mercredi 17 novembre 2010

Le Roman qui a fait pleurer toute l'Amérique.

C'est ce qu'annonce l'éditeur sur la première de couverture du roman de David Wroblewski, L'Histoire d'Edgar Sawtelle (JC Lattès). Eh bien, l'Amérique peut-être mais pas moi!

Tout avait pourtant bien commencé et j'imaginais une de ces bonnes histoires comme savent en ficeler les yankees, qui ne me demanderait pas une réflexion intense et me procurerait un réel plaisir de lecture. Et puis, bien vite, j'ai trouvé l'auteur lourdaud dans ses développements trop fréquents et trop indigestes: tout savoir sur le dressage de jeunes chiots ne m'a jamais provoqué le moindre début de soupçon de petite érection intellectuelle. La manie de faire feu de tout bois, de nous donner à lire par exemple des lettres retrouvées dont l'intérêt s'avère dans la suite bien piètre, cette manie de plus en plus répandue chez les auteurs qui ne conçoivent pas que l'on puisse écrire un livre de moins de six cents pages m'exaspère. On veut paraître savant et l'on tue le souffle du roman.

Ainsi ai-je fait ce que je fais rarement: j'ai lu en diagonale, choisissant un mot par ci, une phrase par là, me contentant de ne pas perdre le fil de la narration mais totalement insensible au style ou à l'effet recherché. Vers la fin, deux cents pages environ, j'ai repris la lecture intégrale, accroché par un nouveau personnage puis par la violence du dénouement. Pourtant, j'ai observé cette violence de l'extérieur, me disant qu'effectivement l'Amérique avait dû bien pleurer sur ces pages mais en percevant trop les ficelles pour marcher moi-même. Une idée qui a germé alors dans mon petit cerveau tordu a fini de m'éloigner de ce que je lisais: j'imaginais le film que, dans quelques temps, on allait tirer de ce récit, j'en voyais les images une à une, à chaque page, à chaque paragraphe, et j'ai fini par me dire que ce livre avait été écrit POUR le cinéma, que les effets étaient recherchés en ce sens, que l'incendie final de la grange, par exemple, était détaillé jusqu'à la maniaquerie comme une suite d'images de final à grand spectacle. Alors, non. J'aime le cinéma et la littérature mais je ne peux accepter que ce soit la même chose. Je suis trop indépendant de caractère pour supporter que l'on m'impose les images que je dois voir naître en lisant.

Depuis, pour me laver, j'ai lu un Pontalis. Autre chose, assurément.

8 commentaires:

christophe a dit…

Je ne suis pas spécialiste du milieu littéraire américain bien sûr, mais j'ai l'impression qu'il y a là-bas une vraie tradition de l'écrivain qui gagne de l'argent et très peu de place, compte tenu du "secteur livre" (en tant que secteur économique), pour les "petits" auteurs un peu vivotants ou publiés chez de "petits" éditeurs. Soit il y a des consignes explicites des éditeurs, soit les consignes sont carrément intériorisées, mais je pense qu'il est fortement conseillé de penser aux droits dérivés (notamment d'adaptation) lorsque le contrat est signé. D'où, peut-être, une écriture volontiers cinématographique, chez l'auteur que tu signales (et que je ne connais pas), mais aussi chez de nombreux autres.

Cornus a dit…

Ah, toi aussi comme Lancelot, tu lis en diagonale (il va pas être content que je dise enfin la vérité vraie inavouée et enfouie depuis des décennies).

Sinon, j'aime bien ici ta plume bien aiguisée.

Ah, on se lave avec du Pontalis : très sophistiqué. Il y en a qui n'utlisent que de l'eau, du savon et éventuellement un gant de toilette.

Calyste a dit…

C'est probable, Christophe. Mais cette mode, apparemment, d'une littérature lourde, qu'elle soit américaine ou européenne, m'ennuie profondément.

Pontalis, c'est mieux, Cornus: c'est aussi un stimulant pour moi, quand sa nostalgie naturelle ne l'emporte pas!

Lancelot a dit…

Bon, ça ne se situe pas au même niveau, (d'un point de vue littéraire) mais j'avais eu exactement la même impression que toi en lisant le dernier Harry Potter, il y a trois ans. On avait vraiment l'impression que Rowling, sachant que de toute façon le roman serait adapté à l'écran, en avait rajouté vingt louches dans les scènes spectaculaires. C'était bien dommage parce que je trouvais que, sans jamais voler bien haut (même sur un balai!) elle était très douée pour l'écriture de scènes intimistes.

Le cinéma influence la littérature... Seigneur... où allons-nous...

Valérie de Haute Savoie a dit…

Bon tu le sais, je l'ai bien aimé ce livre et je ne l'ai pas lu en diagonale. C'est justement pour cette différence de perception que nous avons chacun en fonction de nos goûts de notre histoire, de nos envies du moment, que j'avais abandonné très vite le blog http://obsessivereadingcompulsivewriting.blogspot.com/ où Dr CaSo nous invitait à parler des livres que nous avions lu, parce que c'est toujours délicat de conseiller un livre. Je me souviens d'un livre qui m'avait tellement plu que je l'avais offert à deux amies (l'élégance des veuves d'Alice Ferney)une de mes amies n'avait pas pu le lire tellement il lui avait déplu dès le départ, l'autre l'avait trouvé bien mais sans plus. Moi qui l'avais tellement aimé, j'étais triste qu'elles ne l'aiment pas. Je n'ai comme cela jamais pu finir un livre écrit par Christian Bobin que l'on m'a pourtant chaudement conseillé de nombreuses fois, j'avoue que j'ai trouvé son écriture chiante. Alors même si je sais que tu n'en m'en veux pas, je te présente mes plus plates excuses pour t'avoir encouragé à le lire ;)

Calyste a dit…

Valérie, ne t'excuse pas, vraiment. D'abord, j'ai aimé certaines parties de ce livre. Ensuite, je crois qu'il y a dans la vie des moments où l'on n'aime rien, même le meilleur chef-d'œuvre, et certains de ces derniers jours, je n'étais pas toujours disponible dans ma tête. Enfin, je sais la difficulté de conseiller des lectures à des amis. Comme toi, j'ai eu de tristes expériences de ce côté là. Alors, rien de grave, je t'assure. Mais tu le sais bien!
Je me permets de te faire une bise.

Nicolas a dit…

Ils ont sans doute pleurer car ils l'ont acheté :)

Calyste a dit…

Sans doute, Nicolas. En tout cas, ton commentaire, lui, m'a bien fait rire!