dimanche 10 mai 2009

Vidéos et clichés.

J'ai reçu hier un mail avec, en pièce jointe, une vidéo censée être drôle. Parfois, j'en reçois des romantiques, dégoulinantes de rose et de bleu avec fondus enchaînés et flous artistiques. D'autres sont de pseudo messages humanitaires ou des chaînes de l'"amitié" assurant le bonheur à ceux qui transmettent et les pires malheurs à ceux qui brisent l'élan. Je n'ai toujours pas compris comment des gens qui se disent mes amis peuvent croire que cela me fait plaisir de recevoir de telles inepties. J'ai tenté de le dire gentiment à certains, ils n'ont pas compris. Il faudra donc que je recommence de façon un peu plus dynamique.

Hier, il s'agissait en fait de la resucée d'autre chose que je connaissais déjà. La différence essentielle, c'est que cette fois-ci, apparaissait pour la première fois la véritable raison de cette vidéo: une pub pour les stylos Bic, avec le slogan accrocheur: "Assure au moins à l'écrit!". Et que voit-on sur cette vidéo? Un examinateur dans une salle, seul, assis derrière un bureau et, de l'autre côté de ce bureau, un élève (âge: bac, sans doute), debout, en train d'être cuisiné. Juste un exemple pour que vous compreniez bien:
- Question de l'examinateur: -Qui était Galilée?
- Réponse du candidat: - Un inventeur célèbre. Je crois qu'avant lui, la terre elle tournait pas.
Suit un plan sur la mine déconfite de l'examinateur.

A mourir de rire, non? Cette pub est littéralement débile. Débile la situation: jamais sans autorisation spéciale un candidat à un examen ne pourrait être filmé. Débile la position des deux personnages: un prof assis a, quand il l'interroge, un élève assis face à lui et non pas debout. Qu'est-ce que c'est que ces traces d'ancien régime? Débile la question: qui, aujourd'hui, quel enseignant accepterait d'évaluer un candidat par des questions dignes d'un quizz pour magazine estival en mal de sujet de fond? Débile toute la scène et surtout la réaction de l'enseignant qui, dans la plupart des cas, laisse deviner un mépris profond pour l'élève qu'il a face à lui. Or, sauf exception rarissime, cela ne se produit jamais. Attitude totalement réservée ou au pire saine colère, mais pas le mépris!

Que Bic s'appuie sur de tels clichés datant d'un autre âge pour vendre ces stylos-bille, je m'en moque. Ce qui me gêne bien davantage, c'est que je suis sûr que la majorité des spectateurs découvrant cette pub pense qu'elle traduit l'exacte vérité, que cela se passe réellement ainsi dans l'école de la République.

Et quelles conclusions en tirer? Soit que les profs sont des tortionnaires posant, pour les faire chuter, des questions absurdes et sans intérêt aux élèves qui, eux, vivent avec leur époque. Soit que le niveau des élèves a bien baissé et que ces pauvres professeurs doivent bien s'en voir devant tant de bêtise et d'inculture. Or dans les deux cas, ce n'est pas à la gloire de l'école. C'est un peu comme lorsqu'on montre, dans des téléfilms, un curé tenté par la chair: les uns seront scandalisés et se demanderont où va l'église, les autres jubileront en voyant un de ses membres chuter comme le premier des humains. Or tous auront tort, à mon avis.

Pour l'école, c'est la même chose. Alors qu'on veuille bien arrêter de la caricaturer tant dans les propos que dans les images, qu'on laisse faire leur travail aux profs consciencieux (et c'est la majorité) et que l'on cesse de ne juger le niveau qu'à l'aune de son propre savoir et de ce que l'on a appris des dizaines d'années plus tôt.

4 commentaires:

totem a dit…

Tout le tord est bien du côté de l'agence de pub et du publicitaire qui concocte le message dans l'ignorance la plus totale du monde de l'enseignement, et en se vautrant dans la caricature.

Calyste a dit…

L'essentiel est de faire sensation, pas de faire vrai! Qui ira vérifier, d'autant qu'on flatte la schématisation?

Lancelot a dit…

Ta note me fait rire, ou plutôt sourire. Ce style de cliché à la noix, on baigne dedans jusqu'au cou. Depuis l'époque de 'Pause-Café' à la télé, RIEN n'a changé. J'étais lycéen (ça ne date donc pas d'hier), on se tordait de rire devant ces cucugnateries de séries TV où les lycées semblaient tourner par la seule volonté de deux profs et demi, ternes et caricaturaux au possible, d'une cantinière "copine" permanentée, et d'un proviseur en noeud pap, réac et coincé, comme il se doit... J'ai cessé de m'énerver sur ces trucs. Je crois que le 'grand public' sait très bien qu'il s'agit de clichés faux, mais qu'il aime les clichés faux. C'est comme les histoires d'amour avec romantisme dégoulinant. Personne dans la vraie vie n'irait échanger des répliques aussi ineptes, mais on en redemande sans cesse...

Ah , baaaah.... Ca ne nous empêche pas de continuer à faire notre métier, les phantasmes de Bic et consort.... Laisse pisser....

Calyste a dit…

Moi, ça m'énerve toujours!