jeudi 11 décembre 2008

Mon vieux lycée.

Une photo rajoutée sur Copains d'avant: la classe de Maths Spé 1971/72 au lycée Claude Fauriel à St Etienne. Je n'y étais pas, je venais d'entrer en fac à Lyon, mais j'aurais pu y être. Sur la photo, je reconnais quelques-uns des garçons avec qui j'ai passé le bac, je peux même encore mettre des noms sur deux ou trois visages.

Je reconnais les vieux murs gris, démolis depuis pour faire place à des bâtiments néoclassiques, les immenses fenêtres grillées et grillagées, les quelques platanes dont l'écorce se délitait déjà.

Je reconnais l'atmosphère, même si soixante-huit était passé par là peu de temps avant: une ambiance d'étude, de sérieux, d'ennui un peu solennel, à la manière anglaise. Claude Fauriel a toujours eu beaucoup de classe, de chic. Si l'on ne faisait pas l'affaire, on était vite dirigé sur l'autre lycée de garçons de la ville, moins regardant sur la qualité, disait-on.

Je ne connais pas les deux professeurs assis au premier rang, au centre stratégique de ce groupe de grands garçons un peu dégingandés pour la plupart. Je ne connais pas non plus les deux filles qui, sacrilège, ont été admises dans cette antre machiste qu'était mon bon vieux lycée. C'étaient parmi les premières. Je n'en ai jamais côtoyé dans aucune de mes classes. Et je crois bien que, si l'on nous avait demandé, la majorité aurait été contre leur arrivée, malgré la perspective de plaisirs fugaces que cela ouvrait à certains.

J'ai cru un instant être sur cette photo, tant nous nous ressemblions tous, finalement. Pour beaucoup, les cheveux longs et frisés, la chemise à col pointu ou le col roulé, les pantalons plutôt étroits, les souliers de cuir - il était interdit de porter un quelconque vêtement de sport en dehors des heures de gymnastique-, des lunettes à montures de plastique imitation écaille, qui nous donnait un air sérieux et intellectuel que nous affectionnions tous.

Beaucoup avaient encore la veste mais, 68 oblige, certains osaient le pull sans rien dessus. Aujourd'hui, ce genre de considérations peut faire rire mais, à l'époque, il était inimaginable de suivre des cours en chemise! La révolution était donc en marche. D'ailleurs, si l'un des deux professeurs arbore encore le costume traditionnel, sans doute blazer et pantalon de flanelle, l'autre montre une paire de souliers fort peu orthodoxe.

Je n'ai aucune nostalgie devant cette image d'une autre époque. Je peux simplement dire que c'est là que j'ai passé un bon nombre des plus belles heures de ma vie, dans ces murs datant de Napoléon Ier, qui menaçaient ruine, avec ses vieux professeurs peu rieurs mais puits de science, dans ces études surveillés où j'écrivais des vers. C'est là que j'ai appris tout ce que je sais, c'est là que je suis sorti de mon univers ouvrier et paysan pour accéder à une certaine culture humaniste qui a bien failli, quelques années plus tard, me griser mais que j'ai finalement appris à relativiser. C'est là que je me suis fait comme je suis aujourd'hui. Vraiment. Aucun regret, que de la gratitude.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Et la photo, faut l'imaginer (en même temps tu l'as bien décrite) ou bien j'arrive trop tôt ? :)

Anonyme a dit…

Pas besoin d'image pour bien voir les longs couloirs , sentir l'odeur si caractéristique des salles de classe, entendre le craie que glisse sur le tableau noir "tic fuiich fuiich crssss (un frisson parcourt la salle!) fuiich fuiiii tac!)...Ne le fais bien hein? c'est que j'ai été craie dans une vie antérieure! Avant j'avais été crayon...j'en garde un bon souvenir, mais épuisant: j'arrêtais pas de faire tailler la pointe et de me faire mordiller et suçoter!!! Nan, nan n'ai rien pris!! ;-)
Sinon j'ai plus de souvenirs de l'année 69 que 68...va savoir pourquoi!

Calyste a dit…

Pas de photo, comme le dit Piergil. Elle serait en noir et blanc, comme mes souvenirs.

Anonyme a dit…

"le pull sans rien dessus"... ? J'ai du mal à comprendre... "sans rien dessous" éventuellement, oui... Mais "dessus"...?

Calyste a dit…

Non, Lancelot, "dessus", c'est à dire la veste. Nous ne devions jamais être "débraillés".