jeudi 31 janvier 2008

La gifle

Un professeur, je ne sais où, a giflé un élève. Toute la journée, apparemment, l'information est passée en boucle sur les radios. Le père de cet élève est gendarme. Le professeur sera jugé en mars prochain.

Voilà du rondement mené, comme on aime au sommet de notre état. J'espère pourtant qu'avant le procès, on prendra le temps de calmer le jeu qui, me semble-t-il, ne vaut pas cette chandelle.Je ne connais pas les circonstances exactes de l'affaire, je ne peux donc que donner un avis général.

Qu'un professeur gifle un élève est bien sûr un acte grave et répréhensible. La violence ne résout rien. La mettre en pratique, c'est, en levant le bras pour frapper, le baisser devant la difficulté, s'avouer vaincu, déclarer forfait. On notera cependant que les corrections corporelles ont, y compris chez nous, en France, été longtemps admises et pratiquées, avec la bénédiction des parents qui, à la maison, appliquaient le même genre de pédagogie. Les moeurs ont évolué depuis, et c'est tant mieux.Il existe d'autres moyens de cadrer certains éléments un peu trop intempestifs.

Cependant, il m'est arrivé, à moi aussi, il y a très longtemps, au début de ma carrière, de gifler deux élèves. La première fois, c'était au LEP, une jeune beurette (ce mot n'existait pas à l'époque) qui, à une de mes remarques pourtant calmes, me regarde droit dans les yeux et, par provocation sans doute, me lance un "Tu déconnes?" qui n'a pas eu l'heur de me plaire. Cette jeune personne a immédiatement quitté la salle. J'ai pris illico le chemin du bureau de la directrice à qui j'ai exposé l'affaire et qui m'a répondu tout de go: " C'est la première fois que ça vous arrive? Ce ne sera pas la dernière!" Ces paroles m'ont rassuré quant au soutien que je pouvais espérer de sa part en cas de besoin, mais n'ont pas calmé mon mal-être devant l'acte que je venais de commettre et que je désavouais.
La deuxième fois, c'était en classe verte, un garçon qui croyait, parce qu'il était réveillé à cinq heures du matin, pouvoir se permettre de mener grand train et d'ameuter tout l'entourage, dont je faisais malheureusement partie. J'ai revu ce garçon des années plus tard, par hasard. C'est lui qui m'a reconnu et qui est venu me serrer chaleureusement la main et me parler. Il a évoqué cette année-là comme une des meilleures de sa vie scolaire par ailleurs très agitée, et m'a carrément remercié de l'avoir giflé car, selon lui, je lui avais rendu service en le calmant.


Je pense que tout le mal vient de l'américanisation progressive des français face à la justice. Pour un oui, pour un non, on intente un procès. les plaintes s'accumulent, pour tout et n'importe quoi. On ne prend pas le temps d'échanger, de chercher à comprendre, à démêler les fils d'histoires pas si compliquées au final. On préfère monter sur ses ergots et faire valoir ses droits. Le droit face au devoir!
Un élève a-t-il le droit d'insulter un enseignant? Ne se sent-il pas intouchable, au sens propre comme au figuré, dans une atmosphère telle que celle actuelle? Quel gâchis! Je sais d'expérience tout ce que l'on peut demander à des enfants et tout ce qu'ils peuvent offrir d'eux-mêmes quand la relation est sainement établie.

La faute n'est ni à l'enseignant, qui regrette son acte, ni à l'élève, qui ne comprend pas encore la gravité de ce qui se passe. Je serais moins conciliant avec le père et avec le monde qui entoure aujourd'hui ce microcosme en grand danger qu'est l'école.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

il semblerait que l'enseignant a un probleme avec l'alcool !

Anonyme a dit…

Peu importe son problème avec l'alcool ; je suis révoltée devant l'ampleur que prend cette histoire qui aurait dû se régler, en face à face, avec les parents, l'enfant, éventuellement l'Académie. Je n'ai jamais giflé un enfant, mais j'ai certainement fait pire. Les mots tuent plus que les gestes. Et mes secrètes pensées devant l'un ou l'autre de mes enfants (les miens car je ne suis pas professeur) - opposant et récalcitrant - sont presque indicibles.