lundi 31 janvier 2011

Momentini

- Vendredi, ça y est, j'ai fait le grand pas (je reprends la première personne car, à lire mon billet précédent, on pourrait finir par croire que je me prends pour Delon!): j'ai acheté une voiture neuve. La première de ma vie, il était temps. Son nom? Attendez, je regarde le papier que m'a remis le commercial: Berlingo HDI 90 FAP BVM XTR, mais je pense que je vais lui en trouver un plus sexy! Avec plein d'options toutes aussi mirobolantes les unes que les autres! Et une remise loin d'être négligeable, très loin, grâce en particulier aux connaissances techniques et au savoir parler de Frédéric. Tiens, il faudra peut-être que je pense à lui dire merci (à Frédéric, pas au commercial!)

- Entendu une journaliste à la radio ce matin, à propos de l'Égypte:"On est en droit de se demander qui et comment bouge(nt) les pions!". Et comment accordez-vous le verbe, ma bonne dame?

- Qu'y a-t-il de plus agaçant qu'une porte automatique qui n'arrête pas de s'ouvrir entre le compartiment et le sasse pour perturber un voyage en train? Une bande de gamins brailleurs sans doute, mais là, il n'y en avait pas.

- Le ciel de Lyon est gris, désespérément gris. Pas vu le soleil de la journée. Et puis froid, le mauvais froid humide. Mais je crois que cela aurait été pire pour reprendre le cartable s'il avait fait beau. A tout prendre, je préfère encore ça!

- En fin de matinée, rencontre avec un menuisier envoyé par la régie de l'immeuble pour installer un vide-prospectus (prospecti?)dans le hall d'entrée. Odieux! Je l'ai envoyé promener. Et il commence dans le métier!

Calyste à la neige

Quelques jours sans mon blog! Mais qu'a-t-il bien pu faire pendant ce week-end au point de ne rien écrire ici!Eh bien, je vais tout vous dire: Calyste était à la montagne. Non pas chaussant des skis, cela il déteste, mais profitant du repos, du ciel bleu et des paysages enneigés où il se promena hardiment.

Pendant que les autres dévalaient les pentes abruptes avec plus ou moins de régularité et de bonheur (mais celui qui tomba en faisant un roulé-boulé n'est pas forcément celui à qui l'on pensait de prime abord!), le troisième larron avait chaussé des après-ski prêtés par Frédéric et, en regardant bien où il mettait les pieds, verglas oblige, s'adonnait à la marche dans la station de Saint-François Longchamp, en Maurienne, et le soir, fatigué, après de bonnes parties de dames chinoises, et la contemplation émue (narquoise?) d'une voiture que des soulographes avait réussi à mettre en position délicate en contrebas du parking, il étendait délicieusement son corps de rêve sous la couette tout près de l'être cher.



On peut imaginer pire comme fin de semaine, non? Plus fort que Martine à la mer!

C'est à vous, Messieurs! (7): Marcel Herrand

Un second rôle, Marcel Herrand? Oui et non. Certes peu de gens se souviennent de lui aujourd'hui et pourtant il a eu au moins un rôle marquant dans sa carrière, celui de Lacenaire, l'assassin dandy des Enfants du paradis de Carné (1943). Peut-être est-ce sa mort assez précoce à 56 ans (1897-1953) qui est la cause de l'oubli relatif dans lequel il se trouve. En 1943, il incarne également le Rodolphe des Mystères de Paris de Jacques de Baronvelli. Bien sûr, il ne s'agit pas de l'adaptation la plus connue du célèbre roman-feuilleton d'Eugène Sue, celle de Hunebelle (1962) la surclassant aux yeux du public grâce en particulier à la présence au générique de Jean Marais, mais elle mérite qu'on s'y arrête un peu.

Pour moi, ce roman fleuve publié dans le journal des Débats entre 1842 et 1843 par l'un des inventeurs du genre au XIX° siècle reste une des lectures marquantes de mon enfance. De mémoire, je peux encore en citer les principaux personnages: le Maître d'école, au visage vitriolé, Fleur-de-Marie, l'héroïne fragile surnommée la Goualeuse, le Chourineur, la Chouette, abominable vieille borgne, et, bien sûr, Monsieur et Madame Pipelet, les concierges, dont le nom est resté à la postérité pour désigner un homme trop bavard. Je me souviens surtout de la frayeur que j'éprouvais délicieuse à lire ces pages profondément populaires.

jeudi 27 janvier 2011

Avancée des travaux "intellectuels"

Peu à peu, le travail prend forme. La nouvelle policière que les cinquièmes doivent rédiger en s'inspirant d'une aventure de Sherlock Holmes est en voie de réalisation. J'ai commencé par leur faire faire des recherches sur l'auteur, Conan Doyle, sur ses personnages principaux et sur leur cadre de vie, cela afin de les familiariser avec le genre littéraire d'une part ( mais ils connaissent déjà un peu) et d'autre part avec le mode de vie de la société londonienne à la fin du XIX°siècle. J'ai été content de leur travail, presque toujours efficace.

Pendant leurs recherches, ils devaient également lire trois ou quatre nouvelles ayant pour héros le célèbre détective, noter, au fil des pages, tout ce qui pouvait leur être utile dans leur propre rédaction, et tâcher de découvrir la structure du récit et les scènes incontournables. Maintenant, nous avons attaqué le plat de résistance: la mise au point, par groupe de deux, de l'énigme qui devra être résolue à la fin de la nouvelle.

Pendant les deux ou trois premières séances, ils ont eu beaucoup de mal: résolution trop simple du problème, manque de logique dans le déroulement des actions, anachronismes, manque d'imagination, imagination débordante. A ce stade, je suis intransigeant: pas une ligne ne sera écrite avant que j'aie donné mon aval à l'intrigue qu'ils me proposent et que je veux connaître de A à Z.

Cet après-midi, pour la majorité d'entre eux, l'horizon s'est éclairci. Avec un petit coup de pouce de ma part, plus de la moitié des binômes a monté correctement son plan. Le semaine prochaine, ceux-là pourront se lancer dans l'écriture de la première scène: Holmes et Watson passent tranquillement ensemble la soirée au salon du 221 B Baker Street lorsqu'on frappe à leur porte. La gouvernante, Madame Hudson, va ouvrir et introduit le visiteur ou la visiteuse dans le studio. L'inconnu(e) raconte alors son histoire et demande l'aide du détective à la pipe. Et c'est parti...

mercredi 26 janvier 2011

Deux poids, deux mesures

J'ai lu, ces derniers mois, beaucoup d'articles critiques, voire haineux ou imbéciles, sur l'Église catholique et particulièrement sur la position de son chef, le pape, que ce soit celui-ci ou un autre précédent. On reproche à l'évêque de Rome de ne pas vouloir considérer le préservatif comme un moyen de contraception ou, mieux, comme une façon de se protéger contre la contamination. Je sais, de mon côté, que de nombreux prêtres du clergé de base n'ont pas ses réticences et sont, dans leur discours, beaucoup plus ouverts.

Or, ce qui me surprend et me gêne, c'est que je n'entends ni ne lis pas grand chose sur la position de nos politiques, particulièrement le premier ministre, sur le délicat problème de l'euthanasie. Comment se fait-il que cette position contre le droit de choisir l'instant de sa mort, ne soulève pas une semblable levée de boucliers, une indignation similaire? Je ne comprends pas.

La mort serait-elle à ce point ignorée dans nos sociétés occidentales modernes que l'on ne se préoccupe guère de la regarder en face. Il le faudra bien pourtant un jour ou l'autre si l'on considère le vieillissement de la population de nos pays. Et la souffrance extrême, ne s'en soucie-t-on pas? Faut-il à tout prix être ou ne vouloir être que jeune et plein d'énergie? La sexualité (et la sauvegarde de sa santé) est certes un axe important de nos vies, mais pas davantage que la fin de vie. Ou alors il faudrait considérer que l'on se moque totalement de ces vieux qui ont fait leur temps et qu'on abandonne parce qu'ils ne servent plus, ou de tous ces gens gravement malades, donc improductifs, dont la présence à nos côtés gâche un peu le tableau.

