vendredi 21 janvier 2022

Brave grillon !

Bohémiens en voyage
 
La tribu prophétique aux prunelles ardentes
Hier s'est mise en route, emportant ses petits
Sur son dos, ou livrant à leurs fiers appétits
Le trésor toujours prêt des mamelles pendantes.

Les hommes vont à pied sous leurs armes luisantes
Le long des chariots où les leurs sont blottis,
Promenant sur le ciel des yeux appesantis
Par le morne regret des chimères absentes.

Du fond de son réduit sablonneux, le grillon,
Les regardant passer, redouble sa chanson ;
Cybèle, qui les aime, augmente ses verdures,

Fait couler le rocher et fleurir le désert
Devant ces voyageurs, pour lesquels est ouvert
L'empire familier des ténèbres futures.

Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal

3 commentaires:

Cornus a dit…

Il était pas mauvais quand même ce Baudelaire !

Pippo a dit…

Cher Calyste,
Le premier vers ne contient-il pas treize pieds. Il me paraît difficile de n'en pas prononcer la dernière syllabe. Qu'en penses-tu?
Cordialement.

Calyste a dit…

Cornus : je confirme.

Pippo : un retour qui me fait plaisir !
Non, le premier vers a bien douze pieds, la terminaison "-es" en fin de vers n'étant jamais comptabilisée.