoit des lettres qui lui semblent d'abord étrangères à elle-même et puis, peu à peu, la réalité se précise, un peu chaque fois, jusqu'à la dernière page et la dernière vérité. Interdit donc de commencer par la fin!
(Hélène Grémillon, Le Confident. Ed. Gallimard.)

mardi 1 janvier 2013

Science sans conscience...

Aucun livre ne saura jamais nous dire ce que nous sommes, aucune page ne nous révélera ce que nous deviendrons, aucune science ne fera que nous soyons autres. Alors, soyons nous, pauvres, ignorants, inachevés, imparfaits. Et que nul obstacle ne nous empêche d'avancer.
A tous, une bonne année 2013.