Personnellement, je me sens libre. Je ne reconnais à aucun dirigeant politique ou religieux le droit de disposer de ma vie et de prendre des décisions à ma place. Pour dire plus, je me moque totalement de leur avis ou de leurs interdictions. Le sujet n'est pas là. J'aurais simplement aimé que ceux qui crient facilement haro sur le baudet lorsqu'il s'agit de prise de position religieuse fassent également connaître leur indignation lorsque c'est un politique qui prend position (surtout sachant que la pratique de l'euthanasie dont on parle est déjà, à mon avis, passablement répandue dans le milieu médical). Alors, si l'on veut débattre, débattons, mais, s'il vous plaît, arrêtons les hypocrisies!

C'est à vous, Messieurs! (6): Pierre Repp

Peut-on même parler pour lui de second rôle? Pierre Repp (1909-1986) apparaît pourtant dans une quarantaine de films de 1933 à 1985. Son talent comique est indéniable: bégayeur un peu ahuri, il avait l'art (car c'en est un, et pas des plus faciles) de tordre les mots, les mélanger, en inverser les syllabes pou aboutir toujours à des résultats hilarants que l'on ne pouvait deviner à l'avance.

Certes, sa carrière au music-hall et dans les cabarets a sans doute été plus importante, mais c'est à la télévision que je l'ai découvert et déjà, enfant, son jeu sur et avec les mots me fascinait. Même s'il n'a pas joué sous la direction de très grands réalisateurs (sauf avec Truffaut, dans Les Quatre cents Coups où il incarne le professeur d'anglais), il méritait d'être mentionné ici. Avec toute ma sonquidération, heu... déconrasition, heu... céconditaration, heu...mon respect.

La vidéo est extraite de l'émission de télévision Discorama du 31/08/1961.

mardi 25 janvier 2011

Saül

En feuilletant mon agenda, je vois qu'aujourd'hui, les chrétiens fêtent la Conversion de Saint Paul. Je ne peux pas ne pas penser, en découvrant cela, au tableau du Caravage qui se trouve à Rome, à Santa Maria del Popolo, dans la chapelle Cerasi. C'est sans aucun doute un de mes tableaux préférés, en tout cas un de ceux qui m'a le plus estomaqué lorsque je l'ai découvert la première fois.

Commandité par le Cardinal Tiberio Cerasi, trésorier du pape Clément VIII, sa première version fut refusée par celui-ci. Le second, celui que j'ai vu, est saisissant d'intensité dramatique. On y voit Saül, habillé en soldat romain et tombé de cheval, qui tend les bras vers la lumière qui l'aveugle, pendant qu'un serviteur tient l'animal par la bride et s'inquiète de son maître. Aucun symbole religieux apparent, rien que de l'humain dans ce clair-obscur époustouflant.

Mais ce qui m'a toujours davantage fasciné dans cette toile, c'est le cheval lui-même, peint pratiquement grandeur nature et vu de trois-quarts arrière. Il s'en dégage une force extraordinaire, une vérité quasi palpable. J'ai bien l'intention de faire découvrir ce chef-d'œuvre à Frédéric et Jean-Claude lors de notre prochain séjour à Rome début mai. Sans doute ensuite monterons-nous jusqu'aux jardins du Pincio pour rêver sur les toits de la Ville éternelle et contempler les entrelacs que tisse le vol des nuées d'étourneaux dans le ciel romain. Je sens déjà la brise contre ma joue....

lundi 24 janvier 2011

C'est à vous, Messieurs! (5): Darry Cowl

Bien sûr, ce n'est pas le meilleur des comédiens! Bien sûr, on peut être agacé par l'aspect répétitif de ses mimiques et de sa façon d'envisager un rôle (mais ne peut-on aussi le reprocher à d'autres acteurs, plus sur le devant, comme Louis De Funès ou Gabin vers la fin?). Et pourtant, pas de Panthéon des seconds rôles masculins sans lui, Darry Cowl (1925-2006) qui se tourna vers le cinéma en 1957, chez Sacha Guitry (encore!). Le "frisotté à lunettes" appartient lui aussi, qu'on le veuille ou non, à notre patrimoine cinématographique, avec des films de réalisateurs aussi divers que Sautet, Verneuil, Pinoteau, Berthomieu, Girault, Allégret, Boyer, Lautner, Drach, Mocky, de Brocca, Kaminka ou Claire Devers.

Cinq Millions comptant est un film d'André Berthomieu de 1956, ou Darry Cowl prête son physique bien particulier à Philémon de Montfilet face à Pierre-Louis dans son propre rôle d'animateur de l'émission. A comparer avec les jeux télévisés dits "intellectuels" d'aujourd'hui!

dimanche 23 janvier 2011

Momentini

- Les travaux dans l'appartement continuent. Après la deuxième chambre, c'est au tour du bureau, la pièce la plus délicate puisque, comme son nom l'indique, c'est là que je travaille. Il faut que je retrouve facilement tout ce que je vais changer de place. Jean-Claude en a bien conscience et m'a déjà déplacé trois étagères en conservant leur "rangement" initiale. J'apprécie.

- Probable changement de voiture en perspective. Je profite des réductions actuelles. Hier matin, donc, rendez-vous pris dans un garage Citroën. La transaction aura lieu sans doute vendredi prochain. Là, ce sont les conseils et les connaissances de Frédéric qui me sont bien utiles. J'apprécie encore davantage.

- Au cours d'un repas auquel je participais, un des convives parle de la famille Koenig, de Lyon. Je lui demande alors s'il s'agit de la même famille que celui du pont ( en effet, à Lyon, il y a un pont sur la Saône qui porte ce nom). Un troisième invité, pourtant lyonnais, croit que nous parlons d'un certain Dupont-Koenig. Et le pire, c'est qu'il ne fait pas exprès!!! Je savoure!

- Week-end prévu à la montagne. Je n'ai pas quitté Lyon depuis août dernier. Départ en voiture, avec la toute nouvelle voiture de J-C. Retour par le train, les autres ayant la possibilité de prolonger le séjour. Dire que j'apprécie est peu dire, même si je ne skie pas.

- Deux constations qui s'imposent: je prends beaucoup moins de photos qu'auparavant et mon travail (en particulier mes collègues) me saoule de plus en plus.

- Troisième constatation, plus optimiste: je fais de gros progrès en cuisine.

samedi 22 janvier 2011

C'est à vous, Messieurs! (4): Fernand Charpin

Né à Marseille en 1887, Charpin, après une carrière au théâtre, a connu la gloire avec la trilogie de Marcel Pagnol: Marius, Fanny, César. Détail à souligner: il a vu le jour la même année que l'invention de la pellicule par l'américain Hannibal Goodwin. Il joua dans de nombreux films de ce réalisateur, notamment dans Le Schpountz et La Femme du boulanger où il incarne le marquis de Venelles. Il apparaît également dans des films d'autres réalisateurs comme Renoir, Marc Allégret, Julien Duvivier (Pépé le Moko) et Raymond Bernard (Tartarin de Tarascon).
On parle souvent de la rivalité qui aurait existé entre lui et Raimu. Pourtant il semble qu'ils aient été de bons amis et que, même, Raimu le considérait comme un grand professionnel.
Le 6 novembre 1944, Charpin, qui vit à Paris, monte à pied ses sept étages car son ascenseur ne fonctionne pas. Son cœur l'abandonne en route. Comme son personnage Panisse, il est emporté par "cette maladie qui tue les gens en bonne santé et ça fait des morts ridicules".
La Fille du puisatier est un film de Pagnol sorti en 1940.

vendredi 21 janvier 2011

Le coucher

Longtemps, je me suis couché de bonne heure, écrivait Proust au début de La Recherche du temps perdu. Cette phrase célèbre vient même d'être reprise pour un affichage publicitaire concernant un jus d'orange, je crois: Longtemps, je me suis couché de bonheur!

Moi, je ne sais pas faire. J'ai beau prendre régulièrement le soir de bonnes résolutions, je ne les applique jamais. Hormis le fait que je me réserve ce moment après le dîner pour mon plaisir personnel, moment sans lequel j'aurais souvent l'impression de vivre une vie absurde, je crois que d'autres paramètres viennent se greffer là-dessus.

