Quand j'étais petit, j'aimais bien, comme tous les enfants, me regarder dans les miroirs. Je ne me souviens pas s'il y en avait un chez ma grand-mère maternelle, qui m'élevait. Mais elle ne manquait jamais, lorsqu'elle me surprenait à le faire, de me prévenir : "A force de te regarder, un jour tu vas voir apparaître le diable !"
A l'époque, j'y croyais ferme au diable, avec cornes, poils, queue fourchue et tout l'attirail. Peut-être est-ce pour cela que, peu à peu, je ne jetais à mon image qu'un bref regard en passant. Chaque fois, bien sûr, c'était moi que je voyais : le diable n'était sans doute pas assez rapide et n'apparaissait-il qu'une fois que j'avais détourné le regard.
Un autre de mes grands plaisirs était, lorsque je me trouvais devant une glace, de m'y faire les pires grimaces que je pouvais imaginer. Comme j'avais la peau du visage assez souple, cela donnait des résultats assez surprenants qui me faisaient beaucoup rire. Mais, de cela non plus, il ne fallait pas, selon aïeule, prendre l'habitude. Elle avait, pour l'occasion, une autre phrase toute prête, à peine différente de la précédente : " Si tu continues à faire des grimaces, un jour, tu vas rester bloqué !"
Ce dernier avertissement m'inquiétait bien davantage que le précédent : et si c'était vrai, si je devenais très laid, si mes yeux restaient révulsés, si ma bouche demeurait tordue, si mes oreilles ne se redressaient pas (là, je n'ai eu aucun souci par la suite !), si tout le monde se moquait de moi ou s'enfuyait, terrorisé, en me voyant arriver ?
Tout cela est bien loin aujourd'hui, pourtant il m'en reste quelque chose : je ne peux pas m'asseoir à une table et manger face à mon reflet. Je demande toujours, si c'est possible, de tourner le dos au miroir, à la fenêtre ou à la vitrine. Et, chose surprenante, ma sœur, qui n'a pourtant pas été élevée par la grand-mère maternelle, se comporte exactement de la même façon ! Ma mère, sans doute, avait dû prendre le relais...
(Inutile de dire que je comprends bien ces peuples qui refusent d'être photographiés de peur qu'on leur vole leur âme.)
( J'aime toujours faire des grimaces !)
dimanche 20 juillet 2014
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5 commentaires:
Moi c'est ma grand-mère qui m'apprenait à faire des grimaces...dans le dos de ma mère !Elle était très douée.
Ici, la malédiction de faire des grimaces était: Si le vent tourne, tu vas rester comme ça ! RJ
Plume : mon autre grand-mère était très rieuse, elle aussi.
Anonyme : ici, mais où ? Et connaîtrais-je ce RJ ?
On ne m'a jamais rien dit par rapport aux miroirs, mais j'ai eu les mêmes remarques sur les risques de déformations pour les grimaces de la part de mes deux grands-mères.
Cornus : je me demande si ça continue avec les grand-mères d'aujourd'hui ?
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