jeudi 28 mars 2013

Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants

J'ai longtemps tourné autour du roman Zone de Mathias Enard. Et puis, j'ai renoncé à le lire, parce qu'il est trop volumineux (mais j'ai connu bien plus gros, au point d'être gêné par le poids, le soir, dans mon lit), parce qu'il ne comporte aucun signe de ponctuation (mais j'ai déjà avalé des pages et des pages sans un seul point). Sans doute, plus réellement parce que ce n'était pas le bon moment.

Alors, lorsque j'ai vu en rayon celui-ci, du même auteur mais nettement moins gros, je me suis dit:"Je vais essayer". Et j'ai bien fait. J'ai immédiatement été sensible à une certaine similitude d'atmosphère avec un autre auteur que j'aime bien: Laurent Gaudé (ou avec le Maxence Fermine de Tango Massaï). Une sorte d'attirance vers l'épopée froide qui permet le rêve.

Ici, il s'agit d'un personnage historique, Michel-Ange, et de son voyage à Constantinople sur l'invitation du sultan Bajazet, dans le but d'y construire un pont entre l'Europe et l'Asie, par dessus la Corne d'Or. Rivalité avec Léonard de Vinci, dont les plans ont été refusés, fuite devant le pape Jules II dont il n'a pas achevé le tombeau (mais pour qui il peindra plus tard, en s'enfermant pendant des années, les fresques de la Chapelle Sixtine), réflexion sur la vanité de l'art et la difficulté de l'amour du même, fascination devant les couleurs et les parfums de l'Orient, tout y est, sous forme de courts chapitres qui suggèrent plus qu'ils ne décrivent la vie de ce génie de la Renaissance qui, à ce moment-là, refusait encore sa part humaine.
(Mathias Enard, Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants. Ed.  Actes Sud.)

mercredi 27 mars 2013

Un petit coin bien sympathique

Vous connaissez Cha-Cha ? Eh bien moi non plus, je ne le connaissais pas jusqu'à lundi soir, au sortir du théâtre. Et c'est d'autant plus étonnant que, pendant 17 ans, j'ai habité tout près de son bar-restaurant. Un tout petit local qui n'a rien d'extraordinaire pour la décoration. Un bar de quartier comme il y en a des centaines d'autres à Lyon.

Frédéric et Jean-Claude m'en avaient souvent parlé. Ils le fréquentaient beaucoup à une certaine époque, il y a quelques années. Lorsque nous sommes entrés, Cha-Cha, un kabyle d'à peu près mon âge,  a tout de suite reconnu Jean-Claude. Accueil chaleureux, c'est vrai, même si le repas fut moyen à mon goût (mais, aux dires des deux autres, il fait, sur commande, un excellent couscous!).

Cette rencontre m'a permis de parler avec lui de mon ancien quartier, devenu hélas repaire de nouveaux riches et alignement de boutiques tertiaires, d'évoquer des figures d'autrefois comme Janette, la serveuse du bar où j'avais mes habitudes, une petite femme nerveuse, à la voix cassée par la cigarette et qu'il fallait savoir caresser dans le bon sens du poil, ou comme le tenancier d'un autre bar tout proche qui, le soir venu, après avoir baissé le rideau, se mettait debout sur les tables pour nous improviser une danse du ventre à mourir de rire mais sans rien de vulgaire.

Aujourd'hui, cet homo hilarant est mort, et Janette aussi peut-être, puisque, lorsque j'ai déménagé, en 91, elle était déjà en retraite. J'ai d'ailleurs été étonné qu'un tel lieu, resté populaire,  existe encore au milieu de tous ces magasins qui n'ont plus, pour moi, aucun intérêt.

mardi 26 mars 2013

Les Monologues du vagin

Belle soirée hier soir avec cette pièce "culte" d'Eve Ensler au Théâtre Tête d'Or. Marie-Christine Barrault, Lisette Malidor et Sandrine Ferrer y égrenaient le texte tiré de plus de deux cents entretiens de femmes du monde entier et de tous âges.

Tantôt très drôle (ah! l'imitation de l'orgasme clitorido-vaginal! ou celui de la bourgeoise du XVI° arrondissement!), tantôt plus tragique lorsqu'il y est évoqué l'infibulation pratiquée sur les petites filles africaines ou le viol des femmes pendant la dernière guerre ethnique en ex-Yougoslavie, ce court spectacle nous a enchantés, Jean-Claude, Frédéric et moi, même si, a priori, le thème ne nous concernait pas vraiment  directement...

