Un héros de mon enfance

Tout en tournant les pages d'Internet, je laisse traîner une oreille sur France Inter en sourdine derrière moi. Et, il y a une minute, j'entends un nom qui me la fait dresser (l'oreille) : Milon de Crotone. Un nom que je n'ai jamais oublié. 

Je l'ai connu dans un livre d'art ayant appartenu à mon père et qui traînait à la maison. Je l'aurais sans doute oublié s'il n'y avait eu la photo de la sculpture de Pierre Puget montrant sa mort :

Milon de Crotone, Pierre Puget, Musée du Louvre

L'athlète a la main gauche coincée dans la souche d'un arbre et un lion est en train de commencer à le dévorer. L'idée de mourir ainsi, sans rien pouvoir faire, me terrorisait. Je plaignais ce grec de tout mon cœur et, en même temps, sa beauté me fascinait !

Milon de Crotone, Joseph-Benoît Suvée, Musée Groeninge, Bruges

Milon était un lutteur grec du VI° siècle av. J-C, réputé pour sa quasi invulnérabilité, due à une force herculéenne, et pour son énorme appétit. 

Milon de Crotone, Charles Meynier, Musée des Beaux-Arts de Montréal

Ce que je ne savais pas, et que je viens d'apprendre, c'est qu'il avait également un hubris démesuré : s'il a la main coincée, c'est parce qu'il pensait, par sa seule force, finir de fendre le tronc de l'arbre. Ainsi, les dieux l'auraient-ils puni pour ce trop grand hubris. 

Mais cette mort-là n'est qu'une légende (qui, d'ailleurs, mentionne des loups et non un lion, sans doute rapprochement de Puget avec un des travaux d'Hercule) : Milon fut, en fait, victime d'un "attentat". Il était marié à une des filles de Pythagore et des opposants aux théories pythagoriciennes mirent le feu à sa maison. Il mourut dans le brasier. Décidément, le sectarisme ne date pas d'aujourd'hui !