vendredi 9 mai 2008

Provence (3)


Cet après-midi, après un repas où j'ai retrouvé un des fils d'Amédé que je n'avais pas vu depuis un temps certain, maintenant père de famille de quarante-huit ans avec cinq enfants aux trousses, nous sommes partis pour la visite de l'abbaye de Montmajour, tout près d'Arles.

Fondé au X° siècle par des moines bénédictins, il domine la plaine de la Camargue depuis son éperon rocheux. En ruines aujourd'hui, il garde pourtant des vestiges suffisamment intéressants pour justifier une visite, surtout la partie la plus ancienne, les bâtiments postérieurs, datant du XVIII° étant très abîmés suite à leur vente, à la Révolution, comme biens nationaux et à leur utilisation comme carrière de pierres.


Ainsi peut-on encore voir la Tour Ponce de l'Orme, l'abbatiale, le cloître, des tombes creusées à même le rocher, la sacristie, la salle des archives et le réfectoire. Le plus intéressant est sans doute la crypte qui sert également de fondation à l'abbatiale: il s'en dégage, de par le silence qui y règne et l'épaisseur de ses murs, une impression de force tranquille que rien ne semble pouvoir perturber, force rendue très humaine par la présence, gravées dans la pierre, des marques des différents tailleurs de pierres ayant oeuvré ici, et que l'on appelle "tâcherons".
Je trouve que ce mot qui, aujourd'hui, laisse un goût de jugement négatif, est bien ici en rapport avec cette puissance trapue des voûtes de la crypte, cette impression de bonheur du travail accompli et bien accompli.


L'ensemble du site, tout intéressant qu'il soit, ne peut être comparé, de par l'émotion qui pourrait s'en dégager, avec les abbayes de Sénanque ou Silvacane que j'avais visitées lors de mon précédent séjour. Il y manque la dimension spirituelle. On est plutôt ici dans le monde des chateaux-forts que dans celui de l'esprit. De plus, un groupe de touristes tchèques, arrivés en même temps que nous et fort bruyants, m'a bien vite exaspéré. Après cela, allez vous concentrer!

Après un arrêt rapide, à deux cents mètres de là, à la chapelle Sainte-Croix, enchâssée dans une propriété privée, et donc encore une fois inaccessible, nous avons parcouru sur quelques pas le tracé d'un aqueduc romain approvisionnant la ville d'Arles, tracé qui m'a posé quelques difficultés d'interprétation, n'étant apparemment pas traditionnel, et que je vérifierai dès que j'en aurai le temps (c'est à dire jamais?). J'y ai cueilli un rameau d'une plante vivace et épineuse, aux feuilles vernissées, que je tenterai de bouturer à Lyon.


La prochaine escale fut la colline face aux Baux de Provence. Nous n'avions pas le temps ni le désir de nous arrêter dans le village lui-même, dont la réputation me semble un peu surfaite et qui profite visiblement de sa notoriété pour taxer sans cesse le pauvre touriste moyen: même le stationnement le long de la route, en bas, est payant!

Cette habitude de pressurer le même citron commence à devenir un peu agaçante: faut-il en avoir les moyens pour pouvoir approcher la culture? L'accès à certains lieux chargés d'art ou d'histoire va-t-il finir par être réservé aux plus aisés? A un moment où l'on se gargarise de l'héritage de mai 68, il faudrait commencer à se poser sérieusement la question.

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