J'avais été enthousiasmé par la lecture du Fusil de chasse de Yasushi Inoué. Je viens de l'être tout autant par celle du Faussaire, du même auteur, au moins en ce qui concerne celle des trois nouvelles qui donne son titre au recueil. Une écriture limpide et classique tellement prenante que j'en ai oublié de marquer les pages que j'aurais pu reproduire ici.
Parti à la recherche des œuvres picturales d'Ônuki Keigaku en compagnie du fils de l'artiste,Takuhiko, le narrateur peu à peu finit par s'intéresser davantage à la personne de son "double, le faussaire Hara Hôsen, étrange personnage qui laissa son propre talent dans l'ombre du grand maître et finit sa vie en fabriquant des poudres destinées aux feux d'artifice, en particulier une poudre violette qu'il ne parvint apparemment jamais à mettre au point. Le génie et le raté indissociablement liés et dont la fin de la nouvelle semble aplanir les différences.
Pensant aux faux Keigaku, les fleurs et les oiseaux ainsi que le renard qu'avait peints Hara Hôsen, j'imaginais ces rouleaux toujours accrochés dans l'alcôve des deux fermes où je les avais découverts. Là-bas, au fin fond des montagnes du Chûgoku, l'air avait déjà pris un parfum d'automne. L'espace d'un instant, je retrouvai la vision d'éternité qui avait déjà traversé mon esprit. Ces peintures devaient quelque chose tant à Keigaku qu'à Hôsen et, pourtant, elles continuaient à vivre dans un monde bien réel sur lequel ni l'un ni l'autre n'avait le moindre pouvoir. Dans ce monde-là, les mots d'authentique ou de faux ne voulaient plus rien dire. En me disant que, l'automne venu, j'irais à Kyôto voir Ônuki Takuhiko et qu'autour d'une coupe de saké je lui parlerais de cet aspect de Hôsen qu'il ignorait toujours, je restai un moment encore captif de la vision qui m'avait parcouru, dans un éclair froid et brillant.
( Le Faussaire, Stock. Trad. de Catherine Ancelot.)
mercredi 5 janvier 2011
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