lundi 15 février 2010

Elle et lui

Elle: en jean bleu clair et T-shirt rose pâle, blonde comme il se doit, coupe emmêlée, jeune. Elle est légèrement penchée en avant, la main gauche tentant de maintenir fermement la planche épaisse de bois clair qu'elle coupe, la droite tenant en biais la scie neuve qu'elle utilise à cet effet. Dans son effort, elle ne tire pas la langue mais le cœur y est.

Lui: jean plus foncé, bleu toujours, T-shirt blanc immaculé, coupe moyen-court ébouriffée comme elle. Il est appuyé sur le bout de la planche, de chaque côté de l'appui d'un tréteau, les deux bras verrouillés au niveau du coude. Lui aussi est un peu penché mais dans une attitude plus de repos que d'extrême concentration. Il a, posés devant lui, une feuille de papier et un crayon (un autre est à peine visible dans la main droite), sans doute pour les notes prises des dimensions à respecter.

Un jeune couple qui s'installe et a fait appel à une grande surface du bricolage, celle où j'ai passé des heures ces derniers jours tant je m'y sens bien (!!!), deux êtres qui vont entamer la vie commune et ne savent sans doute pas encore que les travaux, ça salit, et que la vie commune, ça peut user. La photo sur le catalogue est idyllique: souhaitons-leur tout le bonheur du monde et même un peu plus, puisqu'il s'agit d'eux et de personne d'autre. Pourtant...

Pourtant, à y regarder d'un peu plus près, le tableau n'est pas aussi parfait qu'il en a l'air. On peut à bon droit se demander s'il n'y a pas une pointe d'humour dans cette photo publicitaire, certes pas de l'humour voulu par la grande surface qui compte bien s'en tenir à "tu verras, mon p'tit loup, comme on va être bien, à tout partager!" mais peut-être un clin d'œil discret de la part du photographe. Ou alors c'est un hasard ou un effet de mon esprit tordu. Moi, ce qui m'attire l'œil, c'est le sourire de l'homme: j'ai vraiment l'impression qu'au lieu du sourire de satisfaction béate de celui qui voit sa compagne si habile aux travaux manuels, on lit sur ce visage , sur ces lèvres plissées, une sorte de rictus de moquerie, une condescendance mal dissimulée, le sentiment profond qu'il va se passer quelque chose, que sa compagne sera incapable de mener à bien la tâche entreprise, qu'elle finira par lui demander son aide, à lui, l'homme, de l'espèce de ceux qui savent de tout temps se servir de leurs mains.

Mais je me trompe, peut-être.

3 commentaires:

piergil a dit…

Moi non plus, m'en lasse pas des rayons bricolage!...les vendeurs sont de tellement bons cou...Oups! ..conseil!

KarregWenn a dit…

Piergil > J'avais point remarqué dis-donc que les vendeurs du rayon bricole étaient torse- poil. C'est pas possible, ils remettent leur fringues quand ils me voient arriver, ou quoi ?

Calyste a dit…

Moi non plus, je n'en ai jamais vu dans cette tenue, K. Un fantasme piergilien, sans doute (mais je l'adopte. Pas Piergil, le fantasme!)