lundi 28 septembre 2009

Le long poème

L'odeur du corps de l'autre, sur ses mains, après qu'il est parti. Se les passer sur le visage et aspirer goulûment ces parfums de sous-bois où se niche parfois une fragrance un peu plus forte, vestige des égarements en lui.

Se dire que ces mains ont touché, palpé, caressé, malaxé, exploré sans jamais découvrir le mystère de la chair offerte. Se dire que demain, malgré la douche, il en restera quelque chose, à respirer fortuitement en portant la cigarette à ses lèvres. Sourire et ne rien dire. Les autres s'étonneront.

S'ils savaient! Tous ces cris, cette bataille, tous ces draps froissés et moites de deux corps, cette salive sèche et ces bouches avides, tous les délires et les éclairs quand on ferme les yeux pour mieux regarder le plaisir, cet appétit qui voudrait dévorer jusqu'à la moindre parcelle de cet homme étendu sous soi, qui vous regarde tout aussi implorant que vous l'êtes. Deux prières muettes aux mots qui gueulent dans les gestes. Je te prends, tu me prends. Nous nous appartenons. Et après le plaisir, détisser la tapisserie de nos membres comme la reine d'Ithaque les soirs d'été sous un ciel d'oliviers.

Un spasme de tendresse qui fait refermer les bras sur l'autre pour retarder l'instant du départ ou pour préparer celui de la nuit commune. Comme une dernière vague qu'imagine le sable quand l'ombre s'agrandit. On réintègre son corps. L'autre est autre, pourtant si proche. Mais la porte refermée, il restera les mains, araignées vicieuses, ces travailleuses, ces fidèles, ces précises, pour se souvenir du corps offert et en chanter le long poème.

2 commentaires:

KarregWenn a dit…

Malgré le libellé "homo" voilà un long poème qui pourrait être dit et qui touche bien plus largement. L'"autre" est multiple. En tout cas je le vois ainsi. Et je l'aime beaucoup ce texte.

Calyste a dit…

Tu as raison, Dame k. J'avais d'ailleurs oublié d'y adjoindre le libellé "textes" que je voulais qu'il porte aussi. "Homo", c'est juste pour moi, pour me permettre de la retrouver plus facilement si nécessaire. Comme tu le dis bien, l'autre est multiple et je te remercie de ce que tu m'écris là. Je suis sincère en t'avouant que ça me fait plaisir.