Ça sent la fin de l'année: les jours rallongent, les jupes prennent le chemin inverse, à tel point qu'on est parfois obligé de rappeler, à l'école, devant une cuisse trop exposée ou un bas de dos trop apparent, que la plage, c'est pour un peu plus tard, là, au bout de la ligne droite.
Et la ligne, elle ne l'est pas trop, droite. Certains, sûrs de ne pas revenir l'an prochain, cherchent à pourrir l'atmosphère et à dégrader un maximum de matériel, d'autres ont décidé qu'ils avaient suffisamment travaillé pour cette année et qu'en conséquence, il était inutile de leur donner une leçon de plus, d'autres se font oublier, totalement amorphes sur leur chaise dont ils glissent dangereusement jusqu'à risquer la chute.
Les matins sont silencieux, surtout les lendemains de fête privée dans le sous-sol de la villa, pendant que papa et maman sont en voyage à l'étranger, les après-midi sont excités parce qu'on attend déjà le soir où on va pouvoir embrasser pour la première fois truc ou machin, et le voler à sa meilleure copine. C'est fou, d'ailleurs, ce qu'ils sont bisous cette année, nos élèves. On passe son temps, dans les couloirs, à attendre la fin d'une étreinte (permise si pas trop torride) pour rejoindre sa classe. Il y a même les coins chauds, les carrefours à la croisée des chemins où il faut parfois intervenir.
Côté collègues, ce n'est guère mieux. Pire même car, dans la salle des profs, l'ambiance n'est pas vraiment aux bisous. Il y a ceux qui ne retrouveront pas leur poste l'an suivant, ceux qui ont demandé une mutation, ceux qui ne parviennent plus à tenir leur classe et en rejettent la faute sur un manque d'investissement du collège dans la répression, ceux qui n'ont, comme les élèves, plus envie de travailler, ceux qui pensent déjà à leur emploi du temps de la prochaine rentrée et demandent tel ou tel jour de liberté pour pouvoir s'inscrire à un club de remise en forme physique ou de peinture sur soie, ceux qui frétillent comme des poissons dans l'eau au milieu de ces eaux troubles et rajoutent un peu de venin pour épicer la sauce, et j'en passe et des meilleurs, comme aurait dit notre cher grand Victor.
Et que fait votre Calyste au milieu de cette fourmilière qui s'excite en cercle fermé? Comme le reste de l'année: il évite comme la peste la salle des profs, y fait de furtives apparitions au moment où il la sait déserte, il lui préfère la salle à cafés, en dehors des récréations, et, pendant ces récréations, il descend dans le parc, derrière le bâtiment, et regarde travailler les ouvriers, en échangeant parfois quelques mots avec l'un ou l'autre. Il a toujours son appareil photos à proximité de mains, au cas où. Calyste se la joue tranquille et philosophe, car Calyste sait que le pire est à venir, jusqu'à fin juin, et il n'a plus envie, mais alors plus du tout, de participer à ces vaines querelles où personne n'écoute plus personne et où des gens à priori responsables se transforment en aboyeurs éructant leurs rancunes.
mercredi 10 juin 2009
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9 commentaires:
Bravo et merci pour ces propos très justes ! Je vais d'ailleurs bientôt en rajouter une couche....
Oh là là ! Il est remonté...mais juste !
Avec les ouvriers...bien sûr...!
Je savais que tu me comprendrais, Tef.
Oui, Mossieu Petrus, avec les ouvriers! Je suis de gauche, moa!
Après ces élections, il faudra me dire ce que c'est...Tiens, dans un long billet !
Une "salle à café" située hors de la salle des profs, j'ai jamais compris à quoi ça pouvait ressembler... ça me fait rêver...
Un parc derrière le bâtiment, où des ouvriers travaillent : ça non plus, j'ai pas.
Alors je fais quoi ? Je rentre chez moi, me bronzer au soleil. Quand j'ai fini.
Mais ça ne se dit pas, Petrus, ça se vit. Peut-être la différence est-elle là?
Plains-toi, Lancelot!
Le monopole du coeur qui serait à gauche ? Non, c'est une image !
Je pourrais te citer des exemples...
Oh la la ça a l'air de barder chez les profs, en espérant que le record du monde de lancer de serviette soit battu. J'ai hâte de voir la suite.
Montre-moi où j'ai prétendu cela, Petrus. Je ne vois dans mes propos rien qui y ressemble!
Pour l'instant, rien n'a valsé, -Y-, il faut dire qu'en général, dans ces moments-là, ça ne vole pas haut! Mais je te tiens au courant si par hasard...
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