Marie-Christine Barrault ( qui joue en alternance avec Andrea Ferréol) est meilleure, à mon avis, dans les parties sombres, alors que Lisette Malidor est époustouflante lorsqu'on aborde le comique. A côté de ces deux grandes, Sandrine Ferrer tire bien son épingle du jeu. Une excellente soirée, en résumé, qui s'est terminée.......au restaurant (oui, je sais, j'en abuse un peu ces derniers temps!).

lundi 25 mars 2013

Désolations

J'avais aimé le premier roman traduit en français de David Vann, Sukkwan Island, roman noir et terrible quant aux rapports affectifs entre un homme et son fils.
Le deuxième, Désolations, est sans aucun doute encore plus sombre.La désintégration progressive d'une famille, un couple vieillissant et leurs deux enfants adultes, au bord d'un lac en Alaska, processus fatidique qui ira jusqu'au meurtre et à la prescience que le fatum ne s'en arrêtera pas là. Sous des couverts de modernité, Vann a reproduit la progression inexorable d'une tragédie antique, où les dieux s'acharnent sur leurs victimes et où chacun reste muré dans son égoïsme et sans doute dans sa folie.
A lire uniquement lorsqu'on est en pleine forme!
(David Vann, Désolations. Ed. Gallmeister. Trad. de Laura Derajinski.)

dimanche 24 mars 2013

Deux jours à la neige



Il me fallait quitter Lyon. La mort de ma tante m'a plus affecté que je ne le pensais. Le petit séjour à Megève, habituel depuis l'an dernier, était le bienvenu. Et puisque, vendredi, mes horaires de travail m'imposaient de prendre un bus pour Annecy, va pour le bus, où je me suis endormi pendant presque le moitié du trajet. Puis un train pour Sallanches, bondé d'étudiants rentrant chez eux pour le week-end, dont une adolescente vulgaire et au verbe haut, au rire désagréable, qui a eu la bonne idée de descendre à une des premières gares.

Le soir, fondue savoyarde et dodo rapide. Décidément, j'ai du mal en ce moment à récupérer de toute cette fatigue. Le samedi, grande balade à raquettes du côté de Combloux sous un ciel mitigé mais avec une température agréable à la marche. Au sommet, repos sur chaise longue devant un petit verre de vin blanc, et puis la redescente, plus pénible pour les genoux. Le soir, promenade dans Megève où les manteaux de fourrure se disputent le prix du mauvais goût avec celles, décrépites, qui les portent. Rentré au chalet, ce soir, ce sera raclette puis nuit agitée par des ennuis intestinaux qui m'en gâcheront le sommeil.



Ce matin, il fallait rendre les clés à dix heures. Frédéric et moi, nous prenons la route direction Conflans, la cité médiévale d'Alberville sur la place de laquelle nous avions très bien mangé l'an dernier. Restaurant fermé, ciel gris , cité déserte. Nous décidons de déjeuner à Aix-les-Bains: le patron d'un bar de Conflans nous a conseillé le restaurant de l'un de ses amis au bord du lac du Bourget.

Et il a bien fait: un repas délicieux que j'ai mangé avec plaisir malgré mon peu d'appétit initial. Risotto aux noix de Saint-Jacques et queues d'écrevisses pour nous deux, puis pavé de bœuf au foie gras pour Frédéric et filets de perches pour moi. Pour finir, un délicieux fondant au chocolat. Courte visite à Émile où nous refaisons provision de conserves de betteraves rouges de son jardin puis retour à Lyon sous la pluie.

Je ne suis parti que deux jours mais que ça fait du bien!

jeudi 21 mars 2013

Terreurs enfantines

Le voyage à Saint-Étienne de mercredi m'a remis en mémoire, en voyant les lieux, un certain nombre de souvenirs de mon enfance, en particulier ceux liés aux frayeurs qu'on nous imposait pour nous faire tenir tranquilles.

