dimanche 19 septembre 2010

Ascenseur

Il fait soleil. L'humeur aussi est au beau. Je dois prendre cet ascenseur que je ne connais pas et j'attends sagement que la cabine, arrêtée alors haut dans les étages, descende jusqu'à moi. Lorsqu'enfin elle apparaît, un léger carillon retentit pour prévenir de sa présence. La cabine est minuscule, non pas dans le sens de la largeur car, sur cette dimension-là, elle est comme toutes les autres cabines d'ascenseur, mais dans celui de la profondeur. Autrefois aussi, dans mon ancien logement, près de la Préfecture, j'avais connu ce genre d'habitacle un peu étroit, le seul que ces immeubles très anciens permettaient d'installer sans toucher aux structures lourdes des murs. Mais jamais étroite à ce point.

Pourtant pas un seul instant, je n'hésite. Je dois (pourquoi ?) monter et je monte. La porte de métal coulissant se referme sur moi. Je ne peux me tenir que de profil, les bras collés au torse pour ne pas risquer de toucher la paroi qui commence à défiler à quelques centimètres de mon oreille gauche. Je ne sais pour quelle raison, alors que l'ascenseur est déjà en marche, je dois alors appuyer sur le bouton de l'étage à atteindre. Mais les rêves ne sont pas toujours logiques, n'est-ce pas. C'est à ce moment-là que je me rends compte que je ne peux pas effectuer le mouvement de rotation nécessaire: les boutons sont derrière moi, sur mon côté gauche, et il m'est impossible de les voir ou les toucher.

La cabine continue pourtant à monter. Étrangement, je n'éprouve aucune angoisse, malgré la paroi qui, sans raison, se rapproche parfois encore davantage de moi. C'est un peu comme si je vivais une expérience scientifique ou que quelqu'un d'autre, ayant emprunté mon apparence était à ma place coincé dans cette cabine minuscule.

Pourtant je me réveille. Il fait froid cette nuit. Il est quatre heures. Aucun bruit nulle part. Pas encore la moindre trace de lumière. Je rajoute sur mon lit l'épaisseur du peignoir de bain qui attend mon réveil sur le dos du valet et je me rendors. Il y a eu d'autres cauchemars en début de nuit, il y en aura d'autres jusqu'au matin. Mais ceux-là, je les ai publiés.

16 commentaires:

Valérie de Haute Savoie a dit…

Il m'arrive aussi de rêver d'ascenseurs, qui montent, qui n'ont souvent pas de parois, des boutons approximatifs. Et même si ces rêves sont à mi-chemin du cauchemar, ce n'en sont pas vraiment.

Cornus a dit…

C'est horrible cette histoire d'ascenseur, d'autant que cette histoire d'étroitesse me rappelle un rêve récurrent : je me trouve dans un souterrain ou des couloirs très très étroits et je dois avancer ou suivre des gens beaucoup plus maigres et petits que moi et il m'est impossible de revenir en arrière. J'ai peur de rester coincé, j'ai peur de mourir étouffé.

Sinon, si ça peut te rassurer, les ascenseurs avec paroi extérieure féifilante, il n'y en a plus, c'est interdit depuis une vingtaine d'années.

Lancelot a dit…

Sans vouloir jouer les anciens combattants du sommeil, c'est hyperclassique, ces histoires de cauchemars où l'on est enserré dans des espaces confinés...

Petite perle de ta note : le détail sur le peignoir rajouté. J'adore. Pourquoi ? J'en sais rien, et je m'en fiche. Ca m'attendrit, et ça me fait sourire. Un peu comme si je t'avais vu te rendormir. Bisou.

KarregWenn a dit…

Et pourquoi dans les rêves les ascenseurs ne descendent jamais, hein Sigmund ?

Cornus a dit…

KarregWenn> Calyste n'a pas dit descenseur, c'est pour ça ;-)

Assomption a dit…

Para la noche próxima: las escaleras dan también bellas pantorrillas.

