Je me souviens d'un petit garçon de sept ou huit ans qu'un ancien déporté, apparenté à la famille, avait emmené voir Nuit et Brouillard. Ce petit garçon est ressorti de la salle physiquement malade et psychiquement perturbé pour de nombreuses années. Lorsqu'il faisait des cauchemars, les allemands y avaient toujours le rôle des méchants et l'angoisse naissait souvent du bruit des avions venant pour des bombardements qu'il n'avait, en réalité, jamais connus, étant né après la guerre.
Ce petit garçon est devenu adulte, il est devenu professeur et, pendant des années, dans le cadre d'une semaine européenne, il a emmené sa classe de cinquième en Alsace visiter le Parlement Européen,le château du Haut-Koenigsbourg, Strasbourg, Colmar et, de l'autre côté du Rhin, un petit bout de Forêt Noire allemande. Il a aussi dû convaincre moult parents de la nécessité pour leurs enfants de connaitre le camp du Struthof et l'histoire qui y est liée. Sur place, il était aidé par d'anciens déportés de ce camp qui, malgré leur douleur parfois encore palpable, acceptaient de servir de guide à de jeunes enfants. L'un d'entre eux, d'ailleurs, était au départ des Amitiés Franco-Allemandes.
Ce petit garçon, c'était moi. Cet adulte,ce professeur, c'est moi. Et pourtant, je suis écœuré par la proposition de Sarkozy de faire parrainer chaque enfant mort en déportation par un enfant de CM2. Outre l'aspect purement démagogique de l'annonce (après les catholiques, ce sont les juifs que l'on essaie de caresser dans le sens du poil), je trouve absolument odieuse cette idée mortifère. Qui va leur parler de tout ça? Comment vont-ils y être préparés? Combien vont être profondément perturbés, comme je l'ai été aussi dans mon enfance? Dix ans, c'est encore trop jeune pour connaitre la cruauté du monde. Laissons-leur le temps, le droit de rêver, d'être des enfants insouciants et libres. Parlons-leur d'Ulysse et de ses merveilleux voyages, de tous les dieux du Panthéon grec et romain, de la nymphe poursuivie par Apollon et que son père transforma en laurier, de toute cette mythologie qui les fascine tant.
N'essayons pas d'en faire des adultes trop vite, mais le temps venu,n'oublions pas d'en faire des adultes. Le temps venu.
vendredi 15 février 2008
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1 commentaire:
Le petit Nicolas et les religions... Effectivement Calyste, la démagogie de cette annonce a de quoi révulser !
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