Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d’une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l’ourlet ;
Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son œil, ciel livide où germe l’ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.
Un éclair… puis la nuit! – Fugitive beauté
Dont le regard m’a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l’éternité ?
Ailleurs, bien loin d’ici! trop tard! jamais peut-être !
Car j’ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
O toi que j’eusse aimée, ô toi qui le savais !
Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal.
6 commentaires:
Joli sonnet.
Cornus : oui, du grand Charles !
Elle est grandiose et terrible cette vision, tendue par le désir!
Merci Calyste.
Pippo : de rien.
Ah je l'aimais bien celui-là ! "la douleur qui fascine et le plaisir qui tue"... en même temps c'est un peu kitsch, non ?
Jérôme : as-tu des instincts un peu masos ? C'est "la douceur" !!!
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