Il paraît qu'en 1783 déjà, un volcan islandais avait fait des siennes et, par ses poussières, plongé l'Europe dans une semi-pénombre, faisant descendre la température de quelques degrés. La vie avait été si dure en France pendant les hivers de ces années 80 que l'on peut à bon droit y voir une des origines de la Révolution française. Ainsi l'Islande a dit son mot dans notre univers politico-historique.
En sera-t-il de même cette fois-ci? Je crois que l'on peut, sans risquer de se tromper, répondre, hélas, par la négative. Pas de renversement de régime, pas de roi décapité, pas de tête promenée au bout d'une pique de sans-culotte. Rien que le mécontentement de tous ces gens bloqués dans les aéroports de tel ou tel pays qui leur souriait pour passer leurs vacances mais qui les intéresse nettement moins s'il faut y prolonger le séjour. Et ce ne sont même pas eux qui crient le plus fort.
Qui se plaint le plus aujourd'hui? Des gens qui ont tout perdu comme les Haïtiens après le tremblement de terre, ou les habitants de Bame, en Iran, après le leur en 2003 et dont on n'a plus jamais entendu parler ( les Haïtiens n'ont eux aussi qu'à attendre un peu pour retomber dans l'oubli)? Non, la Révolution est celle des nantis, celle des compagnies aériennes et des aéroports qui, vampires modernes, n'ont pas leur dose quotidienne de profit depuis que cet imbécile de Eyjafjöll a décidé de jouer les trouble-fête. Le bras de ces gens-là doit être assez long car, depuis ce soir, on parle de réouverture d'aéroports, comme les deux de Lyon par exemple. Sait-on tout de même que les conclusions tirées des expériences de vols faites ces deux dernier jours n'ont absolument rien de scientifique. On dit pouvoir ouvrir des corridors de circulation aérienne. Tant mieux mais en espérant que pour une fois la vie de centaines de personnes ne sera pas sacrifiée sur l'autel du profit!
Pour en revenir aux passagers prisonniers ici ou là et ne pouvant rentrer chez eux (ceux de l'avion comme ceux de la SNCF), je suis toujours surpris, en entendant leurs récriminations, de la bêtise et du peu de poids de certaines d'entre elles. Mais passons... Ce qui me choque le plus, c'est cette perte complète de la notion d'aventure. On veut bien partir loin, se faire frissonner à côtoyer certains dangers, la plupart du temps imaginaires, mais il faut la certitude que tout cela n'est qu'une péripétie d'un voyage clés en main qui ne peut qu'être agréable d'un bout à l'autre. On part comme pour l'aventure, on s'habille comme pour l'aventure, on revient bronzé façon baroudeur, on a des anecdotes à raconter à faire pâlir d'envie l'oncle Paul de Spirou, on se sent autre parce qu'on a "fait" le désert machin ou la montagne truc, mais on a une âme de petit épargnant et sûrement de grand joueur. Je ne comprends pas l'intérêt de ces expériences aseptisées.
Je ne dis pas que je suis un aventurier dans l'âme mais autant je n'aime pas les surprises dans la vie de tous les jours, autant, lorsque je me trouve en voyage à l'étranger, elles m'apparaissent toujours comme les bienvenues pour mettre un peu plus de piment dans le périple. Plusieurs fois, j'ai eu affaire à des imprévus, même lors de voyages scolaires, et j'ai toujours aimé résoudre ces problèmes inattendus: enfants qui se blessent, hôtel réservé et non disponible, repas oubliés, etc.
Lors d'un voyage en Égypte avec un ami et un groupe d'une douzaine de personnes, voyage entièrement organisé par nos soins avec les moyens autochtones, nous devions, la première nuit, être hébergés par le Séminaire Catholique Copte de Ma'adi, au Caire. Arrivés avec beaucoup de retard sur les lieux, à cause de difficultés à l'aéroport, nous avions trouvé portes closes, lumières éteintes et gardes armés sur le trottoir. Les dames les plus âgées du groupe commencèrent par trouver bien légères ces mœurs orientales qui ne se souciaient guère des convenances puis, alors que la situation s'éternisait, se mirent à geindre d'abord discrètement puis de façon de plus en plus évidentes.
Moi, je riais beaucoup (sous cape, bien sûr). D'abord, il faisait très doux dans la nuit cairote, ensuite j'étais ravi de voir ces veilles toupies un peu moins sûres d'elles, enfin, les gardes armés, en fait jeunes soldats effectuant leur service militaire, avaient, même dans une semi-obscurité, des allures plus qu'affriolantes. La seule chose qui me dérangeait un peu, c'est que je commençais à avoir bigrement faim. Mais j'étais bien certain que, d'une façon ou d'une autre, nous n'allions pas devoir passer la nuit sur ce trottoir. Effectivement, grâce au plus jeune de la troupe, qui parvint à escalader les grilles du séminaire, sans d'ailleurs que les soldats, à qui l'on avait tout expliqué, n'interviennent aucunement, le supérieur fut réveillé (il croyait que nous n'arrivions que le lendemain) et nous eûmes droit à repas fort correct et couche bienvenue.
Je raconterai peut-être une autre fois comment j'ai failli rester enfermé dans une tombe de la Vallée des Nobles....
( La photo n'a rien à voir: il s'agit tout simplement d'un sommet des Alpes, en Maurienne, à la fin de cet hiver.)
lundi 19 avril 2010
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7 commentaires:
On peut partir dans une pseudo aventure, apprécier les péripéties diverses et imprévues et néanmoins avoir des obligations de retour, comme celle de gagner sa vie face à un patron qui n'appréciera pas l'absence prolongée.
Mais gueuler dans ces cas là ne sert effectivement à rien. Nous sommes au moins en ce point d'accord.
Quant à la course au profit, il est évident que ça ne sontt pas les caprices, ou non, de la nature qui va l'arrêter. Hélas.
Oui, bien sûr, Olivier, il y a de bonnes raisons de vouloir rentrer sans attendre. Deuxième point d'accord, donc. Mais quand j'entends: " J'ai un petit garçon de trois ans qui m'attend.", ça me hérisse le poil, ce chantage à l'apitoiement : si on l'aime tant, il fallait l'emmener ou ne pas partir en vacances!
Je n'aime pas l'aventure. Je ne feindrai donc jamais d'y partir. Si je voyageais dans des pays "exotiques", il me faudrait un minimum de "confort" car je n'aime guère les mauvaises surprises. Parmi les gens coincés, j'ai vu de sacrés têtes de cons, mais il y a aussi forcément des gens "relativement modestes" qui avaient pu, pour une fois, se payer un voyage plus ou moins lointain et qui sont maintenant devant de vraies difficultés. Mais ces gens là, on ne les a pas entendus.
Il se peut aussi que les "témoignages" soient soigneusement triés sur le volet. Déjà, on vous solliciterait dans un aéroport pour donner un point de vue, vous le feriez ? C'est la logique du micro trottoir, la fabrique de l'opinion : il s'agit d'infantiliser un peu plus, et tant qu'on peut, des grands enfants, hélas.
Oui, je suis d'accord avec vous, Cornus et Solko: l'information est formatée, sans cesse, dans un sens ou dans l'autre, pas forcément d'ailleurs pour un but de politique politicienne. C'est plus grave à mon avis: infantilisation rampante, autrefois appelée "panem et circenses". Rien ne change. Est-ce que tout s'aggrave?
'failli être enfermé dans une tombe'... avec l'un des jeunes gardes "affriolants".....?
Ah non, c'est vrai : on ne fait pas garder les morts.
Trop curieux, Lancelot! Je ne saisirai pas la "perche"!
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