Ma mère étant malade et âgée, ses réaction sont décuplées par rapport à celles d'une personne plus jeune et en bonne santé. Elle, tous les soirs, est submergée par l'angoisse au moment de se mettre au lit. Il lui faut quelques minutes pour retrouver le calme ou, au moins, accepter la situation.

Je crois que, pour moi, toutes proportions gardées, il en est de même. Je n'aime pas me coucher. Je retarde le plus longtemps possible ce moment, en traînant dans mon appartement ou sur mon ordinateur, comme si j'avais encore une multitude de tâches à accomplir. L'impression de ne pas avoir fini ce que j'avais à faire. L'impression aussi que le temps consacré au sommeil est du temps perdu, volé à la vie. Pourtant, et heureusement pour moi, lorsqu'enfin je suis dans mon lit, je m'y sens bien, au point d'avoir de plus en plus de mal à le quitter le matin. Une fois le livre en main, ce léger mal être se dissipe et je ne tarde guère à m'endormir. Allez comprendre!

jeudi 20 janvier 2011

Un dessert à mon goût

Je sors de mon canapé, devant la télévision. Ce soir, un petit délice: John Irving, à la Grande Librairie de François Busnel, depuis sa maison du Vermont. J'ai enfin compris pourquoi j'aime tant ce romancier américain malgré certains de ses livres que je trouve inaboutis et un peu lourds. Quelques points communs dans nos biographies respectives: il a été élevé par sa grand-mère jusqu'à l'âge de six ans (moi huit), il n'a jamais rencontré son père biologique et a vécu dans un entourage principalement féminin. Mais est-ce pour autant que l'on apprécie un auteur? Ce qu'il a dit sur ses goûts littéraires m'a beaucoup plus intéressé: il aime Flaubert et déteste Hemingway. Un homme qui a ces passions et ces détestations ne peut pas foncièrement être mauvais. Enfin un qui ne porte pas l'auteur du Vieil Homme et la mer au pinacle. Je me sens moins seul tout à coup.

Je me souviens encore lorsque, dans les années 80, j'ai découvert Le Monde selon Garp. C'est comme si l'on m'avait donné un coup de poing dans le ventre. Je n'avais jamais rien lu de tel, d'aussi profond et loufoque à la fois et certaines scènes, dont celle de la castration involontaire à l'entrée du garage, sont à jamais gravées dans mon esprit. Après, j'ai enchaîné. Je crois que c'est à ce jour le seul auteur dont j'ai lu absolument tous les livres. Comme je le disais plus haut, certains avec une joie immense, d'autres avec plus de réticence. Parmi mes préférés: L'Oeuvre de Dieu, la part du diable, bien sûr, probablement son meilleur roman, mais aussi L'Hôtel New-Hampshire, L'Amour poids moyen, La Veuve de papier, Un Enfant de la balle.

Le dernier que j'ai lu, Je te retrouverai, ne m'a pas accroché car trop long (voilà que je me mets à parler comme mes élèves!) pour ce qu'il avait à dire. Aussi suis-je ravi de la parution de Dernière nuit à Twisted River, que je vais m'empresser d'acheter.

C'est à vous, Messieurs! (3): Julien Carette

Après des débuts difficiles, Julien Carette (1897-1966) est enfin remarqué par Jean renoir qui lui offre des rôles dignes de lui dans La Grande Illusion, La Marseillaise, La Bête humaine ou La Règle du jeu. Ensuite, il tournera également beaucoup avec Claude Autan- Lara, en particulier dans L'Auberge rouge (1951) où son personnage inquiétant de patron de l'auberge de Peyrebeille est resté dans ma mémoire depuis que je l'ai vu, tout enfant, aux côtés de Fernandel et de Françoise Rosay. Peyrebeille n'est en effet pas si éloigné que ça de ma ville natale, Saint-Étienne.

Petit homme de caractère à l'accent parisien prononcé, plutôt abonné au registre comique, il finira tragiquement dans l'incendie de son appartement du Vésinet en 1966: devenu impotent, il ne put s'extraire à temps de son fauteuil enflammé par sa cigarette.

La vidéo est extraite de L'Amour d'une femme (1953), de Jean Grémillon, où il campe le personnage de Le Quellec, le bedeau.

mercredi 19 janvier 2011

Un mot

Prenez par exemple le mot "phare": tout le monde le connaît et sait ce qu'il veut dire, tout le monde (ou presque) sait l'écrire. c'est un de ces mots banals que l'on croise sans y prêter attention, qui passe inaperçu, beaucoup plus que la réalité qu'il nomme, tant il fait partie de notre vocabulaire courant.

Et pourtant! Tout à l'heure, en l'entendant par hasard à la télévision, dans une émission qui n'avait rien à voire avec la mer, il a retenu mon attention, je n'ai pas écouter la suite, mon attention s'était arrêtée sur ce simple mot: un phare. Je me suis alors surpris à me poser une de ces questions idiotes qui me viennent souvent à l'esprit et qui surprennent parfois mes interlocuteurs qui arborent alors le pire des airs commisératifs. Je me suis demandé qui me l'avait appris.

A quel moment de ma vie est-il entré dans mon bagage de vocabulaire? Tôt sans doute, mais qui, le premier, m'en a enseigné le sens? Bien sûr, je n'en ai aucune idée. Il me semble avoir toujours fait partie de ma vie. Pourtant, il a bien fallu une première rencontre, une première question, une première réponse. Est-ce l'instituteur qui me l'a transmis, un jour de lecture, et en quelle classe? Sont-ce mes parents dont je ne suis pas sûr qu'ils en aient jamais vu un? Ou bien l'ai-je appréhendé seul, un soir dans mon lit ou couché dans l'herbe des prés qui entouraient la maison, avec un livre pour seul horizon? Je ne le saurais jamais. Mais ce genre de mystère est, pour moi, bien aussi important que de m'interroger sur l'infinitude de l'univers.

mardi 18 janvier 2011

C'est à vous, Messieurs! (2): Noël Roquevert

Quand j'étais petit, Noël Roquevert me faisait peur, avec sa moustache bien noire, son air autoritaire, sa voix professorale et son sourcil expressif. Comme d'autres précédemment cités, il fut remarqué par Guitry et Max Linder. Il faut chercher ses rôles les plus célèbres chez Clouzot (L'Assassin habite au 21, Le Corbeau, Les Diaboliques), Duvivier (Marie-Octobre), Christian Jaque (Fanfan la tulipe) ou Verneuil (Un Singe en hiver, où il joue un personnage de gentil). Il apparaît pour la dernière fois en 1972, dans Le Viager de Pierre Tchernia.
La Bande à papa, film de Guy Lefranc date de 1956. Il y interprète le "Grand J", auteur d'un hold-up qui rate à cause de son propre fils, joué par Fernand Raynaud.

lundi 17 janvier 2011

Privé de titre

Andrea Camilleri est déjà un bon auteur de romans policiers et son Commissaire Montalban me plaît assez. Mais je crois que j'aime encore davantage ceux de ces ouvrages qui dépassent ce cadre-là et qui, tout en gardant un aspect volontairement comique, nous présentent une Sicile aux prises avec tous ces démons plus ou moins ancestraux.

Dans Privé de titre (Fayard), il expose la rivalité des fascistes et des communistes sur l'île du soleil, comme l'appelaient les anciens, ou plus exactement le complot fasciste se retournant contre un ouvrier communiste accusé d'un meurtre qu'il n'a pas commis. Présentée en narration simple, en lettres, en articles de journaux, indépendants ou sous la botte du Mussolini, cette histoire se veut, comme toujours chez Camilleri, souvent légère et prêtant à rire. Pourtant, derrière cet aspect trop évident, on perçoit toute l'horreur de ces années-là, toute la corruption, la violence, le mensonge qui y régnèrent sous un régime qui vacilla puis tomba après le débarquement allié. Un beau Camilleri, relatant sans avoir l'air d'y toucher, la vie d'un brave homme gâchée par les circonstances historiques.

dimanche 16 janvier 2011

C'est à vous, Messieurs! (1): Robert Dalban

S'il fallait trouver un archétype du second rôle masculin, je crois bien que ce serait lui. Il a joué dans d'innombrables films, dont le plus connu est sans doute Les Tontons flingueurs. Mais Robert Dalban (1903-1987) n'est pas que cela. D'abord comédien de théâtre, il fut poussé au cinéma par Gaby Morlay et épousa quelque temps Madeleine Robinson! L'homme savait choisir son entourage! Et, chose que je viens d'apprendre en cherchant sur les différents sites où il est mentionné, il fut la voix française de Clark Gable dans Autant en emporte le vent. Yes, Sir! Le voici dans un extrait de L'Oeil du Monocle de Georges Lautner (1962) où l'on découvre les goûts culinaires très différents de Paul Meurisse et de Dalban.

