"Si tu devais choisir entre être un grand photographe ou un grand écrivain???". Telle est la question que me pose Charlus dans un commentaire sur mon billet "Sur la Saône". Question intéressante mais à laquelle il est difficile de répondre, tant il est vrai que je ne suis ni l'un ni l'autre. Pourtant, je n'ai cessé d'y penser toute la journée car, comme on disait à une époque pas si lointaine, "elle m'interpelle quelque part."
J'ai appris à écrire, j'ai eu pour cela des maîtres vénérables à qui, encore aujourd'hui, je réserve une vénération sans bornes. Au contact des grands auteurs dont il m'ont ouvert les portes, je suis entré de plain pied dans la littérature avec une passion et une curiosité qui ne ne sont pas atténuées jusqu'à ce jour. Je leur dois sans doute les plus belles heures de ma vie, au point d'avoir voulu, en entrant dans la vie active, faire partager cette passion et ce plaisir à d'autres, plus jeunes.
Le revers de la médaille fut que je mis de longues années à me débarrasser de modèles aussi illustres qu'embarrassants. Écrire pour moi, c'était écrire, sans le vouloir, "à la manière de". Victor Hugo bien sûr et aussi Chateaubriand, et puis Flaubert ou Maupassant. Le roman me plaisait, alors que je ne mis pas longtemps pour m'apercevoir que je n'étais pas doué pour la poésie. Mais les pages que je noircissais adolescent ne me satisfaisaient guère et ce furent alors de longues années de silence. Jusqu'au jour où je découvris l'écran, où j'ouvris ce blog qui me permit enfin d'être moi, sans références étrangères, angoissé mais heureux parce que libre.
L'amour de la photographie m'est venu plus tard. Le premier appareil digne de ce nom dont je fis l'acquisition, je le destinais dans mes rêves à des portraits en noir et blanc, que je ne fis jamais. Au passage au numérique, la passion revint en s'intensifiant. Et là, je n'avais pas eu de maîtres, pas de méthode, pas de contraintes. C'est un peu en chien fou que je me suis lancé dans cet amour, au point d'en parcourir des kilomètres dans les rues de Lyon ou d'ailleurs et d'en lasser les amis qui parfois m'accompagnaient. Sur mon site d'accueil, on peut voir aujourd'hui près de dix mille clichés. Si j'y rajoute ceux que je ne présente pas parce que trop personnels, redondants ou inintéressants à mes yeux, combien de fois ai-je appuyé sur le petit bouton déclencheur?
Alors que répondre à Charlus? J'aime passionnément l'écriture et la photographie. Je suis plus fier, à de rares exceptions près, de mes photos que de mes textes même s'ils me demandent un temps beaucoup plus conséquent et subissent des corrections que je n'ai jamais faites sur aucun de mes clichés. Mais l'un et l'autre sont personnels, voire souvent intimes. Et d'ailleurs les deux "arts" ne procèdent-ils pas de la même matière qui est mienne: une immense curiosité pour tout ce qui vit, un amour infinie pour les êtres et les chose qui m'entourent? Peut-être ai-je, et je le dis sans m'en glorifier parce que je n'y suis pour rien, un oeil acéré qui sait capter l'instantané lorsqu'il se présente, mais cela découle avant tout de ce qui me fait vibrer et que je viens d'expliquer dans les phrases précédentes.
Alors désolé de ne pas te répondre plus précisément, ami Charlus, mais je ne le peux pas. Il me vient à l'instant un seul mot qui pourrait définir ma démarche: celui de plaisir, dans ce domaine comme dans bien d'autres, le plaisir de saisir le moment qui passe .... et peut-être le refus, l'angoisse de le voir passer. Et merci à toi de m'avoir fait réfléchir sur ce qui, aujourd'hui, m'est aussi indispensable que mes bras et mes jambes.
dimanche 19 août 2012
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8 commentaires:
"Et là, je n'avais pas eu de maîtres, pas de méthode, pas de contraintes. C'est un peu en chien fou que je me suis lancé dans cet amour, au point d'en parcourir des kilomètres..."
Et ça, si c'est pas bon ! :)
peu importe ce qu'on est pourvu que l'on soit grand... dirais-je !
Pourquoi faudrait-il toujours choisir? Mieux vaut additionner(surtout les talents)...
Je ne sais rien de la stature de Calyste mais pour moi il a la bonne taille aussi bien dans ces écrits que dans ces photos.
Olivier: je savais que tu allais réagir! Ne partageons-nous pas cette passion?
P.P: dois-je le prendre pour un compliment?
Lédefon Laperre: merci à toi. Et très joli pseudo, bien approprié pour ce billet!
Si, justement :) .
Olivier: je ne laisse que rarement de commentaire sur tes photos mais je te suis régulièrement, et j'apprécie.
J'ai presque honte d'être aussi expéditif dans mon commentaire alors qu'une analyse plus détaillée aurait dû s'imposer. Le talent de l'écriture, évidemment même si on l'a peu vu sur la "longueur" d'une nouvelle ou d'un roman. La photographie, cela crève les yeux que ta sensibilité est peu commune et m'étonne, m'interpelle souvent.
Cornus: merci à toi. Cela me ferait pourtant plaisir que tu prennes le temps de "détailler" davantage car sincèrement je n'ai aucun moyen d'évaluer. Je ne cherche pas les compliments, juste un avis extérieur et objectif comme je sais que le tien ne manquera pas de l'être.
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