J'ai pris, ces jours derniers, retraite approchant, deux décisions.
La première de barrer sur mon carnet d'adresses tous les noms et numéros de téléphone que je ne compose plus jamais, soit parce que les amis en question sont morts, soient parce que, peu à peu ou plus catégoriquement, ils se sont évaporés dans la nature. Mon carnet est ancien et aujourd'hui, ce sont les biffures qui l'emportent.
La deuxième, d'appeler les rescapés, un à un, un par jour ou presque. Trois numéros composés jusqu'à ce soir.
Le premier d'un ami à Paris, celui qui m'avait hébergé lors de mon dernier séjour. Il n'était pas seul mais m'a assuré que je ne le dérangeais pas. Mais visiblement, il avait, en me parlant, l’œil rivé sur la télévision pour suivre un jeu dont j'entendais la musique anxiogène à l'autre bout du fil.
Le second, un ami de très longue date comme le premier, qui vit depuis longtemps avec un compagnon. Tendresse bien présente cette fois-ci mais égrenage cent fois entendu des nouvelles de la famille et de sa propre santé.
La troisième, mon amie de la Creuse, ancienne collègue, qui, retirée là-bas depuis de longues années avec son mari, y plonge peu à peu dans une vieillesse tranquille et assumée. Elle était très contente d'avoir de mes nouvelles mais n'avait rien de nouveau à m'apprendre, comme si sa vie s'était arrêtée ou qu'elle avait voulu l'arrêter volontairement, pour s'installer dans la pente inexorable.
Tout cela me fait penser à une condisciple de fac, autrefois amoureuse de moi, jamais perdue de vue et qui, à chaque nouvelle année, m'envoie régulièrement une carte de vœux achetée à l'Unicef dont, par avance, je sais par cœur le contenu. Autrefois, je la faisais ouvrir par Pierre et lui en racontais le contenu: je n'étais jamais très loin de ce qu'elle avait effectivement écrit.
Alors, dans ces moments-là, j'ai envie de hurler et de sortir dans la rue, de me perdre au milieu de la foule pour contempler le visage d'inconnus.
jeudi 30 mai 2013
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6 commentaires:
J'ai de plus en plus le sentiment qu'il vaut mieux qu'il ne se passe pas grand chose dans ma vie. J'attends en effet des épreuves pas très agréables avec mon vieillissement inéluctable, et tant que cette situation tranquille se maintient, je me dis que tout va bien....
J'ai de mon côté arrêter de téléphoner aux personnes qu'on a toujours l'impression de déranger et d'écrire sur papier ou électroniquement à ceux qui ne répondent JAMAIS, même pour donner des nouvelles élémentaires. Des personnes que je ne vois plus, qui plus est. Je trouve ça dommage et j'ai nettement l'impression de les emmerder.
Je comprends ton envie de hurler.
En effet, un hiatus s'installe entre les personnes qui se laissent glisser sur la pente et les résistants qui ont l'intention d'occuper leur retraite d'une manière constructive en entrant dans un nouvel épisode actif de leur vie.
Dans son quotidien, et surtout si la passion a été mise dans le métier, on a rarement grand chose de bien intéressant à vivre et/ou raconter.
Il n'en reste pas moins vrai qu'on peut en tirer plaisir(s) et le faire partager... Aurais-je dit "momentini"? ;-)
Tout est affaire de regard(s) et de cœur qui bat.
Pas de carnet d'adresses chez Plume, mais des quantités de bouts de papier dont certains inutilisables (des n° de tel sans nom !). Un répertoire dans le portable quand même, que je nettoie impitoyablement de temps à autre.
J'adore bavasser au téléphone, juste parfois pour entendre la voix de l'ami(e) et j'écris des mails, rares mais très longs. Tout m'intéresse chez mes potes, même le quotidien le plus banal !
Renepaulhenry: je te comprends. Je n'exprimais ici qu'un point de vue très égoïste.
Cornus: je le ressens d'autant plus que j'ai toujours été très fidèle en amitié.
André: et j'ai l'impression que tu te situes dans la 2eme catégorie!
Jérôme: c'est vrai mais j'espère bien, quant à moi, retrouver de nouvelles passions très vite!
La Plume: moi aussi, mais, comme le disait Cornus, on a parfois vraiment l'impression de tomber comme un cheveu sur la soupe.
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