Momentini

- Les galères du renouvellement de carte d'identité: trouver un photographe, apprendre chez lui que les photos avec col roulé sont systématiquement rejetées, découvrir qu'il ne faut pas avoir de lunettes (alors que plus rien sur le formulaire à remplir n'indique maintenant les signes particuliers), avoir téléphoné deux fois à la mairie pour connaître les documents à apporter et s'entendre dire sur place que l'on désire savoir la date de naissance de vos père (mort alors que j'avais sept mois) et mère (là, ça allait), finir par se faire gentiment (oui, sans ironie) conseiller de demander à la mairie de naissance une copie intégrale d'acte de naissance parce que votre carte est légèrement écornée et qu'elle a pu être "désécurisée", faire sa demande sur internet et, sur le site, ne jamais trouver la mention "envoi"! Rien de tout cela ne m'a été épargné vendredi après-midi.

- Samedi, grand soleil. Je descends par Gambetta sur le centre ville, pensant y trouver des tunisiens en liesse et des drapeaux partout. Rien! Qu'une foule compacte et lourde à la recherche de la bonne occasion. J'avais oublié que c'étaient les soldes! On a le monde qu'on mérite.

- L'autre fou de la maison de la cour a décidé ce matin de refaire son feu de bois. Résultat: tous les voisins empuantis par la fumée épaisse qui se dégageait de sa cheminée. Comment peut-on le faire cesser?

- Au marché ce matin, rencontré Gisèle, pas vu depuis longtemps. Elle m'apprend le suicide par balle d'un ancien ami, Pierre, qui, paraît-il, ne supportait pas de vieillir. J'ai logé avec lui et cinq ou six autres il y a longtemps dans un très grand appartement du 6° arrondissement. J'étais étudiant et me levais souvent tard. Il était ouvrier et se levait tôt. L'appartement étant à l'entresol, de mon lit je l'entendais partir le matin, à cause du bruit que faisaient ses claquettes à la semelle de bois, très à la mode à cette époque. J'étais toujours tout "chose" en pensant que cet homme était si beau et qu'il ne s'en doutait pas.

- Jean-Claude nous a fait aujourd'hui un très bon repas. Nous étions douze? Comment fait-il pour tout organiser et rester aussi calme? Frédéric et moi l'avons déchargé d'une grosse partie de la vaisselle, malgré lui qui ne voulait pas.

samedi 15 janvier 2011

Au revoir, Mesdames

Avant de clore momentanément le Petit Panthéon consacrée aux actrices françaises plus ou moins oubliées, je voudrais rendre hommage à toutes celles dont je voulais parler et dont je parlerais sans doute un jour mais pour qui la recherche d'extraits de films n'a pas abouti. J'ai nommé: Jenny Clève, Arlette Didier, Lucienne Bogaert, Arlette Thomas, Jeanne Pérez, Yvette Etiévan, Blanchette Brunoy, Muni, Germaine Delbat, Jacqueline Porel, Muse Dalbray, Madeleine Barbulée, Micheline Luccioni, Gilberte Géniat, Gabrielle Dorziat, Jeanne Fusier-Gir, Yvonne Legeay, Monique Tarbès, Christiane Muller, Véronique Silver, Mady Berry, Gabrielle Fontan, Milly Mathis, Mona Goya, Renée Gardès, Mila Parély, Alida Rouffe et tant d'autres que j'oublie moi-même. Merci, Mesdames. Sans vous, le cinéma français n'aurait pas été ce qu'il a été.

Aux hommes maintenant.

Samedi soleil



vendredi 14 janvier 2011

Panthéon des Petites Gloires oubliées (20): Silvia Monfort

Un autre registre sans doute que toutes les précédentes. Plus intellectuel, plus en dedans. Mais en parlerait-on encore si un théâtre parisien, inauguré en 1992, ne portait pas son nom? Quels films ai-je vus où elle apparaît? Je ne m'en souviens pas. Pourtant je n'ai jamais oublié ni son visage ni sa voix, un visage de caractère qui marque à jamais.

C'est au théâtre qu'elle perça d'abord. On n'oubliera pas son interprétation de Chimène dans Le Cid, au TNP. Auparavant, elle n'avait pas hésité à entrer en résistance sous le pseudonyme de Sinclair et avait épousé Bernard Clavel. En 1955, elle se lance dans l'aventure du premier film d'Agnès Varda, La Pointe courte, aux côtés de Philippe Noiret (vidéo). Elle jouera aussi en 1957 dans un film courageux de Jean-Paul Le Chanoy, Le Cas du Docteur Laurent, qui milite pour l'accouchement sans douleur. Elle y côtoie Jean Gabin et Nicole Courcel. Mais son rôle le plus inoubliable est sans doute celui de Phèdre de Racine qu'elle interpréta maintes et maintes fois. Elle est morte en 1991.

Un jour

Il y a depuis quelques jours à Lyon des levers du jour splendides. J'aime beaucoup arriver au collège à ce moment-là. De l'endroit où il se trouve, je domine toute la ville et bénéficie d'un spectacle rare. Voir le ciel se teinter d'une couleur rose orangée tout au fond, à l'horizon, là-bas vers la chaîne des Alpes, me donne de l'allant. J'ai souvent fait remarquer la beauté du soleil levant à mes élèves depuis les fenêtre d'une de mes salles de classe. Aujourd'hui, ce sont eux qui me le disent: "Monsieur, regardez comme c'est beau! Vous ne prenez pas de photos?". Ça aussi, je pense que ça fait partie de l'éducation que j'ai à leur transmettre.

L'autre chose qui me manquera lorsque je ne monterai plus sur la colline, c'est de voir ces élèves dans la cour de récréation, attendant la sonnerie de début des cours, peu nombreux, en petits groupes ou seuls, bien souvent frigorifiés. Certains, pour venir, ont sans doute quitté leur lit avant moi. Ils ont des bouilles d'enfants encore endormis, qu'ils gardent pendant la première heure de cours. Ce sont les plus petits qui ont sur le dos le cartable le plus lourd et de les voir ainsi, en apparence si vulnérables, me touche chaque fois.

Ce soir, en revanche, le brouillard s'est installé sur la ville et lui donne un aspect presque onirique. Si j'en avais eu le courage, je serais allé à pied marcher dans les rues presque désertes comme je le faisais lorsque j'avais encore mon chien. Ces promenades vespérales étaient souvent contraignantes mais réservaient parfois de bien belles surprises. J'aime les villes la nuit.

jeudi 13 janvier 2011

Panthéon des Petites Gloires oubliées (19): Micheline Francey

Elle joua l'épouse de Pierre Larquey dans le Corbeau d'Henri-Georges Clouzot. Après ce film, et après guerre, les comités d'épuration s'acharnèrent sur elle ainsi que sur le réalisateur et les autres interprêtes et elle fut frappée d'interdiction de travailler pendant un an. Mais en 1945, elle sera applaudie par la France entière pour son rôle (la cousine du soliste) dans La Cage aux rossignols de Jean Dréville. Elle ne connut guère ensuite de grands rôles mais, en 1955, elle devint la première voix radiophonique d'Europe N°1 lors de la création de cette radio. Cette voix, on la retrouvera, off, dans le feuilleton télévisé Les Saintes Chéries, où elle est la narratrice. Elle jouera ensuite l'épouse de Jean Richard interprétant l'un des plus célèbres Commissaire Maigret. Elle est morte en 1969, à cinquante ans et me semble, elle, bien oubliée aujourd'hui.

Culture(s)

Je sais que l'on peut vivre sans culture. Je parle ici de la culture dite bourgeoise qui m'a été inculquée, bien que je ne sois pas originaire de ce milieu social, ou dont on m'a donné la curiosité pendant mes études. Certains s'en passent et sont tout aussi heureux sans. Je ne la mets pas au dessus d'autres formes de culture, plus populaires ou professionnelles. Loin de moi l'idée de faire partie d'une aristocratie qui serait seule à posséder le vrai savoir. D'ailleurs, certains, possédant un bon bagage de connaissances, ne sont que de sombres imbéciles.

