vendredi 11 novembre 2016

Mes ratés

J'ai parlé il y a peu de mes détestations musicales. Dans le même ordre d'idées, voici quelques ratés de ma vie. Il y en a sûrement beaucoup mais certains m'ont plus marqué que d'autres.

Un des tout premiers, dans mon souvenir, est l'examen pour l'attribution des bourses des mines. Mes parents comptaient beaucoup sur ma réussite car la somme attribuée était conséquente ( bien davantage que les bourses nationales) et pouvait largement faciliter mon entrée au collège.

Je devais avoir dix ans. Je vivais dans un petit hameau, à la campagne, et n'avais jamais mis les pieds à Saint-Étienne. Mon père m'emmena en voiture. Découverte de la ville noire (à l'époque), de ses fumées, des coulées de métal en fusion, que l'on apercevait de la rue,  dans les aciéries. Un monde terrifiant qui fut, dans mon esprit, la première image de l'enfer.

Ma petite école de campagne me plaisait, avec son préau où pendait la corde à nœuds, les champs qui l'entouraient où les vaches nous regardaient à la récréation, son bal du mois de juin et son spectacle de Noël. Des odeurs aussi et ses enseignants.

A la ville, j'arrivai dans un bâtiment lugubre et impressionnant pour le gamin que j'étais : une façade austère où s'étalait la devise de la République, des couloirs immenses où résonnaient les pas, et des odeurs qui n'étaient pas les miennes. Je venais de découvrir les écoles de la troisième république, toutes semblables où que l'on soit en France et que l'on ne peut confondre avec rien d'autre.

De l'examen, aucun souvenir. J'étais tétanisé. Ce n'était pas mon monde, ces vieux messieurs à l'allure sévère et ces citadins beaucoup plus sûrs d'eux que moi. Il me fallut ensuite mes bonnes notes du collège pour comprendre que je n'étais pas plus bête qu'eux. Bien sûr, je ne fus pas reçu. Il m'en reste encore aujourd'hui une sorte de mal être lorsque je pénètre dans ces écoles ou que je passe devant en voiture. Le petit paysan n'est pas tout à fait mort en moi.

2 commentaires:

Cornus a dit…

Je pense bien te comprendre, d'autant que tu as déjà expliqué plusieurs fois cet écart citadin/bourgeois et paysan/ouvrier (pour simplifier) et je détecte aussi dans mon vécu quelques rares bribes équivalentes vues de loin. J'ai connu aussi l'échec (pas à beaucoup d'examens, essentiellement à un - je ne parle pas de mes redoublements). La réussite aux concours ou aux examens est souvent cruciale pour occuper certains postes, notamment pour les cadres de la fonction publique (ou les écoles qui y mènent), mais quand on constate après dans les faits la véritable "valeur" de beaucoup de ces bêtes à concours, il y a de quoi se poser des questions et ne pas avoir de complexe. Moi, je ne regrette rien.

Calyste a dit…

Cornus : j'ai un peu pensé à toi en écrivant cet article. Moi non plus, je ne regrette rien, en particulier de ne jamais avoir tenté l'agrégation, cela grâce aux exemples d'agrégés (que je jugeais souvent désagrégés) que j'avais sous les yeux.