Depuis quelques temps, devant un malaise croissant dans les rapports entre les élèves des différents niveaux (de 6° à 3°), nous avons mis en place un certain nombre d'occasions où les élèves, ici les cinquièmes, peuvent s'exprimer, dire leurs peurs et proposer leurs espoirs d'amélioration du quotidien.
Je n'ai pu assister à une de ces réunions le jour des funérailles d'Amédé mais j'ai suivi de près le projet. Autant dire tout de suite que j'étais contre au départ: non que je redoute de donner la parole aux élèves, mais j'expliquerai plus tard pourquoi.
Aujourd'hui, nous nous réunissions entre professeurs principaux de 5° et RN (responsable du niveau). Une réunion d'une heure où je me suis profondément emmerdé, n'ayons pas peur des mots. Je n'ai pas voulu intervenir pour dire ce que je pensais car on me prend de plus en plus souvent pour un emmerdeur dans ce genre de réunions, et puis je voulais voir comment celle-ci évoluerait. Eh bien, elle n'a pas évolué. Il faudra que j'en parle avec Gilles, qui était là aussi et n'avait pas l'air non plus de s'amuser beaucoup, même s'il faisait des efforts considérables pour paraître concerné.
De quoi a-t-il été question? Alors que le dessein initial était de faire apparaître les problèmes mais aussi les désirs des élèves au quotidien dans notre collège et de tenter de les responsabiliser en les écoutant et en leur donnant éventuellement carte blanche pour la réalisation de certains projets à condition que ces projets soient bien ficelés, nous n'avons évoqué pendant une heure que moyens de renforcer la discipline, d'améliorer la surveillance, d'interdire, de punir, d'étouffer dans l'œuf toute initiative.
Seule proposition qui semblait avoir l'aval de la RN: la création entre midi et deux d'un groupe de danse jazz moderne par des filles. Explication de l'acceptation: elles sont tellement gentilles! Alors que, bien sûr, les projets présentés par des garçons sont refusés sous prétexte que... Sous prétexte que quoi au fait? Aucun officiel, mais un qui traîne dans la tête de cette dame depuis toujours: les garçons, ça ne pensent qu'à mal et c'est violent.
Du coup, j'ai pris fait et cause pour un projet de slam mis en musique, alors que je ne connais rien au slam ni à la musique urbaine, et que un des deux garçons qui le présente me semble effectivement parfois à recadrer gentiment. Mais bon Dieu, j'en ai marre de ce sexisme imbécile. On ne refuse pas un projet, pas plus qu'on ne l'accepte, pour les beaux yeux de X ou de Y mais parce que ceux qui le proposent savent le présenter, argumenter, défendre leur bébé et ont suffisamment de capacités d'organisation pour que cela tourne rond. Stop aux gentilles fifilles nunuches ou pas. Et qu'on ne vienne pas me dire encore une fois que je suis misogyne: je me contente, parfois vivement c'est vrai, de rééquilibrer la balance trop fortement en défaveur des garçons. Ils ont déjà un pourcentage de profs anormalement féminins, qu'on les laisse être ce qu'ils sont à cet âge-là, c'est à dire des chiens fous, un peu cons cons, brusques mais pas forcément violents et qu'on ne cherche plus sans cesse à les émasculer.
Voilà pourquoi j'étais dès l'origine opposé à ce projet. Il ne suffit pas de se gargariser de bons mots et d'idées généreuses. On veut donner la parole aux élèves? Bravo: j'applaudis à deux mains, j'en redemande. Mais que l'on sache bien à quoi l'on s'engage et que l'on s'y tienne! Chaque fois ce prurit de bons sentiments s'est terminé dans le silence au mieux, la réprobation beaucoup plus souvent. On a donné la parole aux élèves, on les a fait rêvé. Pour rien: aucun projet ou presque n'a dépassé le stade du velléitaire, aucune parole n'a été prise au sérieux. Voilà, je n'y crois plus.
Qu'on les laisse donc tranquilles, nos élèves, qu'ils s'occupent entre eux de leurs rêves, de leurs désirs. Que venons-nous, alors que ce n'est pas indispensable, mettre nos grands pieds d'adultes sur leurs plates-bandes adolescentes? Je trouve ça malsain. Contentons-nous de les observer d'un peu plus loin, de veiller à ce que tout se passe du mieux possible, de leur donner un coup de pouce quand il le réclame, ou mine de rien, sans qu'ils le sachent, et tout ira bien.
On ne peut pas leur demander de croire en des gens qui ne croient pas à ce qu'ils font.
jeudi 12 mars 2009
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3 commentaires:
Certains ne croient même pas en ce qu'ils sont !
R slamant ... A voir de toute urgence.
Bises, J.
Mais c'est le principe même du projet ! Ça s'agite, ça fait des propositions, il y a des pré-réunions pour préparer les réunions et on se quitte en se disant qu'il faudra se revoir, au moins pour fixer une date !
Et comme le dit le proverbe: on a le choix dans la date!
Certains même ne savent pas ce qu'ils font!
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