lundi 19 janvier 2009

Autre chose.

Je viens de faire l'acquisition, chez Rue du Commerce, d'un disque dur externe destiné à entreposer mes photos pour en délester l'autre. En allant le récupérer ce soir au point relais, j'ai, sans le vouloir, suivi le même itinéraire, absolument, que celui que j'emprunte le dimanche matin pour aller au marché. Question d'habitude. Le bureau de tabacs dépositaire est d'ailleurs au bout de la place du marché Saint-Louis. Mais justement, ce soir, ce n'était pas comme d'habitude. La nuit tombait et j'ai vu le quartier sous ce visage-là, et en semaine en plus, aspect que je ne connaissais pas vraiment. Et ça change tout.

D'abord l'obscurité de ces petites rues: je n'avais jamais remarqué à quel point elles sont mal éclairées par l'éclairage public. On y voit clair mais à peine, et certains renfoncements d'allées feraient presque penser à ces coupe-gorges décrits dans Les Mystères de Paris! D'ailleurs une partie de la faune qu'on y croise, que j'y ai en tout cas croisé, moi, ce soir accentuait encore la ressemblance avec l'ambiance décrite par Eugène Sue. J'ai, à un moment, doublé un couple assez âgé, dont l'homme semblait bien imbibé, et la femme peut-être aussi, et je n'ai pas réussi à reconnaître la langue qu'ils parlaient ni même la famille à laquelle cette langue pourrait se rattacher. Sue et Zola se donnant la main donc.

Ensuite, l'aspect même de la place et des alentours: l'espace central est entièrement occupé par un parking, organisé pour certains emplacements, anarchique pour d'autres, alors que le dimanche, ce sont les étals et la foule qui se presse, foule ne rappelant en rien ma rencontre de ce soir puisque, si la nuit, c'est popu, le marché, c'est plutôt bobo et petits bourgeois. Autour, j'ai vu ouvertes des boutiques que je ne connais d'habitude que fermées. Des ateliers plutôt que des boutiques: des garages, des carrossiers, des menuisiers, d'autres dont l'épaisseur de poussière sur les vitres m'empêchait de reconnaître la destination. Un atelier de théâtre aussi, où de nombreux enfants semblaient bien s'amuser.

Expérience faite, le tabac remplace agréablement l'ancien relais, la boutique de fleurs en face de la caserne, où, pour mon précédent achat, j'avais été reçu comme un chien dans un jeu de quilles. En voilà qui sont sûrs de ne jamais m'avoir comme client!

En face de la caserne, il y a aussi, de l'autre côté de la voûte si belle qui débute la rue Saint-Michel, dans l'amorce de la courbe qu'y fait cette rue, un petit hôtel à l'ancienne, à la devanture discrète et peu éclairée, dans lequel on doit pouvoir se glisser sans risquer d'être aperçu. Il suffit d'entrer sous le porche qui dessert l'hôtel mais aussi le reste de l'immeuble d'habitation, les chambres ne devant occuper qu'un étage ou deux, il suffit en hiver de relever un peu son col pour se fondre dans une atmosphère qui rappelle Simenon, tant le décor est réaliste. Et j'ai rêvé devant cette entrée, rêvé à un soldat du feu, beau comme la flamme dans son uniforme, un soldat qui se glisserait derrière moi jusqu'à l'étage et que j'entraînerais dans notre chambre habituelle, avec avidité, avec passion, en tremblant si fort que mes mains s'impatienteraient à ne pouvoir le dégrafer et avec qui, une fois allongés sur le vieux lit, nous réinventerions le plaisir à chaque fois, en nous extasiant de le créer toujours différent et de le reconnaître toujours semblable. Et lorsque, ivres, nos corps seraient fatigués, nous regarderions ensemble, à travers le voile tiré de la fenêtre, clignoter faiblement le néon de la rue: hôtel, hôtel, hôtel....

4 commentaires:

JaHoVil a dit…

Ah ! Suspense ! Qui est ce disque dur ?
Et où va-t-il aller ? Dans une chambre ?
Bises, J

Anonyme a dit…

On dit que la caserne de la Madeleine renferme les plus beaux pompiers de Lyon... qu'en penses-tu ?

Anonyme a dit…

"iiiil m'a aimé toute la nuit, mooon Légionnaire..." (dada da di da...)
Ca commence sur Eugène Sue, ça enbraye sur Zola et ça se termine sur Apollinaire version libertine ("les onze mille verges", tu connais ? Non, remarque, c'était beaucoup moins joli que ton dernier paragraphe...)

Calyste a dit…

Je sens de l'excitation dans l'air! Et je n'ai pas l'impression que ce soit à cause de l'informatique.
Gourmand, Lancelot: onze mille! (oui, je connais)Mais l'hôtel est beaucoup trop petit! Et bonjour pour la discrétion. Tu imagines la q**, pardon:la file devant le porche!
Viens faire le marché avec moi, Fabrice, tu te rendras compte de visu!