Ce seraient les derniers mots d'Auguste, l'empereur Auguste: "La pièce est dite".
Et bien dite, terminée par un feu d'artifices de compliments dont je rougirais de vous rapporter le moindre. Lorsque je suis sorti du collège vers 13h, le soleil brillait dans ce bel automne, mais il aurait plu, je crois que je ne l'aurais pas senti tant j'étais sur un petit nuage.
Certaines choses que m'a dit l'inspectrice m'ont profondément touché et fait plaisir: que j'étais jeune, plus jeune que bien des collègues nés longtemps après moi, que j'étais pétillant, vivant, léger, aérien, et surtout, ce qui m'a vraiment touché, que j'aimais mon métier et que j'aimais et respectais mes élèves. Je suis vraiment heureux que cela se sente, se perçoive d'une manière aussi évidente. Ce métier aura été toute ma vie et c'est celui que je rêvais de faire étant enfant. J'ai vécu mon rêve de gosse. Combien n'ont pas cette chance-là? J'avais dit que je ne révèlerai pas les compliments, et je viens d'en exposer certains. Ce n'est pas pour m'installer sur un piédestal dont je n'ai que faire, c'est que, sincèrement, je ne m'y attendais pas de la part d'une inspectrice réputée pour sa rudesse et sa cruauté.
Avec moi, avec nous, car ma collègue a eu le même traitement, elle a été charmante, souriante, détendue, plaisantant librement, échangeant de façon parfois presque personnelle, voire intime. Elle veut nous garder sous le coude pour des projets pédagogiques, en tant que conseillers. Moi, très sincèrement, je ne m'y vois pas. Ce que j'aime dans l'enseignement, ce sont ces sales gosses, pas mes collègues (enfin, pas tous) ni l'institution.
Là encore, comme le dirait sans doute J., je fais montre de mes goûts (j'avais, lapsus, tapé coups!) de maso. Mais je suis sûr que, le jour où il me faudra quitter définitivement l'enceinte d'un établissement scolaire, ce sont eux qui vont me manquer, leur avachissement toujours prêt à s'animer si l'histoire racontée est bonne, leurs rires d'adolescents qui masquent mal les subsistances de l'enfance, leur naïveté, leur odeur (oui, une salle de classe après un cours, ça a une odeur particulière, pas forcément bonne, mais particulière qui me manquera, elle aussi), leur "bonjour, m'sieur" du matin, dans la cour, leur "à demain" une fois la journée finie, leurs rêves, leurs mauvaises humeurs, leurs fulgurances, leur intelligence, leur tendresse, les livres qu'ils m'apportent pour me les montrer, les confidences parfois, parce qu'ils ont confiance, leurs petits mensonges, leurs dents qui tombent encore, leur rhume, leurs excuses à deux sous pour un travail non fait, leur volonté forcenée plus ou moins consciente de vouloir vous charmer à tout prix.... Et ils me charment comme, paraît-il, je les charme. Approche mutuelle consentie et respectueuse du mystère de l'autre.
Je voulais parler de mon inspection et je parle des élèves. C'est tout de même bien plus important, non? Ce sera sans doute la dernière avant ma retraite, même s'il me reste quelques années à travailler. Je ne regrette pas d'avoir entendu ce que j'ai entendu aujourd'hui. J'ai eu une carrière en toute liberté, sans cette contrainte du jugement venu d'en haut, j'ai fait ce que j'aimais comme je le voulais, et le jour où l'institution vient observer ma pratique, cela plaît. Comment ne pas être heureux? Ce soir, je suis fatigué, mais je ne sais pas si je vais dormir facilement.
J'éprouve quelque chose d'un peu semblable (en moins intense pourtant) que ce que j'ai ressenti à la fin du semi-marathon: le plaisir d'avoir fini, d'y avoir pris du plaisir et de ne pas avoir démérité.
mercredi 15 octobre 2008
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10 commentaires:
Des collègues nés longtemps après toi, diantre elle y va avec du tact :)
Merci, Olivier. Décidément, on va se nommer "relecteurs" l'un de l'autre!
Heu... c'était pas une correction. Et maintenant il me semble que ça ne va plus, à moins que ça soit moi.
S'il sont nés avant toi (longtemps ou pas), tu es forcément plus jeune. Enfin, je crois :)
J'en étais sûre. J'aurais dû faire un pari.
Ben oui, Olivier, la fatigue....
Vous avez déjà gagné mon amitié, Anna, et sans parier!
Du positif, rien que du positif !
Pas par chance,mais par ce que vous êtes et comment vous accomplissez votre métier.
Ce n'est pas la fonction qui compte mais la façon dont on la remplit.
Je suis très heureuse pour vous, pour cette joie si belle que vous vivez.
Merci, Danielle. Maintenant, je me sens, ou vais bientôt me sentir, pétillant, aérien, comme elle le disait elle-même.
Trop de choses à répondre sur une myriade de points abordés dans ta note.... Cela ne pourrait se faire que lors d'une conversation à batons rompus... un jour peut-être...? Il faudra penser à imprimer ce billet au préalable pour l'annoter et le ressortir, entre la poire et le fromage...
Et, bravo, bien sûr.
Eh ! bien, je me joins avec enthousiasme à ces concerts d'éloges et de félicitations !
Encore merci.
Oui une discussion me plairait, entre poire et fromage ou pas. On a certainement beaucoup de choses à se dire! Enfin, je pense.
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