lundi 27 octobre 2008

Lendemain.

Aujourd'hui, le temps est gris. Ce matin, j'ai profité des dernières lueurs pour reparcourir en courant le même itinéraire jusqu'à l'aire d'autoroute. Il n'y avait personne. La traque est-elle, elle aussi, déjà entrée en "automnage"?

Maintenant, la pluie ne devrait plus tarder. J'ai devant les yeux, en regardant par la fenêtre, l'endroit d'où hier s'élançaient les coureurs pour une animation sportive locale. Étrange contraste. Tout a été démonté, le gros portique gonflable rouge du Conseil Général, les barrières, les bandes bicolores interdisant le passage. Plus rien ne laisse deviner qu'hier il y avait du soleil, des sportifs, des spectateurs et de la musique.

J'ai regretté de ne pouvoir participer à cette course. Émile ne m'ayant pas prévenu, je n'avais pas sur moi de certificat médical. Il y avait différentes épreuves: une marche de six kilomètres, une course de huit, une autre de quinze, plus quelques compétitions pour les plus jeunes. Je suis descendu près du point d'où étaient donnés les départs pour faire quelques photos du public, de l'ambiance et surtout des concurrents dont plusieurs m'ont fait regretter de ne pas être à leur côté dans l'effort et la sueur. L'un d'entre eux, alors que j'essayais d'être discret, a même remarqué que je le photographiais et n'en a paru que très content, passant et repassant devant moi, mine de rien, l'air sérieux mais vérifiant régulièrement que j'étais toujours là.

Quand tous les départs ont été donnés, je me suis rapproché encore et installé contre une barrière métallique qui a failli basculer (oui, J., je suis sans doute "tombé" sur la seule de tout le parcours à ne pas être fixée aux autres). L'homme qui se tenait contre la suivante s'est mis à rire et m'a lancé une remarque sympathique. IL n'en fallut pas plus pour que nous passions presque deux heures ensemble, rejoints au bout d'un moment par sa femme.

C'est un ancien sportif qui a dû arrêter la couse à cause d'une maladie des os et ne peut plus aujourd'hui se défouler que sur un vélo. Bien sûr, nous avons parlé de la course, du plaisir ressenti, des sensations éprouvées pendant ces kilomètres d'épreuve, de tout ce que ceux qui ne courent pas ne peuvent pas comprendre. Pendant ce temps, les plus rapides commençaient à arriver et, à de rares exceptions près, des gens à bout d'efforts, je reconnaissais sur tous ces visages la joie d'être parvenu au bout et le plaisir irradiant tout le corps et l'esprit.

Mon voisin connaissait certains participants et les apostrophait au passage en riant. Plus tard, il me proposa de venir, avec ses amis, boire du vin blanc chez lui, à quelques mètres de là. J'ai hésité puis refusé, pour ne pas gêner et pour ne pas m'imposer de contrainte, à moi qui, ces jours-ci, ne les supportent guère.

Après son départ, je me suis rapproché du "village" pour voir, pour entendre, pour sentir. J'y ai retrouvé un coureur de mon âge avec qui j'avais échangé deux mots avant le départ, un homme sec, à la barbe et aux cheveux courts grisonnants. Il semblait timide et à la fois volontaire pour me parler. Chaque phase semblait le propulser en avant par l'effort qu'il s'imposait pour la prononcer. Devait-il maîtriser une difficulté d'élocution, bégaiement ou autre, avant de s'exprimer à voix haute? J'ai aimé cette discussion gratuite avec un étranger aperçu un instant dans la communion d'une passion et que je ne reverrai probablement jamais.

Aujourd'hui, devant la mairie, on attend les premières gouttes. Tous ces hommes sont rentrés chez eux, ont repris leur travail, le chef-lieu est retombé dans sa morosité et seules les feuilles arrachées par le vent aux branches des arbres donnent encore un peu de mouvement à l'endroit déserté.

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