Autrefois, c'étaient les grand-mères que l'on entendait, sur le pas de leur porte, adresser cette ultime recommandation aux enfants partant pour l'école. Cela voulait dire: tiens-toi correctement, ne réponds pas au maître, prends ton mouchoir pour te curer le nez, mets la main devant ta bouche lorsque tu bâilles, sur tes cahiers trace les traits avec une règle, ne fais pas de taches d'encre, écris lisiblement, relis-toi pour corriger tes fautes d'orthographe, et lave-toi les mains aussi souvent que nécessaire.
Aujourd'hui, les grand-mères n'ayant plus guère l'occasion de participer à l'éducation des enfants, je pense que la fameuse phrase qui, en si peu de mots, disait tant de choses, a totalement disparu de l'horizon des familles. Il n'est besoin pour s'en rendre compte que de contempler leur progéniture dans le cadre scolaire. Mais je n'ai pas envie, ce soir, d'enfourcher ce cheval-là.
Actuellement, "sois sage" fait, j'en ai l'impression, un tabac dans le "monde" homosexuel. Je l'ai entendu plusieurs fois prononcé par des amis, alors que nous nous quittions et que rien ne prédisposait dans la conversation à donner ce conseil de sagesse. D'où cette mode sort-elle? Pourquoi adresser cette recommandation à ses amis?
Désir quasi maternel de les protéger? Remplacerait alors, par l'incitation à l'abstinence, l'antique "Sortez couverts!" ? Ce qui traduirait bien l'évolution "morale'" actuelle de la société française. Petit jeu entre amis, parents/enfants comme autrefois marchande/client? Volonté de se créer ainsi une sorte de "famille" d'adoption, de foyer confortable. Injonction ironique et tendre à la fois à faire exactement le contraire? Équivaudrait alors, en beaucoup plus recherché et complice, au vulgaire "bonne bourre!". Volonté de marquer son territoire sur l'autre, comme si l'on voulait qu'il se souvienne de vous jusqu'à la prochaine rencontre? Serait l'équivalent de "Ne m'oublie pas!", au parfum léger de myosotis.
Je ne sais pas. Mais j'aime bien cette façon de se quitter qui ne prononce pas de mot de séparation, qui ne renvoie pas à Dieu ou au Revoir, qui glisse vite sur les lèvres comme un dernier baiser que l'on adresse, qui tisse le fil des retrouvailles comme une certitude prochaine. Oui, "Sois sage!" me plaît bien, même si je n'obéis pas forcément toujours!
samedi 15 novembre 2008
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7 commentaires:
A la lecture du titre, je me suis dit " Lui ?!?" :) Et puis ta conclusion m'a rassuré et amusé.
J'utilise souvent cette expression aussi. Je ne suis pas sûr que ses raisons soient aussi élaborées que tout ce que tu en dis, mais en même temps, en effet, pourquoi pas.
C'est sûr que je le dis. Pour ma part, c'est exactement le contraire de sa signification première, mais cela sous-entend tant de choses, qu'un commentaire est trop court pour l'expliquer.
Par contre, je ressens toujours de la tendresse en le disant.
Bises, J.
"Sois sage", c'est ce que je dis toujours à mon chéri quand nous nous quittons pour quelques jours, que ce soit lui ou moi qui s'absente.
Je croyais avoir réussi à faire taire ma jalousie quasi maladive, mais là, chaque fois, elle nous ressaute à la gueule.
Malgré moi, c'est plus fort que moi.
Et chaque fois, nous nous séparons, lui fâché, et moi tout penaud et contrit d'avoir, "en si peu de mots, dit tant de choses"... imbéciles.
J'ai cru un moment que tu m'avais entendu ! Je n'avais pas remarqué à quel point cette expression était devenue commune ches les gays.
Merci de nous faire prendre conscience de ces petits mots que moi aussi j'aime employer. Pour ma part, cette petite expression est très complice, amicale voir plus... Le sois sage, en effet, peut avoir plusieurs connotations. Mais à chque "sois sage" lancé, les deux personnes se comprennent mutuellement.
Bises, S.
On me dit jamais ça à moi, pas plus que je ne le dis. Suis-je normal docteur ?
Par contre moi je dis, à ceux que j'aime le plus, parfois, mais seulement mes amis : fais pas de bêtises (ou : pas de bêtise hein !)
^^
Du coup, tiens, comme ça, je me souviens maintenant que mon ex, avec qui j'ai partagé quelques années, me disait ça et c'était très "paternel", bien qu'on avait seulement 2 années d'écart. C'est troublant, pour le coup !
Tendresse et complicité, c'est ce qui ressort de vos commentaires, messieurs. J'en suis heureux, car je ressens la même chose.
Je ne pensais pas, en l'écrivant, que ce petit billet de rien du tout allait vous intéresser!
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