Ainsi, un des tout premiers est lié à une vieille sœur, Marie de Béthanie, qui faisait, outre les occupations liées à sa vocation, office d'infirmière bénévole dans le village. Une tendresse de sœur, grasse comme un moine de camembert, mais que mes parents avaient appelée à la rescousse parce que je faisais encore pipi au lit alors que l'âge en aurait dû être passé. Elle m'avait simplement dit: "Si tu continues, je t'emmènerai dans une grande maison à côté d'une petite". Je ne crois pas que ces maisons existaient vraiment mais l'effet de la menace fut immédiat: mon énurésie cessa du jour au lendemain (ou plutôt: de la nuit au lendemain). Sans doute un des premiers symptômes de mon "abandonnite" aiguë, après la mort de mon père et les changements divers de foyers que je connus à cette époque.

Le deuxième (et c'est étrange: Cornus évoque le lieu dans son commentaire à mon billet précédent) vient directement de mes parents. A l'époque, il existait à La Valla en Gier, dans une vallée au-dessus de Saint-Chamond, une institution scolaire religieuse réputée pour la sévérité de sa discipline. Il s'agissait, je le sais maintenant, de Frères Maristes mais nous les appelions simplement les Frères Bleus, à cause de la couleur de leur redingote. Et la peur qu'ils nous inspiraient sans même en avoir jamais vu un de notre vie, était bien de la même couleur que leur habit! Ainsi, la phrase fatidique:"Si tu n'es pas sage, nous te mettrons en pension chez les Frères Bleus!" avait le don de nous calmer immédiatement. Je suppose que l'image que j'en avais à l'époque devait fort ressembler à une gravure de Gustave Doré représentant l'ogre des contes pour enfants.

Comment voulez-vous, après ça, ne pas être traumatisé ? Et encore, je trouve que je m'en tire bien...

mercredi 20 mars 2013

Le jour des myrtilles

C'était le printemps aujourd'hui. On nous avait annoncé un temps pourri, pluie et peut-être neige. L'enterrement s'est passé sous un ciel le plus souvent dégagé et ensoleillé. Une absoute, simple et émouvante. A la sortie, sur la place de l'église, une cousine de ma mère, encore bon pied bon œil, et puis Hélène, que nous appelions toujours Lélène autrefois.

Elle venait souvent chez nous quand nous étions enfants, s'occupant de mes frère et sœurs plus jeunes. Elle nous est parent, je ne sais plus comment, et je ne l'avais jamais revue depuis mes dix ans. Elle était douce Lélène, elle l'est encore aujourd'hui, à voir son visage plein de sérénité. Quel âge a-t-elle ? Autour de soixante-dix ans, sans doute.

Sur une vieille photo, elle apparaît, au col de la République, au bord d'un bois. Nous sommes tous là, mi ombre mi soleil, sauf mon père qui tient l'appareil. Elle sourit et ma mère est jeune. Mon frère est au dessus de nous, le bras appuyé à un arbre, la bouche tachée des airelles (myrtilles) dont il vient de se goinfrer. Je crois que je porte un petit chapeau de paille. Et tout le monde est heureux.

mardi 19 mars 2013

Sept conseils et un enterrement.

La nuit est tombée. Demain, je n'irai pas au collège. On enterre ma tante dans le caveau familial où sont déjà ma sœur, mon père, mon oncle et ma grand-mère. Chaque fois, ça me fait tout drôle de ne pas être au travail quand les autres y vont. Une habitude à prendre pour dans trois mois...

Les conseils de classe se déroulent chaque jour de cette semaine et de la semaine prochaine. Je sais maintenant presque par avance ce que chacun va dire et la façon qu'il aura de le dire: celui qui n'ouvrira pas la bouche, celle qui ne cessera de bavarder avec sa voisine, celle qui voudra encore nous vendre ses pratiques pédagogiques comme étant les meilleures (puisque ce sont les siennes), celle qui remontera à la première dent du bambin pour expliquer une mauvaise note, celle qui parlera d'un élève alors qu'on en sera à aborder le cas d'un autre, celle qui trouve toujours que tout est merveilleux, celle qui regrette que le niveau baisse de façon alarmante d'année en année.... J'arrive maintenant à trouver ça drôle. D'autant que , finalement, dans tout ce bazar, on arrive cahin-caha à s'occuper correctement des élèves, sans, je pense, trop d'injustices ni d'erreurs.

lundi 18 mars 2013

Ils ont des oreilles et ils n'entendent pas!

