Aucun jeu, jamais, n'est parvenu à prendre le dessus sur le plaisir que me donne la lecture de romans, de nouvelles, pour peu que, d'une manière ou d'une autre, ils racontent une histoire dont à la fois je redoute et suis impatient de connaitre la fin. Privé de la lecture, je serais réduit à n'être que ce que je suis. Je ne crois pas pourtant qu'elle me tienne lieu de "vraie vie", ni qu'elle me permette de vivre par procuration des vies imaginaires ou de confondre la mienne avec un roman. Non, plus simplement, plus efficacement, elle me détache de mes points fixes, elle me libère de la pensée affligeante que ma vie pourrait n'être qu'une succession de jours dont l'un répète, ou, pire, efface l'autre. Elle m'entraîne là où je ne suis pas et pourtant, puisqu'elle m'y entraîne, c'est que j'y suis ! La lecture est mon grand jeu.Jean-Bertrand Pontalis, L'Enfant des limbes.
(J'ai lu beaucoup d'ouvrages de J-B. Pontalis, sauf ceux sur la psychiatrie, et j' m'y trouvais chez moi, totalement. )
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire