jeudi 19 janvier 2012

Plaisir fugace

Rencontre insolite que celle d'hier après-midi. Pour diverses affaires, j'avais rejoint mon ancien quartier où se trouvent encore ma banque et ma régie et, en rentrant, j'eus le regard attiré par une librairie que je connais comme assez dynamique et qui proposait en vitrine un choix très large de romans chinois et surtout japonais.

De ces derniers, j'avais déjà lu un bon nombre mais quelques titres inconnus me firent passer le seuil de la boutique et fouiner un peu dans les rayons. Pendant que je lisais en diagonale les quatrièmes de couverture, entra un monsieur de quelques années plus âgé que moi, une sorte de gentleman farmer chaudement emmitouflé dans un manteau d'hiver. Tout dans sa mise indiquait l'homme cultivé et serein. Il expliqua au libraire qu'il avait l'intention de compléter ses lectures de Georges Bataille et s'enquit des titres disponibles. La librairie en possédait trois qu'il acquit immédiatement.

Puis il acheta aussi un roman qu'il avait possédé mais perdu: Gilles de Drieu La Rochelle, ouvrage que j'ai lu il y a fort longtemps et que j'avais particulièrement apprécié malgré l'aura négative qui flottait alors et qui flotte encore aujourd'hui autour de son auteur. "Un lecteur peu banal!" me dis-je in petto et, comme nous sortions ensemble, je ne pus m'empêcher de lui adresser la parole. S'ensuivit une conversation enjouée autour de la littérature française et américaine. Nous découvrîmes ainsi que nous avions beaucoup des goûts communs pour certains écrivains de ces deux pays.

J'appris également qu'il n'habitait pas Lyon, qu'il n'y venait que rarement, principalement pour faire le plein de lectures avant de rejoindre une vieille ferme qu'il avait retapée dans le Haut-Forez, pays que, par mes origines, je connais bien, contrée aux paysages splendides mais au climat rude et austère comme ses habitants. Son village ne compte qu'une cinquantaine d'habitants et cela lui convient parfaitement. Nous nous quittâmes en nous serrant la main, certains de ne plus jamais nous revoir mais heureux de cette rencontre inopinée. En rentrant, je me disais que je ferais peut-être bien moi aussi de relire Gilles, dont je n'ai gardé qu'une impression fugace de plaisir intense sans me rappeler un traître mot de l'intrigue.

7 commentaires:

Cornus a dit…

Ce genre de rencontre, c'est rare en effet. J'ai déjà vécu un fait équivalent dans le domaine de la floristique.

Calyste a dit…

Cornus: en herborisant?

Kynseker a dit…

J'avais adoré Gilles, écrit dans une très belle langue, riche mais pas clinquante, intense mais jamais lourde.

L'intrigue a aussi un petit quelque chose de Bel Ami qui m'a toujours plu.

Un grand souvenir de lecture !

Erin a dit…

Oh la la !!! Plus je te lis et plus je me dis que ma culture littéraire est pauvrissime !

Pourrais-tu me donner l'adresse de cette librairie dynamique et ayant une vitrine de livres japonais ? Depuis mon départ d'Auxerre, en juillet 2008 je n'ai pas retrouvé de vraie librairie... tout au plus des "bookstore", ces grandes surfaces du livre offrant un large choix mais sans ce coté rencontre-conseil-découverte.

Une bien belle rencontre... qui ne m'arrivera jamais tant je suis timide... on me dit asociale parfois...

Georges a dit…

ça m'est arrivé il y a peu de temps, au sujet de Joyce Carol Oates, une femme en parlait très bien à son amie, essayant de la convaincre d'essayer. Je me suis permise d'appuyer ce conseil de lecture.
oui oui oui, il faut lire Joyce Carol Oates.

Georges a dit…

@erin : Parfois, même timide et peu sociable, c'est juste un cri du coeur. l'envie de se joindre à une conversation qui résonne.
Je crois que ça dépasse la timidité :) J'espère que ça t'arrivera et que tu nous le raconteras même:)

Calyste a dit…

Erin: Librairie du Tramway. Elle est rue Moncey (pratiquement angle de rues), dans le 3°, en face du nouveau palais de justice, tout près de la place Guichard.

Georges: ce n'est pas la première fois que tu en parles. Il faudra que j'y pense la prochaine que je fais mes provisions.
Pour la timidité, tu as raison. Je n'ai pas réfléchi avant de lui parler. Sinon, je ne l'aurais pas fait.