samedi 10 janvier 2009

Ciccio.

Il s'appelait Ciccio (prononcer Tchitchio).

Mon chien. Le dernier. Le mien. Le nôtre. Ramassé sur le coin d'une autoroute italienne, près de Civitavecchia, dans l'ancienne Etrurie. Il échappa aux noms de Vulca et d'Etrusco.

Ciccio, c'est le diminutif de Francesco, François, c'est aussi une façon affectueuse de traiter quelqu'un de couillon. Lui ne l'était pas. De tous les chiens que j'ai eus, que ma famille a eus, c'était lui le plus futé.

Pierre n'en voulait pas, pourtant il s'est vite attaché à ce squelette ambulant que nous avions ramené en France, faute de preneurs chez nos amis piémontais. Il lui faudrait des mois pour se débarrasser de ses mètres de ver solitaire qu'il expulsa un jour dans un caniveau lyonnais.

Au début, nous l'avons cru muet. Jamais un cri, jamais un soupir, un petit jappement. Rien. Jusqu'au matin où nous croisâmes un cheval: il n'a jamais aimé les grosses bêtes dont il pensait sans doute qu'elles nous étaient dangereuses. Même chose pour les vaches ou les chèvres.

Ai-je déjà parlé de lui? Il m'arrive de réécrire sans cesse la même histoire, fantômes réapparaissant comme les personnages, cercle répétitif, d'une horloge astronomique. Il est resté près de nous dix-sept ans. Il fallut un jour le faire euthanasier. Nous y allâmes tous les deux, avec Pierre, et nous rentrâmes seuls, comme deux cons. Le bruit des pattes aux ongles trop longs griffant le parquet nous manquait déjà.

On le trouvait beau dans la rue, ce bâtard de beauceron et de doberman: la finesse de ligne de l'un, la gentillesse et la tendresse de l'autre. Dire toutes les joies, tous les moments? Ils ne sont intéressants que pour moi. Dire l'attachement du chien aux maîtres - ce chien avait deux maîtres -, des maîtres au chien, ce serait ridicule. Je ne suis jamais tombé dans l'anthropomorphisme. Pas encore aujourd'hui.

Il a été brûlé. On m'a demandé si je voulais récupérer ses cendres. On était obligé de me le demander. Elles sont éparpillées dans un champ de l'Ain, près de Trévoux, avec celles de milliers de semblables.

Je n'en ai jamais voulu d'autre.

8 commentaires:

Anonyme a dit…

La perte d'un animal de compagnie est toujours un moment difficile.
Je n'ose imaginer le départ de mon Tigre ! Quant à l'obligation de le faire euthanasier, je ne sais pas si j'en aurai seulement la force...

Anonyme a dit…

Je me souviens de notre (petit) échange sur les préférences "chats" ou "chiens" des uns et des autres, et de ta réponse. Je comprends mieux maintenant.
Bisou à toi. Quelqu'un qui aime les chiens ne peut pas être foncièrement méchant ! (tiens c'est ma réponse à ton commentaire sur Nanni Moretti l'autre jour, na.)

Anonyme a dit…

Pêr et moi avons élevé une chatte pendant dix ans, pour laquelle nous avions une affection débordante. Elle s'est défenestrée un soir (en 2003), sous mes yeux. Ça été tellement dur que je ne voulais plus adopter de mamifère (nous avions par la suite opté pour des oiseaux). Or cet été, et après beaucoup d'hésitation de ma part, nous avons tout de même recueilli un jeune chat. Comme quoi...

Anonyme a dit…

-> La discrète - Quand j'ai croisé le regard de mon chien qui n'en pouvais plus, j'ai dit oui, le cœur serré, brisé, pulvérisé, atomisé, mais j'ai dit oui.

Calyste a dit…

MarcelD a dit ce que je n'ai pas dit, par pudeur et par peur du ridicule: l'échange de regards entre le chien et nous, le regard de l'animal qui n'en peut plus et qui implore la fin et celui de l'adieu, juste avant la piqûre. Je ne croyais pas cela possible.

Anonyme a dit…

Les chiens trouvés sont sans doute parmi les plus fidèles, ils ont une confiance totale en celui qui les a recueillis et au moment de l'adieu, même si ce n'est pas facile, on se doit d'être là pour les apaiser...

Anonyme a dit…

Il faut savoir prendre la juste décision parfois. Tel a été la cas concernant ma chienne ''Cannelle'' le 2 janvier dernier. La souffrance se lisait dans ses yeux et même sans qu'elle puisse l'exprimer par la parole bien sûr, je comprenait celle-ci et la décision de la faire euthanasier s'est hélas imposée avec l'assentiment du vétérinaire. L'acharnement thérapeutique, je m'assieds dessus... C'était une petite bâtarde que j'avais adoptée à la SPA à l'âge de 6 mois, elle avait 13 ans et était d'une gentillesse rare...Elle fait partie de ma vie comme les autres chiens que j'aie eu.

Calyste a dit…

Piergil sérieux! Merci, l'ami.

Je te rejoins complètement, FD, quand tu dis que ces bêtes font partie de nos vies. Certaines peuvent y tenir une grande place!