Mais je me demande souvent comment je pourrais, pour ma part, continuer à exister sans elle. Elle m'est aussi indispensable que l'eau ou le pain, que l'air que je respire. Je ne sais pas vivre sans lire, sans écouter de la musique, même si je passe de longues périodes sans toucher un disque, sans m'intéresser au cinéma, même si je ne vais guère dans les salles, et surtout sans avoir à ma disposition tout ce que j'ai engrangé jusqu'à aujourd'hui.

Il m'est souvent pénible de ne pouvoir communiquer qu'avec de rares amis sur un sujet dont je sais que la plupart de ceux qui m'entourent ne connaissent pas le moindre détail. Telle situation, telle remarque quotidienne me renvoient souvent à un livre, un film, un point d'histoire ou de civilisation, antique par exemple, et je dois réfréner l'envie de l'évoquer, parce que je sais que l'on me regardera alors comme un doux dingue, un dinosaure ou quelqu'un qui ne se prend pas pour la queue d'une poire, alors qu'il ne s'agit en rien de cela. Il y a de la joie à pouvoir échanger cette culture, à en jouer sans la croire supérieure. Quel bonheur que cette complicité-là! J'aime parfois me passer en tête quelques vers appris dans mon enfance et dont je me souviens encore. J'aime voir les correspondances entre des faits actuels, des comportements contemporains et ce qui se passait dans le monde grec ou romain. J'aime comprendre le commencement des choses. Pour moi, il n'y a rien de pire que ceux qui considèrent que le monde est né avec eux et que l'homme moderne a tout inventé.

Dans le film de Truffaut, Fahreinheit 451, des résistants se réfugient dans les bois pour échapper à la civilisation anti-livres et apprennent chacun un ouvrage qu'ils veulent sauver de l'anéantissement. Je crois que je serais capable d'être un de ces individus en marge qui consacrent leur vie à la sauvegarde de ce qui leur est essentiel. D'ailleurs, il m'arrive souvent de me sentir en marge sur ce point précis. Mais je ne pourrais vivre ailleurs que dans cette marge.

mercredi 12 janvier 2011

Bis

Quand on aime, on ne compte pas. La revoici, en très bonne compagnie, dans un film de Sacha Guitry, Quadrille (1938), où elle apparaît plus sautillante et avec son vrai visage.

Panthéon des Petites Gloires oubliées (18): Gaby Morlay

Là, c'est autre chose. Grand moment pour moi. Je crois bien que, dans mes jeunes années, j'étais amoureux de cette actrice que je trouvais à la fois belle et drôle, légère et pétillante. Pourtant, c'est du Voile bleu, où elle est vieillie à dessein et qui ne respire pas la franche gaieté, que je me souviens le mieux. Je crois bien que je n'ai jamais davantage pleuré devant un film. Qu'en serait-il aujourd'hui si je le revoyais?

Gaby Morlay (1893-1964) a, elle aussi, bien fait de changer de nom. De naissance, elle s'appelait Blanche Pauline Fumoleau. Si les deux prénoms sont pleins de charme, que dire du patronyme qui, je trouve, ne lui convient pas du tout? Elle a commencé à tourner très tôt avec Max Linder puis sera dirigée par Duvivier, feyder, Tourneur, Gance, L'Herbier, Guitry, Ophüls, et dans d'autres tant sa longue carrière.

Le Voile bleu est un film de Jean Stelli et date de 1942. Loulou, Louise Jarraud, a passé sa vie au service des autres, et notamment de nombreux enfants qu'elle a élevés. L'un d'entre eux va réunir, au soir de Noël, toutes ces anciennes têtes blondes devenues adultes qui lui rendent un hommage très émouvant.

Automobile

Lundi fut pour moi une grande journée, "automobilistiquement" parlant. Dès le matin, je me suis fait flasher par un radar à un carrefour alors que je n'avais franchi que la première bande. Le deuxième flash a été actionné par un cycliste qui est venu ensuite me dire que je l'avais été et, voulant me montrer où se situaient mes roues avant, est passé devant ma voiture et est parvenu à en déclencher un troisième. En début d'après-midi, à un autre carrefour avec radar, je me suis bien sagement arrêté où il fallait et je me suis fait emboutir à l'arrière par un automobiliste qui, lui, avait continué sa course. Il valait le coup de travailler ce jour là!

Toujours en ce qui concerne l'univers de l'automobile, je suis de plus en plus agacé par les gens qui possèdent un GPS. Je trouve insupportable d'avoir à se méfier quand on est derrière ces gens-là qui roulent au ralenti en attendant que leur engin leur indique la bonne route et ne savent pas, ni nous non plus d'ailleurs, où ils vont. Je trouve cet appareil très dangereux et ne comprend pas que la plupart des constructeurs proposent maintenant ce gadget sur leurs nouveaux modèles. Est-ce qu'il est si compliqué d'établir son itinéraire à l'avance?

mardi 11 janvier 2011

Panthéon des Petites Gloires oubliées (17): Nicole Courcel

Chaque fois que je vais en voiture dans la Creuse, je pense à elle en traversant un petit village qui porte (presque) son nom: Courcelles.
Nicole Courcel n'a plus tourné pour le cinéma depuis 1979. Sa dernière apparition à la télévision date de 2004, dans un téléfilm de José Dayan, Milady, et au théâtre on ne l'a pas vu depuis Une Journée particulière, pièce d'après le film d'Ettore Scola, qu'elle joua en 1982 à Lyon, au Théâtre du 8°.
Citons au hasard dans sa filmographie: Rendez-vous de Juillet, de Jacques Becker (vidéo), La Marie du port de Carné, Papa, maman, la bonne et moi de Le Chanois, Les Créatures d'Agnès Varda et Si Versailles m'était conté de Guitry.
Mais au fait, sa fille est présentatrice à la télévision française. Qui pourrait me dire de qui il s'agit?

La Bataille de Toulouse

Lors d'une interview recueillie le 28 mai 1976 par J-L de Rambures et publiée chez Flammarion (Comment travaillent les écrivains.), José Cabanis disait: "Chaque nuit, car c'était une écriture quotidienne, je me forçais, après avoir lu les dix dernières pages (jamais plus) du texte de la veille, d'écrire la suite. Le risque d'une telle entreprise, c'est évidemment de rester court. Mais l'avantage, c'est de vous permettre de repartir chaque jour à neuf. C'est ce qui a pu donner à mes romans un certain imprévu dans le déroulement des faits qui est en réalité l'imprévu même de la vie."

C'est bien l'impression que l'on a en lisant son roman La Bataille de Toulouse (Gallimard), prix Renaudot 1966, décerné à l'unanimité comme le précise le bandeau rouge miraculeusement toujours présent sur ce vieux livre retrouvé au fond de ma bibliothèque alors même que j'abordais le sujet du travail des écrivains avec mes élèves et que je citais sa façon à lui de travailler.

Un homme, le narrateur, vient de mettre fin à une relation amoureuse avec une femme profondément aimée mais malheureuse et destructrice car partagée. Il pense pouvoir se consacrer entièrement à l'écriture d'un roman historique sur cette bataille de Toulouse qui opposa en 1814 Soult et Wellington. Mais Gabrielle ne se laisse pas si facilement oublier et, même absente, conduit peu à peu les pensées du narrateur vers le monde de son enfance qu'il retraduit alors.

Roman attachant et surprenant à la fois, mêlant extraits de ce qui devrait être un futur cycle romanesque (et qui finalement ne sera jamais écrit), souvenirs amoureux heureux et malheureux, scènes de la vie de province et même un très beau passage sur la foi qui habitait l'écrivain dans ses premières années. Mais la réussite absolue de Cabanis, à mon avis, c'est le début de son livre, lorsqu'il parle d'Hélène et analyse la relation passionnelle qui les unissait et la façon dont peu à peu cette passion se délite.

