Retour de OXC (Odyssée) aux Invites de Villeurbanne. Je veux écrire ce billet ce soir, à chaud tellement ce spectacle est beau.
Pendant une heure et quart, j'ai oublié que j'étais debout. Le spectacle était tout autour de la place Lazare Goujon, devant le TNP. Simples projections lumineuses sur les immeubles, puis dessins, ombres chinoises, images animées, et des voix qui disent un texte, qui chantent, qui crient, et de la musique d'aujourd'hui, percussions et électronique, rappelant étrangement la musique antique. Des personnages aussi, plutôt équilibristes et grimpeurs, des décors mouvants, des podiums inspirés pour les récitants.
Les voix, comme la musique, semblent circuler autour de la place, elles se modifient, s'altèrent, se transforment, enflent et finissent dans le cri, ou s'éteignent dans un soupir. Les textes sont souvent ceux-là même d'Homère. Et comme sa langue est belle. La longue litanie des morts, les ombres des femmes qu'Ulysse rencontre aux Enfers, ces noms grecs anciens composent un magnifique poème vocal.
Le visage d'un vieil homme apparaît pour commenter, parfois: c'est celui de Pietro Cittati, sans doute lors d'une interview donnée pour la sortie en 2004 chez Gallimard de son livre La Pensée chatoyante, Ulysse et l'Odyssée. Magnifique analyse, au-delà de tout cliché. La pensée, en particulier, que la poésie tue, à propos du chant des Sirènes, ces femmes à corps d'oiseaux carnivores étant filles de Mnémosine et donc soeurs des Muses. Ce sont en quelque sorte les muses noires.
Les références du texte apparaissent sur la façade de la mairie, non sans un humour certain quant à la dénomination des morceaux musicaux. Par exemple, "Déchant d'amour" lorsque Ulysse quitte Calypso, ou bien "luth final" lorsqu'enfin il retrouve Pénélope, et que le comédien acrobate gravit cette façade puis le beffroi de l'horloge, moment magnifique du grand final.
Bravo Villeurbanne. Voir autant de spectacles de qualité en si peu de temps et dans un espace si restreint relève de la gageure. Pari relevé et tenu par la grande voisine de Lyon. Je crois qu'aujourd'hui je me suis créé une habitude annuelle.
En rentrant en vélo, je me suis souvenu de l'immense plaisir esthétique que j'avais ressenti à Prague, en 1990, au spectacle de la Lanterne Magique portant également sur l'Odyssée et mélant aussi étroitement plusieurs procédés (voix, musique, ombres chinoises, voilages, etc).
Décidément, lorsque je parle à mes élèves de texte fondateur à propos du long poème d'Homère, je n'emploie pas de vains mots.
dimanche 22 juin 2008
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2 commentaires:
Que de souvenirs sur ces photos...Mes dix premières années étaient très proches de là...
Elles sont malheureusement un peu floues: je n'ai pas un appareil très performant la nuit.
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