C'est toujours par ces deux mots courts mais éloquents que commencent les mails que m'envoie parfois, de plus en plus souvent hélas, la secrétaire de direction de mon ancien établissement scolaire. Je sais alors qu'en ouvrant ce mail, je vais découvrir qu'un de mes anciens collègues, enseignants ou autres, est parti.
Je m'y attends, bien sûr, puisque, à l'époque où j'ai été embauché, j'étais parmi les plus jeunes, voire le plus jeune pendant un certain temps. Mais c'est chaque fois un pan qui s'écroule avec la perte de ces gens qui m'ont été proches, qui pour certains ont été des amis.
Aujourd'hui, il y a avait un de ces mails dans ma boîte. L'ancienne économe est morte avant-hier, à 102 ans. Bel âge pour mourir, sans doute, mais c'est une femme qui m'a beaucoup marqué. J'en parlais toujours avec le plus grand respect. Je connaissais son nom, je viens d'apprendre son prénom : Yvonne.
Avant d'être prof, j'avais été pion dans cet établissement. Je surveillais les immenses études du soir dans une salle tout en longueur. Je n'avais que quelques années de plus que les lycéens que je surveillais et des liens s'étaient noués rapidement. Un soir, nous avions parlé des manifs qui, à l'époque, étaient plus que fréquentes (un peu après 68) et, à la suivante, j'avais aperçu quelques-uns de ces élèves dans les troupes qui défilaient. La semaine suivante, j'étais viré. Motif officiel : on n'avait plus besoin de moi.
Cette femme, Yvonne, douce et adorable, m'avait défendu bec et ongles et avait finalement obtenu que l'on me rembourse aussi mes frais de transport, ce que l'on me refusait sans son intervention. Je l'ai revue seulement une ou deux fois par la suite. J'en avais demandé des nouvelles, plusieurs fois. On m'avait simplement répondu qu'elle était à la retraite. Personne ne semblait plus se soucier d'elle, qui, pourtant, avait été un personnage clé de l'établissement. Je la croyais morte depuis longtemps, dans l'indifférence. Non : elle méritait bien, pour son humanité, de vivre aussi longtemps.
mercredi 28 juin 2017
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3 commentaires:
Pensées pour elle. Tu lui rends un bel hommage à travers toi.
Bises +++
Ah oui, quand même ! J'ai personnellement toujours une pensée pour ces personnes un peu "invisibles" et qui font pourtant tourner les boutiques, surtout si elles sont discrètement sympathiques. Pour ma part, j'ai beaucoup de respect pour elles. En tant que directeur, je m'efforce d'y être d'autant plus attentif.
Nicolas : oui, c'est une femme qui m'a marqué, comme je le disais, pour son humanité et sa compétence.
Cornus : je crois que tu fais bien, et je n'en doutais pas un seul instant.
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