vendredi 27 janvier 2012

Peau-rouge

L'accent est mis ces jours-ci par ceux qui nous gouvernent sur la violence à l'école et les brimades à l'encontre de certains élèves. Le sujet n'est certes pas nouveau mais on semble le découvrir maintenant, alors que les enseignants s'en plaignent depuis longtemps déjà.

Bien entendu, la solution est encore une fois demandée à l'enseignement et à l'enseignement seul, comme si cette violence n'était pas le reflet exact de celle de la société dans laquelle nous vivons. Il faudrait que les enseignants prennent à bras le corps ce problème et se chargent de lui trouver une solution. Visiblement, et quoi de surprenant, les cours d'éducation civique ne suffisent plus à enrayer le phénomène.

J'avais, il y a quelques années, une élève charmante en cinquième dont le seul souci était d'avoir sur les bras de larges plaques couleur de vin que l'on nomme ici des "envies". Elle venait chaque matin avec des chemisiers à manches longues qui lui couvraient jusqu'aux avant-bras.

Cette année-là, j'étudiais avec eux le roman de Bruce Lowery, La Cicatrice, qui raconte l'histoire d'un garçon rejeté dans son collège à cause d'une cicatrice à la lèvre, reste d'un bec de lièvre opéré dans sa prime jeunesse. Le calvaire de Jeff émut beaucoup tous les élèves de la classe qui trouvaient scandaleux le traitement que lui faisaient subir les autres.

Quelques temps plus tard, la jeune fille de ma classe vint un matin ou il faisait particulièrement chaud avec un chemisier à manches courtes. Aucune réaction des autres. La leçon avait porté, me semblait-il. Puis elle fut absente un jour, deux jours, une semaine complète puis deux. Au responsable qui s'en inquiétait, la maman finit par confier que sa fille ne voulait plus venir au collège à cause des moqueries des autres qui l'avaient finement surnommée "peau-rouge".

J'étais le professeur principal de cette classe. Je les avais en cours six ou sept heures par semaine et je n'avais rien remarqué, rien n'avait transpiré. Inutile de préciser que ma réaction fut violente à l'égard des amateurs de westerns et que je leur fis bien comprendre ce que je pensais de leur attitude, non par une leçon de morale à laquelle ils auraient adhéré hypocritement mais en leur faisant l'inventaire de chacun de leurs défauts physiques à eux. Le rire changea alors de camp. Attitude risquée puisque je m'exposais à des réactions indignées de parents. Il n'y en eut pas et la pauvre fille put réintégrer la classe sans plus avoir la crainte de se faire insulter.

7 commentaires:

Cornus a dit…

J'ai été l'objet de moqueries répétées et insistantes à un moment donné au collège, ce qui n'était guère agréable, mais j'ai serré les dents. On avait bien aussi essayé de m'empoisonner l'existence par des gestes violents. Seulement, j'avais pu répliquer, cogner à plusieurs reprises et on m'avait fichu la paix. Je me souviens qu'à deux reprises, j'avais pu prendre le dessus sur l'un de mes agresseurs (ils agissaient en général à plusieurs) et je m'étais rendu compte que j'aurais pu les blesser très gravement. Moi qui passe généralement pour très calme et pacifique en apparence... Franchement, tout cela ne me rappelle pas que de bons souvenirs et je suis persuadé que les moqueries, même anodines, n'ont pas eu que des effets positifs sur mon niveau scolaire, même si on peut considérer que c'est marginal.

Ta réaction était en effet risquée, mais parfois, il y a une telle ébulition, qu'il faut soulever le couvercle. Et parois, c'est aux parents qu'il faudrait casser la gueule en premier !

Yo a dit…

Mais dis donc... ce serait pas une anecdote déjà évoquée ici même ? Non mais pour qui prend-on le lecteur ?!
:-)

Cornus a dit…

Christophe me rassure, il me semblait bien aussi avoir lu cete histoire, mais de façon moins développée.

laplumequivole a dit…

Mais nous l'avions aussi remarqué, seulement avec la délicatesse toute féminine qui nous caractérise nous n'avions rien dit !
(je sais pas pourquoi, je sens que je vais m'attirer des remarques...)

Calyste a dit…

A tous: ben oui, je radote! Et puis d'abord, quand on aime, on ne compte pas! Seule La Plume a une hauteur d'âme suffisante pour ne rien faire remarquer. Merci, gente Dame!

Cornus a dit…

Ah la Plume fayotte. Je me souviendrai de tout cela. La mule du pape, c'est de la rose à côté de moi.

Calyste a dit…

Cornus: c'était pas un peu plus au sud, la mule du pape?