Avec les sixièmes, nous en sommes à la fable. La Fontaine, bien sûr, et ses illustres aînés, Ésope pour les grecs et Phèdre pour les latins. Évidemment, ils connaissent tous, pour les avoir apprises en primaire, les histoires du Corbeau et du Renard ou du Loup et de l'Agneau. Mais lorsque l'on se lance dans des textes moins célèbres, ils découvrent ce que je dis à tous mes collègues depuis longtemps: le langage de La Fontaine n'est pas aussi évident que ça à comprendre pour des enfants d'aujourd'hui. D'ailleurs, la plupart du temps, lorsqu'ils me récitent, tout fiers, ce qu'ils savent, cela ressemble plus à la déclamation d'une table de multiplication qu'à celle d'une fable, ou aux prières qu'enfant je récitais en latin à l'église: le rythme y est à peu près, mais le sens.....

En tant que professeur tordu comme vous me connaissez, j'ai eu l'idée d'une petite interrogation écrite (annoncée à l'avance) sur le cours de présentation générale. Je ne vous dis pas à quel siècle certains m'ont fait naître La Fontaine, mais le plus drôle, je l'ai trouvé dans une copie d'un élève pourtant assez travailleur! La Fontaine s'est, selon lui, inspiré de deux auteurs antiques: Eh Hop et Fred! Je crois que, moi aussi, j'ai des progrès à faire en diction...

dimanche 17 mars 2013

Adieu

Ma tante est morte vendredi. Elle s'appelait Janine et j'ai eu le bonheur de la revoir une dernière fois il y a une quinzaine de jours. Elle avait quatre-vingt onze ans. Un bel âge pour tirer sa révérence, diront certains. Pourtant sa mort m'a bouleversé. Parce que c'était ma seconde mère, parce que la complicité et l'amour entre nous étaient immenses, parce que c'était elle et que j'étais moi. On l'enterre mercredi dans le caveau familial du petit village de la Loire, celui dont les tombes regardent les monts du Pilat se couvrir de bruyères, de genets ou de brume et de neige. Je t'embrasse, ma tante.

vendredi 15 mars 2013

Soirée d'enfer (sauf la température) !

Ce matin, je n'ai même pas ouvert mon ordinateur avant de partir au travail. Première fois depuis combien d'années ? Sans doute la fatigue d'hier soir dont il restait encore quelques traces.

Hier soir: une heure pour traverser Lyon, de la clinique de ma mère à la basilique de Fourvière où se donnait le Requiem de Mozart. Toutes les avenues embouteillées, la place Saint-Jean fermée à la circulation (et, en plus, je le savais), le long du palais de justice, arrêt pour laisser un mec menotté se faire emmener par une voiture de police... Quelques flocons de neige volettent dans la pollution. Et l'heure qui tourne, et le concert qui va commencer! Seul point positif: une place de stationnement se libère devant moi. sans doute la seule du plateau! J'arriverai finalement avant le début! (Frédéric, lui n'a pas eu plus de chance avec les transports en commun)

En première partie, des œuvres insipides, de celles qui font que, souvent, je déteste Mozart, du sur-mesure, du prévisible, de l'entendu mille fois! Un couple bobo est installé devant nous. Elle: la parfaite bourgeoise lyonnaise, faussement décontractée. Lui: le stéréotype du cadre dynamique, déjà (ou encore) bronzé, si propre sur lui qu'on y mangerait si l'on n'était pas dégoûté par sa suffisance. Et son inculture car, sur le programme qu'il avait acheté, il suivait les paroles du Requiem alors qu'il n'était pas encore commencé!

Le Requiem: vraiment rien d'inoubliable. J'espérais beaucoup, pourtant, d'un chœur tchèque. Mais les voix d'hommes écrasaient celles des femmes, la tessiture du baryton ne me convenait pas, les départs n'étaient pas impeccables et le tempo plus que chancelant à force de varier.

A la sortie, la Sibérie: un vent glacial pendant nous attendions les autres en fumant une cigarette. Le temps de se frictionner les joues et hop, en voiture avec le chauffage à fond. J'étais heureux de retrouver mon lit. Je l'aurais été encore plus s'il n'avait pas fallu le quitter si tôt ce matin.

jeudi 14 mars 2013

Blanches actualités

Comme, décidément, on ne pouvait pas que parler de la neige et de tous ces pauvres gens coincés dans leur voiture (qu'on leur avait bien dit de ne pas utiliser) parce que ça finit tout de même par lasser, on s'est prestement rabattu sur l'élection du nouveau pape. Mais là, que dire ? Eh oui, un conclave, c'est à huis-clos. Alors, on nous a montré tous ces croyants amassés sur la place Saint-Pierre, attendant que la fumée veuille bien passer au blanc. Ça avait l'air de bien les embêter, ces journalistes,  de ne pas pouvoir fureter dans les moindres recoins du Vatican, de ne pouvoir interviewer à tout va, de ne recueillir aucune confidence digne d'intérêt.

