Le cirque est dans la ville. J'ai vu son affiche, avec ce personnage hybride tenant du majordome, du clown au nez rouge et de Coluche pour la silhouette. J'ai entendu le haut parleur ce matin, niché au sommet de la voiture sillonnant les rues de Lyon pour rameuter le chaland.
J'aime le cirque. J'ai toujours apprécié ce spectacle, sans jamais penser aux efforts, aux souffrances imposés aux hommes comme aux bêtes pour réussir leurs numéros, simplement pour la magie des paillettes, pour la peur que l'on aime ressentir, qui poigne le ventre devant les acrobates au trapèze ou les dresseurs de fauves, pour la beauté des corps aussi sans doute.
Mon premier contact avec ce monde à part fut sans doute le film de Cecil B. DeMille, sorti en 1952, année de ma naissance, et que l'on m'emmena voir au cinéma rapidement (qui? quand? je ne sais pas. Ma grand-mère paternelle sans doute, quelques années plus tard). Je n'ai aucun souvenir de l'histoire que raconte Sous le plus grand Chapiteau du monde. Mais j'ai gardé la sensation d'émerveillement, d'écrasement que m'avaient procuré les images et cette impression d'avoir vu évoluer des surhommes.
Je ne crois pas avoir un jour mis les pieds dans un vrai cirque, sous un grand chapiteau. Tout ce que j'en sais, je l'ai vu à la télévision, dans l'émission de Gilles Margaritis La Piste aux Etoiles, qui a duré jusqu'à la fin des années soixante-dix. Roger Lanzac en était le Monsieur Loyal. Je n'en manquais jamais un rendez-vous et, si dans mes jeunes années, c'est évidemment l'apparition du couple de clowns que j'attendais avec impatience, plus tard j'eus bien vite les yeux plus attirés par la bosse sous les maillots collants et les fessiers rebondis des athlètes que par les gros godillots des amuseurs.
La seule fois que je vis un cirque "en vrai", c'est à l'école primaire. J'étais encore dans les premières classes, tout gosse donc. A cette époque-là, les dinosaures n'existaient déjà plus (eh oui, mes amis Fabrice et Petrus, je vous rappelle que l'on a mangé le dernier pour mon baptême!) mais les petits cirques ambulants sillonnaient encore la France, avec des spectacles plus pédagogiques que spectaculaires. Ainsi nous montrait-on des oies, des chèvres, des ânes et parfois, avec un peu de chance, un lama ou un gros serpent bien endormi.
Nous ne payions que trois sous pour voir mais il faut dire que, hormis "l'attraction exotique", il y avait bien longtemps que nous avions découvert les autres animaux dans les prés autour de chez nous. Je me souviens pourtant de l'air triste de la plupart de ses bêtes. C'est sans doute lors de la visite de l'un de ces cirques que je me suis juré de ne jamais enfermé un animal pour mon plaisir. Jusqu'à ce jour, j'ai tenu parole: je n'ai eu qu'un chien, trouvé au bord de la route en Italie, il serait mort sans moi et il n'a jamais été enfermé.
Quand je vois ces affiches, quand j'entends le haut-parleur, j'ai parfois envie de me diriger vers la grande tente, de prendre un billet, de faire un tour entre les cages du zoo, à respirer l'odeur forte des fauves et de l'urine avant de pousser le rideau et d'entrer dans le cercle magique du chapiteau. Envie de faire un pont avec mes premières années. Envie de retrouver le même émerveillement, d'ouvrir grand la bouche quand les lumières s'éteignent, que l'athlète est là-haut, tout là-haut au sommet, petit comme un moineau, que le tambour roule dans un silence de plus en plus épais, et, lorsqu'il s'élance dans le vide, magnifique oiseau charnel, de pousser le même cri sorti de mille poitrines oppressées.
Envie de redevenir enfant.
samedi 27 décembre 2008
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3 commentaires:
Comme je l'ai écrit dans un billet, c'est au cirque, quand j'étais en primaire, que j'ai eu mon premier émoi pour un garçon de l'école du cirque d'Annie Fratellini, puis je l'ai dit à ma mère en rentrant...Sinon, pour avoir habité près d'ine zone où les cirques s'installaient, leurs animaux vivent enfermés dans des conditions lamentables; un tigre allongé tenant plus de la moitié de la surface de sa cage, c'est triste...
On y va ensemble ?
Il semble à te lire que nous en ayons les mêmes souvenirs :)
Si vous êtes sages, je vous emmènerai tous les deux. Vous aurez même droit à la barbe à papa. Mais il faut être sages, hein!
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