Je traduisais sans peine, j'interprétais, j'interrogeais adroitement, j'amenais Gabrielle de très loin jusqu'à un certain détail décisif, qu'elle livrait sans méfiance. Il y avait chez elle beaucoup de naïveté, mais aussi une vigilance toujours en alerte, et la certitude de ne rien laisser échapper de ce qu'elle voulait taire. Elle se trahissait sans doute, et à tout propos, mais à la dérobée, par un mot sans importance que je saisissais au vol. Je l'écoutais toujours avec curiosité, et songeais que le plus crédule des deux n'était pas celui qu'elle pensait. Elle ne se doutait pas que depuis longtemps je ne croyais plus un mot de ce qu'elle disait. Elle me racontait paisiblement ses histoires, et je me disais que la vie est curieuse, tout de même, qui m'avait conduit à vivre au-delà de la réalité, dans un monde entièrement truqué, une sorte de théâtre de marionnettes dont Gabrielle tirait les ficelles, avec la certitude que j'étais bon public.

lundi 10 janvier 2011

Panthéon des Petites Gloires oubliées (16): Jany Holt

Rien d'autre que son vrai nom: Ekaterina Rouxandra Vladesco-Olt, sa vie (1909-2005) et le plaisir du cinéma à la Bresson. Ici, en compagnie de Renée Faure et Sylvie, dans Les Anges du péché (1943). Silence.

Bruits

C'est étonnant comme les pas de femme
Résonnent au cerveau des pauvres malheureux.
disait Verlaine dans un de ses plus beaux poèmes, L'espoir luit....

Longtemps, ces vers m'ont paru obscurs. Je ne les comprenais pas. Aujourd'hui, je ne les comprends toujours pas mais ils éveillent en moi des "correspondances", réactualisent un instant des moments vécus dont le point d'ancrage est un bruit. Celui des femmes, bien sûr, dans les hôpitaux la nuit ou le matin à la première aurore, lorsque, même en vie, on a froid sous le drap trop court qui couvre à peine le brancard et qu'elles arrivent, celles du service de jour, avec encore la vie de l'extérieur dans l'air qu'elles expirent et la force du pas trop fort sur le carreau. Savent-elles qu'elles transpercent le cerveau des "pauvres malheureux"?

Le bruit de la pendule aussi, dans le silence d'un repas pris seul face à une assiette déjà vide ou lorsqu'au salon, on lève un instant le nez de son livre pour s'assurer que l'on est bien toujours là, au milieu de ses meubles familiers et que la tempête qui coula le vaisseau de Robinson ne vous atteindra pas. Bruit rassurant, installé dans le quotidien, reposant par son rythme calme et presque imperceptible puisque l'instant d'avant, on ne le percevait pas.

Ces bruits-là s'imposent en brisant le silence qui les précédait et remplissent, presqu'avec bonheur, un vide trop lourd à supporter. Mais il y a les autres, ceux que l'on perçoit au milieu de centaines d'autres plus puissants qu'eux, plus aigus, plus tonitruants, et qui pourtant ne parviennent pas à masquer plus longtemps le tic-tac de la montre ou le ronronnement du réfrigérateur. Ceux-là sont terribles car, d'oubliés qu'ils étaient, ils deviennent encombrants: on n'entend plus qu'eux une fois qu'on les a perçus, ils semblent réguliers, au premier abord, puis, en concentrant davantage son attention sur eux, on reconnait des variations, de rythme, d'intensité, de profondeur. Comment le mouvement d'une pendule peut-il accaparer l'esprit à ce point, au point qu'une seconde, la foudre même ne pourrait tenir autant de place dans ce tambour idiot qu'est votre tête que ces battements de votre cœur qui vous sont devenus extérieurs?

On peut, mais tous le peuvent-ils?, pour arrêter le tintamarre, se réciter en douce, tout seul, rien que pour soi, ces vieux vers appris lorsqu'on était jeune et qui paraissent si jeunes maintenant que l'on est vieux.

L’espoir luit comme un brin de paille dans l’étable.
Que crains-tu de la guêpe ivre de son vol fou ?
Vois, le soleil toujours poudroie à quelque trou.
Que ne t’endormais-tu, le coude sur la table ?

Pauvre âme pâle, au moins cette eau du puits glacé,
Bois-la. Puis dors après. Allons, tu vois, je reste,
Et je dorloterai les rêves de ta sieste,
Et tu chantonneras comme un enfant bercé.

Midi sonne. De grâce, éloignez-vous, madame.
Il dort. C’est étonnant comme les pas de femme
Résonnent au cerveau des pauvres malheureux.

Midi sonne. J’ai fait arroser dans la chambre.
Va, dors ! L’espoir luit comme un caillou dans un creux.
Ah ! quand refleuriront les roses de septembre !


Verlaine, Sagesse.

dimanche 9 janvier 2011

Panthéon des Petites Gloires oubliées (15): Geneviève Page

Geneviève Page a aujourd'hui 83 ans. A-t-elle gardé toute la grâce qu'elle montrait dans chacun de ses films? Est-elle oubliée? Je n'en sais rien. Elle ne le mérite pas, en tout cas, au regard de sa carrière française et internationale, au cinéma comme au théâtre. Avoir joué au TNP Lorenzaccio avec Gérard Philippe, avoir tourné La Vie privée de Sherlock Holmes avec Billy Wilder, Belle de jour avec Bunuel et Buffet froid avec Bertrand Blier, ce n'est pas rien tout de même. On peut aussi rajouter à son palmarès des réalisateurs tels que Christian-Jaque (Fanfan la tulipe), Cukor ( Le Bal des adieux), Mann (Le Cid), Clément, L'herbier, delannoy, Carné, Jean Becker ou Fran heimer (Grand Prix). Alors? Tournée, la page?
La vidéo est extraite d'un film de Jean Delannoy, Le Majordome, en 1964, avec Paul Meurisse dans le rôle titre.

Momentini

- A la radio cette semaine, l'interview d'un sportif, un jeune espoir du ski qui, ce jour-là, aurait dû tout réussir et n'a rien réussi du tout. Bien sûr, il parle pour ne rien dire: "Je ferai mieux à la prochaine compétition; C'est la faute à...; La neige était...; Au début, je le sentais bien et puis...;" Habituel, tout cela, me direz-vous. Ce qui l'était moins, c'était le vocabulaire recherché qu'il employait: "J'ai les boules, fait chier, putain, ça me gonfle...." Je ne suis pas bégueule mais pourquoi passe-t-on de telles déclarations stériles et vulgaires à la radio? J'espère au moins qu'il skie mieux qu'il ne parle.

- La galette des rois, c'est fini. Bientôt les œufs de Pâques. On parie que dans une semaine, il y en aura plein les magasins?

- Samedi matin, je suis allé courir au parc de la Tête d'Or. Il y avait plus d'un an et demi que je ne l'avais pas fait, hormis une fois où, me sentant bien, j'ai un peu trop forcé et j'en ai ensuite payé les conséquences. On perd tout, en un an et demi. Ce n'a pas été un plaisir physique, loin de là. mais un plaisir intellectuel, oui. J'ai couru un seul tour, sans regarder ma montre: je n'en suis plus à l'esprit de compétition. Puis je me suis arrêté sagement: reprendre petit à petit, comme me l'ont dit les médecins. Il est parfois dur de les écouter. Mais je sais maintenant que je peux m'y remettre, et ça, ça n'a pas de prix.

- Après ma course, j'ai pris un vélo'v, pour prolonger le plaisir. Alors que je composais mon code, un homme s'est approché de moi. J'ai cru qu'il voulait un renseignement. Il portait sa libido dégoulinante sur le visage. Il m'a demandé ce que je faisais. Quand je lui ai dit que je voulais me promener, il m'a demandé, avec un air qui ne trompait pas sur ses intentions, s'il pouvait "m'accompagner". Je lui ai dit non, calmement mais fermement. et lui ai tourné le dos en enfourchant mon vélo. Il y a quelques années, j'y aurais mis davantage les formes. Je n'ai plus de temps à perdre!

- Ce matin, aux puces, avec Frédéric et Jean-Claude, j'ai acheté une magnifique table basse pour mon salon. Il a bien fallu la persuasion des deux autres pour que je me décide à faire cet achat un peu onéreux. Mais j'ai dit que maintenant, je pense un peu à moi. Alors, je mets en pratique. Elle m'a plu, je l'ai prise.

