On va dire qu'il s'appelle Boris Sovikolov. Il est russe sans doute ou d'une des républiques anciennement amies et, hélas pour certaines, toujours satellites. Il est jeune et a décidé de venir finir ses études en France. Sa famille peut lui payer une année à l'étranger. Après la chute de l'URSS, bien des gens se sont enrichis, dont eux. Il a choisi Lyon parce qu'il avait entendu parler de la ville: n'est-ce pas une équipe lyonnaise qui est à l'origine de l'éclairage nocturne du Palais de l'Hermitage? Et puis, depuis Lyon, si l'on veut se rendre à Paris, deux heures de train, qu'est-ce que c'est quand on pense à la distance entre Moscou et Saint-Pétersbourg? L'Italie, la Suisse, l'Allemagne ne sont pas loin.
Il a trouvé la ville belle et vivante, jeune aussi de tous ses étudiants. Un petit côté Prague, où il a récemment passé des vacances. On remplace la Basilique de Fourvière par le Palais Royal et le tour est joué. Les méandres de la Saône peuvent rappeler la Vtlava que certains ne connaissent que sous le nom de Moldau. Il a loué une chambre dans une résidence universitaire nouvellement construite dans le 3°arrondissement et s'est abonné au service Vélo'v. Il a d'ailleurs une station juste en bas de chez lui et peut, grâce aux pistes cyclables de Gambetta, se retrouver en plein centre, à Bellecour, en même pas dix minutes.
Il sait qu'il devra repartir: papa a besoin de lui, l'an prochain, dans l'entreprise. Il le sait et veut engranger en attendant: sorties, rencontres, beuveries nocturnes sur les ports du Rhône, expériences en tous genres. Comme il n'est pas trop laid, ça n'est pas vraiment difficile. Les Françaises aiment assez le physique slave. Elles, les latines, craquent volontiers pour la blondeur des plaines cosaques et il lui suffit d'amplifier légèrement son accent ou d'avouer être né au bord de la Néva pour en pêcher une dans ses filets.
Tout se passe bien, tout s'est bien passé, jusqu'à ce matin, où il a perdu sa carte d'abonnement longue durée à vélo'v. Elle a dû tomber de sa poche lorsqu'il a sorti son paquet de mouchoirs en papier pour se moucher. Il est repassé au même endroit un peu plus tard, quand il s'est aperçu de sa disparition, mais rien. Ce qu'il ne sait pas, c'est qu'un quinquagénaire l'a trouvée entre temps, l'a ramassée consciencieusement, étant lui même abonné, et l'enverra à la société gestionnaire dans quelques instants, juste après avoir fini d'écrire, juste après son moment de petit délire à vouloir inventer une vie à un nom et un prénom imprimés au dos d'une carte rouge. Mais lui, le slave, ne saura jamais comment s'appelle celui qui la lui a renvoyée!
mardi 1 juin 2010
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5 commentaires:
Pas mal, je me suis fait piéger.
C'est une histoire vraie, en tout cas pour la carte trouvée sur le trottoir. Le reste n'est que littérature!
Ben et la photo alors ? Il n'y a pas que les FrançaisEs à aimer le charme slave......
Jolie extrapolation, mais... remplacer la cathédrale de Prague par la basilique de Fourvières, comme tu y vas ! :)
Une photo de mon imagination, Lancelot?
Je n'ai pas dit qu'elles se ressemblaient, karagar!
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