jeudi 20 novembre 2008

Mais je me radoucis.

En tournant le dos à la banderole affichée sur la façade de l'école républicaine, je découvre... le bibliobus, que je n'avais pas remarqué en m'approchant. Bien solitaire sur cette place libérée des voitures, sans aucun passant que moi, ce soir. Seule, au sommet de quelques marches, la porte d'entrée vitrée dispense un peu de lumière à l'extérieur.

Ainsi donc, ça existe encore, les bibliobus, même à Lyon? Tout de suite, je suis transporté dans mon souvenir, à Terrenoire, une banlieue très ouvrière de St Etienne où mes parents ont tenu un commerce pendant plusieurs années. Au début, nous n'avions pas d'appartement autre que celui attenant au magasin d'alimentation, soit une cuisine au rez-de-chaussée, qui donnait accès aux différents entrepôts, et deux chambres à l'étage: une pour mes parents et mes sœurs, l'autre pour mon frère et moi. Pas de quoi prendre trop d'aises. C'est dans cette chambre, pourtant, que j'ai écrit mon premier roman, que j'ai caché ces écrits aux yeux des autres, surtout à ceux de ce frère qui avait l'art de toujours tout découvrir (y compris la photo d'un de mes amants, nu, que ce dernier m'avait donnée).

Nous n'avions pas de salle de bains. La toilette se faisait sur l'évier, et régulièrement aux bains et douches municipaux. Pour s'y rendre, nous traversions à l'aller comme au retour la grande place où stationnait un soir par semaine le bibliobus. Je finis par m'y abonner. Mon frère, qui venait avec moi aux douches m'abandonnait pour l'étape dans le camion: la lecture n'était pas son univers.

Généralement, il n'y avait personne à l'heure où je m'y rendais. J'avais donc tout le loisir de toucher, de sentir, d'extraire des rayonnages, de remettre en place ces volumes qui tentaient de me séduire ou que je tentais d'apprivoiser. J'ai ainsi ramené et lu dans la chambre au-dessus du magasin des centaines de romans aussitôt dévorés. Lesquels, je ne m'en souviens plus. Un seul subsiste dans ma mémoire aujourd'hui, parce que l'ouvrage était épais et que son titre m'avait intrigué. Il s'agit de L'Eternité plus un jour, de George-Emmanuel Clancier. Je me rappelle simplement que ce roman m'avait plu à l'époque. J'avais environ dix-sept ans à ce moment-là. Mon goût littéraire restait encore à affiner sans doute.

Un peu plus tard, nous avons déménagé, tout en gardant le magasin. Plus de place, plus de confort, mais finie la poésie des vieilles chambres, finies les visites aux Bains-Douches et fini le bibliobus, puisque, cette année-là, je devais préparer mon bac tout en donnant un sérieux coup de main au magasin. Je lui dois pourtant, à ce bibliobus, parmi mes meilleures soirées d'adolescent solitaire.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

"Je lui dois pourtant, à ce bibliobus, parmi mes meilleures soirées d'adolescent solitaire."

Ah bon? z'avaient caché des revues porno dans les rayons? j'ai eu beau fouiner partout n'en ai jamais trouver dans ma bibliothèque, ni même la queue d'un "rat"!....pourtant... ;-)

MY a dit…

Oui ça existe encore les bibliobus !
Quand j'étais gamin il passait au bout de ma rue (Soeur Janin)toutes les semaines. On avait une carte et on prenait plein de bouquins. Ma bibliophilie est en partie née dans une bibliothèque roulante !

Anonyme a dit…

De bien jolis souvenirs de ta jeunesse...

Bon, je sais bien que les lecteurs sont assoiffés de 'gratiné' et j'ai un peu honte de poser des questions sur "ça" mais ce n'est pas vraiment l'aspect 'sexe' des choses qui m'intéresse, en l'occurrence :

-Une photo d'un amant NU ? Quand tu étais ado ??? Quelle audace ! j'aurais jamais osé... Tu/il aviez quel âge ?

-As-tu déjà écrit, ou comptes-tu écrire, une note, sur tes relations avec ce frère en question ? Particulièrement à cette époque ? (deux frères et des soeurs -combien?- je me sens particulièrement concerné..)

Excuse si je suis trop indiscret...

Calyste a dit…

Je ne savais même pas ce que c'était à l'époque, Piergil. Je n'avais pas besoin de revue, j'avais déjà les travaux pratiques.

Depuis, Y., je préfère posséder les ouvrages que je lis, au risque de ne plus avoir de place sur les rayonnages des bibliothèques. Mais j'aimais la fièvre qui me prenait chaque fois à fureter dans ces bibliothèques roulantes.

Non, tu n'es pas indiscret, Lancelot. Puisque tu le demandes, je ferai donc un de ces jours prochain un billet ou deux sur le sujet (un frère, deux sœurs dont une décédée enfant. Je suis l'aîné.). En ce qui concerne l'amant, j'avais environ dix-sept ans et lui la trentaine. J'étais totalement fou de son corps et de nos relations sexuelles. Il m'avait donné cette photo que je ne pouvais pas détruire tellement elle m'excitait et que j'avais du mal à cacher. Elle a fini dans des toilettes du camping de Lourdes, déchirée par mes soins dans ce lieu saint où mes parents avaient décidé de prendre leurs premières vacances en famille. Mais ça, c'est une autre histoire...