Alors, ils nous ont abreuvés de leçons de vocabulaire, découvrant ainsi eux-mêmes sans doute, ce que veut dire "Habemus papam", nous expliquant que "conclave" vient du latin "cum clave", avec une clé. Ils auraient pu en rajouter sur cette racine étymologique, en nommant par exemple le clavier, la clavette, la clavicule et même le clafoutis. Mais non, point trop n'en faut! On ne se refait pas aussi facilement!

Et puis, la fumée est sortie, blanche, hier soir! Et, une heure plus tard, le nouvel élu, tout de blanc vêtu, est apparu à son balcon. Physiquement un mélange de Paul VI et de Jean XXIII. Et, stupeur, on apprend qu'il est le premier partout: premier pape américain, premier pape jésuite, premier pape François. Étonnant, d'ailleurs qu'aucun pontife jusqu'à ce jour n'ait emprunté le prénom du saint des pauvres et des déshérités. Il faut dire que les rapports de Saint François d'Assise avec la papauté de son époque n'ont pas toujours été simples!

Nous étions en train de boire une coupe de champagne en compagnie de Frédéric et de Jean-Claude pour fêter la venue à Lyon  de Jean-Marc, un ami du midi que je n'avais pas vu depuis trois ans. Nous avons donc trinqué aussi à Sa nouvelle Sainteté, et suivi sa première intervention publique, remplie de chaleur et d'humilité. Ce n'est sans doute pas pour rien qu'il a choisi un tel saint patron. Souhaitons-lui de pouvoir, comme son illustre référent, venir à bout de tous les loups, de Gubbio ou d'ailleurs, car ils ne manquent pas, et de ne trouver sur sa route que des rosiers sans épines, comme celui de la Portioncule à Assise, où mourut il poverello!.

mercredi 13 mars 2013

Un mois avec....

Avec qui ? Je suis incorrigible! Avec Montalbano, bien sûr, le commissaire créé par Andrea Camilleri. Trente petites nouvelles  tantôt tendres, tantôt féroces, tantôt pleines d'humour, presque toujours réussies. On y voir le commissaire à différents âges de sa vie, à différents moments de sa carrière, mais c'est bien toujours le même, professionnel mais humain, facétieux et grognon, et surtout bon vivant. Inutile de préciser que je n'ai pas mis un mois à le lire! Camilleri écrit beaucoup; moi, je lis vite: on était fait pour s'entendre!
(Andrea Camilleri, Un Mois avec Montalbano. Ed. Fleuve Noir. Trad. de Serge Quadruppani, avec l'aide de Maruzza Loria.)

mardi 12 mars 2013

De quoi rire (ou pleurer)

- Quelques jours avant le début des conseils de classe, ma directrice en change encore les dates: elle s'était "trompée"! Rien qu'aujourd'hui, trois ordres et contrordres!

- Selon un de mes collègues, l'état du Mississippi a signé l'abolition de l'esclavage il y a seulement quelques mois.  Ils avaient "oublié" de le faire à l'époque!

- Quand j'ai parlé de L'Année dernière à Marienbad à la pose cigarette, aucun des présents ne connaissait ce film. Je dois être d'une autre galaxie!

- Un collègue a appris la mort de Georgette Plana à 95 ans. Il se retourne vers moi et me dit: "Tu dois connaître, toi!". Sans commentaire!

- Pour eux (sauf une), Bowie, c'est ringard! Celle qui l'aime, comme moi, aime aussi Barbara! Ça rassure!

Allez, tournez manèges....

lundi 11 mars 2013

"Laissez-moi, laissez-moi, je suis fatiguée..."