- La dernière trouvaille d'un de mes élèves de sixième: Ulysse aurait été roi d'Atac! Jusqu'où va se nicher la société de consommation.

- Un lycéen, dans l'Ain, s'est fait renverser et tuer par un train alors qu'il traversait la voie sur un passage à la gare. Des signaux lumineux étaient pourtant en place pour lui indiquer le danger. La conductrice de la locomotive a plusieurs fois klaxonné pour le prévenir. Il n'a rien entendu: il avait les écouteurs d'un baladeur dans les oreilles. Conclusion du journaliste: il faudra que la SNCF se penche un peu plus sérieusement sur le problème de ces passages dangereux. On se fout de qui, là?

Panthéon des Petites Gloires oubliées (14): Judith Magre

Judith Magre, pourquoi pas, Charlus, bien qu'elle ne me semble guère oubliée puisqu'elle n'a cessé de jouer jusqu'à cette année, que ce soit au théâtre, au cinéma ou à la télévision. Pour moi, c'est aussi une figure de mon enfance, puisque je l'ai découverte à la télévision, lors d'une retransmission de la pièce de Sartre, Huis-clos, probablement dans la mise en scène de Michel Mitrani en 1963, avec, entre autres, Michel Auclair comme partenaire. Je n'ai lu ce texte que quelques années plus tard et , en le découvrant, j'ai toujours eu en tête le visage si particulier de cette actrice.

Je découvre ce soir qu'elle est née, en 1926, à Moutier-en-Der, en Haute-Marne, région que j'ai bien connue à une époque et où aujourd'hui Odile se délite peu à peu par la maladie d'Alzheimer. Aurait-elle fait la carrière qu'elle a eu si elle avait gardé son nom de baptême, Simone Dupuis. Judith Magre, c'est plus parlant, non?
La vidéo est extraite d'un film que je n'ai jamais vu: L'Homme à l'imperméable, de Julien Duvivier (1956),avec Fernandel et d'après un roman de James Hadley Chase. Elle entre en scène à la cinquième minute, juste après une courte apparition de Bernard Blier qui vaut son pesant d'or.




jeudi 6 janvier 2011

Respect sacré

Je n'avais pratiquement qu'à traverser la rue pour passer du lycée où je poursuivais mes études à la Bibliothèque Municipale, un lieu qui longtemps m'impressionna profondément. C'était une belle demeure bourgeoise sans doute du XIX° siècle, ornée en façade de hautes fenêtres agrémentées de lourdes tentures. Les salles de lecture et le prêt se trouvaient au premier étage.

Je me souviens de cette sorte de respect sacré que j'éprouvais chaque fois que j'en poussais la porte, un peu sans doute comme à Delphes le pèlerin antique à l'approche du temple d'Apollon où officiait la Pythie. J'entrais dans un univers qui n'était pas le mien et où je devais, pour être accepté, adopter une attitude irréprochable. D'ailleurs ne l'eussè-je pas fait de moi-même que l'on m'aurait très vite rappelé à l'ordre.

Les employés municipaux se ressemblaient tous: des gens un peu âgés, forts discrets et distingués (c'est du moins ce que je pensais d'eux à l'époque), presque aussi blancs de peau que les ouvrages demandés qu'ils allaient chercher dans des arcanes inaccessibles au commun des mortels et ne permettant pas le moindre bruit ni le moindre mot dans les salles de travail.

C'est ici, dans ce cadre que j'aimais mais qui m'écrasait, où je me sentais devenir quelqu'un d'autre, que j'ai lu des heures et des heures, des philosophes en particulier, à m'enthousiasmer pour L'Eau et les Rêves ou La Psychanalyse du feu de Gaston Bachelard, à m'ennuyer un peu en lisant la philosophie de Sartre, en oubliant le temps avec Freud.

Je me souviens aussi y avoir entrepris l'écriture d'une pièce en vers, Marie Stuart, qui devait, dans mes pensées, me mettre le pied à l'étrier pour une immense gloire future. Elle était en alexandrins, bien sûr, et je pianotais sur la grande table, sous la lampe qui m'était réservée, comptant le nombre de pieds des deux hémistiches et jetant des coups d'œil à la dérobée autour de moi pour vérifier que personne ne s'était aperçu de mon activité d'écrivain. Car le paradoxe était bien là: je rêvais d'entrer au Cénacle des plumes illustres mais serais mort de honte s'il l'on m'avait surpris écrivant.

Ridicule, bien sûr, tout cela, avec le recul des ans. Pourtant, en étant sincère, je suis sûr que je ne serais pas l'homme que je suis aujourd'hui si tout cela n'avait pas été: le respect, la curiosité, l'ambition et la honte, .... et les vers de mirliton.

Panthéon des Petites Gloires oubliées (13): Josette Day

Josette Day (1914-1978) a relativement peu tourné puisqu'elle a mis un terme à sa carrière en 1950. Mais dans ce peu, on trouve quelques pépites, de grands classiques, comme La Fille du puisatier de Pagnol (son compagnon de 39 à 44 et qui tourna le film en 40), Lucrèce Borgia d'Abel Gance (1935) et surtout La Belle et la Bête de Cocteau en 1945. Elle fit d'ailleurs un autre film avec lui en 1948: Les parents terribles.

Ce film, La Belle et la Bête, a enchanté mon enfance (plus que le conte dont il est issu, de Madame de Beaumont) et particulièrement ce passage que je n'ai jamais oublié: l'arrivée de la Belle au château de la Bête et son errance dans les longs corridors éclairés de candélabres tenus par des bras humains ou animés du souffle du vent sur de longs voilages blancs. Quelqu'un m'a dit un jour que cette scène était éminemment homosexuelle. Qui peut m'expliquer pourquoi?


mercredi 5 janvier 2011

Aux autres

Voilà une belle raison (si besoin était) d'aspirer à une retraite rapide. Je suis devenu accro à la recherche sur Google de toutes ces vidéos où apparaissent, même furtivement, nos gloires cinématographiques féminines d'antan. Les chercher, les trouver, les regarder, même celles que je sais ne pas avoir à utiliser, les choisir, cela me prend un temps fou. Je n'ai qu'une envie: revoir un jour tous ces films dont la télévision semble, hélas, s'être éloignée à tout jamais. Et le temps que je passe là, je ne le passe pas à lire les autres blogueurs qui en profite, les lâches, pour publier à qui mieux mieux: Karagar et sa cathédrale, KarregWenn et sa plume au vent, Lancelot, Cornus, Olivier, les deux Nicolas, Samuel, Valérie, Christophe, Upsilon, Christine. Quelques autres ne publient plus guère.... J'arrive à peine à regarder les "images" de Charlus, mon baron préféré, ou celles de Soyons suave. Mais promis, je rattraperai bientôt mon retard.

Panthéon des Petites Gloires oubliées (12): Renée Faure

Toute jeune, à 23 ans, Renée Faure a entamé sa carrière d'actrice avec ce film de Christian-Jaque (qui devint son mari par la suite), L'Assassinat du Père Noël en 1941. Sa dernière apparition à l'écran date de 1998 avec Homère, la dernière odyssée de Fabio Carpi. Elle a fait également une longue carrière à la Comédie Française (1937-1964). La grâce de son visage irradie la pellicule face à la laideur sublime de Harry Baur, son père dans le film. Elle est décédée le 2 mai 2005.

Le Faussaire

J'avais été enthousiasmé par la lecture du Fusil de chasse de Yasushi Inoué. Je viens de l'être tout autant par celle du Faussaire, du même auteur, au moins en ce qui concerne celle des trois nouvelles qui donne son titre au recueil. Une écriture limpide et classique tellement prenante que j'en ai oublié de marquer les pages que j'aurais pu reproduire ici.
Parti à la recherche des œuvres picturales d'Ônuki Keigaku en compagnie du fils de l'artiste,Takuhiko, le narrateur peu à peu finit par s'intéresser davantage à la personne de son "double, le faussaire Hara Hôsen, étrange personnage qui laissa son propre talent dans l'ombre du grand maître et finit sa vie en fabriquant des poudres destinées aux feux d'artifice, en particulier une poudre violette qu'il ne parvint apparemment jamais à mettre au point. Le génie et le raté indissociablement liés et dont la fin de la nouvelle semble aplanir les différences.

