mardi 10 mars 2009

Autobiographie.4: Autoportrait à la manière de Michel Leiris.

Cette année, j'aurai cinquante-sept ans, deux bons tiers de la vie d'un homme. Au physique, je suis plutôt grand, encore que les nouvelles générations de géants ont eu tôt fait de me rabattre dans la catégorie des moyens.

J'avais des cheveux châtain foncé et frisés serrés. Aujourd'hui, ils sont toujours là mais gris et coupés court, coiffés à la romaine, comme le sont César et le premier empereur, Auguste, sur le marbre de leur buste. Autant que je puisse en être un juge impartial, les traits caractéristiques de ma physionomie sont un visage allongé, qui s'étire encore avec un excès de fatigue, mais dont l'angulosité est aujourd'hui atténuée par une barbe poivre et sel à tendance anarchique, des oreilles dont on a longtemps dit, moi le premier, qu'elles étaient grandes et qui ne le sont pas autant que cela, un front développé, plutôt régulier, aux golfes pénétrant de plus en plus profondément la chevelure.

Mes yeux sont bruns derrière mes lunettes; l'un d'eux, le gauche, semble plus petit à cause d'une légère ptôse de la paupière supérieure qui accentue, lorsque je ne souris pas, le côté sévère, en tout cas sérieux, de mon visage. Mon teint est plutôt pâle et j'ai mis longtemps à découvrir qu'il ne demandait qu'à brunir joliment à condition de l'exposer suffisamment et intelligemment au soleil.

J'ai souvent la peau sèche, ce qui se voit surtout sur le dessus de mes mains lorsque j'oublie (souvent) d'hydrater mon épiderme. Ces mains sont plutôt longues, avec des veines bien apparentes et apparentes aussi, de plus en plus, quelques taches de son annonçant l'âge qui avance. J'aime mes mains, mais je les aurais préférées plus fines, comme celles de ma mère, ou plus allongées, comme celles de mon frère.

Ma tête est assez grosse pour mon corps et, depuis toujours, à cause de torsions de la colonne vertébrale, elle penche légèrement du côté droit, comme pour rétablir un équilibre. L'aspect "romantique" ainsi obtenu a, en son temps, fait beaucoup de ravages. Je trouve mes jambes un peu trop courtes par rapport à mon grand torse. Elles ont longtemps été le point de fixation de mes complexes physiques, au point de refuser de me mettre en short, mais le sport les a musclées et je n'y pense plus guère aujourd'hui. Lorsque je marche, je sautille un peu et ne connais pas la parallèle. On pense davantage à l'écrevisse qu'au cheval qui va l'amble.

J'essaie de rester mince mais je ne peux rien contre la mollesse de la peau qui, un jour ou l'autre, finira par l'emporter sur mes efforts. J'aimais m'habiller élégamment mais je me sens aujourd'hui plus à l'aise dans des vêtements déjà usagés, faits à mon corps, des vêtements qui me connaissent et ne sont pas chichiteux pour s'assembler.

Je déteste voir mon reflet dans une glace, à l'improviste dans la rue ou parce qu'au restaurant j'occupe la place face au miroir. Cela ne veut pas dire que je sois laid mais concrétise, je pense, une vieille peur d'enfant bêtement engendrée par la grand-mère qui m'éleva: il ne fallait pas se contempler dans un miroir (péché d'orgueil?), le diable risquait d'apparaître au lieu de son propre reflet.

A la manière de Michel Leiris, L'Age d'homme, 1939.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Evidemment, nous ne nous ressemblons pas, en de nombreux points. Déjà, je suis beaucoup plus jeune que toi :).
Et pourtant, à certains endroits, j'ai l'impression de me voir. Un peu.

Calyste a dit…

Beaucoup! Beaucoup! Non mais....

Anonyme a dit…

PORTRAIT ROBOT
Bin, j'ai voulu voir ce que ça donnait... euuuuh!..c'est p'tête pas tout à fait au point!! pourtant n'ai bien suivi les indications...
Après ça tu devrais te retrouver dans la glace avec plaisir :-))

Calyste a dit…

Beau talent de dessinateur, Piergil, et même si ce n'est pas tout à fait ça, bravo à toi et merci pour le clin d'œil.