L'écriture est une chose étrange, comme d'ailleurs tout art. Lorsque l'auteur écrit, le texte lui appartient, il est dans son monde. Il peut revenir dessus, changer un mot, préciser une idée, supprimer un paragraphe. Mais, à mon avis, le livre n'est pas seulement ce qui est écrit : il y a aussi tout ce que l'auteur a, consciemment ou pas, dans la tête, tout l'avant, tout le pendant.
Lorsque le lecteur s'y lance, il n'a pas tout ce substrat de l'auteur. Il a le sien propre, totalement différent même si, sans doute, semblable sur certains points s'il apprécie cet auteur. Ainsi, deux réactions de sa part : d'abord, le texte définitif qu'il a devant les yeux ne peut pas être autre et devait nécessairement être celui-ci. Le mot, la phrase, le paragraphe ne pouvaient pas être différents. Je pense en particulier à la poésie.
Mais l'écueil serait, comme dans nos vieux Largarde et Michard, de dire : l'auteur a voulu dire ceci ou cela. Car la lecture est, dans une certaine mesure, recréation. Le livre est celui du lecteur, avec son vécu propre, sa sensibilité propre et ses points d'ancrage ne sont pas forcément les mêmes que ceux de l'auteur. D'où une certaine frustration de ce dernier s'il a des "retours" sur son ouvrage. A petite échelle, je l'ai souvent ressenti dans ce blog où certains billets, capitaux pour moi, ne provoquaient guère ou pas du tout de réactions des lecteurs, alors que d'autres, qui, à moi, me semblaient "légers", attiraient une "foule" de commentaires.
Et je me demande si ce n'est pas la raison pour laquelle je ne me suis jamais lancé sérieusement dans l'écriture. La lecture, elle, n'est que rarement décevante.
dimanche 22 novembre 2015
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7 commentaires:
Eh bien, c'est une très belle et juste analyse... A se demander si elle ne fait pas suite à quelques échanges entre tes confrères/soeurs blogueurs...
Ce n'est pas parce que certains billets ne provoquent pas de commentaires qu'ils ne provoquent pas de réactions.. J'ai même quelquefois trouvé certains billets tellement "en phase" avec des ressentis personnels que je n'ai eu ni la pertinence, ni le courage de les commenter.
Karagar : effectivement. Je suis allé lire chez vous.
Jean-Pierre : certainement mais c'est toujours un peu frustrant pour l'auteur (sauf pour certains billets, comme les lettres à Pierre, où je n'attendais pas de commentaires parce que profondément écrits pour moi).
En général, même si je n'ai rien de bien lumineux à dire, je commente si je suis en phase avec un post.
Ce que tu dis semble une évidence, et pourtant la manière dont tu le formules ici me semble nouveau et très pertinent.
L'écriture est difficile. Elle demande un travail. Quelques soient les facilités que l'on a naturellement ou les difficultés qu'on rencontre pour écrire. Toujours un travail.
C'est pour ça que je tire mon chapeau bas aux écrivains car les lire est rarement décevant. D'autant qu'on a le choix !
Et puis lire, c'est vivre !
Vrai que les retours sont souvent frustrants comme tu le dis, mais parfois aussi l'auteur découvre dans les remarques des lecteurs, quand ils osent vraiment dire ce qu'ils pensent, des choses qu'il n'avait pas eu conscience d'exprimer, et alors ça c'est génial. Rarissime, troublant, mais génial.
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