Pensant aux faux Keigaku, les fleurs et les oiseaux ainsi que le renard qu'avait peints Hara Hôsen, j'imaginais ces rouleaux toujours accrochés dans l'alcôve des deux fermes où je les avais découverts. Là-bas, au fin fond des montagnes du Chûgoku, l'air avait déjà pris un parfum d'automne. L'espace d'un instant, je retrouvai la vision d'éternité qui avait déjà traversé mon esprit. Ces peintures devaient quelque chose tant à Keigaku qu'à Hôsen et, pourtant, elles continuaient à vivre dans un monde bien réel sur lequel ni l'un ni l'autre n'avait le moindre pouvoir. Dans ce monde-là, les mots d'authentique ou de faux ne voulaient plus rien dire. En me disant que, l'automne venu, j'irais à Kyôto voir Ônuki Takuhiko et qu'autour d'une coupe de saké je lui parlerais de cet aspect de Hôsen qu'il ignorait toujours, je restai un moment encore captif de la vision qui m'avait parcouru, dans un éclair froid et brillant.
( Le Faussaire, Stock. Trad. de Catherine Ancelot.)

mardi 4 janvier 2011

Panthéon des Petites Gloires oubliées (11): Suzy Delair

Pour finir la journée en douceur avec une gloire peut-être pas tout à fait oubliée. Extrait de Quai des Orfèvres de Henri-Georges Clouzot (1947). Encore un film immense!


Des mots, des murs

Des mots sur des murs, il y en a partout dans les villes. Que cela s'appelle des tags, des graffitis ou des graphes, qu'ils soient beaux ou laids, colorés ou sinistres, occupant tout l'espace ou mesquinement cantonnés dans un coin, ils disent tous la même chose: ce besoin inhérent à la condition de l'homme sinon de laisser une trace, du moins de marquer son passage, en artiste ou en révolté, en coquin ou en exalté.

Ceux que Jean-Claude a découverts cet après-midi en arrachant le vieux papier peint défraîchi de ma chambre sont autre chose, moins et plus à la fois. Tracés d'une main féminine, bien droits sur leurs lignes invisibles, avec des lettres rondes où l'on sent le trait sur, la patte de qui a l'habitude de tenir le crayon, le pinceau ou le fusain. Ils sont réapparus vingt ans après avoir été pensés et jetés sur le plâtre. De tout ce temps, je les ai oubliés, totalement. Ils sont sortis de ma vie pour y revenir aujourd'hui, sans crier gare.

Que disent-ils, ces mots? Des bêtises, des choses banales, sans intérêt pour personne que celui à qui ils étaient destinés. Dans le coin près de la fenêtre, à l'endroit où hier encore il y avait une grosse commode elle aussi fatiguée, à l'extrémité du plus long pan, presque à l'angle, et sur la paroi séparant la chambre de la salle de bains, elle avait écrit, il y a presque vingt ans, pour moi: "Ici, réserve de lecture (pour plusieurs annéeees) pour Biquet", "Ici, lit du biquet", "Je t'aime? Tu, même? On sème...". C'était la seule qui avait le droit de m'appeler ainsi. Elle ne m'a jamais appelé autrement. C'était Kicou.

lundi 3 janvier 2011

Panthéon des Petites Gloires oubliées(10): Paulette Dubost

Oubliée? Pour les récompenses de la profession, certainement. Mais pour le reste, pas tant que ça, puisqu'on vient de fêter son 100° anniversaire cette année, le 08 octobre. Que de films depuis son apparition en tant que figurante dans Nana de Jean Renoir en 1926 jusqu'à son dernier rôle (pour le moment!) en 2007. Plus de 80 ans de carrière! Longue vie à la doyenne des actrices françaises!
(Vidéo extraite du film de Léon Mathot, Le Comte Obligado (1934), d'après une opérette d'André Barde, où elle joue le rôle de Mitaine.)


Momentini

- Fin des festivités, reprise des cours, par 6 degrés la première heure et neuf la seconde. Non pas à l'extérieur mais à l'intérieur de ma classe: le chauffage avait décidé de s'arrêter pendant les vacances. Il n'a été remis en route qu'une demi-heure avant le début des cours. Tout le monde en manteau et écharpe. Une manière comme une autre de prolonger l'ambiance station. Un élève a d'ailleurs, pour corriger sa rédaction, cherché l'orthographe du mot "igloo! Approprié, non...

- Exercice de conjugaison en sixième: repérer dans une liste de verbes ceux qui sont à l'imparfait. A la forme "vous châtiez", un élève m'a répondu que c'était bien un imparfait. Surprise de ma part. "Oui, monsieur, a-t-il ajouté tout fier de lui, du verbe "chater". On ne me l'avait jamais faite, celle-là!

- Séance d'embrassades entre collègues à n'en plus finir pour les vœux, sincères pour la plupart. C'est étonnant comme les jeunes générations aiment se faire la bise! Voilà, c'est fait pour un an. Je ne suis pas fan, pas avec tout le monde.

- Courses cet après-midi avec Jean-Claude. La deuxième chambre est vide, prête à être restaurée. Nous avons même trouvé déjà les doubles rideaux qu'il va m'y installer. Cet appartement revit et embellit peu à peu, après des années de laisser-aller de ma part. Signe des temps: je laisse maintenant toutes les portes ouvertes, comme si la vie circulait à nouveau. Non, pas "comme": la vie circule à nouveau. Grâce à lui et à Frédéric.

- L'habillement suit le même chemin: nouveaux pulls (dont un noir à col roulé dont Frédéric m'a dit en me voyant le porter que cela lui provoquait une "petite érection"!) , nouveau cartable offert par Jean-Claude. Frédéric m'a offert une montre. Elle est belle, je ne la quitte plus, moi qui n'en mettais plus depuis des années. Il ne me reste plus qu'à me débarrasser d'une tonne de vieilleries que je gardais pieusement et qui me ficelaient dans un monde de tristesse.

- J'ai aussi envie de reprendre contact avec plusieurs amis dont je me suis, plus ou moins volontairement, détaché ces dernières années. Le silence de certains d'entre eux me pèse, ils ont eu dans ma vie une place que je ne peux oublier facilement. Mais qu'il est difficile de faire le premier pas! Je pense en particulier aux deux amis prêtres de Pierre qui étaient vite devenus les miens, Laurent et Émile, dont je n'ai plus de nouvelles. Je les appellerai. Si la distance persiste, il faudra bien que je tire un trait, mais j'aurai essayé.

dimanche 2 janvier 2011

Panthéon des Petites Gloires oubliées(9): Elina Labourdette

Elle, son palmares, c'est, en autres, Mocky, Demy, Marc Allégret, Carné, Renoir, Le Chanois, Hunebelle, Jacques Becker, Clément, Pabst et bien sûr Bresson dans le célèbrissime Les Dames du bois de Boulogne (et, dans un autre registre, Louis Pauwels, le journaliste, écrivain et éditorialiste du Figaro Magazine. Mais on peut aimer moins...) A voir aussi pour Maria Casares et le ton très "distancié" des deux actrices: les deux premières répliques de Maria Casares ressemblent à du Racine!

Le Maître de Ballantrae

Qui, parmi les blogueurs, m'a mis sur la piste de ce roman de Stevenson que je ne connaissais pas? Je ne me souviens plus. Je viens de le terminer et j'y ai retrouvé intactes toutes mes émotions de jeunesse, lorsque je lisais L'Ile au trésor du même auteur.

C'est un roman foisonnant racontant la haine mortelle que se vouent deux frères, Henry et James, tous deux Maîtres de Ballantrae successivement et qui les amène à traverser le monde, depuis l'Écosse en passant par les Indes et l'Amérique du Nord. Un roman d'aventures où l'écriture de Stevenson, d'une fluidité absolue (bravo pour la traduction de Alain Jumeau chez Gallimard) est au service total de l'action sans jamais rien sacrifier à la beauté de la langue. Un vrai régal pour tous ceux qui n'ont pas perdu leur âme d'enfant!

samedi 1 janvier 2011

2000 et 2011

Potomac et Calyste, pour leur 2000° billet, sont heureux de vous souhaiter une très bonne nouvelle année.