De longs couloirs labyrinthiques filmés en noir et blanc à l'intérieur d'un palace germanique, un parc aux allées géométriques que vient seulement contrarier le baroque des torsions des statues, des visages muets pendant que résonne une voix off, des femmes élégantes et des hommes en habit mais que l'on n'entend pas, une statue antique que l'on se perd à interpréter, des scènes récurrentes, des mots qui reviennent, un temps qui s'étire au point de se perdre, la beauté de l'inconnu de retour un an après, le mystère de l'homme au visage sévère et l'évanescence de la jeune femme, tantôt en noir, tantôt en blanc, la musique de l'orgue qui se tait tout à coup, les tables de jeux avec les allumettes où l'inconnu perd et où l'homme gagne toujours, des silhouettes qui se figent ou qui s’alanguissent....

Je viens de revoir pour la première fois depuis longtemps L'Année dernière à Marienbad, avec toujours la même fascination.

dimanche 10 mars 2013

Des fleurs (10): l'arum

Dans un tiroir de ma mère, ou dans une boîte en fer, il y a une photo en noir et blanc, avec les bords crantés et aujourd'hui sans doute jaunis, une photo que je n'ai pas vue depuis longtemps mais dont je me souviens parfaitement.

Ma mère est dans son lit, appuyée sur de gros oreillers, légèrement décoiffée. Elle tient sur le bras droit un bébé: ma sœur, qui ne devait avoir que quelques mois. Elle-même est très jeune, elle a trente-trois ans, et sourit en regardant l'objectif. Elle est rayonnant et belle. Sans doute mon père, de l'autre côté, doit-il avoir le même sourire. Leur première fille!

Près du lit, mon frère, d'un an plus âgé, qui a l'air d'un Pierrot lunaire et semble déjà vouloir protéger le petit être qui dort, inconscient d'être la cause de tout ce bonheur. Et puis, il y a moi, à cinq ans, déjà l'aîné, déjà rêveur. Mon autre sœur viendra deux ans plus tard, au moment où je réintégrerai définitivement la famille. De son bras libre, ma mère nous tient tous les deux enlacés. Pour moi, rien n'est plus tendre que cette photo.

Sur le côté droit du lit, une table basse sur laquelle une lampe est allumée. De cette lampe aussi, je me souviens bien, tant je l'ai aimée. L'abat-jour était en satin crème, régulièrement plissé, avec sur ses bords inférieur et supérieur, un bourrelet de satin vert torsadé. Elle me rappellera plus tard des scènes de films américains et, tant que mes parents l'ont gardée, elle m'a donné l'impression d'être riche.

Sur la table aussi, un bouquet. Ce sont des arums blancs, élancés, élégants, qui émergent de la pénombre et paraissent faits de la même étoffe que la lampe. Après, la mode en est passée et je n'en ai plus jamais revu jusqu'à ces dernières années. Hier, sur la marché du Rhône, j'en ai acheté pour moi. Il sont sur la table de mon salon et, chaque fois que je les regarde, me vient à l'esprit cette photo ancienne du bonheur d'une famille.

samedi 9 mars 2013

Momentini

- Hier, Stéphane est venu faire les mises à jour sur mon ordinateur. Je peux ainsi à nouveau voir les vidéos normalement. Mais il est grand temps que je change d'engin: le mien est d'une lenteur... Au cours de la conversation, nous avons évoqué la rentrée de lundi: lui, ça le gonfle; moi, je n'y pense toujours pas: je crois que je m'en fous totalement.

- Hier encore, repas pour l'anniversaire de Jean-Claude. Lui aussi avait préparé quelque chose que j'adore: des gâteaux de foie de volailles avec des quenelles! Frédéric et moi lui avons offert une montre. Et les anniversaires de mars ne sont pas terminés: il y a encore ma belle-sœur et ma mère! Avec tout ça, j'ai réussi à ne prendre qu'un kilo.

- Acheté hier, en compagnie de Frédéric, une chemise en lin bleu pétrole. Ça sent les beaux jours. D'ailleurs, aujourd'hui fut une belle journée.

- Un petit film d'animation magnifique l'autre jour à la télé. L'histoire d'un gamin fâché avec la lecture et qui hérite de tous les livres de sa vieille tante décédée. Les personnages de contes lui apparaissent et lui demandent de lire une formule magique pour leur permettre de vivre encore longtemps. Seulement voilà, il faut lire et, quand il essaie, les lettres se mettent à sauter, à couler, à s'envoler, à l'agresser. Bien sûr, ça se finit bien. Et moi, malgré mon âge, j'ai marché!

vendredi 8 mars 2013

Pourquoi et comment ?

