On parle, en haut lieu de confier le rôle de garant pédagogique, tenu jusque là par les inspecteurs d'académie, aux chefs d'établissement. D'où la grève de demain dans l'enseignement. Je ne participerai pas à cette grève (il y a longtemps que je me suis détourné de ce genre d'activité) mais je la comprends et l'approuve entièrement.
Le système actuel a beau comporter de nombreux défauts, en particulier celui de visites trop peu fréquentes (on parle d'une moyenne de sept ans entre deux inspections. J'ai dû, pour ma part, patienter plus de vingt ans), il n'en présente pas moins une certaine garantie d'objectivité et d'indépendance. On n'est bien sûr, pas à l'abri de quelques mouvements d'humeur le jour de la présence de l'inspecteur, certains de ces messieurs (ou dames) font preuve parfois de drôles de petites manies bien irritantes, la note obtenue progresse bien souvent en fonction de l'âge de l'enseignant et il est rarissime qu'elle soit baissée. Mais la plupart des inspecteurs sont des gens de qualité qui connaissent leur matière, savent de quoi ils parlent et donnent parfois de bons conseils à des enseignants débutants.
Au lieu de cela, que veut-on nous imposer? Le regard de chefs d'établissement qui non seulement n'ont pas tous, loin s'en faut, été professeurs auparavant et ont en revanche tous le regrettable inconvénient d'être à la fois juges et parties. Sur quels critères vont s'appuyer ces gens-là pour attribuer une note à tel ou tel? Il avait été question, il y a quelques années, de baser cette note sur le mérite mais le projet avait fait long feu: comment évaluer le mérite de chacun devant des types de classes aussi hétérogènes qu'elles le sont actuellement? Le pourcentage de réussite aux examens n'est en rien significatif de la valeur de l'enseignant. Enseigner à Louis-le-Grand ou dans un collège de banlieue ne peut être considéré comme le même métier et ces deux situations ne sont pas comparables et ne peuvent être comparées.
On imagine d'autre part très facilement l'ambiance que ce genre de rapport entre enseignants et chefs d'établissement créera immanquablement, installera dans les écoles. Une sorte de hiérarchisation contraignante et stérile comme elle existe bien souvent dans les entreprises. Peut-être d'ailleurs est-ce cela le véritable motif de la réforme annoncée: mettre les enseignants au pas et les faire rentrer tous dans un moule unique où pas un cheveu ne dépasse. Adieu, un peu partout, l'innovation, la créativité, l'originalité. Bonjour le népotisme et le copinage.
Les chefs d'établissement ont déjà actuellement un pouvoir de regard sur les enseignants: si la note d'une inspection est attribuée sur 60 points dans l'avancement de la carrière, celle du chef d'établissement l'est sur 40. Y sont pris en compte le rayonnement et la ponctualité entre autres, ce que je trouve parfaitement justifié. Mais être évalué en grec par exemple par quelqu'un qui n'en sait même pas lire l'alphabet, je m'y refuse catégoriquement.
J'ose espérer que cette réforme absurde ne verra jamais le jour. Au pire, si elle est mise en place, je plains mes collègues qui auront à en subir les méfaits et je doute qu'elle contribue à susciter de nouvelles vocations, vocations dont la source se tarit de jour en jour. Moi, j'ai fait mon temps.
mercredi 14 décembre 2011
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10 commentaires:
népotisme,copinage...clientélisme.A quand la petite enveloppe?
Ipsa: à moins que ce ne soit, adressé aux parents, le "tapez 1, tapez 2".
Tant qu'on leur dit pas "tapez Calyste"....
Remarque dans ce cas de figure on n'a pas pas besoin de dire de faire, ils font !
Je me demande parfois : jusqu'où oseront-ils aller pour tout déstructurer ?
Faut croire que ça les dérange gravement tous les acquis du "peuple". L'enseignement pour tous ? aux chiottes.
Et commencer par faire rentrer les profs dans le rang ! Comme dans le privé, les obliger à jouer les lèche-cul pour avoir promotion. Voire même pour seulement garder leur boulot !
Et vive la pensée unique !
Purée, j'aurais 20 ans, je serais sur les barricades !
Mode colère/off
A part ça tu vas bien Calyste ? sourires.
La Plume: je le leur conseille!!!
Caly: comme quelqu'un qui sera en vacances demain soir! C'est-à-dire fatigué et impatient.
Je viens de trouover un job ..; à l'inspection académique, la bête noire de tous les profs.
Je suis tout à fait opposée à ce système de notation par un "gestionnaire", un administrateur.
C'est tellement la France que nous allons, je le crains, avoir pour 5 années encore...
Le plus grave est bien, comme tu le soulignes, de supprimer toute spécificité de notre métier et nous fondre dans un corps unique de fonctionnaires (ou du moins ce qu'il en reste!). Le copinage sera roi et les collègues qui remuent beaucoup de vent dans nos établissements à monter force projets à l'utilité pédagogique douteuse se feront bien voir des principaux et proviseurs "noteurs". Le système des inspections n'était pas non plus parfait et j'ai gardé de mauvais souvenir de certains (contrairement à toi, j'ai été inspecté 6 fois en 20 ans de carrière!). Si la majorité faisait bien son travail et partageait son expérience pédagogique, d'autres au contraire ne devaient leur place qu'à des promotions douteuses, parce qu'ils s'avéraient incapables de continuer à faire cours devant des classes devenues de plus en plus difficiles.
Comme pour les "réformes" imposées depuis 5 ans, ce ne sont pas 24h de grève (la x ième depuis le début de l'année, on les compte plus!) qui feront reculer le ministre.
En mai prochain dans l'isoloir, le choix d'un bulletin de vote sera nettement plus efficace!
Georges: mais non, Georges, il n'y a pas de sots métiers. Ça peut éventuellement être intéressant.
Zeus: attendons pour voir.
J'avais commencé un commentaire hier, mais je n'ai pas eu la force de le publier. Du coup, je l'ai transformé ce soir en note.
Cornus: que j'ai lue avec attention.
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