vendredi 18 juillet 2008

Mens sana in corpore sano.

Première journée à Lyon. Courses à Casino, déjeuner avec J., soleil à Miribel, visite à ma mère. Rien n'a changé.

Si, pourtant. J'ai découvert deux choses aujourd'hui:

- la première, en fait la deuxième dans l'ordre chronologique, c'est que ce n'est pas ma mère que je ne supporte pas, c'est son état.

- la deuxième concerne mon corps. Je n'ai pas trop l'habitude d'en parler mais, c'est une évidence, il a changé. Il y a trois ans, je pesais quatre-vingt trois kilos, je n'en étais qu'au début de la pratique de la course et j'avançais un sérieux petit ventre un peu trop proéminent à mon goût. Mes jambes étaient maigres et absolument pas musclées.

Aujourd'hui, la balance, dans les meilleurs jours, indique soixante-dix kilos (plus deux à ce retour de Creuse), tous ceux que je croise me disent que je suis trop maigre, que cela me vieillit et que ma fatigue s'en trouve accrue. Un autre changement de taille: je me découvre des muscles aux jambes, là où je n'imaginais même pas pouvoir en avoir un jour. Maintenant, j'ai des mollets, et c'est nouveau pour moi.

J'ai toujours dédaigné ce corps et paradoxalement je cherchais toujours, aux aguets, à déchiffrer le regard des autres sur moi. Longtemps, il s'est entretenu tout seul. Ensuite personne ne l'a plus entretenu.

Lorsque la maladie s'est attaquée à ceux qui m'entouraient, j'ai vu les ravages qu'elle pouvait faire en peu de temps, maigreur cadavérique pour certains, gonflement dû aux médicaments pour les autres, perte des cheveux, maladresse des mouvements. Et ce corps si malléable, si peu résistant, je l'ai méprisé encore davantage. C'est à cette époque que j'ai tondu mes cheveux, prétextant qu'ainsi je serais moins différent de moi-même le jour d'une chimio éventuelle. J'ai voulu lui faire mal aussi, dans l'effort extrême, je ne l'ai pas écouté quand il se plaignait. Ses plaintes masquaient les autres, celle du psychique qui commençait lui aussi à fatiguer. A partir de là, j'ai perdu tous les kilos superflus, et quelques autres.

Maintenant je pense avoir été bien orgueilleux de m'imaginer que le mental seul comptait et dirigeait l'être, lui en imposait. C'est faux, ne serait-ce que parce que ce que les autres voient de nous, c'est notre enveloppe extérieure et que d'elle, ils tirent des renseignements, même faux, sur notre identité profonde.
D'ailleurs comment le voit-on soi-même, son propre corps? Le voit-on réellement? Il a fallu ce miroir en pied, dans le chalet de Noëlle, pour qu'un soir, en me mettant au lit, je m'aperçoive, nu, entier. Et la fulgurance de l'apparition m'a montré pour quelques dixièmes de seconde mon corps sans doute comme les autres le voient et non comme j'ai l'habitude de l'interpréter.

Tout à l'heure, à la plage de Miribel, je regardais les autres hommes nus autour de moi. Des laids, des beaux à mes yeux, mais aux leurs? Le plus laid déambulait sans complexe aucun, fier sans doute de sa silhouette, alors que le plus beau n'avait peut-être pas conscience de sa beauté. Et moi, comment me voyaient-ils? Allaient-ils seulement au-delà de la barrière des cheveux blancs? A partir de ce corps qui commence à brunir, qu'imaginaient-ils que j'étais, alors que moi, profondément, je ne peux trouver mon identité que dans la peau blanche?

Nous ne sommes pas esprit et corps dissociés, nous ne sommes qu'un et le dépérissement de l'un entraîne inexorablement la chute de l'autre. Je crois qu'il faut aimer son corps aussi, ce que longtemps je n'ai pas su faire, la frénésie sexuelle ne constituant pas une preuve opposable, bien au contraire.

6 commentaires:

Anonyme a dit…

Il faudra peut-être que tu m'apprennes, alors.

Anonyme a dit…

"frénésie sexuelle"
...!!
suffit de 2 petits mots pour qu'aussitôt je dresse ...l'oreille! ;-)

Calyste a dit…

Je ne suis pas encore un très bon professeur, Olivier. Mais j'essaie de progresser.
Je ne sais pas pourquoi, Piergil, je pense au bonnet d'âne!

Calyste a dit…

Peut-être rapport avec les oreilles?

Anonyme a dit…

Tu crois que l'âme est donc périssable ? Pourtant tu es croyant non ? Je ne comprends pas.

Calyste a dit…

Je n'ai jamais pu répondre à cette question: croyant ou pas. Moi non plus, je ne comprends pas. C'est peut-être ça que l'on appelle en religion un "mystère".
Il faudra qu'un jour, sur le sujet de l'âme, je lise Teilhard de Chardin. Quand?