La presse recherche les responsables. Quel sera le temps de votre mercredi? Et maintenant place à votre film du mardi soir. Voilà trois phrases entendues à la radio ou à la télévision qui, à des degrés divers, m'ont fait bondir cette semaine.
Commençons par la plus anodine: Et maintenant, place à votre film du mardi soir. On imagine le sourire sirupeux qu'aurait la speakrine si on pouvait encore la voir apparaître sur l'écran. La journaliste qui clôt son journal d'informations par ces paroles n'en a pas moins l'air stupide. Et nous, spectateurs, que sommes-nous dans l'histoire? J'ai l'impression, quand j'entends ça, de me transformer en gentil caniche à sa mémère qui, parce qu'il a été bien sage pendant toute la journée, est récompensé le soir d'un bon susucre qu'avant de lui donner, on fait pendre, inaccessible, au-dessus de son nez. A noter que, quelle que soit la qualité du susucre, enfin je veux dire du film, chef-d'œuvre ou navet intégral, le ton est toujours le même et le plaisir sous-entendu de la même intensité. Ces gens-là ont-ils vu un seul des films qu'ils annoncent avec tant de gourmandise?
Deuxième phrase qui fait monter mon taux de bile: Quel sera le temps de votre mercredi ? On sait bien que les français n'attendent que cet instant, que les nouvelles du monde ne les touchent aucunement et que ne compte finalement que la météo du lendemain ou du week-end s'ils ont prévu de partir à la montagne. Notez que, dans ce dernier cas, ils réclament de la neige sur les pistes mais surtout pas sur les routes! En avant donc pour les petits cartes remplies de symboles que l'on nous commente comme si nous étions des débiles profonds incapables de deviner qu'un large soleil veut dire beau temps et que de lourds nuages annoncent la pluie dans les jours suivants. La dame qui fait de grands gestes, parfois un peu approximatifs, devant l'écran, est toujours vêtue d'une tenue improbable prêtée par un couturier croyant ainsi faire de la publicité pour sa maison de couture alors que, la plupart du temps, on se demande, à les voir, comment de telles horreurs peuvent exister.
Passons donc aussi sur le chic à la française revu façon météogirl et revenons à la phrase précitée. Pour qui se prend le monsieur ou la dame qui la prononce? "Votre" vendredi? Mais n'est-ce pas forcément aussi le sien? Ne vit-il pas en France, à Paris sans doute? Ou bien prend-il l'avion pour les îles exotiques dès son petit numéro terminé, en se fichant du plafond de l'hexagone comme de sa première chemise? Quelle condescendance dans ce "votre" qui semble le (la) placer dans un autre univers, dans un ailleurs de calme et d'ataraxie où se réunissent chaque jour les êtres supérieurs, à la façon de ceux qui, parfois, par inadvertance, laisse tomber une boule de chocolat pliée dans du papier d'or sur la terre qui s'en délecte!
Enfin, ma préférée, médaille de platine au classement de ces dernières semaines: La presse recherche les responsables.. Celle-là, je l'aime particulièrement. Sous un aspect anodin, elle est en fait totalement symptomatique de la société actuelle. Ce ne sont plus la justice, la police, les tribunaux qui recherchent et énoncent les responsabilités. Dormez tranquilles, braves gens: les journalistes s'en chargent! Il est vrai qu'on peut leur reconnaître, ces derniers années, un sens aigu des responsabilités et un degré extrême de sérieux dans leurs investigations. Depuis que des journalistes américains, eux de haut lignage, ont permis il y a plusieurs dizaines d'années, de dévoiler au grand jour des scandales qui, sans eux, seraient restés silencieux, tout le monde se prend aujourd'hui pour un as de l'enquête, un limier au flaire infaillible. Pourquoi perdre son temps à vérifier ses dires, pourquoi étayer ses conclusions sur de solides arguments? L'essentiel n'est-il pas, avant tout et seulement, de communiquer l'information (mais est-ce encore de l'information?) avant l'autre?
Ainsi, après la catastrophe qui a récemment touché les côtes de l'ouest de la France, on s'empresse de dire tout et n'importe quoi, d'accuser tel élu qui accorde des permis de construire dans des zones inondables, de montrer du doigt le maire qui n'a pas eu l'idée de consolider des digues pour les rendre aptes à résister à n'importe quelle tempête exceptionnelle, de laisser entendre que les secours auraient pu être plus rapides, etc, etc. Qu'on laisse donc ces affaires à ceux dont c'est le métier, que les enquêteurs professionnels fassent tranquillement et en toute indépendance leur travail, et que ces messieurs les fouille-merde de la presse qui pratiquent ces méthodes retournent à leurs lieux d'aisance pour y admirer le dernier étron du nouveau chanteur à la mode ou la dernière exhibition stupidement pornographique d'une dame qui se prend maintenant pour un écrivain.