La question habituelle sur l'origine du monde: comment ?
Celle sur sa fin: pourquoi ?
Moi je leur préfère: d'abord pourquoi et ensuite comment. Mais sans doute suis-je pessimiste...

Surprise

Reçu aujourd'hui une carte postale d'Outre-manche, aussi sympathique qu'inattendue. Oui, c'était bien la bonne adresse! Merci, les amis, et bises en retour!

jeudi 7 mars 2013

Un jour, tu oublieras ta tête...

Le plus pénible, dans le fait de vieillir, c'est de ne plus savoir ce que l'on fait de ses affaires. Il m'est rarement arrivé, dans ma vie, de perdre quelque chose. La seule fois dont je me souvienne, c'était au glacier des Diablerets, en Suisse. Je devais avoir neuf ou dix ans et je faisais un petit voyage de deux jours avec l'école primaire. Au retour de l'escapade, mon mouchoir n'était plus dans ma poche. Une perte bien minime mais j'avais peur de la réaction de ma mère (réaction qui n'eut jamais lieu!).

Depuis quelque temps, je n'arrête pas d'égarer ceci ou cela. D'abord mon chéquier, et je devais envoyer des chèques urgents. Après des heures de recherches, j'étais prêt à téléphoner à ma banque pour faire opposition lorsque je l'ai retrouvé dans la poche externe de ma valise où je l'avais glissé pour aller je ne sais où.

Ensuite, ce fut au tour de mes clés. Mais là, le champ de recherches n'était pas très étendu: soit je les avais laissées sur ma boîte à lettres (d'où le retour rapidissime à mon immeuble pour vérifier), soit je les avait perdues en faisant mes courses au supermarché du coin. Un coup de fil me rassura: on les avait trouvées sur la porte vitrée d'un meuble de produits congelés.

Aujourd'hui, impossible de remettre la main sur ma carte d'identité. Habituellement, elle est toujours au même endroit, dans mon portefeuille. Quand j'ai voulu m'en servir pour retirer une lettre recommandée: rien. Valise, fonds de poches, tiroirs, dossier récent du notaire de Saint-Étienne, paperasses de ma mère dont je m'occupe, cartable: pas de carte! Et c'est en rentrant tout à l'heure que je suis tombé sur mon premier dossier retraite où l'on me demandais une photocopie de ce document. En soulevant le rabattant de ma photocopieuse, j'ai poussé un ouf de soulagement: elle était bien là! Rien de bien grave donc, mais ça suffit pour gâcher un après-midi ensoleillé.

mercredi 6 mars 2013

Deux jours hors les murs

Un petit tour à la campagne, ça ne peut pas faire de mal ! De lundi à ce matin, séjour chez Émile à Aix-les-Bains, sous un temps plutôt clément, en tout cas lundi avec un beau soleil. Après une longue promenade pédestre sur les bords du lac, avons d'abord visité une petite chapelle dans le village de Dressy dont l'autel vient d'être orné par un artiste local d'une poule rassemblant sous ses ailes sa couvée de poussins. Jouxtant la chapelle, un ancien atelier pour ferrer les bœufs.

Plus haut sur la montagne, le nouveau restaurant de la Chambotte, entièrement reconstruit (l'ancien ne satisfaisait plus aux normes de sécurité) et dont le belvédère surplombe très abruptement le lac du Bourget. Un mur métallique à claire voie reproduit le célèbre poème de Lamartine à Madame Charles. Juste en face, sur l'autre rive, l'abbaye de Hautecombe que nous avions visité lors de ma dernière visite.

Émile, dont c'était l'anniversaire hier (aujourd'hui c'est au tour de Jean-Claude), m'a gâté en matière de gastronomie en me servant tout ce que j'aime: poireaux vinaigrette, betteraves rouges, cervelle, tripes, terrine maison, et au restaurant que je lui ai offert, nous avons pris une tête de veau. Inutile de préciser que le sieste
 fut toujours la bienvenue...

dimanche 3 mars 2013

Après le poulet aux morilles de vendredi, ce fut la poule en cage de samedi. Nous sommes allés à l'exposition avicole de Puzignan, dans la banlieue est de Lyon. Et, comme il y a deux ans, cette exposition m'a bigrement intéressé, même si je n'y connais rien contrairement à Frédéric qui nommait par leur nom quasiment toutes les races de poules, de pigeons et de lapins représentées.

