Deux perles aujourd'hui à la radio:
- un candidat lyonnais à un jeu radiophonique: "je suis d'origine guatémalienne!" Afro-américain alors?
- un ministre du gouvernement: "....les lycées qui font quelque chose pour la réussite scolaire." Les autres apprécieront, eux qui font tout pour que leurs élèves échouent!
Cela me rappelle le Préambule que Jean Tardieu écrivit pour sa pièce Un Mot pour un autre (Ed. Gallimard). Le voici dans sa quasi intégralité:
Vers l'an 1900 (...), une curieuse épidémie s'abattit sur la population des villes (...). Les misérables atteints de ce mal prenaient soudain les mots les uns pour les autres, comme s'ils eussent puisé au hasard les paroles dans un sac.
Le plus curieux est que les malades ne s'apercevaient pas de leur infirmité, qu'ils restaient d'ailleurs sains d'esprit, tout en tenant des propos en apparence incohérents, que, même au plus fort du fléau, les conversations mondaines allaient bon train, bref que le seul organe atteint était: le "vocabulaire".
Ce fait historique - hélas, contesté par quelques savants - appelle les remarques suivantes:
que nous parlons souvent pour ne rien dire,
que si, par chance, nous avons quelque chose à dire, nous pouvons le dire de mille façons différentes,
que les prétendus fous ne sont appelés tels que parce que l'on ne comprend pas leur langage,
que dans le commerce des humains, bien souvent les mouvements du corps, les intonations de la voix et l'expression du visage en disent plus long que les paroles, et aussi que les mots n'ont, par eux-mêmes, d'autres sens que ceux qu'il nous plaît de leur attribuer. (...)
Mais vous savez, moi, ce que j'en dis...
mercredi 26 mai 2010
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9 commentaires:
Deux choses qui me viennent :
- en lien avec ton titre, au lycée un prof d'allemand se plaignait parfois de ce que disait certains : "c'est vaguement de l'à peu près"
- en lien avec tous les lycées qui s'évertuent à conduire leurs élèves à l'échec, le même prof d'allemand disait qu'il ne nous collerait jamais d'interro surprise car il n'était pas là pour nous piéger.
Moi, je n'aurais bêtement pas réagi immédiatement pour la guatemaltèque car ça ne sonnait pas si mal que ça.
Ici le manque de vocabulaire est une plaie et dans la langue ado (et ailleurs) combien de phrases se terminent par un: «... genre, comme, tsé qu'est-ce je veux dire ? »
Importé directement de l'américain:« ... kind, like, you know what I mean ?X
Ça énerve ! et ça fait un peu novlangue aussi., ce qui n'est pas rassurant.
Ah ! ce "genre" toutes les minutes, secondé par le fameux "Tsé" (tiens, il fallait y penser pour l'orthographe). Ca m'énerve, ca m'énerve (dit-elle en souriant) et zut, j'ai perdu ma cédille, où est-telle sur ce clavier ... Pour le guaté and Co, j'essaie d'être indulgente même si parfois ça me fait mal aux oreilles.
Bonne soirée Calyste.
Ah ça me donne envie de relire (ou mieux - mais plus difficile - revoir) des textes de Tardieu !
Moi, ce qui m'énerve, c'est l'usage abusif de "sur" ("j'habite sur Paris"), de "au niveau de", "absolument", "c'est clair", "outè-tu-fé-koi?", etc.
Et moi ce qui m'énerve totalement c'est les "voilà" égrenés à chaque phrase, et qui pour moi signifient "je suis incapable de finir ma phrase, vu que je ne sais pas trop ce que je veux dire, mais je vous emmerde, c'est déjà beau que je daigne vous parler, et j'ai pas que ça à faire, et si vous n'avez pas compris avec une demi-phrase c'est que vous êtes des bas du bulbe."
Voilà !
"Eh bien oui, je bredouillais dans les garages, après ma scéance au sleeping, et puis je me suis dit : Irène est sûrement chez sa farine, je m'en vais les susurrer toutes les deux !"
Je m'étais régalé à le jouer, ce Tardieu-là... C'était, il y a, mon Dieu, dix neuf ans déjà...
Quiand aux lycées "qui font quelque chose pour la réussite scolaire", je préfère ne pas c ommencer à commenter, parce que je n'en finirais pas. Surtout ces jours-ci, vu ce qui se trame "chez nous". Ca m'échaufferait trop les muscles de la fureur...
Je suis d'accord avec toi, Cornus, sur la bonne sonorité de "guatémalienne" et ne suis pas vraiment choqué.
Qu'est-ce que c'est, magoua, que cette "novlangue"? Jamais entendu parler.
Vous l'avez retrouvée, Anna? (la cédille!)
Le "outè-tu-fais-koi" ne risque pas de disparaître, Christophe, avec la généralisation du téléphone portable.
Si un jour j'écris un dictionnaire, c'est ta définition, Dame K, que j'adopterai pour "voilà"!
Il faudra que tu me racontes ça, bugne à bugne ou au téléphone, Chevalier. Pour le côté boulot, je préfère aussi que nous évitions en ce moment!
le gentilé est Guatemalteque non ?
Quant aux "tsé", "voila", "donc", enfin, des tics de langage, tout le monde en a, même les plus cultivés, les plus fins lettrés : exemple, Paul Morand et ses "ben vous savez"... Le site de l'INA est une mine d'or.
Pour moi, longtemps, ce fut (oralement):"ceci dit".
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