vendredi 16 mai 2008

Service minimum.

Notre délicat président de la République n'a rien trouvé de mieux que de faire une déclaration sur le service minimum dans l'Education Nationale au moment de la journée d'action des syndicats. Si ce n'est pas une provocation, ça y ressemble tout de même beaucoup.

Je viens d'entendre sur France-Inter qu'il était également question à court terme de créer une Agence Nationale chargée de pourvoir au remplacement des profs absents ou malades. Là, je crois que les limites sont largement franchies.

D'abord, en période de vaches maigres dans les sondages, ce monsieur flatte les bas instincts d'une marge de son électorat en proposant des réformes démagogiques dont il est sûr qu'elles rencontreront son adhésion.

Ensuite, il focalise l'opinion sur l'absentéisme des enseignants, ce qui est un refrain déjà beaucoup chanté mais dont les paroles, d'après les analyses, sonnent étrangement faux. L'absentéisme chez les profs n'est pas plus important que dans les autres catégories socio-professionnelles. Et à qui cette agence fera-t-elle appel? Qui formera ces "remplaçants au pied levé"? Se verront-ils aussi méprisés que les AVS que l'on envoie au casse-pipe dans nos établissements? Je suis désolé de le dire: une maman ayant élevé ses enfants et désirant entrer dans l'éducation ne sera pas forcément un bon pédagogue. La bonne volonté ne suffit pas. Professeur, instituteur (je préfère ce mot à celui, imbécile et pompeux, de "professeur des écoles"), c'est un métier et cela s'apprend (ou devrait s'apprendre).

Enfin un de ses ministres défend la création d'un service minimum, car, dit-il, il ne s'agit pas d'un entreprise où l'on fabrique des vis et des boulons, mais d'un lieu où l'on forme des enfants.

Fort bien. Je comprends que les parents qui travaillent et qui n'ont que rarement à disposition les grands parents soient gênés par une grève dans les écoles. Mais toute grève est forcément gênante, d'autres beaucoup plus encore, par exemple dans les transports en commun.

Alors on confie l'accueil et la garde de ces enfants à des employés municipaux dont ce n'est absolument pas le travail habituel et qui n'ont pour la plupart aucune notion d'animation ou de psychologie enfantine. Je suis surpris qu'à une époque où l'on brandit à tout bout de champ le principe de sécurité, on n'hésite pas, pour concrétiser un effet d'annonce démagogique, à ériger en jardiniers d'enfants des gens qui n'ont pas la moindre idée de comment les gérer. Et que l'on ne me rétorque pas que, dans ces employés communaux, il y a des mamans qui savent parler aux petits: on ne gère pas un groupe de plusieurs dizaines de bambins comme on conduit une famille.

Et que dire des réformes successives que l'on nous demande d'appliquer dans les plus brefs délais quasiment à chaque changement de ministre. Un collégien a à peine le temps de terminer son parcours avant le lycée qu'une autre réforme vient remplacer la précédente. Ainsi les profs ne sont-ils plus que des distributeurs d'exercices en conformité avec ce que le dernier qui a parlé en haut lieu croit être la science absolue? Bien sûr, ces réformes sont de plus en plus ficelées à la va-vite, sans aucune concertation avec des spécialistes de l'éducation ni des hommes de terrain: à quoi bon quand on croit tout savoir?

Et ça, c'est respecter les enfants? C'est les considérer comme des "personnes humaines", comme dit l'autre? Ce ne sont pas des vis et des boulons, ce sont des cobayes, même pas, car l'on ne teste rien, on tente simplement de récolter quelques voix supplémentaires aux prochaines élections (ce qui n'a pas l'air de vraiment fonctionner) et de laisser une trace dans l'histoire de cette grande institution. Désolé, Messieurs, n'est pas Jules Ferry qui veut, et les traces susnommées rappellent souvent bizarement celles laissées par ces étranges animaux qui portent leur maison sur leur dos.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Bel argumentaire !