Au théâtre hier soir avec Kikou.
Ceci exige maintenant la mise en place de toute une intendance, car Kikou n'est plus apte à se déplacer seule. George, son mari, me l'a "livrée" devant les Célestins, une demi-heure à l'avance. Nous avons demandé où se trouvait l'ascenseur. Dans ce vieil édifice, il faut d'abord descendre au sous-sol pour changer d'ascenseur et remonter au niveau des corbeilles. Du sourire et de l'humour de la part des ouvreurs et ouvreuses: c'est bien. Kikou ayant réclamé le tapis rouge, un jeune homme lui a répondu qu'on venait justement de le déposer au pressing, mais que l'on ferait tout pour le réinstaller pour sa prochaine visite. Y aura-t-il une prochaine visite?
Kikou avait, comme d'habitude, fait un effort d'élégance. Ça m'émeut beaucoup de voir cette petite bonne femme qui m'arrive à peine sous le bras ne pas se laisser aller, lutter contre sa maladie qu'elle soupçonne pourtant être irrémédiable. Elle était habillée d'une sorte de chasuble en lainage brun qu'elle portait sous une veste ouverte pour masquer sa silhouette de profil, qu'elle trouve trop empâtée.
Le spectacle: Vers toi, terre promise, tragédie dentaire de Jean-Claude Grumberg. Histoire d'un couple juif athée à Paris, ayant perdu une fille en camp de concentration et l'autre en la confiant à une institution religieuse de bonnes sœurs qui, l'ayant convertie, ne la rendra jamais. L'homme, dentiste, se forge un personnage de vieil aigri bougon. Elle, plus pleurnicharde mais en même temps plus réaliste, mûrit peu à peu le projet de migrer en Israël, ce qu'ils finiront par faire. Une pièce tournant autour du sujet de la dépossession (la fille, le cabinet, le pays), émouvante mais à l'humour corrosif, aux réparties lapidaires qui font mouche, et servie par d'excellents comédiens, en particulier elle, madame Spodek, interprétée par Christine Murillo. Cette tristesse qui se moque d'elle-même me convient parfaitement en ce moment. Une des répliques qui m'a le plus fait rire:
- Devine qui est-ce qui est mort?
- Ces temps-ci ou durant les dernières années?
La pièce étant assez courte, j'ai proposé à Kikou d'aller ensuite boire quelque chose dans un bar proche du théâtre, de prendre du temps rien qu'à nous, sans hâte, sans stress, comme on le fait rarement, plutôt que de rentrer immédiatement. Tous les deux, nous avons eu la même impression: être redevenus des étudiants qui échangent sur la culture et refont le monde le temps d'une bière pour moi, d'un thé pour elle.
Puis taxi jusqu'à la Croix-Rousse. Je suis resté quelques minutes avec elle et son mari et, peu avant minuit, j'ai redescendu la montée de la Grande-Côte et pris un vélov à l'opéra pour rentrer dans mon troisième arrondissement. Je ne savais pas encore que, pendant que je pédalais, avec toujours la même sensation de liberté, Amédé s'en allait.
samedi 31 janvier 2009
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