Escalacion a dit…

fierts@ Assomption : surtout quand on rêve qu'on est poursuivi, et qu'on ne parvient pas à les grimper. Terrible.

Calyste a dit…

Oui, Valérie, comment expliquer que ça n'en soit pas alors que tous les ingrédients sont réunis pour? J'éprouvais du détachement en me voyant dans cette situation.

Les couloirs qui rétrécissent, je connais aussi, Cornus, mais il y a longtemps qu'ils se tiennent tranquilles, eux. Pourvu que ça dure!

Merci, Lancelot. Avec toi comme ange gardien, je ne risque rien. Les cauchemars n'ont qu'à bien se tenir!

KarregWenn et Cornus, je vous laisse régler ce débat ensemble!

Bien que ne connaissant pas l'espagnol, j'ai à peu près compris ton commentaire, Assomption. Mais que veut donc dire "pantorrillas"? D'ailleurs, je ne connais pas vraiment d'Assomption non plus!

Et "fierts", moi pas comprendre non plus. Bon, la suite, ça va. Beau pseudo "Escalacion", et qui colle à merveille avec le contenu de ce billet....

Cornus a dit…

Franchement, comme je ne lis pas Sigmund, ni ses disciples, ni ses contradicteurs, j'ignorais vraiment que ces histoires de boyaux et couloirs qui rétrecissent étaient quelque chose de classique. Chez moi, c'est devenu davantage préoccupant suite à mon choc anaphylactique où j'avais étouffé pour de vrai.

Calyste a dit…

Ouh la la ! Ça doit être assez effrayant, Cornus, de manquer réellement d'air?

D. Hasselmann a dit…

Dans "Ascenseur pour l'échafaud", la lame de la guillotine - qui n'existe que dans le titre - est suspendue virtuellement sur Maurice Ronet : à l'époque, la peine de mort n'avait pas encore été abolie.

Michel Onfray nie forcément que les rêves d'ascenseur aient la moindre signification - mais son pamphlet anti-Freud non plus.

La prochaine fois, cher Calystee, pensez en vous endormant à prendre l'escalier !

Cornus a dit…

En effet, quand on manque d'oxygène, les secondes paraissent longues, sachant qu'en plus on a tendance à s'affoler. C'est bien après qu'on se rend réellement compte de la gravité de la situation dans laquelle on a été. Alors forcément, ça laisse des traces. Outre les rêves (c'est pas grave), il y a les peurs d'étouffer en s'endormant (je crois que cela m'a enfin passé) et un truc que je ne supporte pas : qu'on me mette la main devant le nez et la bouche qui me rappelle sans doute le masque à oxygène qui ne semblait pas faire effet.

Calyste a dit…

Dominique: une lame de ce type est également présente dans une nouvelle fantastique d'Edgar Poe et elle ne cesse de descendre sur le prisonnier attaché, si je me souviens bien.

Moi, c'est dans l'eau, Cornus, lorsque l'on essaie de me faire boire la tasse ou simplement de jouer: ma petite sœur étant morte d'une hydrocution, je ne supporte pas et deviens immédiatement violent.

D. Hasselmann a dit…

@ Calystee : vous avez raison, je crois que c'est "Le Puits et le pendule", et je me souviens du moyen-métrage qu'en a fait Alexandre Astruc (je n'ai pas encore vérifié dans Wikipédia) et qui m'avait impressionné quand je l'avais vu dans un ciné-club - un nom désuet !

D. Hasselmann a dit…

@ Calyste (sans e) : je viens de vérifier, c'est bien ça... mais il y a un hasard incroyable : c'est aussi Maurice Ronet qui jouait dans ce film (1964) !

Calyste a dit…

Merci, Dominique. Vous m'avez retrouvé le titre de cette nouvelle et vous m'apprenez l'existence de ce moyen-métrage. Je dois aussi vous dire que Ronet a été mon acteur de référence pendant toute mon adolescence. Pour moi, il était la séduction même, avec Cary Grant chez les américains. mais Ronet me plaisait davantage parce que moins lisse.