mardi 2 février 2010

Un seul être vous manque.....

Dans un peu plus d'une semaine, Aurélien ne sera plus au collège. Aurélien, c'est un surveillant, un pion comme on disait autrefois, mais c'est bien plus que cela.

Comment il est arrivé jusque chez nous, lui originaire de l'Ain, je n'en sais rien. D'abord sous les "ordres" d'un conseiller d'éducation, il a, au moment du licenciement de ce dernier, très vite pris la charge de travail sans toutefois en avoir le salaire. Levé à cinq heures tous les matins, affrontant pour venir les routes verglacées ces derniers temps, il est toujours là, et presque toujours souriant. A son âge, à peine plus de vingt ans, c'est assez rare.

Il a une sorte de contact naturel avec les enfants et les ados: à la fois ferme et accueillant, proche d'eux sans être leur copain, il a su établir des relations d'un autre ordre que celles habituellement de règle entre le chat et les souris. Beaucoup d'élèves, quand ils ont appris son départ prochain, en ont été très peinés et le lui ont dit.

Pour moi, Aurélien, c'était aussi un peu plus que cela: d'une relation purement professionnelle, nous sommes vite passés à quelque chose de tendre et de sain à la fois. Lorsque mon ancien cartable a rendu l'âme sous le poids des livres, il m'a offert le sien, prétextant que maintenant, il ne lui servirait plus à rien. Un jour, comme ça, sans prévenir, il s'est mis à me faire la bise le matin, en arrivant, ou plutôt lorsque, moi, j'arrive car il arpente la cour et les couloirs bien avant moi. Je pourrais presque parler, si je ne risquais pas d'être ridicule, d'une relation comme de père à fils avec l'amitié en plus.

Dire que son départ me touche et m'ennuie, c'est peu dire. Il sera remplacé par un militaire à la retraite. Pourquoi pas! Bienvenue! Cependant ses gestes d'affection vont me manquer terriblement et, au-delà de ce sentiment purement égoïste, je crains que le collège ne soit pas près de retrouver un garçon de cette valeur humaine.

Une enveloppe est déjà en train de circuler entre adultes pour lui offrir un cadeau de départ. Moi, j'ai décidé de faire bande à part. Pour lui, je ne me contenterai pas d'une participation à une collecte générale. J'ai déjà l'idée de lui offrir quelques bonnes bouteilles de vin, à lui qui fait bien la cuisine et me semble fin gourmet et puis autre chose (mais quoi?) de plus durable, qu'il conservera en souvenir de notre amitié. Enfin,, je l'espère, comme j'espère bien aller faire de temps en temps quelques virées au pays des Ventres Jaunes.

4 commentaires:

D. Hasselmann a dit…

Une histoire de fin de quelque chose, oui, dans les couloirs des bâtiments de l'Education nationale, il n'y a pas que des gens sans coeur et des coups de couteau attirant les portiques et autres caméras de surveillance.

Bel exemple de "vie scolaire" dans sa transgression douce des barrières imposées.

Cornus a dit…

Même dans le privé, j'ignorais qu'un conseiller d'éducation pouvait être licencié. Tu en as peut-être déjà parlé, mais je n'ai pas suivi.
Et ce jeune surveillant, j'imagine qu'il s'en va pour de bonnes raisons.
Moi aussi, j'ai eu des collègues qui sont partis. Un en particulier qui m'a vraiment marqué. Je n'avais pas trop voulu lui montrer combien j'étais touché par son départ, jamais je ne lui avais montré que je tenais à lui. Ce n'est que plusieurs mois après son départ que je me suis confié à lui par courrier électronique et que je lui ai témoigné mon amitié de façon explicite. Je crois avoir évolué en un peu mieux depuis.

piergil a dit…

Aurelien...c'est bien lui qui a eu droit à voir ces deux yeux immortalisés dans la galerie des regards?
...et en plus avec toutes ces qualités, j'veux bien l'adopter moi aussi! ;-)

Calyste a dit…

Dominique, nous n'en sommes pas encore à l'Apocalypse, comme certains voudraient le faire croire.

Merci, Cornus, de me poser la question. j'ai effectivement oublié de dire pourquoi Aurélien s'en allait: c'est tout simplement parce qu'il a obtenu un poste plus important, plus intéressant et plus près de chez lui. Le connaissant, je suis certain qu'il va très bien s'en sortir.

Tu ne te trompes pas, Piergil, c'est lui, même en personne. Je vois que tu as l'œil (et même les deux)! Pour l'adoption, n'y compte pas! Je me le garde! Égoïste? Eh bien oui!