(PS: je veux tout de même préciser que je tiens certains journalistes, presse, radio et télévision confondues, pour d'excellents professionnels.)
jeudi 4 mars 2010
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7 commentaires:
Enfoncez-vous bien un truc dans la caboche, Monsieur le présentateur : Mes lundis sont plus beaux que vos samedis.
Ça, c'est vache! Je crains que, la susdite caboche étant à peu près vide, cela ne s'enfonce trop en avant et n'y reste à jamais. On pourra dire alors qu'il avait une "idée" derrière la tête...
J'échappe à ça, pas de télé à la maison. Les infos, 7 h du mat sur France-Musique ( oui, je sais ça fait rigoler). 10 mn de tour du monde, pas de météo, pas de sport, pas de fait-divers, juste des nouvelles du monde. Et je m'en tiens là.
Moi, j'avoue que la météo à la télé est un de mes petits plaisirs. Je me fiche à peu près du temps qu'il va faire chez moi le lendemain et j'écoute d'une oreille distraite le baratin, mais les cartes, la comparaison des températures, les masses d'air, j'adore. Combien de fois des gens me disent, en hiver: Oh, tu es en Bretagne, tu dois avoir froid (genre des gens qui habitent en Champagne!!). Je suis sûr que ces gens regarde la météo tous les soirs depuis 40 ans et ils n'ont pas remarqué la douceur des températures hivernales ici. Les informations en général on les a bien avant qu'on nous les mâche, il faut juste un peu d'attention. Le sida et la vache folle, il me semble m'en être méfié bien avant les grands alertes médiatisées, donc...
Moi je dois bien avouer que depuis mes douze ans passés dans le Nord, j’ai acquis un conditionnement : dès que j’entends le mot « bulletin météo », je dresse les oreilles tel un berger allemand à qui on dit « Sousoupe ! »
Mais ce qui est le plus intéressant, je trouve, c’est ton analyse de la phrase « la presse recherche les responsables ». Il est vrai que c’est le style de truc qu’on entend quotidiennement sans s’en offusquer alors que si on réfléchit un peu, c’est effectivement très choquant. On en est arrivés à une forme de société où, considérant le pouvoir d’impact des médias, on le glorifie et le monte sans cesse en épingle de cravate. Il est bon que les scandales soient dénoncés, c’est l’avantage du système démocratique. Mais le revers de la médaille, c’est que cet atout énorme dont nous disposons est galvaudé, rendu grotesque, à cause de la prétention des médias eux-mêmes. La boutade que tu as faite sur la journaliste qui semble s’adresser à la plèbe « le temps de VOTRE vendredi » est en fait très proche de la réalité. Paradoxalement, les journalistes et présentateurs constituent bien un monde à part.
D'accord avec ton analyse sur le vocabulaire infantilisant des présentateurs, ce qui n'est heureusement pas vrai partout tout le temps.
Au sujet de "on recherche les responsables", je suis d'accord avec toi. Ce ne sont pas les journaleux qui disent ça qui recherchent quoi que ce soit, car de toute manière, ils ont prouvé depuis longtemps leur incompétence en la matière (seulement, le "grand public" ne sait pas à quel point ils sont incompétents en général).
Evidemment, il faut que ce soit les scientifiques qui fassent les études, fassent les recherches nécessaires. De nombreux journalistes, recherchent, eux, du spactaculaire, du superficiel, ne font pas de l'investigation (en même temps, il en existe aussi qui font parfaitement bien leur travail, mais on n'en parle rarement dans les grands médias).
Ceci étant dit, les responsables existent : les maires qui ont accordé des permis de construire en toute connaissance de cause et certains hauts responsables de l'Etat qui n'ont pas mis leur véto. Mais en même temps, je veux bien croire où des erreurs aient été commises en toute bonne foi, mais alors là, c'est l'Etat qui n'a pas toujours joué son rôle régalien avec des études qui n'ont pas été menées en temps utile, faute de moyen ou pour s'éviter les foudres des élus locaux à cause à qui on pourrait interdire de construire...
Chercher des "coupables" aux catastrophes devient une activité médiatique en vogue. Les gens qui ont acheté ces maisons en terrain inondable sont aussi "coupables" que les communes qui ont accordés les permis de construire ou qui ont vendu les terrains en question.
il es toujours dangereux de vivre, ou que ce soit sur Terre!
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