Il y a longtemps que je n'ai plus parlé d'eux. Je n'en ai plus besoin, presque. J'ai aujourd'hui conscience d'être moi, et rien que ça. Il était temps de regarder ce prisme de la mort en face.
Si je pense à eux, c'est en ayant lu le passage du dernier roman de De Luca, Le Jour avant le bonheur, où un enfant napolitain apprend que l'homme qui s'occupe de lui, le concierge de l'immeuble, connaissait son père qui a depuis longtemps disparu. Pas mort mais en allé. Devant cette révélation, il découvre qu'il n'aime guère être ainsi défini fils de quelqu'un, même s'il ne connaît pas encore le nom de ce quelqu'un, à peine quelques bribes de son histoire, alors que jusque là il était fils de Personne, un peu fils donc d'Ulysse et de toutes les épopées.
Moi, je n'ai pas connu ce moment. On m'a appris trop tôt qui était mon vrai père (P1). Peut-être a-t-on bien fait, peut-être pas. On m'a évité un choc, on m'a privé d'une réflexion. Mais cela n'a plus d'importance. Quant à P2, à qui je demandais sur son lit d'hôpital qu'il n'allait plus quitter pourquoi il avait accepté de me prendre en charge, il me répondit qu'il l'avait fait par devoir. J'ai été très heureux de sa réponse et profondément blessé aussi. Heureux parce que nous avions pu échanger sur des sujets profonds avant qu'il ne disparaisse, blessé par ce mot si court, si froid, comme un dernier rempart à un amour refusé. Mais cela n'a plus d'importance non plus.
C'est cela, n'est-ce pas, la vie, être heureux et malheureux pour exactement les mêmes raisons...
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7 commentaires:
Tu avais déjà évoqué ces pères P1 et P2 et cele m'avait déjà marqué.
J'ai l'immense chance d'avoir un père qui se porte encore assez bien. Mais lui, n'a connu qu'une sorte de P2 (même si ça n'est pas comparable). Mon grand-père P2, celui qui a élevé mon père aurait pu dire qu'il l'avait fait par devoir, dans le sens que c'était un honneur, qu'il le fallait, mais une chose est sûre, il aimait ses enfants qui n'étaient pas les siens. Ce P2 est mort bien avant ma naissance. C'est assez tard dans l'enfance que j'ai compris que P2 n'était pas mon grand-père génétique, mais qu'il y avait un P1 qui vivait encore quelque part (un vrai tabou, surtout au niveau de ma grand-mère). Et ce P1 a trouvé le moyen de mourir après ma grand-mère alors que j'avais plus de 20 ans et je ne l'ai jamais connu (mon père non plus). Et une chose est sûre, ce P1 n'avait ni fait son devoir avec les enfants partis avec leur mère (un autre était resté avec lui), ni il ne les avait aimé.
Merci de ton commentaire, Cornus, qui est bien plus qu'un commentaire. Je crois tout de même que P2 m'a élevé ET m'a aimé. Je crois. En tout cas, il n'a jamais fait de différence dans le traitement.
Dernière phrase très pertinente...
Quant à la mort, c'est se chercher des raisons d'être heureux, et s'en trouver d'être malheureux, uniquement.
Bien plus facile.
J'aime ta note, et le commentaire de Cornus. Bisous à vous deux.
Je lui demande "ce que tu fais, tu le fais par devoir ou par amour ?". Il répond en souriant : "Qu'est ce que ça change, le résultat est le même, non".
Bisous à vous, les quatre garçons.
On peut aussi découvrir du plaisir à faire son (ou ses) devoir(s)...
Merci, Petrus, je jette le reste! (je plaisante)
Pour moi, je crois que c'est un peu plus compliqué, Lancelot. peut-être dû à mon âge plus avancé que le tien...
J'espère pour toi, Anna, que ce n'est pas du vécu! Bise à toi aussi, tout là-bas, loin, tout près.
Piergil, en 67, j'avais 15 ans et je me souviens parfaitement de cette chanson, un des premiers disques de mes parents. Je la savais par cœur, en toute ingénuité à l'époque.
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