En entrant, j'ai tout de suite reconnu cette odeur de volailles que j'ai si longtemps fréquentée dans mon enfance. J'ai pensé à mon père que ces manifestations auraient enchanté lui aussi.

Il y avait les calmes, attendant patiemment le retour au bercail, les prétentieux qui gonflaient le jabot et voulaient présenter leur meilleur image, les paniqués qui ne cessaient de parcourir leur espace en tout sens en prenant bien soin de rester au fond de la cage, loin des visiteurs qui, pourtant, ne faisaient rien pour les exciter et puis ceux qui, philosophes, tuaient le temps en dormant.  Seuls deux pigeons, un mâle et une femelle dans deux cages voisines, paraissaient, quoique de races différentes,  avoir succombé à un coup de foudre et ne pouvoir s'empêcher de se donner de tendres baisers par becs interposés.

J'ai pris de nombreuses photos, fasciné comme un vrai gosse (mais ne confondant pas, tout de même, les animaux avec des peluches!), m'amusant parfois à ne retenir qu'un détail révélant leur splendeur.
(P.S: il y a des crêtes que j'aurais tout de même bien mises dans mon assiette!)

Cinquante, oui.


 Vendredi soir, c'était le repas pour l'anniversaire de Frédéric, dont la vraie date tombe aujourd'hui. Chez Patrick encore, et malgré l'absence de Francine qui venait de perdre son beau-père. Il y avait là des amis communs, des amis à moi et des amis à lui, dont Youpy, sa plus vieille copine que j'ai rencontrée pour l'occasion et qui m'a tout de suite plu par son humour et son intelligence. Et, malgré son visage marquée, je la trouve très belle.

Encore une fois, beaucoup trop à manger mais que de l'excellent, dont un poulet à la crème et aux morilles (Patrick nous avait gardé les cous et les têtes pour le lendemain) et le punch divin en apéritif.

J'avais demandé à Émile de m'emmener en voiture car je comptais bien faire honneur à la dive bouteille et je sais que lui, de ce côté-là, est plus raisonnable. Je ne le referai plus tant il voit mal et tant il m'a causé de frayeurs autant à l'allée qu'au retour.

Frédéric était tendu, nerveux, attentif à ce que tout se passe bien, et n'a pas, c'est sûr, profité à fond de cette soirée. Il en était de même pour moi en novembre. Et tout, évidemment, s'est très bien passé. Tous ceux qui étaient là aux deux anniversaires semblent prendre goût à ce petit restaurant de quartier où l'on mange si bien.

Maintenant, j'éprouve comme un peu de nostalgie que ces anniversaires soient du passé. Nous en avons tellement parlé et, finalement, ils sont passés si vite. Alors, merci, Frédéric, pour cette soirée et pour tant d'autres choses.

vendredi 1 mars 2013

Et un peu de musique, ça vous dirait ? (127)

J-S Bach, Ach Bleib' Uns, Herr Jesu Christ, Bww 649, Marie Claire Alain.

Momentini

- Vu récemment Vincere, le film de Marco Bellocchio  sur la première femme de Mussolini. Éprouvant!  Étrange ressemblance de l'actrice principale que je ne connais pas avec Alida Valli jeune, dans le regard surtout.

- Scandalisé par l'idée que l'on donne aux associations caritatives les produits retirés du marché pour cause de présence de viande de cheval à la place du bœuf. Ou bien ces produits sont comestibles pour tout le monde et peuvent rester dans les grandes surfaces (à prix baissés, bien entendu), ou bien ils ne le sont pour personne.Pourquoi encore insulter les pauvres ?

- Emmanuelle Riva n'a pas eu l'Oscar à Hollywood. Je m'en fiche: pour moi, c'est la meilleure.

- Marie-Claire Alain est morte ces jours-ci. Pas un mot nul part. Il est vrai qu'aujourd'hui, l'orgue n'est pas très porteur, moins que les petits bobos d'un Johnny Hallyday.

- Aller parler des droits de l'homme à Poutine, ce n'est pas comme pisser dans un violon ?

- Ce soir, c'est la fête: les cinquante ans de Frédéric! Mes soixante à moi ont déjà presque quatre mois. Le temps passe !

- Hier, vernissage d'une exposition de peintures de Gilles. Heureux de le revoir et d'échanger à cette occasion sur la Yankee. Mais lui aussi bien que moi, nous avons fait sécession.Et j'en connais d'autres qui s'apprêtent à suivre le même chemin.